Friedhelm Quiller y Johann Heusmann contra Consejo de la Unión Europea y Comisión de las Comunidades Europeas.

JurisdictionEuropean Union
CourtGeneral Court (European Union)
Date09 December 1997
EUR-Lex - 61994A0195 - FR 61994A0195

Arrêt du Tribunal de première instance (première chambre élargie) du 9 décembre 1997. - Friedhelm Quiller et Johann Heusmann contre Conseil de l'Union européenne et Commission des Communautés européennes. - Recours en indemnité - Responsabilité extracontractuelle - Lait - Prélèvement supplémentaire - Quantité de référence - Règlement (CEE) nº 2055/93 - Indemnisation des producteurs - Prescription. - Affaires jointes T-195/94 et T-202/94.

Recueil de jurisprudence 1997 page II-02247


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

1 Responsabilité non contractuelle - Conditions - Acte normatif impliquant des choix de politique économique - Violation suffisamment caractérisée d'une règle supérieure de droit protégeant les particuliers - Préjudice anormal et spécial

(Traité CE, art. 215, alinéa 2)

2 Responsabilité non contractuelle - Conditions - Acte normatif impliquant des choix de politique économique - Violation suffisamment caractérisée d'une règle supérieure de droit protégeant les particuliers - Prélèvement supplémentaire sur le lait - Producteurs ayant repris une exploitation grevée d'un engagement de non-commercialisation et privés, en vertu d'une règle anticumul illégale, de toute quantité de référence spécifique - Principe de protection de la confiance légitime - Violation - Responsabilité engagée

(Traité CE, art. 215, alinéa 2; règlements du Conseil n_s 1078/77, 857/84 et 764/89)

3 Recours en indemnité - Délai de prescription - Point de départ - Responsabilité du fait de la règle anticumul prévue par le règlement n_ 857/84 et comportant la non-attribution d'une quantité de référence spécifique aux producteurs de lait ayant repris une exploitation grevée d'un engagement de non-commercialisation - Date à prendre en considération

[Traité CE, art. 178 et 215; statut (CE) de la Cour de justice, art. 43; règlements du Conseil n_s 1078/77, 857/84 et 764/89]

Sommaire

4 La responsabilité extracontractuelle de la Communauté du fait des dommages causés par les institutions, prévue à l'article 215, deuxième alinéa, du traité, ne peut être engagée que si un ensemble de conditions, en ce qui concerne l'illégalité du comportement reproché, la réalité du dommage et l'existence d'un lien de causalité entre le comportement illégal et le préjudice invoqué, est réuni. En matière de responsabilité du fait d'actes de nature normative, le comportement reproché à la Communauté doit, plus particulièrement, constituer une violation d'une règle supérieure de droit protégeant les particuliers. Si l'institution a adopté l'acte dans l'exercice d'un large pouvoir d'appréciation, comme c'est le cas en matière de politique agricole commune, cette violation doit en plus être suffisamment caractérisée. On est en présence d'une telle violation quand les institutions méconnaissent de façon manifeste et grave les limites de leur pouvoir d'appréciation sans faire état d'un intérêt public supérieur, une telle méconnaissance existant lorsque le législateur communautaire omet de prendre en considération une catégorie nettement distincte d'opérateurs économiques, particulièrement si la mesure prise est imprévisible et dépasse les limites des risques économiques normaux.

5 Les conditions requises pour engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté sont remplies en ce qui concerne la règle anticumul qu'énonce l'article 3 bis, paragraphe 1, second tiret, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 764/89, portant règles générales pour l'application du prélèvement supplémentaire sur le lait, et en vertu de laquelle les producteurs ayant repris une exploitation grevée d'un engagement de non-commercialisation au titre du règlement n_ 1078/77 ne peuvent bénéficier d'une quantité de référence spécifique, visée par le règlement n_ 764/89, que s'ils n'ont pas reçu précédemment, pour un autre terrain non soumis à un engagement de non-commercialisation ou de reconversion, une quantité de référence en application de l'article 2 du règlement n_ 857/84.

La disposition en cause viole, en effet, de façon suffisamment caractérisée le principe de protection de la confiance légitime, qui constitue une règle supérieure de droit protégeant les particuliers. Plus particulièrement, le législateur communautaire a, d'une part, omis de prendre en considération une catégorie nettement distincte d'opérateurs économiques, dès lors que la situation des producteurs privés de toute quantité de référence spécifique, suite à la reprise d'exploitations grevées d'engagements souscrits dans le cadre du règlement n_ 1078/77, était distincte de celle des producteurs ayant souscrit directement au régime prévu par ce règlement, et, d'autre part, pris une mesure imprévisible dépassant les limites des risques économiques normaux, étant donné que les producteurs concernés pouvaient placer une confiance légitime dans la reprise de la commercialisation à la fin des engagements repris et que la nature et la durée de la privation de toute quantité de référence spécifique qui leur était imposée sont des éléments constitutifs d'un sacrifice d'une importance majeure.

6 Le délai de prescription frappant les actions dirigées contre la Communauté en matière de responsabilité non contractuelle, prévu à l'article 43 du statut de la Cour, ne saurait commencer à courir avant que ne soient réunies toutes les conditions auxquelles se trouve subordonnée l'obligation de réparation et, notamment, s'agissant des cas où la responsabilité découle d'un acte normatif, avant que les effets dommageables de cet acte ne se soient produits. S'agissant des préjudices subis par les producteurs de lait ou de produits laitiers qui, suite à la reprise d'exploitations grevées d'engagements de non-commercialisation au titre du règlement n_ 1078/77, n'ont pu bénéficier, compte tenu de la règle anticumul énoncée par l'article 3 bis, paragraphe 1, second tiret, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 764/89, d'aucune quantité de référence spécifique, visée par le règlement n_ 764/89, le délai de prescription a commencé à courir le jour où, après expiration des engagements de non-commercialisation dans lesquels les producteurs en cause avaient été subrogés, ceux-ci auraient pu livrer du lait produit dans les exploitations reprises si une quantité de référence ne leur avait pas été refusée en vertu du règlement n_ 857/84, à savoir à la date d'application de ce dernier règlement, dans sa rédaction initiale, à leur égard, étant précisé que l'annulation ou la constatation de l'invalidité du règlement ne constituait pas un préalable nécessaire au dédommagement.

Lesdits préjudices n'étant pas, par ailleurs, des préjudices causés instantanément, mais s'étant poursuivis quotidiennement pendant une certaine période, du fait du maintien en vigueur d'un acte illégal, la prescription de l'article 43 du statut s'applique, en fonction de la date de l'acte interruptif, à la période antérieure de plus de cinq ans à cette date, sans affecter les droits nés au cours des périodes postérieures.

Parties

Dans les affaires jointes T-195/94 et T-202/94,

Friedhelm Quiller, demeurant à Lienen (Allemagne),

Johann Heusmann, demeurant à Loxstedt (Allemagne),

représentés par Mes Bernd Meisterernst, Mechtild Düsing, Dietrich Manstetten, Frank Schulze et Winfried Haneklaus, avocats à Münster, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Mes Lambert Dupong et Guy Konsbrück, 14 A, rue des Bains,

parties requérantes,

contre

Conseil de l'Union européenne, représenté par M. Arthur Brautigam, conseiller juridique, en qualité d'agent, assisté de Mes Hans-Jürgen Rabe et Georg M. Berrisch, avocats à Hambourg et à Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Alessandro Morbilli, directeur général de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d'investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

et

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Dierk Booß, conseiller juridique, en qualité d'agent, assisté de Mes Hans-Jürgen Rabe et Georg M. Berrisch, avocats à Hambourg et à Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

parties défenderesses,

ayant pour objet une demande d'indemnisation, en application des articles 178 et 215, deuxième alinéa, du traité CE, des préjudices subis par les requérants du fait qu'ils ont été empêchés de commercialiser du lait en application du règlement (CEE) n_ 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, portant règles générales pour l'application du prélèvement visé à l'article 5 quater du règlement (CEE) n_ 804/68 dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 90, p. 13), tel que complété par le règlement (CEE) n_ 1371/84 de la Commission, du 16 mai 1984 (JO L 132, p. 11), puis modifié par le règlement (CEE) n_ 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989 (JO L 84, p. 2),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

(première chambre élargie),

composé de MM. A. Saggio, président, C. P. Briët, A. Kalogeropoulos, Mme V. Tiili et M. R. M. Moura Ramos, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 13 mars 1997,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

Cadre juridique

1 En 1977, afin de réduire un excédent de production de lait dans la Communauté, le Conseil a adopté le règlement (CEE) n_ 1078/77, du 17 mai 1977, instituant un régime de primes de non-commercialisation du lait et des produits laitiers et de reconversion de troupeaux bovins à orientation laitière (JO L 131, p. 1, ci-après «règlement n_ 1078/77»). Ce règlement offrait une prime aux producteurs en contrepartie de la souscription d'un engagement de non-commercialisation de lait ou de reconversion des troupeaux pendant une période de cinq ans.

2 En 1984, pour faire face à...

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