Parliament v Council

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:35
Celex Number62013CC0540
CourtCourt of Justice (European Union)
Date22 January 2015
62013CC0540

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NILS WAHL

présentées le 22 janvier 2015 ( 1 )

Affaires jointes C‑317/13 et C‑679/13

Parlement européen

contre

Conseil de l’Union européenne

ainsi que

Affaire C‑540/13

Parlement européen

contre

Conseil de l’Union européenne

«Recours en annulation — Base juridique — Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Mesures d’exécution — Absence de consultation du Parlement européen — Incidence de l’entrée en vigueur du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne — Dispositions transitoires — Article 9 du protocole no 36 — Objectif — Effets juridiques»

1.

L’entrée en vigueur du traité de Lisbonne a substantiellement modifié le paysage institutionnel de l’Union européenne, qui constitue l’arrière-plan juridique de l’adoption de mesures relatives à la coopération policière et judiciaire en matière pénale (ancien titre VI du traité UE) (ci-après le «troisième pilier»). Traditionnellement, ce troisième pilier se caractérisait par l’adoption de décisions intergouvernementales et le Parlement européen n’avait qu’une influence marginale. Or, la «lisbonisation» a intégré le troisième pilier dans le cadre supranational de l’Union et, partant, les processus décisionnels ont été réalignés sur ceux applicables à d’autres domaines de la politique de l’Union. L’extension à cette matière de la procédure législative ordinaire (l’ancienne «procédure de codécision») a donc renforcé de manière générale la position, en tant que colégislateur, du Parlement, qui jouit désormais en ce domaine de compétences égales à celles du Conseil de l’Union européenne.

2.

Les présents recours en annulation introduits par le Parlement sont des manifestations de la complexité de cette évolution. Plus particulièrement, les affaires examinées portent sur l’interprétation correcte de l’article 9 du protocole no 36 ( 2 ) sur les dispositions transitoires annexé au traité. Aux termes de cette disposition, les effets juridiques des actes des institutions, organes et organismes de l’Union adoptés au titre du troisième pilier avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne sont préservés aussi longtemps que ces actes n’auront pas été abrogés, annulés ou modifiés. À la lumière de l’interprétation qu’elle adoptera, la Cour a l’occasion de fixer les critères d’appréciation de la légalité des mesures adoptées par le Conseil après l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne sur la base d’actes relevant du champ d’application de l’article 9 du protocole no 36.

I – Cadre juridique

A – Le protocole no 36

3.

Aux termes de l’article 9 du protocole no 36:

«Les effets juridiques des actes des institutions, organes et organismes de l’Union adoptés sur la base du traité sur l’Union européenne avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne sont préservés aussi longtemps que ces actes n’auront pas été abrogés, annulés ou modifiés en application des traités. Il en va de même des conventions conclues entre les États membres sur la base du traité sur l’Union européenne.»

B – Les décisions concernées

1. La décision de 2005 ( 3 )

4.

La décision de 2005 a été adoptée sur la base du traité UE tel qu’il existait avant Lisbonne et, en particulier, sur la base des articles 29, 31, paragraphe 1, sous e), et 34, paragraphe 2, sous c), UE. Cela signifie que la décision a été adoptée sur la base du troisième pilier et concerne le domaine de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.

5.

Aux termes de son article 1er, la décision de 2005 vise à créer un système d’échange rapide d’informations sur les nouvelles substances psychoactives. Elle prévoit, en outre, une évaluation des risques afin de déterminer la nécessité d’appliquer des mesures de contrôle à ces substances. Plus généralement, la décision de 2005 met en place un mécanisme visant à assurer une réponse rapide et coordonnée des États membres aux nouvelles substances psychoactives qui sont réputées présenter un risque (pour la santé publique ou d’une autre nature).

6.

L’article 8 de la décision de 2005 fixe la procédure d’application à certaines nouvelles substances psychoactives de mesures de contrôle déjà appliquées dans certains États membres aux stupéfiants et à des substances psychotropes. Aux termes de l’article 8, paragraphe 3, la décision de soumettre la nouvelle substance psychoactive à des mesures de contrôle est prise par le Conseil à la majorité qualifiée, conformément à l’article 34, paragraphe 2, sous c), UE.

7.

Aux termes de l’article 9 de la décision de 2005, une fois la décision du Conseil prise en ce sens, il appartient aux États membres de prendre les dispositions nécessaires, conformément à leur droit interne, afin de soumettre les nouvelles substances à des mesures de contrôle et des sanctions pénales.

8.

Les recours des affaires jointes C‑317/13 et C‑679/13 concernent des décisions ( 4 ) prises par le Conseil sur la base de l’article 8, paragraphe 3, de la décision de 2005.

2. La première décision d’exécution

9.

La première décision d’exécution concerne la 4‑méthylamphétamine, qui est un dérivé synthétique méthylé en anneau de l’amphétamine. Le préambule de la décision indique que celle-ci a été adoptée sur la base du traité FUE et de l’article 8, paragraphe 3, de la décision de 2005.

3. La seconde décision d’exécution

10.

La seconde décision d’exécution concerne un dérivé de l’indole, obtenu par synthèse, qui est soupçonné d’avoir des effets hallucinogènes. À l’instar de la première décision d’exécution, le préambule de cette décision indique qu’elle a été adoptée sur la base du traité FUE et de l’article 8, paragraphe 3, de la décision de 2005.

4. La décision VIS ( 5 )

11.

La décision VIS ( 6 ) a été adoptée sur la base du traité UE tel qu’il existait avant Lisbonne et, en particulier, des articles 30, paragraphe 1, sous b), et 34, paragraphe 2, sous c), UE. À l’instar de la décision de 2005, la décision VIS a été adoptée sur la base du troisième pilier et concerne le domaine de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.

12.

Le VIS est un système d’échange de données sur les visas entre les États membres. L’un des objectifs explicites du système est de contribuer à la sécurité intérieure et de lutter contre le terrorisme. Afin de garantir la réalisation de cet objectif, le Conseil a jugé nécessaire de donner accès aux données disponibles dans le VIS aux autorités des États membres compétentes en matière de sécurité intérieure ainsi qu’à Europol. À cette fin, la décision VIS a été adoptée en complément du règlement VIS ( 7 ).

13.

Étant donné les difficultés liées à la mise en place d’un tel système d’accès, il a été décidé que la décision VIS prendrait effet à une date ultérieure, fixée par le Conseil. L’article 18, paragraphe 2, de la décision VIS énonce ainsi que la décision prend effet à compter de la date qui sera fixée par le Conseil lorsque la Commission européenne l’aura informé que le règlement VIS est entré en vigueur et est pleinement applicable.

5. La décision relative à la date

14.

L’affaire C‑540/13 porte sur la décision ( 8 ) prise par le Conseil de fixer la date de prise d’effet de la décision VIS.

15.

Après que la Commission l’eut informé que le règlement VIS était pleinement applicable, le Conseil a adopté la décision relative à la date sur la base du traité FUE et de l’article 18, paragraphe 2, de la décision VIS. En vertu de l’article 1er de ladite décision, la décision VIS devait prendre effet le 1er septembre 2013.

II – Procédure et conclusions

16.

Par décisions du président de la Cour des 8 octobre 2013 et 28 avril 2014, la République d’Autriche a été autorisée à intervenir à l’appui du Conseil dans les affaires C‑317/13 et C‑679/13. Par décision du président de la Cour du 27 mars 2014, ces deux affaires ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

A – Les affaires jointes C‑317/13 et C‑679/13

17.

Le Parlement conclut qu’il plaise à la Cour:

annuler les décisions d’exécution en cause;

maintenir les effets de ces décisions jusqu’au moment où elles seront remplacées par de nouveaux actes adoptés en bonne et due forme, et

condamner le Conseil aux dépens.

18.

Le Conseil – soutenu par la République d’Autriche – conclut qu’il plaise à la Cour:

rejeter les recours;

rejeter l’exception d’illégalité ( 9 ) relative à la décision de 2005 comme irrecevable ou, à tout le moins, comme non fondée;

condamner le Parlement aux dépens, et

à titre subsidiaire, pour le cas où la Cour devrait conclure à l’annulation des décisions d’exécution en cause, de maintenir les effets de ces décisions jusqu’à ce qu’elles soient remplacées par de nouveaux actes.

B – L’affaire C‑540/13

19.

Dans son recours, le Parlement conclut qu’il plaise à la Cour:

annuler la décision relative à la date;

maintenir les effets de cette décision jusqu’au moment où celle-ci sera remplacée par un nouvel acte adopté en bonne et due forme, et

condamner le Conseil aux dépens.

20.

Le Conseil conclut qu’il plaise à la Cour:

rejeter le recours comme irrecevable ou, à tout le moins, comme non fondé;

condamner le Parlement aux dépens, et

à titre subsidiaire, pour le cas où la Cour devrait conclure à l’annulation de la décision relative à la date, maintenir...

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