Regina v Secretary of State for Employment, ex parte Nicole Seymour-Smith and Laura Perez.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1999:60
Date09 February 1999
Celex Number61997CJ0167
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-167/97
EUR-Lex - 61997J0167 - FR 61997J0167

Arrêt de la Cour du 9 février 1999. - Regina contre Secretary of State for Employment, ex parte Nicole Seymour-Smith et Laura Perez. - Demande de décision préjudicielle: House of Lords - Royaume-Uni. - Travailleurs masculins et féminins - Egalité de rémunération - Egalité de traitement - Indemnité pour licenciement abusif - Notion de rémunération - Droit du travailleur de ne pas être licencié abusivement - Inclusion dans le champ d'application de l'article 119 du traité CE ou de la directive 76/207/CEE - Critère juridique pour établir si une mesure nationale constitue une discrimination indirecte au sens de l'article 119 du traité - Justification objective. - Affaire C-167/97.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-00623


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

1 Politique sociale - Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Égalité de rémunération - Rémunération - Notion - Indemnité pour licenciement abusif - Inclusion

(Traité CE, art. 119)

2 Politique sociale - Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Égalité de rémunération - Article 119 du traité - Égalité de traitement dans l'accès à l'emploi et les conditions de travail - Directive 76/207 - Champs d'application respectifs

(Traité CE, art. 119; directive du Conseil 76/207)

3 Politique sociale - Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Égalité de rémunération - Mesure nationale comportant une discrimination indirecte - Appréciation par le juge national - Critères - Preuve d'une justification objective incombant à l'État membre

(Traité CE, art. 119)

Sommaire

1 Le dédommagement octroyé en vertu d'une décision de justice en cas de violation du droit de ne pas être licencié de façon abusive constitue une rémunération au sens de l'article 119 du traité. Cette indemnisation vise notamment à accorder au travailleur ce qu'il aurait dû percevoir si l'employeur n'avait pas illégalement mis fin à la relation de travail.

Il s'ensuit que l'indemnisation pour licenciement abusif est versée au travailleur en raison de l'emploi qu'il a occupé et qu'il aurait continué à occuper en l'absence d'un licenciement abusif. Cette indemnisation relève donc de la notion de rémunération au sens de l'article 119 du traité.

2 Les conditions qui déterminent si un travailleur a droit, en cas de licenciement abusif, à obtenir un dédommagement relèvent de l'article 119 du traité. En revanche, les conditions déterminant si un travailleur a droit, en cas de licenciement abusif, à obtenir sa réintégration ou son rengagement relèvent de la directive 76/207, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail.

3 Pour établir si une règle adoptée par un État membre, selon laquelle la protection contre les licenciements abusifs ne s'applique qu'aux salariés ayant travaillé pendant une période minimale de deux ans, affecte différemment les hommes et les femmes dans une mesure telle qu'elle équivaut à une discrimination indirecte au sens de l'article 119 du traité, le juge national, à qui il appartient de déterminer, en tenant compte de toutes les circonstances juridiques et factuelles pertinentes, la date à laquelle il convient d'apprécier la légalité d'une telle règle, doit vérifier si les données statistiques disponibles indiquent qu'un pourcentage considérablement plus faible de travailleurs féminins que de travailleurs masculins est en mesure de remplir la condition imposée par ladite règle. Si tel est le cas, il y a discrimination indirecte fondée sur le sexe, à moins que ladite règle ne soit justifiée par des facteurs objectifs et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe.

A ce dernier égard, il incombe à l'État membre, en sa qualité d'auteur de la règle présumée discriminatoire, de faire apparaître que ladite règle répond à un objectif légitime de sa politique sociale, que ledit objectif est étranger à toute discrimination fondée sur le sexe et qu'il pouvait raisonnablement estimer que les moyens choisis étaient aptes à la réalisation de cet objectif. De simples affirmations générales concernant l'aptitude d'une mesure déterminée à promouvoir l'embauche ne suffisent pas pour faire apparaître que l'objectif de ladite règle est étranger à toute discrimination fondée sur le sexe ni à fournir des éléments permettant de conclure que ladite mesure est de nature à contribuer à la réalisation de cet objectif.

Parties

Dans l'affaire C-167/97,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE, par la House of Lords (Royaume-Uni) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Regina

et

Secretary of State for Employment,

ex parte: Nicole Seymour-Smith et Laura Perez,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 119 du traité CE, ainsi que de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40),

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, P. J. G. Kapteyn, J.-P. Puissochet, G. Hirsch et P. Jann, présidents de chambre, G. F. Mancini (rapporteur), J. C. Moitinho de Almeida, C. Gulmann, J. L. Murray, D. A. O. Edward, H. Ragnemalm, L. Sevón, M. Wathelet, R. Schintgen et K. M. Ioannou, juges,

avocat général: M. G. Cosmas,

greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour Mmes Seymour-Smith et Perez, par MM. Robin Allen, QC, et Peter Duffy, QC, mandatés par Mme Gay Moon, solicitor,

- pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme Lindsey Nicoll, du Treasury Solicitor's Department, en qualité d'agent, assistée de MM. Patrick Elias, QC, et Nicholas Paines, QC,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. Christopher Docksey et Mme Marie Wolfcarius, membres du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Mmes Seymour-Smith et Perez, représentées par MM. Robin Allen et Peter Duffy, mandatés par Mme Gay Moon, du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par Mme Stephanie Ridley, du Treasury Solicitor's Department, en qualité d'agent, assistée de M. Nicholas Paines, et de la Commission, représentée par M. Christopher Docksey et Mme Marie Wolfcarius, à l'audience de 12 mai 1998,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 14 juillet 1998,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par ordonnance du 13 mars 1997, parvenue à la Cour le 2 mai suivant, la House of Lords a posé, en application de l'article 177 du traité CE, cinq questions portant sur l'interprétation de l'article 119 du traité CE, ainsi que de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40).

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'une requête en «judicial review» (contrôle juridictionnel de légalité), introduite devant la High Court of Justice par Mmes Seymour-Smith et Perez au sujet de l'Unfair Dismissal (Variation of Qualifying Period) Order 1985 (ordonnance portant modification de la durée d'emploi requise pour bénéficier de la protection contre le licenciement abusif, S I 1985, n_ 782, ci-après l'«ordonnance de 1985»), modifiant l'article 54 de l'Employment Protection (Consolidation) Act 1978 (loi consolidée sur la protection de l'emploi, ci-après la «loi de 1978»).

La législation nationale

3 L'article 54 de la loi de 1978 prévoit que tout salarié auquel cette disposition s'applique a le droit de ne pas être licencié de façon abusive par son employeur. Une disposition analogue figure à l'article 94 de l'Employment Rights Act 1996 (loi sur les droits d'emploi, ci-après la «loi de 1996»), qui n'était pas en vigueur à l'époque des faits au principal.

4 Avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance de 1985, les salariés bénéficiaient d'une protection contre le licenciement abusif en vertu de l'article 54 de la loi de 1978 si, à la date effective de cessation de la relation de travail, ils avaient travaillé de façon continue pendant au moins un an pour un employeur ayant au moins vingt salariés. En vertu de l'article 64, paragraphe 1, de la loi de 1978, tel que modifié par l'ordonnance de 1985, l'article 54 ne s'appliquait pas au licenciement d'un salarié si ce dernier n'avait pas été employé de façon continue pendant une période minimale de deux ans prenant fin à la date effective du licenciement (ci-après la «règle litigieuse»). L'article 108, paragraphe 1, de la loi de 1996 contient des dispositions analogues à celles de la règle litigieuse.

5 Conformément à l'article 68, paragraphe 1, de la loi de 1978, lorsqu'un Industrial Tribunal constate le bien-fondé d'une demande concernant un licenciement abusif, il indique à la demanderesse les mesures qui peuvent être prises, à savoir sa réintégration ou son rengagement, et les circonstances dans lesquelles elles peuvent être prises et lui demande si elle souhaite que l'Industrial Tribunal prenne une telle mesure.

6 En vertu du paragraphe 2 de cette même disposition, si, dans le cadre d'une demande concernant un licenciement abusif, l'Industrial Tribunal constate le bien-fondé de la requête, mais qu'aucune mesure de réintégration ou de rengagement ne peut être prononcée, il accorde un dédommagement pour licenciement abusif.

7 Le dédommagement octroyé pour licenciement abusif se compose de deux éléments, à savoir...

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