Spetsializirana prokuratura v Nikolay Boykov Kolev and Others.
Jurisdiction | European Union |
Court | Court of Justice (European Union) |
ECLI | ECLI:EU:C:2020:92 |
Date | 12 February 2020 |
Docket Number | C-704/18 |
Celex Number | 62018CJ0704 |
ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
12 février 2020 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Article 267 TFUE – Mise en œuvre d’une décision préjudicielle de la Cour – Pouvoir d’injonction d’une juridiction supérieure quant aux modalités de mise en œuvre – Autonomie procédurale des États membres – Principe d’effectivité – Respect des droits de la défense »
Dans l’affaire C‑704/18,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie), par décision du 30 octobre 2018, parvenue à la Cour le 12 novembre 2018, dans la procédure pénale contre
Nikolay Kolev e.a.,
LA COUR (cinquième chambre),
composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. I. Jarukaitis, E. Juhász, M. Ilešič et C. Lycourgos (rapporteur), juges,
avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– |
pour la Commission européenne, par MM. F. Erlbacher et R. Troosters ainsi que par Mme Y. Marinova, en qualité d’agents, |
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 |
La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 267 TFUE. |
2 |
Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée contre M. Nikolay Kolev e.a. (ci-après les « personnes poursuivies »), huit personnes accusées d’avoir commis diverses infractions pénales en tant qu’agents des douanes bulgares. |
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
3 |
L’article 6 de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales (JO 2012, L 142, p. 1), intitulé « Droit d’être informé de l’accusation portée contre soi », dispose, à son paragraphe 3 : « Les États membres veillent à ce que des informations détaillées sur l’accusation, y compris sur la nature et la qualification juridique de l’infraction pénale, ainsi que sur la nature de la participation de la personne poursuivie, soient communiquées au plus tard au moment où la juridiction est appelée à se prononcer sur le bien-fondé de l’accusation. » |
4 |
L’article 7 de cette directive, intitulé « Droit d’accès aux pièces du dossier », prévoit, à son paragraphe 3 : « Sans préjudice du paragraphe 1, l’accès aux pièces visé au paragraphe 2 est accordé en temps utile pour permettre l’exercice effectif des droits de la défense et, au plus tard, lorsqu’une juridiction est appelée à se prononcer sur le bien-fondé de l’accusation. Si les autorités compétentes entrent en possession d’autres preuves matérielles, elles autorisent l’accès à ces preuves matérielles en temps utile pour qu’elles puissent être prises en considération. » |
Le droit bulgare
5 |
En vertu de l’article 249 du Nakazatelno protsesualen kodeks (code de procédure pénale), une juridiction peut clôturer la phase juridictionnelle de la procédure pénale et renvoyer l’affaire au procureur pour remédier aux vices de forme portant sur la phase préliminaire de cette procédure, relatifs à l’information de la personne poursuivie aux fins de l’accusation portée contre elle ainsi qu’à l’octroi d’un accès aux pièces du dossier. |
6 |
Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, la réglementation nationale applicable aux faits au principal s’oppose à ce qu’une décision juridictionnelle, adoptée sur le fondement de l’article 249 du code de procédure pénale, puisse être modifiée après son adoption. |
7 |
Les articles 368 et 369 du code de procédure pénale, dans leur version en vigueur à la date des faits au principal, prévoyaient un mécanisme permettant aux personnes faisant l’objet de poursuites pénales d’obtenir, en raison de violations de forme substantielles de la part du procureur, la clôture définitive de la procédure pénale dans son ensemble, c’est-à-dire non seulement la phase juridictionnelle, mais également la phase préliminaire de cette procédure. |
8 |
En vertu de l’article 369 du code de procédure pénale, sur demande de la personne poursuivie, le juge, après avoir constaté que la phase préliminaire de la procédure pénale n’a pas été clôturée dans un délai de deux ans à compter de l’accusation, devait renvoyer l’affaire au procureur en lui impartissant un délai pour terminer l’instruction de l’affaire et mener à terme cette phase préliminaire soit en mettant fin aux poursuites, soit en portant l’affaire en jugement. Dans ce dernier cas, le procureur disposait d’un délai supplémentaire pour établir un réquisitoire et le soumettre au juge. |
9 |
Dans l’hypothèse où le procureur ne respectait pas ces nouveaux délais, le juge devait se saisir de l’affaire et clôturer la procédure pénale. Si, en revanche, le procureur mettait fin à la phase préliminaire de la procédure pénale et soumettait un réquisitoire au juge dans les délais impartis, ce dernier examinait la régularité de la procédure et s’assurait en particulier de l’absence de violations des formes substantielles. S’il estimait que de telles violations avaient été commises, le juge renvoyait une nouvelle fois l’affaire au procureur, en lui accordant un délai additionnel pour remédier aux violations constatées. Si le procureur ne se conformait pas à ce dernier délai, s’il ne remédiait pas auxdites violations ou s’il en commettait de nouvelles, le juge devait clôturer la procédure pénale. |
Le litige au principal et la question préjudicielle
10 |
Les personnes poursuivies font l’objet, depuis l’année 2012, de poursuites pénales pour avoir participé, en leur qualité d’agents des douanes bulgares, à une organisation criminelle. La juridiction de renvoi, le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie), ayant estimé que les actes d’accusation n’avaient pas été adoptés par l’organe compétent et qu’ils comportaient des violations de forme, l’affaire a été renvoyée au procureur compétent du parquet spécialisé pour que celui-ci dresse de nouveaux actes d’accusation à l’égard des personnes poursuivies. La procédure a cependant été interrompue et les délais impartis pour l’enquête ont été prolongés à de multiples reprises. |
11 |
Au cours de l’année 2014, la juridiction de renvoi a été saisie d’une demande visant à mettre en œuvre la procédure prévue aux articles 368 et 369 du code de procédure pénale. Conformément à ces dispositions, cette juridiction a d’abord renvoyé l’affaire au procureur, en lui impartissant un délai pour terminer l’instruction de l’affaire, dresser de nouveaux actes d’accusation, communiquer ceux-ci ainsi que les éléments de l’enquête aux personnes poursuivies et mettre fin à la phase préliminaire de la procédure pénale, le procureur disposant ensuite d’un délai supplémentaire pour établir un réquisitoire et soumettre celui-ci au juge. |
12 |
À la suite de l’établissement de nouveaux actes d’accusation par le procureur et de la présentation d’un réquisitoire dans les délais impartis, ladite juridiction a constaté de nouvelles irrégularités procédurales au détriment des personnes poursuivies et a renvoyé l’affaire une nouvelle fois devant le procureur. |
13 |
Par ordonnance du 22 mai 2015, la même juridiction a constaté que le procureur n’avait pas remédié aux violations des formes substantielles précédemment constatées et en avait commis de nouvelles. Elle a donc considéré que les conditions de la clôture de la procédure pénale étaient réunies et que cette clôture était dès lors de droit pour lesdites personnes. |
14 |
Cependant, malgré ces constatations, la juridiction de renvoi n’a pas ordonné la clôture de la procédure pénale, conformément aux articles 368 et 369 du code de procédure pénale, mais, ainsi que cela ressort de la décision de renvoi dans la présente affaire, a, sur le fondement de l’article 249 de ce code, décidé de clôturer la phase juridictionnelle et de renvoyer une nouvelle fois l’affaire au procureur, afin que celui-ci remédie aux vices de forme relatifs, d’une part, à l’information des personnes poursuivies à propos de l’accusation portée contre elles et, d’autre part, à l’octroi d’un accès aux pièces du dossier. |
15 |
La juridiction saisie de l’appel interjeté contre cette ordonnance du 22 mai 2015 a considéré, par ordonnance du 12 octobre 2015, que la juridiction de renvoi aurait dû procéder à la clôture de la procédure pénale, conformément aux articles 368 et 369 du code de procédure pénale, et a renvoyé l’affaire devant cette juridiction. |
16 |
Par décision du 11 novembre 2015, la juridiction de renvoi a saisi la Cour d’une première demande de décision préjudicielle qui a donné lieu à l’arrêt du 5 juin 2018, Kolev e.a. (C‑612/15, ci-après l’« arrêt Kolev , EU:C:2018:392). |
17 |
Au point 1 du dispositif de cet arrêt, la Cour a dit pour droit que l’article 325, paragraphe 1, TFUE s’oppose à une réglementation nationale instituant une procédure de clôture de la procédure pénale, telle que celle prévue aux articles 368 et 369 du code de procédure pénale, pour autant que cette réglementation s’applique dans des procédures ouvertes à l’égard de cas de fraude grave ou d’autre activité illégale grave portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne en matière douanière. Elle a ajouté, au même point, qu’il appartient au juge national de donner plein effet à l’article 325, paragraphe 1, TFUE en laissant ladite réglementation, au besoin, inappliquée, tout en veillant à assurer le respect des droits fondamentaux des personnes poursuivies, précisant, au point 70 dudit arrêt, que ces droits comprennent le droit de ces... |
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