PP e.a. contre Parlement européen.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2023:204
Date19 April 2023
Docket NumberT-39/21
Celex Number62021TJ0039
CourtGeneral Court (European Union)
62021TJ0039

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre élargie)

19 avril 2023 ( *1 )

« Fonction publique – Fonctionnaires – Crise sanitaire liée à la pandémie de COVID-19 – Décision autorisant l’exercice du travail à temps partiel pour s’occuper de proches en dehors du lieu d’affectation – Absence de possibilité de pratiquer le télétravail en dehors du lieu d’affectation à temps complet – Irrégularité de la procédure précontentieuse – Décision faisant droit à une demande de travail à temps partiel – Défaut d’intérêt à agir – Irrecevabilité – Rémunération – Suspension de l’indemnité de dépaysement – Articles 62 et 69 du statut – Violation de l’article 4 de l’annexe VII du statut »

Dans l’affaire T‑39/21,

PP,

PQ,

PR,

PS,

PT,

représentés par Me M. Casado García-Hirschfeld, avocate,

parties requérantes,

contre

Parlement européen, représenté par Mmes S. Seyr, D. Boytha et M. Windisch, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (septième chambre élargie),

composé, lors des délibérations, de MM. R. da Silva Passos, président, V. Valančius, Mme I. Reine (rapporteure), MM. L. Truchot et M. Sampol Pucurull, juges,

greffier : Mme H. Eriksson, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 14 juillet 2022,

rend le présent

Arrêt

1

Par leur recours fondé sur l’article 270 TFUE, les requérants, PP, PS, PQ, PR et PT, demandent, en substance, d’une part, l’annulation des décisions du Parlement européen du 14 avril 2020 autorisant PQ et PS à exercer leur activité à temps partiel en dehors de leur lieu d’affectation en raison de la pandémie de COVID-19, du 18 mai 2020 autorisant PP à exercer son activité à temps partiel en dehors de son lieu d’affectation en raison de la pandémie de COVID-19 (ci-après, prises ensemble, les « décisions autorisant le travail à temps partiel »), des 7, 15, 16 avril et 19 mai 2020 ayant suspendu le versement de l’indemnité de dépaysement des requérants pendant leur période de travail en dehors de leur lieu d’affectation (ci-après, prises ensemble, les « décisions de suspension de l’indemnité de dépaysement ») ainsi que du 6 mai 2020 procédant à la récupération des sommes trop perçues par PR et PT (ci-après, prises ensemble, les « décisions de répétition de l’indu ») et, d’autre part, la réparation des préjudices qu’ils auraient subis du fait de ces décisions.

I. Antécédents du litige

2

Les requérants sont fonctionnaires au Parlement européen. Lors de leur entrée en service, le bénéfice de l’indemnité de dépaysement leur a été octroyé.

3

Le 11 mars 2020, en raison des niveaux alarmants de propagation et de sévérité de la maladie à coronavirus engendrée par le virus SARS-CoV-2, à savoir le COVID-19, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que la flambée de COVID-19 constituait une pandémie en raison de la hausse rapide du nombre de cas en dehors de la Chine et du nombre croissant de pays touchés.

4

Par courriel du même jour, le secrétaire général du Parlement (ci-après le « secrétaire général ») a informé l’ensemble des membres du personnel que, au vu de la situation sanitaire, il avait donné instruction aux directeurs généraux d’introduire le télétravail pour tous les collègues dont la présence physique dans les locaux du Parlement n’était pas absolument indispensable, à concurrence de 70 % du temps de travail. Le courriel précisait également que cette mesure prendrait effet le 16 mars 2020 et que, en fonction de l’évolution de la situation, le télétravail pourrait être porté à 100 % du temps de travail.

5

Le 16 mars 2020, le secrétaire général a informé les membres du personnel que, compte tenu de l’évolution de la situation sanitaire, le temps de télétravail des collègues dont la présence physique dans les locaux du Parlement n’était pas indispensable et qui pratiquaient déjà le télétravail à concurrence de 70 % était porté à 100 %.

6

Le 19 mars 2020, le secrétaire général a adressé un courriel à l’ensemble des membres du personnel en vertu duquel, dans le contexte de la pandémie de COVID-19, ces derniers étaient autorisés à travailler à mi-temps pour pouvoir s’occuper des membres de leur famille directe. Contrairement à la pratique habituelle, ce travail à mi-temps pouvait être effectué à partir de n’importe quel État membre de l’Union européenne en fonction de la résidence établie des proches dont le fonctionnaire ou l’agent souhaitait s’occuper. Cette décision est entrée en vigueur immédiatement et devait s’appliquer aussi longtemps que durerait la pandémie de COVID-19.

7

Le 31 mars 2020, le secrétaire général a adopté une nouvelle décision relative au travail à temps partiel temporaire effectué en dehors du lieu d’affectation pour des raisons familiales en réaction à la pandémie de COVID-19 (ci-après la « décision du secrétaire général du 31 mars 2020 »). Cette décision, qui a remplacé la décision sur le travail à mi-temps du 19 mars 2020, était rédigée dans les termes suivants :

« [V]u l’article 234, paragraphe 2, du règlement intérieur du Parlement européen :

Les collègues souhaitant s’occuper plus intensément des membres de leur famille directe, comme leurs parents, leurs enfants ou leur conjoint pendant la durée de cette situation particulière causée par la COVID-19, sont autorisés à travailler à temps partiel (75 %).

Contrairement à la pratique habituelle, ce travail à temps partiel peut être effectué à partir de n’importe quel État membre de l’Union européenne en fonction de la résidence établie de ces proches et, jusqu’à la fin de la période transitoire, le 31 décembre 2020, à partir du Royaume-Uni.

Veuillez soumettre une demande officielle à votre directeur des ressources humaines dès que possible avant la date de début demandée.

La demande doit préciser le nom du proche, le lien familial ainsi que la période demandée.

Pour la période couverte par l’autorisation, le membre du personnel aura droit à 75 % de sa rémunération. L’article 3 de l’annexe IV bis du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne] s’applique. Ni l’indemnité de dépaysement ni l’indemnité d’expatriation prévues à l’article 4 de l’annexe VII du statut ne peuvent être accordées.

Cette décision s’applique aux fonctionnaires employés par le secrétariat du Parlement.

Elle s’applique par analogie aux fonctionnaires qui ont quitté leur lieu d’affectation et sont en mesure de télétravailler. Dans ce cas, l’autorité investie du pouvoir de nomination peut adopter une décision sans demande formelle.

En ce qui concerne les demandes introduites conformément à l’article 6, paragraphe 2, des règles internes relatives à l’exercice de l’activité à temps partiel, l’autorité investie du pouvoir de nomination se réserve le droit de les refuser.

L’autorisation de travailler à temps partiel est accordée pour une période de trois mois renouvelable.

La présente décision entre en vigueur le 1er avril 2020 et s’appliquera aussi longtemps que durera la pandémie de Covid-19. Elle remplace la décision du 19 mars 2020. »

A. Sur la situation de PP

8

PP est fonctionnaire au Parlement à Luxembourg (Luxembourg).

9

Le 14 mars 2020, au vu de la fermeture imminente de l’internat où étudiait son fils, PP s’est rendu en Hongrie avec sa famille pour y rejoindre celui-ci.

10

Le 12 mai 2020, au vu de la décision du secrétaire général du 31 mars 2020, PP a introduit une demande visant à obtenir l’autorisation d’exercer son activité à temps partiel à concurrence de 75 % depuis la Hongrie, rétroactivement, à compter du 1er avril 2020. Le 18 mai 2020, il a été fait droit à cette demande pour la période allant du 1er avril au 30 juin 2020.

11

Le 18 mai 2020, PP a repris son travail à temps complet à Luxembourg.

12

Par décision du 19 mai 2020, à la suite de la demande de PP visée au point 10 ci-dessus et en conséquence directe de l’application de la décision du secrétaire général du 31 mars 2020, le chef de l’unité « Droits individuels » de la direction générale (DG) « Ressources humaines » du Parlement a suspendu l’indemnité de dépaysement de ce dernier à compter du 1er avril 2020 pour la période pendant laquelle il avait été autorisé à exercer son travail à temps partiel en Hongrie.

13

Le 12 juin 2020, PP a introduit une réclamation dirigée, notamment, contre les décisions visées aux points 10 et 12 ci-dessus.

14

Le 27 octobre 2020, le secrétaire général, en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination (AIPN), a rejeté la réclamation de PP en tant qu’elle était dirigée contre les décisions visées aux points 10 et 12 ci-dessus.

B. Sur la situation de PQ

15

PQ est fonctionnaire au Parlement à Luxembourg.

16

Le 10 mars 2020, PQ s’est rendue au Danemark en avion, avant l’imposition des premières restrictions de voyage dans l’Union en raison de la pandémie de COVID-19. Son retour, prévu le 22 mars suivant, n’a pas pu avoir lieu en raison de l’annulation de tous les vols entre le Luxembourg et le Danemark. Compte tenu de son souhait de rester auprès de son mari, considéré comme personne à risque face au virus, PQ a été exceptionnellement autorisée à travailler temporairement depuis le Danemark, dans l’attente de l’adoption de mesures générales par le Parlement concernant la situation sanitaire.

17

Le 6 avril 2020, compte tenu de la décision du secrétaire général du 31 mars 2020, PQ a introduit une demande visant à obtenir l’autorisation d’exercer son activité à temps partiel à concurrence de 75 % depuis le Danemark, pour une période de trois mois à compter du 1er avril 2020.

18

Le 14 avril 2020, le directeur général de la DG « Traduction » du...

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