Arrêts nº T-283/03 of Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes, September 13, 2005

Resolution DateSeptember 13, 2005
Issuing OrganizationTribunal de Première Instance des Communautés Européennes
Decision NumberT-283/03

Fonctionnaires - Indemnité de dépaysement – Article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut – Droits de la défense – Article 26 du statut – Erreur manifeste d’appréciation – Notion de résidence habituelle – Services effectués pour un autre État

Dans l’affaire T-283/03,

Lucía Recalde Langarica, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes R. García-Gallardo Gil-Fournier et D. Domínguez Pérez, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité d’agent, assisté de Mes J. Rivas Andrés et J. Gutiérrez Gisbert, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation d’une décision de la Commission retirant à la requérante le bénéfice de l’indemnité de dépaysement,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCEDES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, R. García-Valdecasas et Mme V. Trstenjak, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 30 novembre 2004,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1 L’article 69 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») prévoit notamment que « [l]’ indemnité de dépaysement est égale à 16 % du total du traitement de base et de l’allocation de foyer ainsi que de l’allocation pour enfant à charge auxquelles le fonctionnaire a droit ».

2 L’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut dispose que cette indemnité est accordée au fonctionnaire :

qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation

et

qui n’a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire européen dudit État. Pour l’application de cette disposition, les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale ne sont pas à prendre en considération

.

3 Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut, « [l]e fonctionnaire qui, n’ayant pas et n’ayant jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation, ne remplit pas les conditions prévues au paragraphe 1, a droit à une indemnité d’expatriation égale à un quart de l’indemnité de dépaysement ».

4 Selon l’article 5, paragraphe 1, premier alinéa, de la même annexe, dans sa version applicable à l’époque des faits en cause, l’indemnité d’installation « est due au fonctionnaire titulaire qui remplit les conditions pour bénéficier de l’indemnité de dépaysement ou qui justifie avoir été tenu de changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut ».

5 L’article 10, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut prévoit que « [l]e fonctionnaire qui justifie être tenu de changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut a droit, pour une durée déterminée au paragraphe 2, à une indemnité journalière […] ».

Faits à l’origine du litige

6 La requérante, de nationalité espagnole, est arrivée à Bruxelles (Belgique) en octobre 1988 afin de poursuivre des études de troisième cycle à l’Institut d’études européennes de l’Université libre de Bruxelles (ULB). Ces études s’étendaient sur deux années académiques, soit jusqu’en juin 1990. Entre le 1er octobre 1989 et le 28 février 1990, elle a effectué un stage à la Commission. Le 1er avril 1990, elle a signé un « contrat d’études » avec la société espagnole Interbask SA (ci-après « Interbask »). Elle a travaillé pour cette société, en dernier lieu dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, jusqu’au 21 août 1995.

7 Le 1er septembre 1995, la requérante est entrée en fonctions à la Commission, à Bruxelles, en tant que fonctionnaire de grade A 7.

8 Dans le formulaire ad hoc qu’elle a complété et signé le même jour, elle a déclaré que sa résidence antérieure se situait à Vitoria (Espagne). Sur la base de cette déclaration, la Commission lui a octroyé, à titre provisoire, le bénéfice de l’indemnité de dépaysement et de l’indemnité journalière.

9 Le 4 septembre 1995, la Commission a décidé, à titre provisoire, de retirer à la requérante le bénéfice de ces indemnités et de lui accorder l’indemnité d’expatriation.

10 Par lettre du 5 octobre 1995, la requérante a communiqué au chef de l’unité « gestion des droits individuels » de la direction « droits et obligations » de la direction générale « Personnel et administration » de la Commission, M. Rijssenbeek, une liste de pièces se trouvant dans son dossier individuel ainsi que différents documents, qui tous démontreraient que son « lieu de résidence permanente » et son « centre d’intérêts » se trouvaient à Vitoria.

11 Le 25 octobre 1995, M. Rijssenbeek a adressé à la requérante une note dans laquelle il indiquait que :

Le 1er septembre 1995, vos droits statutaires ont été fixés provisoirement en l’absence de votre dossier personnel et donc sur base du formulaire ad hoc que vous avez complété ce même jour. À l’arrivée de votre dossier, le 4 septembre, il a dû être constaté que vous avez omis d’indiquer dans ledit formulaire que vous aviez travaillé et résidé en Belgique depuis plusieurs années auparavant. Ceci explique le changement de droits communiqué dont vous vous étonnez dans votre lettre du 5 octobre 1995.

En examinant votre dossier, il faut en effet constater que vous résidez à Bruxelles depuis 1988 pour y suivre des études et pour des raisons professionnelles. En voici les détails :

– 10.1988 - 6.1990 ULB

– 1.10.1989 - 28.2.1990 Stage à la DG XVI

– 1.4.1990 - 30.9.1990 Interbask, contrat d’études

– 1.10.1990 - 21.8.1995 Idem, plusieurs contrats successifs

Le 6 décembre 1993, vous avez communiqué par fax à l’unité recrutement que votre adresse à Bruxelles est située au 230, avenue Molière à 1060 Bruxelles (n° tél. [...]). Cette même adresse figure d’ailleurs à l’annuaire téléphonique de Belgacom clôturé le 13 décembre 1991 et dans celui de l’année précédente votre adresse était rue J. d’Ardenne, 50 à 1050 Bruxelles (n° tél. [...]).

Compte tenu de ce qui précède et en application des dispositions générales d’exécution de l’article 7, paragraphe 3, de l’annexe VII du statut, je suis au regret de devoir vous informer que la décision du 4 septembre, fixant votre lieu de recrutement à Bruxelles, doit être maintenue.

D’autre part, ayant résidé en Belgique pendant la période de référence qui se situe, selon l’article 4 de l’annexe VII du statut, entre le 1er mars 1990 et le 1er mars 1995, vous ne pouvez prétendre à l’indemnité de dépaysement. De ce fait, l’indemnité d’expatriation vous est octroyée.

12 Le 12 janvier 1996, la requérante a introduit une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision de la Commission du 4 septembre 1995. Elle expliquait, notamment, qu’elle résidait officiellement à Vitoria et y avait son centre habituel de travail, et qu’elle n’avait conservé un appartement à Bruxelles que pour des motifs professionnels, n’occupant celui-ci que lorsqu’elle était envoyée en mission dans cette ville par Interbask. La requérante estimait que la Commission devait, dès lors, retenir Vitoria comme lieu de recrutement et lui octroyer, à compter de la date de son entrée en fonctions, l’indemnité de dépaysement ainsi que tous les autres droits statutaires découlant de cette situation.

13 Par note du 19 mars 1996, la Commission a invité la requérante à lui fournir des renseignements sur les fiches de salaire qui lui étaient délivrées par Interbask, et, notamment, sur les critères d’attribution des primes qui lui étaient versées en sus de son traitement et sur les modalités de remboursement de ses frais de voyage.

14 En réponse à cette demande, la requérante a communiqué à la Commission, par note du 15 avril 1996, une copie de ses dernières fiches de salaire. Elle expliquait que la prime dénommée « complément de poste » était un « ’plus’ en relation au ‘poste’ [qu’elle occupait] dans la société » et que la prime dénommée « complément journalier » était destinée à compenser le temps de travail qu’elle effectuait au-delà de 40 heures par semaine. S’agissant des frais de voyage, elle exposait que ceux-ci étaient payés à l’avance par Interbask, ou remboursés a posteriori.

15 Par note du 12 juin 1996, le directeur général de la direction générale « Personnel et administration » de la Commission, M. De Koster, a indiqué à la requérante que « [sa] situation au regard du droit à l’indemnité de dépaysement [faisait] toujours l’objet d’un examen des faits pertinents », qu’il lui accordait provisoirement ce droit « en [se] fondant sur les éléments actuellement disponibles et notamment [ses] déclarations à l’appui de [sa] réclamation, [qu’il ne pouvait] pas à ce stade mettre en doute » et qu’il poursuivait l’instruction du dossier « sur des aspects où des doutes [subsistaient] ».

16 Par note du 17 juin 1996, M. Rijssenbeek, se référant à la note précitée de M. De Koster a, « dans le but d’accélérer la procédure en cours », invité la requérante à lui transmettre une copie des contrats de bail qu’elle avait conclus pour les appartements sis au 50, rue J. d’Ardenne à Bruxelles et au 230, avenue Molière à Bruxelles ainsi que « des factures (par exemple : téléphone, eau, gaz et électricité) susceptibles de soutenir [ses] affirmations selon lesquelles [elle se trouvait] à Bruxelles lors des missions seulement ». Il lui a également demandé de lui fournir « une déclaration du consulat général d’Espagne selon laquelle un nouveau passeport valable pour cinq ans a pu être délivré malgré l’absence d’une inscription comme résidente à Bruxelles ».

17 Par décision du 24 juin 1996, notifiée à la requérante le 8 juillet 1996, l’autorité investie du pouvoir de nomination...

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