Solgar Vitamin's France and Others v Ministre de l'Économie, des Finances et de l'Emploi and Others.
Jurisdiction | European Union |
Date | 17 December 2009 |
Court | Court of Justice (European Union) |
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. NIILO JÄÄSKINEN
présentées le 17 décembre 2009 (1)
Affaire C‑446/08
Solgar Vitamin’s France,
Valorimer SARL,
Christian Fenioux,
L’Arbre de Vie SARL,
Source Claire,
Nord Plantes EURL,
RCS Distribution,
Ponroy Santé,
en présence de:
Syndicat de la Diététique et des Compléments Alimentaires
contre
Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Emploi,
Ministre de la Santé, de la Jeunesse et des Sports,
Ministre de l’Agriculture et de la Pêche
[demande de décision préjudicielle formée par le Conseil d’État (France)]
«Compléments alimentaires – Absence de mesures d’exécution – Réglementation nationale fixant les quantités maximales de vitamines et de minéraux autorisés dans les compléments alimentaires – Fixation d’une quantité maximale à une valeur nulle – Application de la clause de sauvegarde – Fixation des quantités maximales en l’absence de limites de sécurité»
1. Dans le cadre de la présente procédure, il est demandé à la Cour de se prononcer sur plusieurs questions relatives à l’existence et, le cas échéant, à l’étendue des compétences des États membres en matière de compléments alimentaires, dans l’hypothèse d’un défaut d’adoption par la Commission des mesures d’exécution ayant pour objet de fixer les quantités maximales de nutriments présentes dans les compléments alimentaires.
2. À cet égard, j’observe que le législateur a visé une harmonisation totale, en ce qui concerne les vitamines et minéraux susceptibles d’être utilisés dans la fabrication de compléments alimentaires. Cependant, cette harmonisation reste inachevée en pratique, eu égard à l’absence d’adoption par la Commission des mesures d’exécution nécessaires. Cette situation est source d’incertitude juridique pour les entreprises concernées et génère des difficultés dans le processus d’application et de transposition pour les autorités compétentes des États membres. Il revient donc à la Cour de rechercher un point d’équilibre entre l’exigence de libre circulation des marchandises en question et la nécessité de protéger la santé publique dans ce contexte juridique inédit.
3. Le Conseil d’État français a saisi la Cour d’une série de questions portant sur l’interprétation des articles 5, 11, paragraphe 2, et 12 de la directive 2002/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 10 juin 2002, relative au rapprochement des législations des États membres concernant les compléments alimentaires (2), ainsi que des articles 28 CE et 30 CE.
4. Cette demande trouve son origine dans les recours pour excès de pouvoir introduits auprès de la juridiction de renvoi entre le 11 juillet 2006 et le 24 juillet 2006 par la société Solgar Vitamin’s France et sept autres requérantes, toutes actives dans le secteur des compléments alimentaires (ci‑après «Solgar e.a.»), ainsi que dans le recours introduit le 28 juillet 2006 par le Syndicat de la Diététique et des Compléments Alimentaires (ci‑après le «Syndicat») à l’encontre de l’arrêté interministériel du 9 mai 2006 relatif aux nutriments pouvant être employés dans la fabrication des compléments alimentaires (ci‑après l’«arrêté du 9 mai 2006»).
I – Cadre juridique
A – Droit de l’Union européenne
5. Ainsi qu’il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2002/46, celle‑ci concerne les compléments alimentaires commercialisés comme des denrées alimentaires et présentés comme tels.
6. Les premier, deuxième, cinquième, treizième, quatorzième et seizième considérants de la directive 2002/46 sont rédigés comme suit:
«(1) Un nombre croissant de produits sont placés sur le marché de la Communauté sous la forme d’aliments constituant une source concentrée de nutriments et conçus pour compléter l’apport en nutriments d’un régime alimentaire normal.
(2) Ces produits sont régis dans les États membres par des règles nationales diverses susceptibles d’entraver leur libre circulation, de créer des conditions de concurrence inégales et d’avoir ainsi une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur. Il importe dès lors d’adopter des règles communautaires applicables à ces produits commercialisés comme des denrées alimentaires.
[…]
(5) Afin de garantir un niveau élevé de protection des consommateurs et de faciliter leur choix, il est nécessaire que les produits qui sont mis sur le marché soient sans danger et portent un étiquetage adéquat et approprié.
[…]
(13) Les apports en quantités excessives de vitamines et de minéraux peuvent avoir des effets néfastes pour la santé et ce risque justifie la fixation, selon le cas, de limites maximales de sécurité pour ces substances dans les compléments alimentaires. Ces limites devraient garantir que l’utilisation normale des produits selon les instructions fournies par le fabricant est sans danger pour le consommateur.
(14) À cet effet, il est nécessaire que la fixation des quantités maximales tienne compte des limites supérieures de sécurité établies pour les vitamines et les minéraux après une évaluation scientifique des risques réalisée à partir de données scientifiques généralement acceptables et des apports de ces nutriments provenant de l’alimentation courante. Il est également dûment tenu compte des apports de référence pour la fixation des quantités maximales.
[…]
(16) L’adoption, sur la base des critères établis par la présente directive et des indications scientifiques appropriées, des valeurs spécifiques correspondant aux limites maximales et minimales des vitamines et des minéraux présents dans les compléments alimentaires constituerait une mesure d’application qu’il y a lieu de confier à la Commission.»
7. Aux termes de l’article 2 de la directive 2002/46:
«Aux fins de la présente directive, on entend par:
a) ‘compléments alimentaires’, les denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés, commercialisés sous forme de doses, à savoir les formes de présentation telles que les gélules, les pastilles, les comprimés, les pilules et autres formes similaires, ainsi que les sachets de poudre, les ampoules de liquide, les flacons munis d’un compte‑gouttes et les autres formes analogues de préparations liquides ou en poudre destinées à être prises en unités mesurées de faible quantité;
b) ‘nutriments’, les substances suivantes:
i) vitamines;
ii) minéraux.»
8. L’article 3 de la directive 2002/46 est ainsi rédigé:
«Les États membres veillent à ce que les compléments alimentaires ne puissent être commercialisés dans la Communauté que s’ils sont conformes aux règles énoncées dans la présente directive.»
9. L’article 4, paragraphes 1, 2 et 4, de la directive 2002/46 dispose:
«1. En ce qui concerne les vitamines et minéraux, sous réserve du paragraphe 6, seuls ceux énumérés à l’annexe I, sous les formes visées à l’annexe II, peuvent être utilisés dans la fabrication de compléments alimentaires.
2. Les critères de pureté des substances énumérées à l’annexe II sont arrêtés selon la procédure visée à l’article 13, paragraphe 2, sauf lorsqu’ils sont appliqués conformément au paragraphe 3.
[…]
4. Pour les substances énumérées à l’annexe II pour lesquelles les critères de pureté ne sont pas spécifiés dans la législation communautaire et jusqu’à l’adoption de telles spécifications, des critères de pureté généralement acceptables, recommandés par des organismes internationaux, sont applicables et les règles nationales fixant des critères de pureté plus stricts peuvent être maintenues.
[…]»
10. L’article 5 de la directive 2002/46 est ainsi rédigé:
«1. Les quantités maximales de vitamines et de minéraux présentes dans les compléments alimentaires sont fixées en fonction de la portion journalière recommandée par le fabricant en tenant compte des éléments suivants:
a) les limites supérieures de sécurité établies pour les vitamines et les minéraux après une évaluation scientifique des risques fondée sur des données scientifiques généralement admises, compte tenu, le cas échéant, de la différence des niveaux de sensibilité de différents groupes de consommateurs;
b) les apports en vitamines et en minéraux provenant d’autres sources alimentaires.
2. Lors de la fixation des quantités maximales visée au paragraphe 1, il est également dûment tenu compte des apports de référence en vitamines et en minéraux pour la population.
3. Pour garantir la présence en quantités suffisantes de vitamines et de minéraux dans les compléments alimentaires, des quantités minimales sont fixées, de façon appropriée, en fonction de la portion journalière recommandée par le fabricant.
4. Les quantités maximales et minimales de vitamines et de minéraux mentionnées aux paragraphes 1, 2 et 3 sont arrêtées selon la procédure visée à l’article 13, paragraphe 2.»
11. L’article 11 de la directive 2002/46 énonce:
«1. Sans préjudice de l’article 4, paragraphe 7, les États membres ne peuvent interdire ou entraver le commerce des produits visés à l’article 1er qui sont conformes à la présente directive et, le cas échéant, aux actes communautaires arrêtés pour sa mise en œuvre pour des motifs liés à la composition, aux caractéristiques de fabrication, de présentation ou à l’étiquetage de ces produits.
2. Sans préjudice du traité CE, et notamment de ses articles 28 et 30, le paragraphe 1 n’affecte pas les dispositions nationales qui sont applicables en l’absence d’actes communautaires arrêtés au titre de la présente directive.»
12. Aux termes de l’article 12 de la directive 2002/46:
«1. Si un État membre constate, sur la base d’une motivation circonstanciée, en raison de nouvelles données ou d’une nouvelle évaluation des données existantes intervenues depuis l’adoption de la présente directive ou d’un des actes communautaires arrêtés pour sa mise en œuvre, que l’emploi d’un des produits visés à l’article 1er présente...
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