AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE v Commission of the European Communities.
Jurisdiction | European Union |
Date | 27 November 2008 |
Court | Court of Justice (European Union) |
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. P. Mengozzi
présentées le 27 novembre 2008 (1)
Affaire C‑425/07
AEPI
Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE
contre
Commission des Communautés européennes
«Pourvoi contre un arrêt du Tribunal de première instance – Concurrence – Rejet par la Commission d’une plainte pour défaut d’intérêt communautaire»
Antécédents, procédure et conclusions des parties
1. Le 22 mars 2001, AEPI Elliniki Etaireia pros Prostasian tis Pnevmatikis Idioktisias AE (ci-après l’«AEPI» ou la «requérante»), société de droit grec chargée de la gestion collective des droits d’auteur sur les œuvres musicales, a saisi la Commission des Communautés européennes d’une plainte contre la République hellénique et trois organismes grecs de gestion collective des droits voisins des droits d’auteur dont sont respectivement titulaires les chanteurs interprètes, les musiciens exécutants et les producteurs de supports matériels de sons et/ou d’images (Erato, Apollon et Grammo, ci-après les «organismes de gestion collective»).
2. Dans cette plainte, l’AEPI a fait valoir, d’une part, que les organismes en cause avaient violé les articles 81 CE et 82 CE en fixant à un niveau excessif, allant jusqu’à 5 % des recettes brutes des stations de radio et des chaînes de télévision grecques, la rémunération des droits voisins et, d’autre part, que la République hellénique avait enfreint l’article 81 CE en leur permettant de mettre en œuvre des ententes et des pratiques concertées à cet égard. L’AEPI se plaignait des dommages graves et irréparables résultant des comportements précités lesquels, en imposant des charges excessives aux entreprises qui utilisent des œuvres musicales, auraient empêché ces dernières de s’acquitter des droits d’auteur que l’AEPI leur réclamait.
3. Par deux décisions distinctes des 18 et 20 avril 2005, la Commission a respectivement rejeté la plainte présentée contre les organismes de gestion collective et classé la plainte présentée contre la République hellénique (2).
4. La décision du 18 avril 2005 (ci-après la «décision litigieuse») se fonde en particulier sur les considérations suivantes:
«Dans le cas d’espèce, l’infraction alléguée n’est pas de nature à provoquer des dysfonctionnements importants du marché commun étant donné que toutes les parties impliquées ont leur siège en Grèce et n’exercent leurs activités qu’en Grèce. Il n’est pas prévisible que cette situation change, c’est-à-dire que les trois organismes [de gestion collective] commencent à brève échéance à exercer leurs activités dans d’autres pays, vu la structure des marchés de services pour la protection des droits voisins et les difficultés pratiques d’une telle entreprise. En outre, les effets des pratiques alléguées ne se produisent que dans le contexte du marché grec. Les contrats pour l’utilisation de musique ne se font qu’avec des stations de radio et télévision et d’autres utilisateurs qui se trouvent en Grèce. Les trois organismes [de gestion collective] ne sont compétents que pour la protection des droits voisins en Grèce et n’ont pas la possibilité pratique d’exercer cette compétence en dehors de ce pays.
D’autre part, afin d’établir une éventuelle infraction, la Commission devrait s’engager dans une enquête complexe sur les conditions prévalentes dans le marché en cause et les alternatives disponibles. En premier lieu, vu que, d’une part, la loi grecque (en conformité avec la directive 92/100/CEE) prévoit qu’une rémunération unique soit payée pour tous les droits voisins et que, d’autre part, l’infraction alléguée proviendrait du fait que les trois organismes se présentent en commun aux utilisateurs afin de revendiquer cette rémunération, la Commission devrait établir l’éventuelle existence et efficacité de méthodes pour revendiquer séparément le paiement de la rémunération unique. En deuxième lieu, la Commission [devrait non seulement] démontrer la détention d’une position dominante collective par les trois organismes, [mais] devrait, selon les arrêts Tournier et Lucazeau [e.a.] [(3)] de la Cour de Justice, [également] enquêter sur les niveaux relatifs des prix des droits d’auteur et des droits voisins dans tous les pays de l’Union, les bases respectives sur lesquelles ils sont calculés, les critères utilisés et les conditions prévalents dans le marché grec par rapport aux [marchés des] autres pays européens.
En outre, il faut noter que votre société a la possibilité de présenter ses griefs devant les autorités nationales. Notamment, elle peut saisir de son cas l’autorité grecque de la concurrence. [Cette dernière] serait, de par sa connaissance approfondie des conditions du marché national, parfaitement en mesure de traiter votre plainte. Le fait que toutes les parties impliquées et tous les utilisateurs de musique concernés ont leur siège et exercent leurs activités dans le marché grec renforce l’importance de la connaissance détaillée des conditions du marché local. D’ailleurs, cette autorité a la compétence pour appliquer les articles 81 et 82 du traité CE du même droit que la Commission européenne.
Il faut donc conclure que l’étendue et la complexité des mesures d’investigation requises pour constater si le comportement des trois organismes de gestion collective […] est ou non en conformité avec les règles du droit communautaire de la concurrence sont disproportionnées par rapport à l’importance très limitée d’une éventuelle infraction pour le fonctionnement du marché commun. L’affaire ne présente donc pas le degré d’intérêt communautaire requis pour l’ouverture d’une enquête de la part de la Commission» (4).
5. Par recours déposé au greffe du Tribunal de première instance, le 15 juin 2005, l’AEPI a conclu à l’annulation de la décision litigieuse. Ce recours, par lequel la requérante a dénoncé une erreur manifeste dans l’appréciation de l’intérêt communautaire et une violation de l’obligation de motivation, a été rejeté par le Tribunal par arrêt du 12 juillet 2007, AEPI/Commission (T-229/05, ci‑après l’«arrêt attaqué»), par lequel la requérante a été condamnée aux dépens.
6. Dans le cadre de l’examen du moyen relatif à la prétendue erreur manifeste d’appréciation, le Tribunal (5) a rappelé que «[p]our apprécier l’intérêt communautaire à poursuivre l’examen d’une affaire», la Commission doit, notamment, «mettre en balance l’importance de l’infraction alléguée sur le fonctionnement du marché commun, la probabilité de pouvoir établir son existence et l’étendue des mesures d’investigation nécessaires, en vue de remplir, dans les meilleures conditions, sa mission de surveillance du respect des articles 81 CE et 82 CE» (point 40 de l’arrêt attaqué) (6).
7. Le Tribunal a en outre rappelé, s’agissant de «l’atteinte au fonctionnement du marché commun, que, selon une jurisprudence constante, «pour être susceptible d’affecter le commerce entre États membres, un accord entre entreprises doit, sur la base d’un ensemble d’éléments objectifs de droit ou de fait, permettre d’envisager avec un degré de probabilité suffisant qu’il puisse exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d’échanges entre États membres, dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d’un marché unique entre États» (point 42 de l’arrêt attaqué) (7). Il a ajouté que «toute entente et toute pratique susceptible de mettre en cause la liberté du commerce entre États membres dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d’un marché unique entre les États membres, notamment en cloisonnant les marchés nationaux ou en modifiant la structure de la concurrence dans le marché commun, relève du domaine du droit communautaire», alors que «les comportements dont les effets sont localisés sur le territoire d’un seul État membre relèvent du domaine de l’ordre juridique national» (point 43 de l’arrêt attaqué) (8).
8. Le Tribunal a ensuite poursuivi en relevant que, «[p]lus particulièrement, dans le domaine des droits d’auteur, […] il est de jurisprudence constante que, lorsque les effets des infractions alléguées dans une plainte ne sont ressentis, pour l’essentiel, que sur le territoire d’un État membre et lorsque des juridictions et des autorités administratives compétentes de cet État membre ont été saisies de litiges opposant le plaignant et l’entité visée par la plainte, la Commission est en droit de rejeter la plainte pour défaut d’intérêt communautaire suffisant pour poursuivre l’examen de l’affaire, à condition que les droits du plaignant puissent être sauvegardés d’une façon satisfaisante, notamment par les juridictions nationales (9) (point 44 de l’arrêt attaqué).
9. Par ailleurs, le Tribunal a constaté que, au cours de la phase écrite de la procédure, la requérante n’avait contesté que le premier des trois motifs sur lesquels la Commission s’était fondée dans la décision litigieuse pour conclure au défaut en l’espèce d’un intérêt communautaire suffisant, à savoir que les pratiques dénoncées ne seraient pas de nature à provoquer des dysfonctionnements importants dans le marché commun. Le Tribunal a par conséquent estimé qu’il pouvait limiter son analyse «aux arguments [par] lesquels [la requérante] contest[ait] l’absence d’atteinte au commerce entre États membres, en faisant valoir que l’imposition de redevances d’un montant excessif pour les droits voisins est une pratique susceptible d’affecter le marché commun au sens des articles 81 CE et 82 CE, même si elle est limitée au territoire grec» (points 45 à 47 de l’arrêt attaqué).
10. «À ce propos», a poursuivi le Tribunal, «la Commission a considéré […] que toutes les parties impliquées dans l’affaire avaient leur siège et exerçaient leurs activités en Grèce, […], qu’il était improbable que les activités des trois organismes de gestion collective puissent s’étendre à d’autres pays […], que les utilisateurs de musique avaient la nationalité grecque et que [lesdits...
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