Arrêts nº T-519/09 of Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes, May 21, 2014

Resolution DateMay 21, 2014
Issuing OrganizationTribunal de Première Instance des Communautés Européennes
Decision NumberT-519/09

Concurrence – Ententes – Marché des transformateurs de puissance – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE et à l’article 53 de l’accord EEE – Accord de répartition de marché – Preuve de la distanciation de l’entente – Restriction de la concurrence – Affectation du commerce – Barrières à l’entrée – Amendes – Montant de base – Année de référence – Point 18 des lignes directrices pour le calcul du montant des amendes de 2006 – Utilisation d’une part de marché fictive sur le marché de l’EEE

Dans l’affaire T‑519/09,

Toshiba Corp., établie à Tokyo (Japon), représentée par Mme J. MacLennan, solicitor, Mes A. Schulz, J. Jourdan et P. Berghe, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par M. J. Bourke et Mme K. Mojzesowicz, puis par Mme Mojzesowicz et M. F. Ronkes Agerbeek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, à titre principal, une demande d’annulation de la décision de la Commission du 7 octobre 2009 relative à une procédure d’application de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39.129 – Transformateurs de puissance), et, à titre subsidiaire, une demande de réduction du montant de l’amende infligée à la requérante dans cette décision,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz (rapporteur), président, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias, juges,

greffier : Mme T. Weiler,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 avril 2013,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige et décision attaquée

1 Le secteur concerné en l’espèce est celui des transformateurs de puissance, des autotransformateurs et des bobines en dérivation avec une gamme de tensions supérieures ou égales à 380 kV. Un transformateur de puissance est un composant électrique essentiel dont la fonction est de réduire ou d’augmenter la tension dans un circuit électrique. Ces transformateurs sont vendus individuellement ou comme élément d’une sous-station électrique clés en main.

2 La requérante, Toshiba Corp., est une société japonaise qui a essentiellement trois domaines clés d’activités : les produits numériques, les appareils et composants électroniques et les systèmes d’infrastructure.

3 S’agissant de l’activité de la requérante dans le secteur des transformateurs de puissance pendant la période pertinente pour le présent litige, c’est-à-dire entre le 9 juin 1999 et le 15 mai 2003, il convient de distinguer deux phases : entre le 9 juin 1999 et le 30 septembre 2002, la requérante était active dans ce secteur par le biais de sa filiale Power Systems Co., plus spécifiquement, par la division « Systèmes de transport et de distribution » de cette filiale. À partir du 1er octobre 2002, l’activité de la requérante s’est faite par l’intermédiaire de TM T & D, une entreprise commune entre elle et Mitsubishi Electric (ci-après « Melco »), dans laquelle ces deux entreprises avaient réuni leur production de transformateurs de puissance. Entre le 1er octobre 2002 et le 15 mai 2003, c’était donc TM T & D qui était responsable de la production et de la vente de transformateurs de puissance.

4 Pendant la période allant de 2004 à 2008, la Commission des Communautés européennes a reçu une série de demandes successives de clémence concernant l’existence d’une entente illicite dans le secteur des transformateurs de puissance, a procédé à des inspections dans les locaux de producteurs de transformateurs de puissance et a adressé des demandes de renseignements à des entreprises, dont la requérante.

5 Le 30 septembre 2008, la Commission a décidé d’engager une procédure concernant le marché des transformateurs de puissance.

6 La communication des griefs a été adoptée le 20 novembre 2008. La requérante y a répondu le 19 janvier 2009. L’audition s’est tenue le 17 février 2009.

7 Le 7 octobre 2009, la Commission a adopté sa décision relative à une procédure d’application de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39.129 – Transformateurs de puissance) (ci-après la « décision attaquée »), dans laquelle elle a constaté que la requérante avait enfreint l’article 81 CE et l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) et lui a imposé une amende de 13,2 millions d’euros.

8 Dans cette décision, la Commission a constaté que la requérante a participé, au moins du 9 juin 1999 au 15 mai 2003, au « gentlemen’s agreement (GA) », une entente illicite couvrant l’ensemble du territoire de l’EEE, consistant en un accord conclu oralement entre les producteurs de transformateurs de puissance européens et japonais et ayant comme objet de respecter les marchés intérieurs de chacun et de s’abstenir d’y effectuer des ventes.

9 S’agissant de l’organisation du gentlemen’s agreement, tout d’abord, la Commission a retenu que les entreprises y ayant participé étaient divisées en deux groupes, l’un européen, l’autre japonais, que chaque groupe devait nommer une entreprise secrétaire et que, tout au long de l’infraction, Siemens avait fait office de secrétaire du groupe européen et Hitachi celui du groupe japonais. Elle a également constaté que l’accord de répartition de marché avait été complété par un accord visant à notifier les appels d’offres (projets) provenant du territoire de l’autre groupe et que ces projets devaient être notifiés au secrétaire de l’autre groupe afin d’être réattribués.

10 Ensuite, la Commission a retenu que, tout au long de l’infraction visée par la décision attaquée, les membres se réunissaient une à deux fois par an, les réunions s’étant déroulées en Europe et en Asie, plus précisément à Malaga (Espagne), du 9 au 11 juin 1999, à Singapour (Singapour) le 29 mai 2000, à Barcelone (Espagne) du 29 octobre au 1er novembre 2000, à Lisbonne (Portugal) du 29 au 30 mai 2001, à Tokyo (Japon) du 18 au 19 février 2002, à Vienne (Autriche) du 26 au 27 septembre 2002 et à Zurich (Suisse) du 15 au 16 mai 2003. Selon la Commission, ces réunions servaient notamment à confirmer le gentlemen’s agreement.

11 En outre, dans la décision attaquée, la Commission a distingué le gentlemen’s agreement de deux autres accords entre les entreprises concernées. D’une part, elle a mentionné l’Aero Club Agreement (AC), un accord étant déjà arrivé à son terme en 1996 mais sur lequel l’organisation de base du gentlemen’s agreement était fondée. D’autre part, la Commission a fait référence à un accord interne (ou accord commercial interne). Ce dernier accord visait à exclure qu’une personne juridique ou une division appartenant à une des entreprises participant à cet accord n’achète des transformateurs de puissance à une personne juridique ou à une division appartenant à une autre entreprise participant à cet accord mais uniquement à une division ou à une société appartenant à sa propre entreprise. L’infraction constatée et l’amende imputée par la décision attaquée ne concernent ni l’Aero Club Agreement ni l’accord interne.

12 En application de sa communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes de 2002 (JO C 45, p. 3, ci-après la « communication sur la clémence »), la Commission a accordé l’immunité d’amende à Siemens AG et Siemens Aktiengesellschaft Österreich et une réduction de 40 % de l’amende à Fuji Electronics Holdings Co., Ltd.

13 Par ailleurs, la Commission a accordé une réduction de l’amende en dehors du champ d’application de la communication sur la clémence de 18 % à Hitachi Ltd et à Areva T & D SA.

14 Ni Melco ni TM T & D n’ont été sanctionnées par la Commission pour participation au gentlemen’s agreement.

Procédure et conclusions des parties

15 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 décembre 2009, la requérante a introduit le présent recours.

16 Le juge rapporteur étant empêché de siéger, la présente affaire a été réattribuée à un nouveau juge rapporteur, siégeant dans la troisième chambre.

17 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé, d’une part, d’ouvrir la procédure orale et, d’autre part, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure au sens de l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, d’inviter la Commission à produire un document. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti.

18 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l’audience qui s’est déroulée le 10 avril 2013.

19 Par lettre du 19 avril 2013, la requérante a demandé la réouverture de la procédure orale au motif qu’un élément avait été abordé pour la première fois pendant l’audience.

20 Par ordonnance du 8 mai 2013, le Tribunal (troisième chambre) a ordonné la réouverture de la procédure orale, conformément à l’article 62 du règlement de procédure.

21 Par lettre du 17 juin 2013, la requérante a soumis un document mentionné dans sa lettre du 19 avril 2013.

22 Par lettre du 4 juillet 2013, la Commission a soumis ses observations sur la lettre de la requérante du 19 avril 2013 et sur le document soumis par la requérante le 17 juin 2013.

23 Par décision du 9 juillet 2013, le Tribunal a clos de nouveau la procédure orale.

24 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler la décision attaquée dans la mesure où elle la concerne ;

– annuler l’amende qui lui a été infligée ;

– à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la décision attaquée serait confirmée en tout ou en partie, réduire le montant de l’amende qui lui a été infligée ;

– condamner la Commission aux dépens ;

– ordonner toute autre mesure qui peut se révéler nécessaire pour donner effet à l’arrêt du Tribunal.

25 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner la requérante aux dépens.

En droit

26 La requérante avance quatre moyens à l’appui du recours. Dans le cadre du premier moyen, elle avance que la Commission n’a pas démontré à suffisance de droit l’existence d’une entente illicite et sa participation à celle-ci. Par le deuxième moyen...

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