Land Nordrhein-Westfalen v Kari Uecker and Vera Jacquet v Land Nordrhein-Westfalen.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date06 February 1997
EUR-Lex - 61996C0064 - FR 61996C0064

Conclusions de l'avocat général Fennelly présentées le 6 février 1997. - Land Nordrhein-Westfalen contre Kari Uecker et Vera Jacquet contre Land Nordrhein-Westfalen. - Demande de décision préjudicielle: Landesarbeitsgericht Hamm - Allemagne. - Libre circulation des travailleurs - Droit du conjoint d'un ressortissant communautaire qui a la nationalité d'un pays tiers d'accéder à une activité salariée - Situation purement interne à un Etat membre. - Affaires jointes C-64/96 et C-65/96.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-03171


Conclusions de l'avocat général

1 Les ressortissants de pays tiers qui sont mariés à des travailleurs communautaires n'ayant pas exercé les droits de libre circulation que leur confère le traité CE bénéficient-ils des mêmes droits que les conjoints de travailleurs communautaires les ayant exercés? La jurisprudence existante de la Cour en matière de discrimination à rebours est-elle encore valable dans une «Communauté se trouvant sur la voie de l'Union européenne»? Telles sont en substance les questions que soulèvent les demandes préjudicielles émanant d'une juridiction du travail allemande dans des litiges entre deux lectrices de langue étrangère et leur employeur.

I - Faits et procédure

2 Mme Uecker, ressortissante norvégienne, travaille depuis 1974, en différentes qualités, comme enseignante de langue norvégienne, principalement en République fédérale d'Allemagne. Rien dans l'ordonnance de renvoi n'indique que son mari, ressortissant allemand, ait travaillé, au cours de la période en question, en dehors de cet État membre. Le 24 septembre 1990, Mme Uecker a signé un contrat de travail avec le Land Nordrhein-Westfalen pour exercer la fonction de lectrice de langue étrangère auprès du séminaire nordique de l'université de Muenster. Pour différentes raisons énoncées à l'article 4 de ce contrat, la durée de celui-ci était limitée au 30 septembre 1994. Se fondant tant sur l'arrêt rendu par la Cour dans l'affaire Spotti (1) que sur l'article 28 de l'accord du 2 mai 1992 sur l'Espace économique européen (2) (ci-après l'«accord EEE»), Mme Uecker a contesté avec succès la limitation dans le temps de sa relation de travail devant la juridiction du travail locale, qui s'est fondée également, dans son jugement, sur l'article 11 du règlement (CEE) n_ 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté (3) (ci-après le «règlement n_ 1612/68» ou le «règlement»). Le Land Nordrhein-Westfalen a interjeté appel.

3 Par ordonnance du 26 janvier 1996, le Landesarbeitsgericht Hamm a déféré à la Cour les questions suivantes:

«1) Le droit découlant de l'article 11 du règlement (CEE) n_ 1612/68, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté peut-il être invoqué également par le conjoint - ne possédant pas la nationalité d'un État membre - d'un ressortissant de l'État membre dans lequel vivent les deux conjoints et dans lequel le conjoint qui en est le ressortissant exerce une activité professionnelle?

2) En cas de réponse affirmative à la question 1:

Ce droit du conjoint ne possédant pas la nationalité d'un État membre d'`accéder à toute activité salariée' sur l'ensemble du territoire de l'État en question lui permet-il de prétendre à être traité par un employeur dans l'État membre en question, en ce qui concerne les conditions d'emploi et de travail, notamment les conditions auxquelles est subordonnée la limitation de la durée d'une relation de travail, de la même façon que celle dont cet employeur devrait traiter le conjoint ressortissant de cet État membre?

3) En cas de réponse affirmative également à la question 2:

Les dispositions combinées de l'article 7, paragraphe 1, dudit règlement (CEE) n_ 1612/68 et de l'article 48, paragraphe 2, du traité CEE confèrent-elles à un travailleur, dans un État membre dont il est ressortissant, le droit à l'égalité de traitement telle qu'elle est reconnue aux travailleurs ressortissants d'un autre État membre et, dès lors, une disposition nationale déclarée inapplicable par la Cour à l'égard de ces derniers est-elle inapplicable également à l'égard des propres ressortissants de l'État membre en question et de leurs conjoints qui ne sont pas ressortissants d'un État membre?»

4 Mme Jacquet, ressortissante russe, enseigne la langue russe, en différentes qualités, depuis 1988 à l'université de Bochum. Rien dans l'ordonnance de renvoi n'indique que son mari, ressortissant allemand, ait travaillé, au cours de la période en question, en dehors de la République fédérale d'Allemagne. Le 14 mars 1994, Mme Jacquet a signé un contrat de travail avec le Land Nordrhein-Westfalen pour exercer la fonction de lectrice de langue russe à l'université de Bochum. Selon l'article 1er de ce contrat, la durée de celui-ci était limitée au 30 septembre 1996 «afin de garantir l'existence de liens actuels avec la situation linguistique du pays d'origine». Se fondant entre autres sur l'article 11 du règlement n_ 1612/68 et sur l'article 7 du règlement (CEE) n_ 1251/70 de la Commission, du 29 juin 1970, relatif au droit des travailleurs de demeurer sur le territoire d'un État membre après y avoir occupé un emploi (4), Mme Jacquet a contesté sans succès la limitation dans le temps de sa relation de travail. Elle a interjeté appel.

5 Par ordonnance du 1er mars 1996, le Landesarbeitsgericht Hamm a déféré à la Cour trois questions qui sont identiques à celles qu'il lui avait précédemment déférées dans l'affaire Uecker.

6 Des observations écrites ont été présentées devant la Cour par Mme Uecker dans l'affaire C-64/96, par Mme Jacquet dans l'affaire C-65/96 et par la République française, la République fédérale d'Allemagne et la Commission dans les deux affaires.

II - Législation communautaire

7 Le cinquième considérant du règlement n_ 1612/68 exprime, entre autres, l'exigence «que soient éliminés les obstacles qui s'opposent à la mobilité des travailleurs, notamment en ce qui concerne le droit pour le travailleur de se faire rejoindre par sa famille, et les conditions d'intégration de cette famille dans le milieu du pays d'accueil».

8 L'article 7, paragraphe 1, est libellé comme suit:

«Le travailleur ressortissant d'un État membre ne peut, sur le territoire des autres États membres, être, en raison de sa nationalité, traité différemment des travailleurs nationaux, pour toutes conditions d'emploi et de travail, notamment en matière de rémunération, de licenciement, et de réintégration professionnelle ou de réemploi s'il est tombé en chômage.»

9...

To continue reading

Request your trial
10 practice notes
10 cases

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT