Opinion of Advocate General Bobek delivered on 11 June 2020.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:451
Date11 June 2020
Celex Number62019CC0300
CourtCourt of Justice (European Union)

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 11 juin 2020 (1)

Affaire C300/19

UQ

contre

Marclean Technologies, SLU,

Autres parties à la procédure :

Ministerio Fiscal

Fondo de Garantía Salarial,

[demande de décision préjudicielle formée par le Juzgado de lo Social nº 3 de Barcelona (tribunal du travail nº 3 de Barcelone, Espagne)]

« Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Licenciements collectifs – Directive 98/59/CE – Article 1, paragraphe 1, sous a) – Période de référence pour calculer le nombre de licenciements »






I. Introduction

1. La directive 98/59/CE, du Conseil du 20 juillet 1998, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs (2)vise à offrir une protection renforcée aux travailleurs en leur accordant (ainsi qu’à leurs associations) certains droits spécifiques en cas de licenciements collectifs. Cette directive s’applique lorsque les conditions prévues à son article 1er sont remplies. Une de ces conditions concerne le nombre de licenciements qui ont lieu sur une période donnée (de 30 ou 90 jours, selon le choix fait par chaque État membre).

2. Les questions adressées à la Cour dans la présente affaire portent sur la méthode à utiliser pour déterminer cette période. En bref, comment faut-il calculer cette période lorsqu’un (ancien) travailleur et son (ancien) employeur sont en désaccord sur le point de savoir s’il y a eu un nombre suffisant de licenciements pour déclencher l’application de la directive 98/59 ?

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

3. L’article 1 er, paragraphe 1, de la directive 98/59 prévoit :

« Aux fins de l’application de la présente directive :

a) on entend par “licenciements collectifs” : les licenciements effectués par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne des travailleurs lorsque le nombre de licenciements intervenus est, selon le choix effectué par les États membres :

i) soit, pour une période de trente jours :

– au moins égal à 10 dans les établissements employant habituellement plus de 20 et moins de 100 travailleurs,

– au moins égal à 10 % du nombre des travailleurs dans les établissements employant habituellement au moins 100 et moins de 300 travailleurs,

– au moins égal à 30 dans les établissements employant habituellement au moins 300 travailleurs ;

ii) soit, pour une période de quatre-vingt-dix jours, au moins égal à 20, quel que soit le nombre des travailleurs habituellement employés dans les établissements concernés ;

[...]

Pour le calcul du nombre de licenciements prévus au premier alinéa, point a), sont assimilées aux licenciements les cessations du contrat de travail intervenues à l’initiative de l’employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne des travailleurs, à condition que les licenciements soient au moins au nombre de cinq. ».

4. L’article 2 de la directive 98/59 dispose :

« 1. Lorsqu’un employeur envisage d’effectuer des licenciements collectifs, il est tenu de procéder, en temps utile, à des consultations avec les représentants des travailleurs en vue d’aboutir à un accord.

[...] »

5. L’article 3 de la directive 98/59 énonce ce qui suit :

« 1. L’employeur est tenu de notifier par écrit tout projet de licenciement collectif à l’autorité publique compétente.

[...]

La notification doit contenir tous renseignements utiles concernant le projet de licenciement collectif et les consultations des représentants des travailleurs prévues à l’article 2, notamment les motifs de licenciement, le nombre des travailleurs à licencier, le nombre des travailleurs habituellement employés et la période au cours de laquelle il est envisagé d’effectuer les licenciements.

[...] »

6. L’article 5 de la directive 98/59 énonce ce qui suit :

« La présente directive ne porte pas atteinte à la faculté des États membres d’appliquer ou d’introduire des dispositions législatives, réglementaires ou administratives plus favorables aux travailleurs [...] »

B. Le droit national

7. L’article 51, paragraphe 1, de la Ley del Estatuto de los Trabajadores (loi espagnole sur le statut des travailleurs, ci‑après le « statut des travailleurs ») prévoit :

« Aux fins des dispositions de la présente loi, on entend par “licenciement collectif” la cessation de contrats de travail pour des causes économiques, techniques ou relatives à l’organisation ou à la production lorsque, au cours d’une période de 90 jours, elle affecte au minimum :

a) 10 travailleurs dans les entreprises qui en emploient moins de 100 ;

b) 10 % du nombre de travailleurs dans les entreprises qui emploient entre 100 et 300 travailleurs ;

c) 30 travailleurs dans les entreprises qui emploient plus de 300 travailleurs.

[...]

Pour le calcul du nombre de cessations de contrats auquel se réfère le premier alinéa du présent paragraphe, il faut également tenir compte de toutes les autres cessations intervenues au cours de la période de référence à l’initiative de l’entrepreneur pour d’autres motifs non inhérents à la personne du travailleur et distincts de ceux prévus à l’article 49, paragraphe 1, sous c), de la présente loi, pourvu que le nombre de cessations soit au moins égal à cinq.

Lorsque, au cours de périodes successives de 90 jours et en vue d’éluder les prescriptions du présent article, l’entreprise procède à des cessations de contrat au titre de l’article 52, sous c), de la présente loi pour un nombre inférieur aux seuils indiqués et sans qu’il y ait de cause nouvelle justifiant son action, ces cessations nouvelles sont réputées effectuées en fraude de la loi et seront déclarées nulles et de nul effet. »

8. L’article 122, paragraphe 2, de la Ley 36/2011 reguladora de la jurisdicción social (loi 36/2011, portant code de procédure des juridictions du travail) dispose que la résiliation d’un contrat est nulle « lorsqu’elle a été prise en fraude à la loi, en éludant les dispositions prévues en matière de licenciements collectifs ».

III. Les faits, la procédure au principal et les questions préjudicielles

9. La requérante au principal a commencé à travailler pour l’entreprise Marclean Technologies, SLU, le 31 octobre 2016. Le 28 mai 2018, elle a été frappée d’une incapacité temporaire de travail. Le 31 mai 2018, elle a été licenciée.

10. Marclean Technologies a fini par reconnaître que le licenciement était abusif, mais a prétendu qu’il dépendait d’une diminution de son activité commerciale et d’inexécutions du contrat de travail imputées à la travailleuse. Il semblerait que d’autres travailleurs aient été licenciés pour les mêmes raisons.

11. La requérante a reçu une indemnité correspondant, selon l’entreprise, à celle qui est due dans les cas où le licenciement est déclaré abusif en justice. Le 11 juin 2018, la requérante a introduit un recours pour licenciement contre Marclean Technologies devant le Juzgado de lo Social nº 3 de Barcelone (Tribunal du travail nº 3 de Barcelone, Espagne). Elle a demandé que le licenciement soit déclaré nul ou, à titre subsidiaire, abusif. La requérante a fait valoir que son...

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