Commission of the European Communities v Republic of Austria.
Jurisdiction | European Union |
ECLI | ECLI:EU:C:2006:135 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Docket Number | C-168/04 |
Date | 23 February 2006 |
Procedure Type | Recurso por incumplimiento – fundado |
Celex Number | 62004CC0168 |
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. Philippe LÉger
présentées le 23 février 2006 (1)
Affaire C-168/04
Commission des Communautés européennes
contre
République d’Autriche
«Manquement d’État – Libre prestation de services – Exigences imposées par l’État membre d’accueil aux entreprises établies dans un autre État membre qui souhaitent détacher sur le territoire dudit État membre d’accueil des travailleurs salariés ressortissants d’un État tiers»
1. Par le présent recours, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en subordonnant le détachement de travailleurs ressortissants d’un État tiers, par une entreprise établie dans un autre État membre, à l’obtention par cette dernière d’un document appelé «confirmation de détachement européen», dont la délivrance par les autorités autrichiennes compétentes requiert la réunion de deux conditions cumulatives tenant, d’une part, à l’ancienneté ou à la pérennité des relations de travail entre ladite entreprise et les salariés concernés et, d’autre part, à la soumission systématique de ces derniers au régime d’emploi existant sur le territoire autrichien pendant la durée du futur détachement, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 CE. La Commission demande également à la Cour de constater que cet État membre a manqué à ces obligations en interdisant l’octroi d’un titre d’entrée ou de séjour à un ressortissant d’un État tiers, qui est détaché par une entreprise établie dans un autre État membre, lorsque ledit ressortissant est entré sur le territoire national sans visa.
2. Si le premier grief invoqué dans le cadre du présent recours est relativement comparable à celui examiné par la Cour dans l’arrêt du 21 octobre 2004, Commission/Luxembourg (2), ainsi que dans l’arrêt du 19 janvier 2006, Commission/Allemagne (3), en revanche, le second grief apparaît inédit, même s’il présente certains liens avec celui formulé dans cette dernière affaire. Par ce second grief, la Commission invite la Cour à apprécier la compatibilité d’une réglementation nationale, visant à assurer le respect de prescriptions concernant le contrôle de l’entrée et du séjour des ressortissants d’États tiers sur le territoire d’un État membre, avec les règles du traité CE en matière de libre prestation de services.
I – Le cadre juridique national
3. En Autriche, le détachement sur le territoire national des travailleurs salariés ressortissants d’États tiers, par une entreprise établie dans un autre État, est régi par la loi sur l’emploi des étrangers (Ausländerbeschäftigungsgesetz, ci-après l’«AuslBG») (4), ainsi que par la loi sur l’adaptation du contrat de travail (Arbeitsvertragsrechts-Anpassungsgesetz, ci-après l’«AVRAG») (5).
4. L’article 18, paragraphe 1, de l’AuslBG pose le principe selon lequel le détachement d’étrangers sur le territoire national, par une entreprise n’ayant pas de siège en Autriche, est soumis à une autorisation préalable. Plusieurs dérogations à ce principe sont prévues en faveur de certaines entreprises ou activités.
5. Au rang de ces diverses dérogations figure celle prévue à l’article 18, paragraphe 12, de l’AuslBG (tel que modifié par une réforme en vigueur depuis le 1er janvier 1998), pour le détachement de ressortissants d’États tiers par une entreprise étrangère ayant son siège dans un autre État membre de la Communauté européenne, en vue de réaliser une prestation de services sur le territoire autrichien. Une telle opération est soumise à une procédure particulière dénommée «confirmation de détachement européen» et non à celle de droit commun prévue pour le détachement d’étrangers qui, comme nous venons de l’indiquer, est une procédure d’autorisation.
6. La procédure de confirmation de détachement européen, qui est mise en cause dans le présent recours, se déroule de la manière suivante.
7. Tout d’abord, il appartient à l’entreprise établie dans un État membre autre que l’Autriche, qui souhaite réaliser un détachement, de procéder à une déclaration préalable en ce sens auprès des autorités nationales compétentes, à savoir le bureau régional du service de l’emploi.
8. Ensuite, il incombe audit bureau de délivrer à l’entreprise concernée un document désigné «confirmation de détachement européen», qui est décrit comme valant attestation de déclaration. La délivrance de ce document, dans un délai de six semaines à compter de la réception de ladite déclaration, est subordonnée à la réunion de deux conditions cumulatives. Ces conditions, énoncées à l’article 18, paragraphe 13, de l’AuslBG, sont les suivantes.
9. Premièrement, il est nécessaire que «l’étranger travaille avec l’entreprise qui l’envoie de manière régulière et habituelle depuis au moins un an dans le pays du siège de l’entreprise, ou [ait] passé un contrat de travail à durée indéterminée avec cette entreprise, et dispose des autorisations exigées en matière d’emploi pour les ressortissants de pays tiers par le pays d’où il est envoyé».
10. Deuxièmement, les travailleurs concernés doivent être soumis, pendant la durée de leur futur détachement, aux conditions de salaire et d’emploi et aux dispositions en matière de sécurité sociale qui sont prévues en droit autrichien.
11. Outre ces exigences afférentes à la procédure de confirmation de détachement européen, l’article 7, sous b), paragraphes 3 et 9, de l’AVRAG impose à l’entreprise établie dans un autre État membre de l’Espace économique européen qui souhaite détacher ses travailleurs en Autriche l’obligation, sous peine d’amende, de procéder à une déclaration auprès du service central de coordination pour le contrôle du travail illégal, relevant du ministère fédéral des Finances. Cette déclaration, qui s’ajoute à celle destinée à un autre service dans le cadre de la procédure de confirmation de détachement européen, doit, en principe, être effectuée au moins une semaine avant le début du travail à réaliser en détachement. Elle doit comporter une série d’indications concernant les personnes impliquées dans l’opération de détachement ainsi que les modalités de celui-ci (6). Ladite déclaration est ensuite transmise par le service destinataire à divers organismes de sécurité sociale ainsi qu’à l’inspection du travail.
12. Par ailleurs, la loi sur les étrangers (Fremdengesetz, ci-après le «FrG») (7) impose aux ressortissants d’États tiers, notamment à ceux qui exercent une activité professionnelle en Autriche sans y résider, l’obligation d’être titulaires d’un titre d’entrée et de séjour, à moins qu’un accord international n’en dispose autrement (8).
13. L’article 10, paragraphe 1, point 3, du FrG prévoit que «[l]’octroi d’un titre d’entrée ou de séjour doit être refusé lorsque […] le titre de séjour […] [sauf pour certaines catégories de personnes] doit être octroyé après une entrée sans visa». Ainsi, ledit article s’oppose à la délivrance d’un titre d’entrée ou de séjour à un ressortissant d’un État tiers, qui est détaché par une entreprise établie dans un autre État membre, lorsqu’un tel ressortissant est entré sur le territoire autrichien sans avoir préalablement obtenu le visa requis. En d’autres termes, dès lors que ledit ressortissant est entré illégalement sur le territoire national, sans être préalablement autorisé à y entrer et, consécutivement, à y séjourner, sa situation n’est pas susceptible d’être régularisée sur place par la délivrance d’un titre d’entrée ou de séjour.
II – La procédure précontentieuse
14. À la suite d’un échange de correspondances entre la République d’Autriche et la Commission et de la réception par cette dernière d’une plainte, celle-ci, estimant que ledit État membre avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 CE, a, par lettres du 14 juillet 1997 et du 2 juillet 1998 (9), mis celui-ci en demeure de présenter ses observations.
15. N’étant pas convaincue par les observations présentées par la République d’Autriche, la Commission lui a adressé, par lettre du 5 avril 2002, un avis motivé l’invitant à prendre les mesures nécessaires pour se conformer aux obligations qui lui incombent en vertu du même article dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet avis.
16. Les autorités autrichiennes ayant indiqué qu’elles n’entendaient pas modifier la réglementation nationale en cause, la Commission a décidé d’introduire le présent recours par requête déposée au greffe de la Cour le 5 avril 2004.
17. Après avoir été admis, par ordonnance du président de la Cour du 26 octobre 2004, à intervenir à la procédure à l’appui de la République d’Autriche, le Royaume des Pays-Bas s’est désisté de son intervention par lettre du 16 décembre 2004, de sorte que, par une nouvelle ordonnance du président de la Cour du 4 février 2005, cet État membre a été radié comme partie intervenante au litige.
III – Le recours
18. À l’appui de son recours, nous le rappelons, la Commission invoque deux griefs portant, d’une part, sur la procédure de confirmation de détachement européen et, d’autre part, sur l’impossibilité pour un travailleur détaché, ressortissant d’un État tiers, de régulariser sur place sa situation quant à son entrée et à son séjour sur le territoire national. Nous examinerons successivement chacun de ces deux griefs.
A – Sur le premier grief relatif à la procédure de confirmation de détachement européen
1. Arguments des parties
19. Par son premier grief, la Commission reproche à la République d’Autriche d’avoir méconnu l’article 49 CE en subordonnant le détachement de travailleurs ressortissants d’États tiers, par une entreprise établie dans un autre État membre, à l’obtention par cette dernière d’une confirmation de détachement européen, dont la délivrance requiert, d’une part, l’existence de relations de travail liant depuis au moins un an les travailleurs concernés à ladite entreprise ou la conclusion entre eux d’un contrat de travail à durée indéterminée et...
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