Opinion of Advocate General Kokott delivered on 6 February 2020.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:82
Date06 February 2020
Celex Number62018CC0716
CourtCourt of Justice (European Union)

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

Mme JULIANE KOKOTT

présentées le 6 février 2020 (1)

Affaire C716/18

CT

contre

Administraţia Judeţeană a Finanţelor Publice Caraş-Severin – Serviciul Inspecţie Persoane Fizice,

Direcţia Generală Regională a Finanţelor Publice Timişoara – Serviciul Soluţionare Contestaţii 1

[Demande de décision préjudicielle présentée par la Curtea de Apel Timişoara (Cour d’appel de Timişoara, Roumanie)]

« Renvoi préjudiciel – Directive 2006/112/CE – Articles 287 et 288 de la directive TVA – Régime spécial d’exonération des petites entreprises – Exonération en dessous de certains plafonds de chiffre d’affaires – Calcul de ces plafonds d’exonération en cas de pluralité d’activités économiques – Notion d’« opérations immobilières » qui n’ont pas le « caractère d’opérations accessoires » à prendre en compte dans le calcul






I. Introduction

1. La présente affaire concerne le régime d’exonération des petites entreprises. En vertu de celui‑ci, les assujettis réalisant un chiffre d’affaires annuel en dessous d’un certain montant peuvent être exonérés de TVA par l’État membre. Ce montant est en Roumanie de 65 000 euros. Comment ce montant doit-il être calculé lorsqu’un assujetti exerce plusieurs activités ? Dans la présente affaire, l’assujetti avait tiré en 2012 des revenus d’une activité de conseil en tant qu’expert-comptable, conseiller fiscal et avocat, d’activités d’administrateur judiciaire et d’écrivain et ainsi que de la location d’un bien immeuble.

2. Dans la mesure où la Roumanie n’intègre pas les revenus de l’activité d’avocat dans ce calcul, le plafond de 65 000 euros ne serait dépassé qu’en tenant compte des revenus de la location. L’article 288, première phrase, point 4, de la directive TVA n’intègre cependant dans le calcul les « montants des opérations immobilières » que si ces dernières n’ont pas de caractère d’« opérations accessoires ». La Cour a aujourd’hui, pour la première fois, l’opportunité de préciser si la location d’un bien immeuble doit être considérée comme une « opération immobilière » et quand il convient d’admettre être en présence d’une « opération accessoire » dénuée de pertinence.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

3. Le cadre juridique en droit de l’Union est régi par les articles 287 et 288 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de la taxe sur la valeur ajoutée (ci‑après la « directive TVA ») (2).

4. L’article 287, point 18, de la directive TVA prévoit :

« Les États membres ayant adhéré après le 1er janvier 1978 peuvent octroyer une franchise de taxe aux assujettis dont le chiffre d’affaires annuel est au maximum égal à la contre-valeur en monnaie nationale des montants suivants au taux du jour de leur adhésion :

18. la Roumanie : 35 000 euros ; […] »

5. En vertu de l’article 1er de la décision d’exécution du Conseil du 26 mars 2012 (3), la Roumanie est autorisée, par dérogation à l’article 287, point 18, de la directive TVA à octroyer une exonération de taxe sur la valeur ajoutée aux assujettis dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur ou égal à la contre-valeur en monnaie nationale de 65 000 euros au taux de conversion du jour de son adhésion à l’Union européenne.

6. L’article 288 de la directive TVA dispose :

« Le chiffre d’affaires qui sert de référence pour l’application du régime prévu à la présente section est constitué par les montants hors TVA suivants :

1) le montant des livraisons de biens et des prestations de services, pour autant qu’elles soient imposées ;

2) le montant des opérations exonérées avec droit à déduction de la TVA payée au stade antérieur en vertu des articles 110 et 111, de l’article 125, paragraphe 1, de l’article 127 et de l’article 128, paragraphe 1 ;

3) le montant des opérations exonérées en vertu des articles 146 à 149 et des articles 151, 152 et 153 ;

4) le montant des opérations immobilières, des opérations financières visées à l’article 135, paragraphe 1, points b) à g), et des prestations d’assurance, à moins que ces opérations n’aient le caractère d’opérations accessoires.

Toutefois, les cessions de biens d’investissement corporels ou incorporels de l’entreprise ne sont pas prises en considération pour la détermination du chiffre d’affaires. »


7. L’article 174, paragraphe 2, contient en outre la réglementation suivante au sujet de la répartition de la déduction de la taxe payée en amont :

« 2. Par dérogation au paragraphe 1, il est fait abstraction, pour le calcul du prorata de déduction, des montants suivants : […]

b) le montant du chiffre d’affaires afférent aux opérations accessoires immobilières et financières ;

c) le montant du chiffre d’affaires afférent aux opérations visées à l’article 135, paragraphe 1, points b) à g), lorsqu’il s’agit d’opérations accessoires. »

B. Le droit roumain

8. En droit roumain, les dispositions correspondantes sont contenues dans la Legea nr. 571 din 22 decembrie 2003 privind Codul fiscal (loi nº 571/2003 du 22 décembre 2003 relative au code des impôts) telle que modifiée et complétée ultérieurement (ci‑après le « code des impôts »). Aux termes de l’article 152 du code des impôts :

« 1. Un assujetti établi en Roumanie conformément à l’article 125 bis, paragraphe 2, point a), dont le chiffre d’affaires annuel, déclaré ou réalisé, est inférieur au plafond de 65 000 euros, [...] soit 220 000 RON, peut demander l’exonération de la taxe, dénommée ci‑après le « régime spécial d’exonération », pour les opérations prévues à l’article 126, paragraphe 1,

2. Le chiffre d’affaires servant de référence aux fins du paragraphe 1 est le total, hors taxes, dans le cas des assujettis qui demandent l’exonération pour les personnes identifiées à la TVA des livraisons de biens et prestations de services effectuées par l’assujetti au cours d’une année civile, imposables ou, le cas échéant, qui seraient imposables si elles n’étaient pas effectuées par une petite entreprise, des opérations résultant d’activités économiques dont le lieu de livraison ou de prestation est considéré comme étant à l’étranger, si la taxe était déductible, dans le cas où ces opérations ont été effectuées en Roumanie conformément à l’article 145, paragraphe 2, point b), des opérations exonérées avec droit à déduction et de celles qui sont exonérées sans droit à déduction, visées à l’article 141, paragraphe 2, points a), b), e) et f), si elles ne sont pas accessoires à l’activité principale. […] »

9. Il est indiqué au point 47, paragraphe 3, du Hotărârea Guvernului României nr. 44 din 22 ianuarie 2004 pentru aprobarea Normelor metodologice de aplicare a Legii nr. 571/2003 privind Codul fiscal (décret nº 44 du gouvernement roumain du 22 janvier 2004 concernant l’adoption des normes méthodologiques en vue de l’application de la loi nº 571/2003 relatif au code des impôts) tel que modifié et complété par le décret nº 670 du 4 juillet 2012 :

« Une opération est accessoire à l’activité principale si les conditions suivantes sont cumulativement remplies :

a) la réalisation de cette opération nécessite des ressources techniques limitées en ce qui concerne les équipements et l’emploi de personnel ;

b) l’opération n’est pas directement liée à l’activité principale de l’assujetti ; et

c) le montant des acquisitions effectuées aux fins de l’opération et le montant de la taxe déductible afférente à cette opération sont insignifiants. »

III. Les faits et la procédure préjudicielle

10. Ainsi qu’il a déjà été indiqué, le requérant de la procédure au principal (ci‑après le « requérant ») exerce en plus d’une activité de professeur d’université, plusieurs activités libérales dont celles d’expert-comptable, de conseiller fiscal, d’administrateur judiciaire et d’avocat. Il perçoit en outre, à titre occasionnel, des revenus tirés de droits d’auteur.

11. Conformément à la réglementation roumaine, le requérant a obtenu un numéro d’enregistrement fiscal unique pour l’« activité de comptabilité, d’audit financier et de consultance dans le domaine fiscal » correspondant aux professions de conseiller fiscal et d’expert‑comptable. En ce qui concerne l’exercice de ces professions, le requérant a indiqué plusieurs sièges professionnels. Un bien immobilier appartenant au requérant est enregistré comme siège du cabinet d’avocat individuel agissant comme administrateur judiciaire.

12. Depuis 2007, le requérant perçoit également des revenus de la location du bien immobilier susmentionné. Celui-ci a été loué à une société dont le requérant est copropriétaire et gérant. Cette société a son siège dans l’immeuble loué et elle y exerce notamment des activités de conseil, de comptabilité, d’expertise-comptable et de conseil en matière fiscale. L’objet déclaré de l’activité principale est le « conseil pour les affaires et autres conseils de gestion ».

13. En 2016, le requérant a fait l’objet d’un contrôle fiscal en ce qui concerne la TVA due pour la période du 1er janvier 2011 au 30 juin 2016. À la suite de ce contrôle, l’administration fiscale (Administraţia Judeţeană a Finanţelor Publice, ci‑après « AJFP ») a constaté que le requérant avait dépassé en 2012 le plafond de 220 000 leu roumains (RON)...

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