BNP Paribas contra Banco Central Europeo.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2020:394
Celex Number62018TJ0150
Date09 September 2020
Docket NumberT-150/18,T-345/18
CourtGeneral Court (European Union)
62018TJ0150

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)

9 septembre 2020 ( *1 )

« Politique économique et monétaire – Surveillance prudentielle des établissements de crédit – Cotisation au système de garantie des dépôts ou au fonds de résolution unique au moyen des engagements de paiement irrévocables – Missions confiées à la BCE – Pouvoirs de surveillance spécifiques de la BCE – Article 4, paragraphe 1, sous f), et article 16, paragraphe 1, sous c), et paragraphe 2, sous d), du règlement (UE) no 1024/2013 – Mesure imposant la déduction du montant cumulé des encours des engagements de paiement irrévocables sur les fonds propres de base de catégorie 1 – Absence d’examen individuel »

Dans les affaires T‑150/18 et T‑345/18,

BNP Paribas, établie à Paris (France), représentée par Mes A. Gosset-Grainville, M. Trabucchi et M. Dalon, avocats,

partie requérante,

contre

Banque centrale européenne (BCE), représentée par Mme E. Koupepidou, MM. R. Bax et F. Bonnard, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation partielle de la décision ECB/SSM/2017-R0MUWSFPU8MPRO8K5P83/248 de la BCE, du 19 décembre 2017, de la décision ECB-SSM-2018-FRBNP-17 de la BCE, du 26 avril 2018, et de la décision ECB-SSM-2019-FRBNP-12 de la BCE, du 14 février 2019,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie),

composé de MM. E. Buttigieg, faisant fonction de président, F. Schalin (rapporteur), B. Berke, Mme M. J. Costeira et M. C. Mac Eochaidh, juges,

greffier : Mme M. Marescaux, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 11 septembre 2019,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1

À la suite de la crise financière de 2008, ayant donné lieu à la crise de la zone euro, un nouveau cadre réglementaire visant à assurer la stabilité et la sécurité de l’activité bancaire dans l’Union européenne et complétant l’union économique et monétaire et le marché intérieur a été mis en place. Ce nouveau cadre se caractérise par un corpus réglementaire unique applicable de manière identique aux établissements de crédit de tous les États membres concernés. L’union bancaire repose sur trois piliers, en l’occurrence un mécanisme de surveillance unique, un mécanisme de résolution unique et un système européen de garantie des dépôts.

2

La directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO 2013, L 176, p. 338), et le règlement (UE) no 575/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO 2013, L 176, p. 1, rectificatifs JO 2013, L 208, p. 68, et JO 2013, L 321, p. 6), font partie du corpus réglementaire unique mentionné au point 1 ci-dessus et forment ensemble le cadre juridique régissant les activités bancaires, le cadre de surveillance et les règles prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement. Le règlement no 575/2013 prévoit que les établissements de crédit sont tenus de posséder un certain pourcentage de fonds propres en fonction de leur profil de risque. Parmi ces fonds propres, il existe les fonds propres de base de catégorie 1 (Common Equity Tier 1, CET 1), à savoir ceux destinés à assurer la continuité des activités d’un établissement de crédit et à prévenir les situations d’insolvabilité.

3

Les exigences prudentielles générales énoncées par le règlement no 575/2013 sont complétées par des dispositifs individuels à l’égard desquels les autorités compétentes devront adopter des décisions dans le cadre de la surveillance continue qu’elles exercent sur chaque établissement de crédit et entreprise d’investissement.

4

Le mécanisme de surveillance unique établi par le règlement (UE) no 1024/2013 du Conseil, du 15 octobre 2013, confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit (JO 2013, L 287, p. 63) (le premier pilier de l’union bancaire mentionné au point 1 ci-dessus), a pour but de garantir la sécurité et la solidité des établissements de crédit. Ledit règlement donne compétence à la Banque centrale européenne (BCE) pour remplir les missions de surveillance prudentielle mentionnées à son article 4, paragraphe 1. Conformément à l’article 6 du même règlement, la BCE s’acquitte de ses missions dans le cadre du mécanisme de surveillance unique, composé d’elle-même et des autorités compétentes nationales. La BCE est en particulier compétente pour assurer la surveillance prudentielle des établissements de crédit de la zone euro classés comme « importants ».

5

Conformément à l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1024/2013, la BCE est tenue d’appliquer toutes les dispositions pertinentes du droit de l’Union aux fins de l’accomplissement des missions qui lui sont confiées. À cette fin, la BCE soumet ses décisions au respect « de tout acte législatif ou non législatif, y compris ceux visés aux article 290 et 291 TFUE » et « [e]lle est, en particulier, soumise aux normes techniques contraignantes de réglementation et d’exécution élaborées par l’[Autorité bancaire européenne (ABE)] et adoptées par la Commission conformément aux articles 10 à 15 du règlement no 1093/2010, à l’article 16 dudit règlement, et aux dispositions dudit règlement relatives au manuel de surveillance européen élaboré par l’ABE conformément à ce règlement ».

6

Les autorités compétentes sont tenues, conformément à l’article 97 de la directive 2013/36, de mettre en place un processus de contrôle et d’évaluation prudentiels (Supervisory Review and Evaluation Process, SREP), afin notamment de déterminer « si les dispositions, stratégies, processus et mécanismes mis en œuvre par les établissements et les fonds propres et liquidités qu’ils détiennent assurent une gestion et une couverture saines de leurs risques ».

7

De plus, conformément à l’article 107, paragraphe 3, de la directive 2013/36, l’Autorité bancaire européenne (ABE), instituée par le règlement (UE) no 1093/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne), modifiant la décision no°716/2009/CE et abrogeant la décision 2009/78/CE de la Commission (JO 2010, L 331, p. 12), a établi le 19 décembre 2014 les orientations sur les procédures et les méthodologies communes à appliquer dans le cadre du SREP (ABE/GL/2014/13).

8

Le mécanisme de résolution unique (qui relève du deuxième pilier mentionné au point 1 ci-dessus), tel qu’instauré par le règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1), prévoit la création d’un fonds de résolution unique auquel doivent contribuer les établissements de crédit. En outre, fait également partie du cadre juridique pertinent la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36 et les règlements du Parlement européen et du Conseil no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190). Cette directive prévoit un régime spécifique de prévention et de gestion des défaillances bancaires. Elle impose notamment la création, dans chaque État membre, d’un dispositif destiné à financer la résolution au plan national, à savoir le fonds de résolution national, auquel doivent contribuer les établissements de crédit de l’État membre concerné.

9

Le troisième pilier de l’union bancaire (voir point 1 ci-dessus), à savoir la création d’un système européen de garantie des dépôts, n’est pas encore achevé. A néanmoins été adoptée la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil, du 16 avril 2014, relative aux systèmes de garantie des dépôts (JO 2014, L 173, p. 149), qui vise à renforcer la protection des déposants en instaurant un système de garantie préfinancé dans chaque État membre. Ce système assure à chaque déposant que son épargne sera intégralement préservée à concurrence d’un montant maximal de 100000 euros.

10

En ce qui concerne le financement du fonds de résolution unique et des systèmes de garantie des dépôts instaurés dans le cadre des deuxième et troisième piliers, il importe de souligner que les cotisations que les établissements de crédit sont tenus de verser au fonds de résolution unique et au système de garantie des dépôts peuvent être payées soit par le biais d’un versement immédiat, soit par le biais d’un engagement de paiement irrévocable (ci-après l’« EPI »).

11

L’article 70, paragraphe 3, du règlement no 806/2014 prévoit ainsi que les établissements de crédit qui choisissent de cotiser en recourant à un EPI prennent l’engagement de verser le montant de la contribution au fonds de résolution unique et au système de garantie des dépôts à la première demande.

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