Arrêts nº T-679/16 of Tribunal General de la Unión Europea, February 26, 2019

Resolution DateFebruary 26, 2019
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-679/16

Aides d’État - Aide octroyée par les autorités espagnoles en faveur de certains clubs de football professionnel - Taux préférentiel d’imposition sur les revenus des clubs autorisés à recourir au statut d’entité à but non lucratif - Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur - Recours en annulation - Intérêt à agir - Recevabilité - Mesure infra-étatique - Caractère sélectif - Distorsion de la concurrence - Affectation des échanges entre États membres - Modification d’une aide existante - Obligation de motivation

Dans l’affaire T-679/16,

Athletic Club, établi à Bilbao (Espagne), représenté par Mes E. Lucas Murillo de la Cueva et J. M. Luís Carrasco, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. G. Luengo, B. Stromsky et Mme P. Němečková, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation des articles 1er, 4 et 5 de la décision (UE) 2016/2391 de la Commission, du 4 juillet 2016, relative à l’aide d’État SA.29769 (2013/C) (ex 2013/NN) octroyée par l’Espagne à certains clubs de football (JO 2016, L 357, p. 1), en ce qu’ils concernent le requérant,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen (rapporteur), président, J. Schwarcz et C. Iliopoulos, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 16 avril 2018,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1 L’article 19, paragraphe 1, de la Ley 10/1990 del Deporte (loi 10/1990 sur le sport), du 15 octobre 1990 (BOE no 249, du 17 octobre 1990, p. 30397, ci-après la « loi 10/1990 »), a obligé tous les clubs sportifs professionnels espagnols à se transformer en sociétés anonymes sportives (ci-après les « SAS »). L’objectif de la loi était d’encourager une gestion plus responsable de l’activité des clubs en adaptant leur forme juridique.

2 Par sa septième disposition additionnelle, la loi 10/1990 prévoyait une exception s’agissant des clubs sportifs professionnels ayant réalisé un résultat positif lors des exercices précédant l’adoption de la loi. Le requérant, l’Athletic Club, ainsi que trois autres clubs de football professionnel entraient dans le champ de l’exception posée par la loi 10/1990. Ces quatre entités avaient donc l’option, qu’elles ont exercée, de continuer à opérer sous la forme de clubs sportifs.

3 À la différence des SAS, les clubs sportifs constituent des personnes morales sans but lucratif qui bénéficient, à ce titre, d’un taux spécifique d’imposition de leurs revenus. S’agissant des provinces bénéficiant d’un statut d’autonomie fiscale, comme c’est le cas du territoire historique de Biscaye (Espagne) dans lequel est établi le requérant, la détermination des taux d’imposition concernés relève de la législation fiscale provinciale. Le taux applicable aux clubs sportifs établis sur le territoire historique de Biscaye est demeuré inférieur au taux applicable aux SAS jusqu’à la clôture de la procédure administrative en cause.

4 Par lettre du 18 décembre 2013, la Commission européenne a notifié au Royaume d’Espagne sa décision d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, au regard d’un possible traitement fiscal préférentiel accordé à quatre clubs sportifs professionnels de football, dont le requérant, par rapport aux SAS.

5 Au cours de la procédure formelle d’examen, la Commission a reçu et analysé des observations écrites du Royaume d’Espagne et de parties intéressées, parmi lesquelles le requérant.

6 Par sa décision (UE) 2016/2391, du 4 juillet 2016, relative à l’aide d’État SA.29769 (2013/C) (ex 2013/NN) octroyée par l’Espagne à certains clubs de football (JO 2016, L 357, p. 1, ci-après la « décision attaquée »), la Commission a conclu que, par la loi 10/1990, le Royaume d’Espagne avait introduit illégalement une aide sous la forme d’un privilège fiscal en matière d’impôt sur les sociétés au profit du requérant, du Club Atlético Osasuna, du Fútbol Club Barcelona et du Real Madrid Club de Fútbol, en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE (article 1er de la décision attaquée). La Commission a conclu en outre que ce régime n’était pas compatible avec le marché intérieur et a enjoint, en conséquence, au Royaume d’Espagne d’y mettre fin (article 4, paragraphe 4) et de récupérer auprès des bénéficiaires la différence entre l’impôt sur les sociétés payé et l’impôt sur les sociétés auquel ils auraient été soumis s’ils avaient eu la forme juridique de SAS, à compter de l’exercice fiscal pour l’année 2000 (article 4, paragraphe 1), tout en réservant en particulier l’hypothèse où l’aide serait une aide de minimis (article 2). La décision attaquée oblige enfin son destinataire à se conformer aux prescriptions figurant dans son dispositif, de manière immédiate et effective s’agissant de la récupération de l’aide accordée (article 5, paragraphe 1), et dans un délai de quatre mois suivant sa notification s’agissant de l’exécution de la décision dans son ensemble (article 5, paragraphe 2).

Procédure et conclusions des parties

7 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 septembre 2016, le requérant a introduit le présent recours.

8 La Commission a déposé le mémoire en défense au greffe du Tribunal le 7 décembre 2016.

9 Le requérant a déposé la réplique au greffe du Tribunal le 23 janvier 2017.

10 Le 30 janvier 2017, le requérant a déposé, sur le fondement de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, une preuve constituée par l’attestation de liquidation de l’impôt sur les sociétés dont il était débiteur pour l’exercice 2015-2016. La Commission n’a pas déposé d’observation sur cette preuve.

11 La Commission a déposé la duplique au greffe du Tribunal le 7 mars 2017.

12 Par lettre du 29 mars 2017, le requérant a indiqué qu’il souhaitait être entendu à l’audience.

13 Le Tribunal a, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure, posé des questions écrites au requérant et à la Commission, lesquels y ont répondu dans le délai imparti.

14 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

- annuler les articles 1er, 4 et 5 de la décision attaquée en ce qu’ils le concernent ;

- condamner la Commission aux dépens.

15 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

- rejeter le recours comme irrecevable ou non fondé ;

- condamner le requérant aux dépens.

En droit

Sur la recevabilité du recours

16 Sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 130 du règlement de procédure, la Commission fait valoir que le recours est irrecevable, au motif que le requérant n’aurait ni qualité pour agir ni intérêt à agir. En réponse à une question posée par le Tribunal lors de l’audience, la Commission a toutefois renoncé à cette fin de non-recevoir en tant qu’elle visait les conclusions en annulation dirigées contre l’article 4, paragraphe 4, de la décision attaquée, qui enjoint au Royaume d’Espagne de supprimer, pour l’avenir, le régime d’aides dont aurait bénéficié le requérant.

17 S’agissant de la fin de non-recevoir à laquelle la Commission n’a pas renoncé et par laquelle elle s’oppose au recours dans la mesure où ce dernier tend à l’annulation de l’article 4, paragraphes 1 à 3, et de l’article 5 de la décision attaquée, il y a lieu de constater que ce chef de conclusions concerne, en substance, l’ordre de récupération des aides qui auraient déjà été versées au requérant, à la date d’adoption de la décision attaquée, sur la base du régime litigieux.

18 À cet égard et selon une jurisprudence constante, un intérêt à voir annuler l’acte attaqué suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir, en ce sens, arrêt du 17 septembre 2009, Commission/Koninklijke FrieslandCampina, C-519/07 P, EU:C:2009:556, point 63 et jurisprudence citée).

19 Les conditions de recevabilité du recours s’apprécient au moment de l’introduction du recours (voir arrêt du 21 mars 2002, Shaw et Falla/Commission, T-131/99, EU:T:2002:83, point 29 et jurisprudence citée).

20 La règle énoncée au point 19 ci-dessus s’entend sous réserve de la question différente de la perte de l’intérêt à agir. En effet, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, cette considération relative au moment de l’appréciation de la recevabilité du recours ne saurait empêcher le Tribunal de constater qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le recours dans l’hypothèse où une partie requérante qui avait initialement intérêt à agir a perdu tout intérêt personnel à l’annulation de la décision qui est attaquée en raison d’un événement intervenu postérieurement à l’introduction dudit recours (ordonnance du 17 octobre 2005, First Data e.a./Commission, T-28/02, EU:T:2005:357, point 36).

21 À cet égard, le Tribunal a jugé qu’une partie requérante perdait un tel intérêt à agir lorsque l’État membre concerné - à qui il incombait d’exécuter la décision qui était attaquée sous le contrôle du juge national et, le cas échéant, du juge de l’Union européenne au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE - décidait, sur la base du dispositif de la décision qui était attaquée et, le cas échéant, des indications relatives à son exécution fournies par la Commission, de ne pas procéder à la récupération des aides alléguées auprès des entreprises requérantes. Dans ce contexte juridique et factuel, l’hypothèse dans laquelle la Commission aboutirait finalement à une appréciation différente de celle émise par l’État membre et lui imposerait de procéder à la récupération des aides alléguées auprès des entreprises requérantes relève de circonstances futures et incertaines insusceptibles de justifier un intérêt à agir (voir, en ce sens, ordonnance du 10 mars 2005, Gruppo ormeggiatori del porto di...

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