Danila Bonifaci and others (C-94/95) and Wanda Berto and others (C-95/95) v Istituto nazionale della previdenza sociale (INPS).

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
ECLIECLI:EU:C:1997:29
Date23 January 1997
Celex Number61995CC0094
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-95/95,C-94/95
EUR-Lex - 61995C0094 - FR 61995C0094

Conclusions de l'avocat général Cosmas présentées le 23 janvier 1997. - Danila Bonifaci e.a. (C-94/95) et Wanda Berto e.a. (C-95/95) contre Istituto nazionale della previdenza sociale (INPS). - Demande de décision préjudicielle: Pretura circondariale di Bassano del Grappa - Italie. - Politique sociale - Protection des travailleurs en cas d'insolvabilité de l'employeur - Directive 80/987/CEE - Limitation de l'obligation de paiement des institutions de garantie - Responsabilité de l'Etat membre du fait de la transposition tardive d'une directive - Réparation adéquate. - Affaires jointes C-94/95 et C-95/95.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-03969


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1 Dans les présentes affaires, la Cour est invitée à se prononcer sur trois questions préjudicielles posées par la Pretura circondariale di Bassano del Grappa, conformément à l'article 177 du traité CE, et concernant l'interprétation et la validité de dispositions de la directive 80/987/CEE, du Conseil, du 20 octobre 1980, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur (1).

2 Le cas qui a donné lieu à la formulation des questions préjudicielles est original et se présente comme suit: un État membre qui a omis de transposer une directive en droit interne (manquement constaté par un arrêt de la Cour) et à qui, du fait de cette non-transposition, incombe une obligation de réparation (sur les conditions de laquelle la Cour s'est également exprimée) à l'égard des personnes lésées entreprend, en adoptant des mesures visant à se conformer à la directive, de fixer directement l'étendue et le niveau de la réparation.

3 La juridiction de renvoi, saisie de recours en indemnité fondés sur les mesures nationales, demande à la Cour de lui fournir les éléments d'interprétation de la directive qui lui sont indispensables pour apprécier jusqu'à quel point les mesures nationales, et plus particulièrement la manière dont, comme nous l'avons dit, a été fixée la réparation, sont conformes au droit communautaire.

4 En conséquence, la réponse qu'attend la juridiction de renvoi constituera un prolongement et un complément de la jurisprudence de la Cour concernant l'obligation de réparation incombant aux États membres du fait de violations du droit communautaire, jurisprudence que la Cour a inaugurée avec l'arrêt du 19 novembre 1991, Francovich e.a. (ci-après «Francovich I») (2).

II - Cadre juridique et factuel

Dispositions communautaires

5 La section I (intitulée «Champ d'application et définitions») de la directive 80/987 (ci-après la «directive»), plus particulièrement l'article 1er, comporte les dispositions suivantes:

«1. La présente directive s'applique aux créances des travailleurs salariés résultant de contrats de travail ou de relations de travail et existant à l'égard d'employeurs qui se trouvent en état d'insolvabilité au sens de l'article 2 paragraphe 1.»

6 L'article 2 de la directive, qui figure dans la même section, est formulé dans les termes suivants:

«1. Au sens de la présente directive, un employeur est considéré comme se trouvant en état d'insolvabilité:

a) lorsqu'a été demandée l'ouverture d'une procédure prévue par les dispositions législatives, réglementaires et administratives de l'État membre concerné qui porte sur le patrimoine de l'employeur et vise à désintéresser collectivement ses créanciers et qui permet la prise en considération des créances visées à l'article 1er paragraphe 1,

et

b) que l'autorité qui est compétente en vertu desdites dispositions législatives, réglementaires et administratives a:

- soit décidé l'ouverture de la procédure,

- soit constaté la fermeture définitive de l'entreprise ou de l'établissement de l'employeur, ainsi que l'insuffisance de l'actif disponible pour justifier l'ouverture de la procédure.

2. La présente directive ne porte pas atteinte au droit national en ce qui concerne la définition des termes `travailleur salarié', `employeur', `rémunération', `droit acquis' et `droit en cours d'acquisition'.»

7 En outre, la section II (intitulée «Dispositions relatives aux institutions de garantie»), plus particulièrement l'article 3, comporte les dispositions suivantes:

«1. Les États membres prennent les mesures nécessaires afin que des institutions de garantie assurent, sous réserve de l'article 4, le paiement des créances impayées des travailleurs salariés résultant de contrats de travail ou de relations de travail et portant sur la rémunération afférente à la période qui se situe avant une date déterminée.

2. La date visée au paragraphe 1 est, au choix des États membres:

- soit celle de la survenance de l'insolvabilité de l'employeur,

- soit celle du préavis de licenciement du travailleur salarié concerné, donné en raison de l'insolvabilité de l'employeur,

- soit celle de la survenance de l'insolvabilité de l'employeur ou celle de la cessation du contrat de travail ou de la relation de travail du travailleur salarié concerné, intervenue en raison de l'insolvabilité de l'employeur.»

8 L'article 4, figurant dans la même section, est formulé dans les termes suivants:

«1. Les États membres ont la faculté de limiter l'obligation de paiement des institutions de garantie, visée à l'article 3.

2. Lorsque les États membres font usage de la faculté visée au paragraphe 1, ils doivent:

- dans le cas visé à l'article 3 paragraphe 2 premier tiret, assurer le paiement des créances impayées concernant la rémunération afférente aux trois derniers mois du contrat de travail ou de la relation de travail qui se situent à l'intérieur d'une période de six mois précédant la date de la survenance de l'insolvabilité de l'employeur,

- dans le cas visé à l'article 3 paragraphe 2 deuxième tiret, assurer le paiement des créances impayées concernant la rémunération afférente aux trois derniers mois du contrat de travail ou de la relation de travail qui précèdent la date du préavis de licenciement du travailleur salarié, donné en raison de l'insolvabilité de l'employeur,

- dans le cas visé à l'article 3 paragraphe 2 troisième tiret, assurer le paiement des créances impayées concernant la rémunération afférente aux dix-huit derniers mois du contrat de travail ou de la relation de travail qui précèdent la date de la survenance de l'insolvabilité de l'employeur ou la date de la cessation du contrat de travail ou de la relation de travail du travailleur salarié, intervenue en raison de l'insolvabilité de l'employeur. Dans ces cas, les États membres peuvent limiter l'obligation de paiement à la rémunération afférente à une période de huit semaines ou à plusieurs périodes partielles, ayant au total la même durée.

3. Toutefois, les États membres peuvent, afin d'éviter le versement de sommes allant au-delà de la finalité sociale de la présente directive, fixer un plafond pour la garantie de paiement des créances impayées des travailleurs salariés.

Lorsque les États membres font usage de cette faculté, ils communiquent à la Commission les méthodes selon lesquelles ils fixent le plafond.»

9 En outre, en vertu de l'article 9 de la directive, les États membres ont la faculté d'appliquer ou d'introduire des dispositions plus favorables aux travailleurs salariés.

10 L'article 10 est formulé dans les termes suivants:

«La présente directive ne porte pas atteinte à la faculté des États membres:

a) de prendre les mesures nécessaires en vue d'éviter des abus;

b) de refuser ou de réduire l'obligation de paiement visée à l'article 3 ou l'obligation de garantie visée à l'article 7 s'il apparaît que l'exécution de l'obligation ne se justifie pas en raison de l'existence de liens particuliers entre le travailleur salarié et l'employeur et d'intérêts communs concrétisés par une collusion entre ceux-ci.»

11 Enfin, l'article 11 dispose que les États membres mettent en vigueur les dispositions nécessaires pour se conformer à la directive dans un délai de trente-six mois à compter de sa notification.

Historique

12 La République italienne n'a pas pris les mesures nécessaires à la transposition de la directive en droit interne dans le délai qui était imparti aux États membres par l'article 11 de cette dernière et qui expirait le 23 octobre 1983. A la suite d'un recours de la Commission, la Cour a constaté le manquement en cause par son arrêt du 2 février 1989, Commission/Italie (3).

13 Le 20 avril 1989, et alors que la directive n'avait toujours pas été transposée dans l'ordre juridique italien, Mme Danila Bonifaci et trente-trois autres salariés de l'entreprise Gaïa Confezioni Srl, qui avait été déclarée en faillite le 5 avril 1985, ont introduit un recours contre l'État italien devant la Pretura circondariale di Bassano del Grappa. Dans leur demande, ils indiquaient que, au moment de la cessation de leur relation de travail, ils étaient titulaires de créances dont le montant s'élevait au total à plus de 253 millions de LIT et qui avaient été admises au passif de l'entreprise faillie, que, cinq ans après la faillite, ils n'avaient encore reçu aucun paiement et que le syndic de la faillite les avait informés qu'une distribution, même partielle, en leur faveur était absolument improbable. Par conséquent, compte tenu de l'obligation d'appliquer la directive qui incombait à l'État italien, les demandeurs ont conclu à ce que ce dernier soit condamné à leur payer les créances qui leur sont dues à titre d'arriérés de salaires, au moins pour les trois dernières mensualités, ou, à titre subsidiaire, à leur verser une indemnité.

14 En vue de résoudre le litige, le juge national a, par ordonnance du 9 juillet 1989, soumis à la Cour une série de questions préjudicielles, auxquelles cette dernière a répondu par l'arrêt Francovich I, précité (4). Le dispositif de cet arrêt est formulé comme suit:

«1) Les dispositions de la...

To continue reading

Request your trial
5 practice notes
5 cases

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT