Paolo Vergani v Agenzia delle Entrate, Ufficio di Arona.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:295
Date12 May 2005
Celex Number62004CC0207
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-207/04

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. DÁMASO RUIZ-JARABO COLOMER

présentées le 12 mai 2005 (1)

Affaire C-207/04

Paolo Vergani

contre

Agenzia delle Entrate Ufficio di Arona

[demande de décision préjudicielle formée par la Commissione tributaria provinciale di Novara (Italie)]

«Politique sociale – Égalité entre travailleurs masculins et féminins – Régime fiscal de l’indemnité pour cessation du contrat de travail – Discrimination en raison du sexe»





1. La présente demande préjudicielle émanant de la Commissione tributaria provinciale di Novara (Italie) vise à savoir si l’article 141 CE ou la directive 76/207/CEE (2) s’opposent à une disposition nationale qui soumet à un régime fiscal différent les hommes et les femmes, selon leur âge, en ce qui concerne l’indemnité perçue de l’employeur par suite de la cessation anticipée de la relation de travail.

I – Le cadre juridique

A – Le droit communautaire

1. L’article 141 CE

2. Cet article dispose:

«1. Chaque État membre assure l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur.

2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimal, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur au travailleur en raison de l’emploi de ce dernier.

L’égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique:

a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d’une même unité de mesure;

b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail.

3. Le Conseil, statuant selon la procédure visée à l’article 251 et après consultation du Comité économique et social, adopte des mesures visant à assurer l’application du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes en matière d’emploi et de travail, y compris le principe de l’égalité des rémunérations pour un même travail ou un travail de même valeur.

4. Pour assurer concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle, le principe de l’égalité de traitement n’empêche pas un État membre de maintenir ou d’adopter des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à faciliter l’exercice d’une activité professionnelle par le sexe sous-représenté ou à prévenir ou compenser des désavantages dans la carrière professionnelle.»

3. Différentes normes de droit dérivé viennent renforcer ces règles de base, comme la directive 75/117/CEE du Conseil, du 10 février 1975, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins (3) et la directive 76/207; les champs d’application de ces deux directives s’excluent l’un l’autre (4).

2. La directive 76/207

4. L’article 1er de la directive 76/207 met en relief l’objectif de celle‑ci consistant à projeter l’identité de traitement sur l’accès à l’emploi, y compris la promotion, et à la formation professionnelle, les circonstances dans lesquelles la prestation de travail est fournie et, dans certaines conditions, la sécurité sociale (5). Ce principe implique, aux termes de l’article 2, paragraphe 1, «l’absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement par référence, notamment, à l’état matrimonial ou familial».

5. Conformément à l’article 5, paragraphe 1, la mise en œuvre du principe en ce qui concerne «les conditions de travail, y compris les conditions de licenciement, implique que soient assurées aux hommes et aux femmes les mêmes conditions, sans discrimination fondée sur le sexe». Le paragraphe 2 dudit article 5 impose aux États membres l’obligation d’adopter les dispositions indispensables afin que:

«a) soient supprimées les dispositions législatives, réglementaires et administratives contraires au principe de l’égalité de traitement;

b) soient nulles, puissent être déclarées nulles ou puissent être amendées les dispositions contraires au principe de l’égalité de traitement qui figurent dans les conventions collectives ou dans les contrats individuels de travail, dans les règlements intérieurs des entreprises, ainsi que dans les statuts des professions indépendantes;

c) soient révisées celles des dispositions législatives, réglementaires et administratives contraires au principe de l’égalité de traitement lorsque le souci de protection qui les a inspirées à l’origine n’est plus fondé; que, pour les dispositions conventionnelles de même nature, les partenaires sociaux soient invités à procéder aux révisions souhaitables» (6).

6. L’article 1er, paragraphe 2, prévoit que le Conseil, en vue d’assurer l’élimination progressive de toute discrimination en matière de sécurité sociale, arrêtera, sur proposition de la Commission, des dispositions qui préciseront «le contenu, la portée et les modalités d’application» du principe susmentionné dans ce domaine, parmi ces dispositions figure la directive 79/7/CEE (7).

3. La directive 79/7

7. Selon son article 3, paragraphe 1, les prescriptions de la directive 79/7 doivent être respectées par les régimes légaux qui assurent une protection contre la maladie, l’invalidité, la vieillesse, l’accident du travail, la maladie professionnelle et le chômage, ainsi que par les dispositions concernant l’aide sociale qui les complètent ou y suppléent. L’article 3, paragraphe 2, laisse en dehors de son champ d’application les prestations de survivant et de maternité, ainsi que les allocations familiales sauf s’il s’agit de majorations dues au titre du conjoint ou d’une personne à charge (8).

8. En vertu de l’article 4, l’identité de traitement exige l’absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement par référence, notamment, à l’état matrimonial ou familial, en particulier en ce qui concerne:

«– le champ d’application des régimes et les conditions d’accès aux régimes;

– l’obligation de cotiser et le calcul des cotisations;

– le calcul des prestations, […]».

9. Ainsi qu’il ressort de l’article 5, les États membres doivent prendre «les mesures nécessaires afin que soient supprimées les dispositions législatives, réglementaires et administratives» qui font obstacle à la parité. Toutefois, l’article 7, paragraphe 1, les autorise à s’écarter des prescriptions communautaires en ce qui concerne «la fixation de l’âge de la retraite pour l’octroi des pensions de vieillesse et de retraite et les conséquences pouvant en découler pour d’autres prestations» [sous a)], ainsi que différents droits et avantages.

B – Le droit italien

10. L’article 9 de la loi n° 1272, du 6 juillet 1939, dans la rédaction de l’article 2 de la loi n° 218, du 4 avril 1952 (9), a accordé une prestation de retraite aux travailleurs masculins âgés de 60 ans et aux travailleurs féminins ayant atteint l’âge de 55 ans; conformément à l’article 1er et au tableau de l’annexe A du décret législatif n° 503, du 30 décembre 1992 (10), ces âges ont été portés respectivement à 65 et 60 ans.

11. La loi n° 155, du 23 avril 1981 (11), prévoit, dans les entreprises déclarées en crise par le Comitato Interministeriale per il Coordinamento della Politica industriale, que les salariés bénéficient de l’admission à la préretraite à l’âge de 55 ans pour les hommes et de 50 ans pour les femmes.

12. Le décret n° 917 du président de la République, du 22 décembre 1986 (12), fixe le régime fiscal des sommes perçues à l’occasion de la cessation de la relation de travail dans le cadre de programmes encourageant le départ à la retraite, en établissant une distinction entre les deux sexes. L’article 17, paragraphe 4 bis, inséré par le décret législatif n° 314, du 2 septembre 1997 (13), dispose:

«Pour les sommes versées à l’occasion de la cessation de la relation de travail afin d’encourager le départ volontaire à la retraite [(14)] des travailleurs qui ont atteint l’âge de 50 ans pour les femmes et de 55 ans pour les hommes, visées à l’article 16, paragraphe 1, sous a) [(15)], l’impôt s’applique au taux égal à la moitié de celui qui est appliqué pour l’imposition du traitement de fin de relation de travail et des autres indemnités et sommes mentionnées au paragraphe 1, sous a), de l’article 16.»

II – Les faits, le litige au principal et la question préjudicielle

13. M. Vergani a participé à un plan de départ volontaire mis en place par Chubb Insurance Company SA, auprès de laquelle il était employé. Le 14 novembre 2001, ayant atteint l’âge de 51 ans, il a démissionné de cette entreprise et a obtenu de ce fait, à titre d’indemnité, la somme de 751 000 000 ITL (387 859,13 euros), sous déduction de la somme correspondant à l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), laquelle a été calculée au taux de 33,95 %.

14. La demande visant à la réduction de 50 % du taux d’imposition et au remboursement de la somme de 70 757,22 euros en principal, majorée des intérêts échus, a été rejetée par l’Agencia Entrate Ufficio Arona (organe d’exécution du ministère de l’Économie et des Finances italien), au motif que cet avantage fiscal était prévu au profit des travailleurs masculins âgés de plus de 55 ans.

15. Cette décision a fait l’objet d’un recours devant la Commissione tributaria provinciale di Novara, qui a sursis à statuer et déféré à la Cour la question suivante:

«L’article 17, paragraphe 4 bis, du Decreto del Presidente della Repubblica n° 917/86, qui accorde, dans des conditions égales, aux travailleurs qui ont atteint l’âge de 50 ans, s’il s’agit de travailleurs féminins, et 55 ans, s’il s’agit de travailleurs masculins, l’avantage résidant dans l’imposition à un taux réduit de moitié (50 %) de l’incitation au départ à la retraite volontaire et des sommes...

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