Arrêts nº T-8/16 of Tribunal General de la Unión Europea, July 12, 2019

Resolution DateJuly 12, 2019
Issuing OrganizationTribunal General de la Unión Europea
Decision NumberT-8/16

Concurrence - Ententes - Marché des lecteurs de disques optiques - Décision constatant une infraction à l’article 101 TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE - Accords collusoires portant sur des appels d’offres organisés par deux fabricants d’ordinateurs - Violation des formes substantielles et des droits de la défense - Compétence de la Commission - Étendue géographique de l’infraction - Infraction unique et continue - Principe de bonne administration - Lignes directrices de 2006 pour le calcul du montant des amendes

Dans l’affaire T-8/16,

Toshiba Samsung Storage Technology Corp., établie à Tokyo (Japon),

Toshiba Samsung Storage Technology Korea Corp., établie à Suwon-si (Corée du Sud),

représentées initialement par Mes M. Bay, J. Ruiz Calzado, A. Aresu et A. Scordamaglia-Tousis, puis par Mes Bay, Ruiz Calzado et Aresu, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. N. Khan, A. Biolan et M. Farley, puis par MM. Biolan, Farley et Mme A. Cleenewerck de Crayencour, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant, à titre principal, à l’annulation totale ou partielle de la décision C(2015) 7135 final de la Commission, du 21 octobre 2015, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39639 - Lecteurs de disques optiques), et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende infligée aux requérantes,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de M. D. Gratsias, président, Mme I. Labucka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : Mme N. Schall, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 3 mai 2018,

rend le présent

Arrêt

  1. Antécédents du litige

    1. Requérantes et marché concerné

      1 Les requérantes, Toshiba Samsung Storage Technology Corp. (ci-après « TSST Japon ») et Toshiba Samsung Storage Technology Korea Corp. (ci-après « TSST KR »), sont des producteurs et des fournisseurs de lecteurs de disques optiques (ci-après les « LDO »). En particulier, TSST Japon est une société commune détenue par la société Toshiba Corporation, établie au Japon, et par la société Samsung Electronics Co., Ltd, établie en Corée du Sud. Pendant la période infractionnelle, TSST Japon a été la société mère de TSST KR.

      2 TSST Japon et TSST KR (ci-après, prises ensemble, « TSST ») ont commencé des opérations le 1er avril 2004 comme deux unités d’exploitation distinctes. En décembre 2005, TSST Japon a quitté le marché, restant avec des activités de ventes transitionnelles réduites jusqu’au début de l’année 2008. TSST KR a graduellement assumé les activités de ventes de TSST Japon et elle a été directement engagée dans le développement, la commercialisation, la vente et le service après-vente des LDO (décision attaquée, considérant 14).

      3 L’infraction en cause concerne des LDO utilisés dans des ordinateurs personnels (ordinateurs de bureau et ordinateurs portables) (ci-après les « PC ») produits par Dell Inc. (ci-après « Dell ») et Hewlett Packard (ci-après « HP »). Les LDO sont également utilisés dans de nombreux autres appareils à l’usage des consommateurs, tels que les lecteurs de disques compacts (ci-après les « CD ») ou de disques optiques numériques (ci-après les « DVD »), les consoles de jeu et d’autres appareils électroniques périphériques (décision attaquée, considérant 28).

      4 Les LDO utilisés dans les PC varient selon leur dimension, leurs mécanismes de chargement (fente ou plateau) et les types de disques qu’ils peuvent lire ou enregistrer. Les LDO peuvent être divisés en deux groupes : les lecteurs mi-hauteur (half-height, ci-après « HH ») pour ordinateurs de bureau et les lecteurs minces pour ordinateurs portables. Le groupe des lecteurs minces regroupe des lecteurs de dimensions différentes. Il y a différents types de lecteurs HH et de lecteurs minces selon leur fonctionnalité technique (décision attaquée, considérant 29).

      5 Dell et HP sont les deux principaux fabricants de produits d’origine sur le marché mondial des PC. Ces deux sociétés utilisent des procédures d’appel d’offres classiques menées à l’échelle mondiale impliquant, notamment, des négociations trimestrielles sur un prix au niveau mondial et sur des volumes d’achats globaux avec un petit nombre de fournisseurs présélectionnés de LDO. En règle générale, les questions régionales n’ont joué aucun rôle dans les appels d’offres pour les LDO autres que ceux liés à la demande escomptée pour des régions influençant les volumes d’achats globaux (décision attaquée, considérant 32).

      6 Les procédures d’appel d’offres comprenaient des demandes de devis, des demandes de devis électroniques, des négociations en ligne, des enchères électroniques et des négociations bilatérales (hors ligne). À la clôture d’un appel d’offres, les clients attribuaient des volumes aux fournisseurs de LDO participants (à tous ou au moins à la plupart d’entre eux, sauf si un mécanisme d’exclusion était en place) selon les prix qu’ils offraient. Par exemple, l’offre gagnante recevait de 35 à 45 % de l’attribution totale du marché pour le trimestre en question, la deuxième meilleure offre de 25 à 30 %, la troisième 20 %, etc. Ces procédures d’appel d’offres classiques étaient utilisées par les équipes des clients chargées des appels d’offres dans le but de réaliser un appel d’offres efficace à des prix compétitifs. À cette fin, elles utilisaient toutes les pratiques possibles pour stimuler la concurrence sur les prix entre les fournisseurs de LDO (décision attaquée, considérant 33).

      7 En ce qui concerne Dell, elle a réalisé les appels d’offres principalement par voie de la négociation en ligne. Celle-ci pouvait avoir une durée déterminée ou s’achever après une période définie, par exemple dix minutes après la dernière offre, lorsqu’aucun fournisseur de LDO ne faisait de nouvelle offre. Dans certains cas, la négociation en ligne pouvait durer plusieurs heures si l’appel d’offres était plus animé ou si la durée de la négociation en ligne était prolongée afin d’inciter les fournisseurs de LDO à continuer de faire des offres. À l’inverse, même lorsque la durée d’une négociation en ligne était indéterminée et dépendait de l’offre finale, Dell pouvait annoncer à un certain moment la clôture de la négociation en ligne. Dell pouvait décider de passer d’une procédure par « classement uniquement » à une procédure « à l’aveugle ». Dell pouvait annuler la négociation en ligne si l’appel d’offres ou son résultat étaient jugés insatisfaisants et pouvait, à la place, conduire des négociations bilatérales. Le processus de négociation en ligne était supervisé par les gestionnaires mondiaux des acquisitions en charge de ces opérations chez Dell (décision attaquée, considérants 34 et 37).

      8 En ce qui concerne HP, les principales procédures d’appel d’offres utilisées étaient les demandes de devis et les demandes de devis électroniques. Les deux procédures ont été réalisées en ligne en utilisant la même plateforme. S’agissant, d’une part, des demandes de devis, celles-ci étaient trimestrielles. Elles combinaient des négociations en ligne et des négociations bilatérales hors ligne réparties sur une certaine période de temps, généralement deux semaines. Les fournisseurs de LDO étaient invités à un tour d’appel d’offres ouvert pendant une période déterminée pour soumettre leur devis sur plateforme en ligne ou par courrier électronique. Une fois le premier tour d’enchères écoulé, HP se réunissait avec chaque participant et entamait des négociations sur la base de l’offre du fournisseur de LDO afin d’obtenir la meilleure offre de chaque fournisseur sans divulguer l’identité ou l’offre soumise par les autres fournisseurs de LDO. S’agissant, d’autre part, des demandes de devis électroniques, elles étaient normalement organisées sous la forme d’un appel d’offres inversé. Les soumissionnaires se connectaient alors à la plateforme en ligne à l’heure spécifiée et la vente aux enchères commençait au prix fixé par HP. Les soumissionnaires présentant des offres progressivement réduites étaient informés de leur propre rang chaque fois qu’une nouvelle offre était soumise. À la fin du temps imparti, le fournisseur de LDO ayant entré l’offre la plus basse gagnait la vente aux enchères et les autres fournisseurs étaient classés deuxième et troisième selon leurs offres (décision attaquée, considérants 41 à 44).

    2. Procédure administrative

      9 Le 14 janvier 2009, la Commission européenne a reçu une demande d’immunité au titre de sa communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17) introduite par la société Koninklijke Philips NV (ci-après « Philips »). Les 29 janvier et 2 mars 2009, cette demande a été complétée afin d’y inclure, aux côtés de Philips, les sociétés Lite-On IT Corporation (ci-après « Lite-On ») et leur entreprise commune Philips & Lite-On Digital Solutions Corporation (ci-après « PLDS »).

      10 Le 29 juin 2009, la Commission a envoyé une demande de renseignements à des entreprises actives dans le domaine des LDO.

      11 Le 30 juin 2009, la Commission a accordé une immunité conditionnelle à Philips, à Lite-On et à PLDS.

      12 Les 4 et 6 août 2009, Hitachi-LG Data Storage, Inc. et Hitachi-LG Data Storage Korea, Inc. (ci-après, prises ensemble, « HLDS ») ont présenté auprès de la Commission une demande de réduction du montant de l’amende en application de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes.

      13 Le 18 juillet 2012, la Commission a ouvert une procédure et adopté une communication des griefs à l’encontre de treize fournisseurs de LDO, dont les requérantes. Dans cette communication, la Commission a indiqué, en substance, que lesdites sociétés avaient enfreint l’article 101 TFUE et l’article 53 de l’accord sur l’Espace...

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