Arrêts nº T-680/13 of Tribunal General de la Unión Europea, July 13, 2018

Resolution DateJuly 13, 2018
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-680/13

Responsabilité non contractuelle - Politique économique et monétaire - Programme de soutien à la stabilité de Chypre - Décision du conseil des gouverneurs de la BCE relative à la fourniture de liquidités d’urgence à la suite d’une demande de la Banque centrale de Chypre - Déclarations de l’Eurogroupe des 25 mars, 12 avril, 13 mai et 13 septembre 2013 concernant Chypre - Décision 2013/236/UE - Protocole d’accord du 26 avril 2013 sur les conditions spécifiques de politique économique conclu entre Chypre et le mécanisme européen de stabilité - Compétence du Tribunal - Recevabilité - Exigences de forme - Épuisement des voies de recours internes - Violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit conférant des droits aux particuliers - Droit de propriété - Confiance légitime - Égalité de traitement

Dans l’affaire T-680/13,

Dr. K. Chrysostomides & Co. LLC, établie à Nicosie (Chypre), et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe (1), représentées par M. P. Tridimas, barrister,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. A. de Gregorio Merino, Mmes E. Dumitriu-Segnana, E. Chatziioakeimidou et E. Moro, en qualité d’agents,

Commission européenne, représentée initialement par MM. B. Smulders, J.-P. Keppenne et M. Konstantinidis, puis par MM. Keppenne, Konstantinidis et L. Flynn, en qualité d’agents,

Banque centrale européenne (BCE), représentée initialement par MM. N. Lenihan et F. Athanasiou, puis par M. P. Papapaschalis et Mme P. Senkovic et enfin par Mme M. Szablewska et M. K. Laurinavičius, en qualité d’agents, assistés de Me H.-G. Kamann, avocat,

Eurogroupe, représenté par le Conseil de l’Union européenne, représenté par M. A. de Gregorio Merino, Mmes E. Dumitriu-Segnana, E. Chatziioakeimidou et E. Moro, en qualité d’agents,

et

Union européenne, représentée par la Commission européenne, représentée initialement par MM. B. Smulders, J.-P. Keppenne et M. Konstantinidis, puis par MM. Keppenne, Konstantinidis et L. Flynn, en qualité d’agents,

parties défenderesses,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 268 TFUE et tendant à obtenir réparation du préjudice que les requérants auraient prétendument subi du fait de la décision du conseil des gouverneurs de la BCE du 21 mars 2013 relative à la fourniture de liquidités d’urgence à la suite d’une demande présentée par la Banque centrale de Chypre, des déclarations de l’Eurogroupe des 25 mars, 12 avril, 13 mai et 13 septembre 2013 concernant Chypre, de la décision 2013/236/UE du Conseil, du 25 avril 2013, adressée à Chypre, portant mesures spécifiques pour restaurer la stabilité financière et une croissance durable (JO 2013, L 141, p. 32), du protocole d’accord du 26 avril 2013 sur les conditions spécifiques de politique économique conclu entre la République de Chypre et le mécanisme européen de stabilité (MES) ainsi que d’autres actes et comportements de la Commission, du Conseil, de la BCE et de l’Eurogroupe liés à l’octroi d’une facilité d’assistance financière à la République de Chypre,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre élargie),

composé de MM. H. Kanninen (rapporteur), président, J. Schwarcz, C. Iliopoulos, L. Calvo-Sotelo Ibáñez-Martín et Mme I. Reine, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 11 septembre 2017,

rend le présent

Arrêt

  1. Antécédents du litige

    1. Traité MES

      1 Le 2 février 2012, a été conclu à Bruxelles (Belgique) le traité instituant le mécanisme européen de stabilité entre le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne, la République d’Estonie, l’Irlande, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, la République italienne, la République de Chypre, le Grand-Duché de Luxembourg, la République de Malte, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République portugaise, la République de Slovénie, la République slovaque et la République de Finlande (ci-après le « traité MES »). Ce traité est entré en vigueur le 27 septembre 2012.

      2 Le considérant 1 du traité MES est libellé comme suit :

      Le Conseil européen est convenu le 17 décembre 2010 qu’il était nécessaire que les États membres de la zone euro mettent en place un mécanisme permanent de stabilité. Le mécanisme européen de stabilité (“MES”) assumera le rôle actuellement attribué à la Facilité européenne de stabilité financière (“FESF”) et au Mécanisme européen de stabilisation financière (“MESF”) en fournissant, pour autant que de besoin, une assistance financière aux États membres de la zone euro.

      3 Conformément aux articles 1er et 2 ainsi qu’à l’article 32, paragraphe 2, du traité MES, les parties contractantes, à savoir les États membres dont la monnaie est l’euro (ci-après les « EMME »), instituent entre elles une institution financière internationale, le mécanisme européen de stabilité (MES), qui possède la personnalité juridique.

      4 L’article 3 du traité MES décrit l’objectif du MES comme suit :

      Le MES a pour but de mobiliser des ressources financières et de fournir, sous une stricte conditionnalité adaptée à l’instrument d’assistance financière choisi, un soutien à la stabilité à ses membres qui connaissent ou risquent de connaître de graves problèmes de financement, si cela est indispensable pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble et de ses États membres. À cette fin, il est autorisé à lever des fonds en émettant des instruments financiers ou en concluant des accords ou des arrangements financiers ou d’autres accords ou arrangements avec ses membres, des institutions financières ou d’autres tiers.

      5 L’article 4, paragraphes 1 et 3 et paragraphe 4, premier alinéa, du traité MES énonce :

      1. Le MES est doté d’un conseil des gouverneurs et d’un conseil d’administration, ainsi que d’un directeur général et des effectifs jugés nécessaires.

      [...]

      3. L’adoption d’une décision d’un commun accord requiert l’unanimité des membres participant au vote. Les abstentions ne font pas obstacle à l’adoption d’une décision d’un commun accord.

      4. Par dérogation au paragraphe 3, une procédure de vote d’urgence est utilisée lorsque la Commission et la [Banque centrale européenne (BCE)] considèrent toutes deux que le défaut d’adoption urgente d’une décision relative à l’octroi ou à la mise en œuvre d’une assistance financière, telle que définie aux articles 13 à 18, menacerait la soutenabilité économique et financière de la zone euro [...]

      6 L’article 5, paragraphe 3, du traité MES prévoit que « [l]e membre de la Commission […] en charge des affaires économiques et monétaires et le président de la BCE, ainsi que le président de l’Eurogroupe (s’il n’est pas lui-même président ou gouverneur), peuvent participer aux réunions du conseil des gouverneurs [du MES] en qualité d’observateurs ».

      7 L’article 6, paragraphe 2, du traité MES énonce que « [l]e membre de la Commission […] en charge des affaires économiques et monétaires et le président de la BCE peuvent chacun désigner un observateur [au conseil d’administration du MES] ».

      8 L’article 12 du traité MES définit les principes auxquels le soutien à la stabilité est soumis et prévoit, en son paragraphe 1, ce qui suit :

      Si cela est indispensable pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble et de ses États membres, le MES peut fournir à un membre du MES un soutien à la stabilité, subordonné à une stricte conditionnalité adaptée à l’instrument d’assistance financière choisi. Cette conditionnalité peut prendre la forme, notamment, d’un programme d’ajustement macroéconomique ou de l’obligation de continuer à respecter des conditions d’éligibilité préétablies.

      9 L’article 13 du traité MES décrit la procédure d’octroi d’un soutien à la stabilité à un membre du MES dans les termes suivants :

      1. Un membre du MES peut adresser une demande de soutien à la stabilité au président du conseil des gouverneurs. Cette demande indique le ou les instruments d’assistance financière à envisager. Dès réception de cette demande, le président du conseil des gouverneurs charge la Commission […], en liaison avec la BCE :

      a) d’évaluer l’existence d’un risque pour la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble ou de ses États membres, à moins que la BCE n’ait déjà soumis une analyse en vertu de l’article 18, paragraphe 2 ;

      b) d’évaluer la soutenabilité de l’endettement public. Lorsque cela est utile et possible, il est attendu que cette évaluation soit effectuée en collaboration avec le [Fonds monétaire international (FMI)] ;

      c) d’évaluer les besoins réels ou potentiels de financement du membre du MES concerné.

      2. Sur la base de la demande du membre du MES et de l’évaluation visée au paragraphe 1, le conseil des gouverneurs peut décider d’octroyer, en principe, un soutien à la stabilité au membre du MES concerné sous la forme d’une facilité d’assistance financière.

      3. S’il adopte une décision en vertu du paragraphe 2, le conseil des gouverneurs charge la Commission […] - en liaison avec la BCE et, lorsque cela est possible, conjointement avec le FMI - de négocier avec le membre du MES concerné un protocole d’accord définissant précisément la conditionnalité dont est assortie cette facilité d’assistance financière. Le contenu du protocole d’accord tient compte de la gravité des faiblesses à traiter et de l’instrument d’assistance financière choisi. Parallèlement, le directeur général du MES prépare une proposition d’accord relatif à la facilité d’assistance financière précisant les modalités et les conditions financières de l’assistance ainsi que les instruments choisis, qui sera adoptée par le conseil des gouverneurs.

      Le protocole d’accord doit être pleinement compatible avec les mesures de coordination des politiques économiques prévues par le [traité FUE], notamment avec tout acte de droit de l’Union européenne, incluant tout avis, avertissement, recommandation ou décision s’adressant au membre du MES...

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