Arrêts nº T-399/11 RENV of Tribunal General de la Unión Europea, November 15, 2018

Resolution DateNovember 15, 2018
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-399/11 RENV

Aides d’État - Dispositions concernant l’impôt sur les sociétés permettant aux entreprises fiscalement domiciliées en Espagne d’amortir la survaleur résultant de prises de participations dans des sociétés fiscalement domiciliées à l’étranger - Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et ordonnant sa récupération - Notion d’aide d’État - Sélectivité - Système de référence - Dérogation - Différence de traitement - Justification de la différence de traitement - Entreprises bénéficiaires de la mesure - Confiance légitime

Dans l’affaire T-399/11 RENV,

Banco Santander, SA, établie à Santander (Espagne),

Santusa Holding, SL, établie à Boadilla del Monte (Espagne),

représentées par Mes J. Buendía Sierra, E. Abad Valdenebro, R. Calvo Salinero et A. Lamadrid de Pablo, avocats,

parties requérantes,

soutenues par

République fédérale d’Allemagne, représentée par M. T. Henze, en qualité d’agent,

par

Irlande, représentée initialement par Mmes G. Hodge et E. Creedon, puis par Mmes Hodge et M. Browne, en qualité d’agents,

et par

Royaume d’Espagne, représenté par M. M. Sampol Pucurull, en qualité d’agent,

parties intervenantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. R. Lyal, B. Stromsky, C. Urraca Caviedes et Mme P. Němečková, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’article 4 de la décision 2011/282/UE de la Commission, du 12 janvier 2011, relative à l’amortissement fiscal de la survaleur financière en cas de prise de participations étrangères C 45/07 (ex NN 51/07, ex CP 9/07) appliqué par l’Espagne (JO 2011, L 135, p. 1),

LE TRIBUNAL (neuvième chambre élargie),

composé de MM. S. Gervasoni (rapporteur), président, L. Madise, R. da Silva Passos, Mme K. Kowalik-Bańczyk et M. C. Mac Eochaidh, juges,

greffier : Mme X. Lopez Bancalari, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 31 janvier 2018,

rend le présent

Arrêt

  1. Antécédents du litige

    1 Le 10 octobre 2007, à la suite de plusieurs questions écrites qui lui avaient été posées au cours des années 2005 et 2006 par des membres du Parlement européen ainsi qu’à la suite d’une plainte d’un opérateur privé dont elle avait été le destinataire au cours de l’année 2007, la Commission des Communautés européennes a décidé d’ouvrir la procédure formelle d’examen, prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, à l’égard du dispositif prévu à l’article 12, paragraphe 5, introduit dans la Ley del Impuesto sobre Sociedades (loi espagnole relative à l’impôt sur les sociétés) par la Ley 24/2001, de Medidas Fiscales, Administrativas y del Orden Social (loi 24/2001, portant adoption de mesures fiscales, administratives et d’ordre social), du 27 décembre 2001 (BOE no 313, du 31 décembre 2001, p. 50493), et repris par le Real Decreto Legislativo 4/2004, por el que se aprueba el texto refundido de la Ley del Impuesto sobre Sociedades (décret législatif royal 4/2004, portant approbation du texte remanié de la loi relative à l’impôt sur les sociétés), du 5 mars 2004 (BOE no 61, du 11 mars 2004, p. 10951, ci-après la « mesure litigieuse » ou le « régime litigieux »).

    2 La mesure litigieuse prévoit que, dans le cas d’une prise de participation d’une entreprise imposable en Espagne dans une « société étrangère », lorsque cette prise de participation est d’au moins 5 % et que la participation en cause est détenue de manière ininterrompue pendant au moins un an, la survaleur financière (voir points 65 et 67 ci-après) en résultant peut être déduite, sous forme d’amortissement, de l’assiette imposable de l’impôt sur les sociétés dont l’entreprise est redevable. La mesure litigieuse précise que, pour être qualifiée de « société étrangère », une société doit être assujettie à un impôt identique à l’impôt applicable en Espagne et ses revenus doivent provenir essentiellement de la réalisation d’activités à l’étranger.

    3 Par lettre du 5 décembre 2007, la Commission a reçu les observations du Royaume d’Espagne sur la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen (ci-après la « décision d’ouverture »). Entre le 18 janvier et le 16 juin 2008, la Commission a également reçu les observations de 32 tiers intéressés. Par lettres du 30 juin 2008 et du 22 avril 2009, le Royaume d’Espagne a présenté ses commentaires sur les observations des tiers intéressés.

    4 Le 18 février 2008, ainsi que les 12 mai et 8 juin 2009, des réunions techniques ont été organisées par la Commission avec les autorités espagnoles. D’autres réunions techniques ont également été organisées avec certains des 32 tiers intéressés.

    5 Par lettre du 14 juillet 2008 et par courrier électronique du 16 juin 2009, le Royaume d’Espagne a soumis des informations additionnelles à la Commission.

    6 La Commission a clôturé la procédure, en ce qui concerne les prises de participations réalisées au sein de l’Union européenne, par sa décision 2011/5/CE, du 28 octobre 2009, relative à l’amortissement fiscal de la survaleur financière en cas de prise de participations étrangères C 45/07 (ex NN 51/07, ex CP 9/07) appliqué par l’Espagne (JO 2011, L 7, p. 48, ci-après la « décision du 28 octobre 2009 »).

    7 La Commission a déclaré incompatible avec le marché intérieur le régime litigieux, consistant en un avantage fiscal permettant aux sociétés espagnoles d’amortir la survaleur résultant de prises de participations dans des sociétés non résidentes, lorsqu’il s’appliquait à des prises de participations dans des sociétés établies au sein de l’Union.

    8 La Commission a cependant maintenu ouverte la procédure en ce qui concerne les prises de participations réalisées en dehors de l’Union, les autorités espagnoles s’étant engagées à fournir des éléments supplémentaires relatifs aux obstacles aux fusions transfrontalières existant en dehors de l’Union dont elles avaient fait état.

    9 Le Royaume d’Espagne a communiqué à la Commission des informations relatives aux investissements directs réalisés par des sociétés espagnoles en dehors de l’Union les 12, 16 et 20 novembre 2009, ainsi que le 3 janvier 2010. La Commission a également reçu les observations de plusieurs tiers intéressés.

    10 Le 27 novembre 2009, ainsi que les 16 et 29 juin 2010, ont eu lieu des réunions techniques entre la Commission et les autorités espagnoles.

    11 Le 12 janvier 2011, la Commission a adopté la décision 2011/282/UE, relative à l’amortissement fiscal de la survaleur financière en cas de prise de participations étrangères C 45/07 (ex NN 51/07, ex CP 9/07) appliqué par l’Espagne (JO 2011, L 135, p. 1, ci-après la « décision attaquée »). Cette décision, dans sa version publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 21 mai 2011, avait fait l’objet d’un correctif en date du 3 mars 2011. Elle a fait l’objet d’un second correctif publié au Journal officiel le 26 novembre 2011.

    12 La décision attaquée déclare incompatible avec le marché intérieur le régime litigieux, lorsqu’il s’applique à des prises de participations dans des entreprises établies en dehors de l’Union (article 1er, paragraphe 1, de la décision attaquée). L’article 4 de cette décision prévoit, notamment, la récupération par le Royaume d’Espagne des aides accordées.

  2. Procédure et conclusions des parties

    13 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 juillet 2011, les requérantes, Banco Santander, SA et Santusa Holding, SL, ont introduit un recours tendant à l’annulation de la décision attaquée.

    14 Par arrêt du 7 novembre 2014, Banco Santander et Santusa/Commission (T-399/11, EU:T:2014:938), le Tribunal a fait droit à ce recours en se fondant sur le fait que la Commission avait fait une application erronée de la condition de sélectivité prévue à l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

    15 Par ailleurs, la décision du 28 octobre 2009 a également été annulée par le Tribunal dans son arrêt du 7 novembre 2014, Autogrill España/Commission (T-219/10, EU:T:2014:939).

    16 Par requête déposée au greffe de la Cour le 19 janvier 2015, la Commission a formé un pourvoi contre l’arrêt du 7 novembre 2014, Banco Santander et Santusa/Commission (T-399/11, EU:T:2014:938). Ce pourvoi, qui a été enregistré sous le numéro C-21/15 P, a été joint au pourvoi, enregistré sous le numéro C-20/15 P, que la Commission avait formé contre l’arrêt du 7 novembre 2014, Autogrill España/Commission (T-219/10, EU:T:2014:939).

    17 Les requérantes, soutenues par la République fédérale d’Allemagne, par l’Irlande et par le Royaume d’Espagne, ont demandé le rejet des pourvois.

    18 Par arrêt du 21 décembre 2016, Commission/World Duty Free Group e.a. (C-20/15 P et C-21/15 P, ci-après l’« arrêt World Duty Free », EU:C:2016:981), la Cour a annulé l’arrêt du 7 novembre 2014, Banco Santander et Santusa/Commission (T-399/11, EU:T:2014:938), renvoyé l’affaire devant le Tribunal et réservé pour partie les dépens. La Cour a également annulé l’arrêt du 7 novembre 2014, Autogrill España/Commission (T-219/10, EU:T:2014:939).

    19 Conformément à l’article 217, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, les parties principales ont déposé des observations écrites le 2 mars 2017 et le Royaume d’Espagne le 3 mars 2017.

    20 Conformément à l’article 217, paragraphe 3, du règlement de procédure, les parties principales et le Royaume d’Espagne ont déposé leur mémoire complémentaire d’observations écrites le 24 avril 2017.

    21 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

    22 Par décision du président de la neuvième chambre élargie du Tribunal du 8 décembre 2017, les parties entendues, la présente affaire et l’affaire T-219/10 RENV, World Duty Free Group/Commission, ont été jointes aux fins de la phase orale de la procédure, conformément à l’article 68 du règlement de procédure.

    23 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries lors de l’audience du 31 janvier 2018.

    24 Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

    -...

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