BM and NP v Ministero dell'Istruzione, dell'Università e della Ricerca - MIUR.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2023:489
Date15 June 2023
Docket NumberC-132/22
Celex Number62022CJ0132
CourtCourt of Justice (European Union)
62022CJ0132

ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

15 juin 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Libre circulation des travailleurs – Article 45 TFUE – Règlement (UE) no 492/2011 – Article 3, paragraphe 1 – Entrave – Égalité de traitement – Procédure de classement pour l’attribution de postes dans certains établissements publics nationaux – Condition d’admission liée à l’expérience professionnelle antérieure acquise au sein de ces établissements – Réglementation nationale ne permettant pas de prendre en compte l’expérience professionnelle acquise dans d’autres États membres – Justification – Objectif de lutte contre la précarité »

Dans l’affaire C‑132/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional du Latium, Italie), par décision du 13 décembre 2021, parvenue à la Cour le 25 février 2022, dans la procédure

BM,

NP

contre

Ministero dell’Istruzione, dell’Università e della Ricerca – MIUR,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. P. G. Xuereb, président de chambre, M. A. Arabadjiev (rapporteur), président de la première chambre, et M. A. Kumin, juge,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour BM et NP, par Me D. Terracciano, avvocata,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme L. Fiandaca et M. A. Jacoangeli, avvocati dello Stato,

pour la Commission européenne, par M. B.-R. Killmann et Mme D. Recchia, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 45, paragraphes 1 et 2, TFUE ainsi que de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) no 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union (JO 2011, L 141, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant BM et NP, ressortissants italiens ayant acquis une expérience professionnelle dans des États membres autres que la République italienne, au Ministero dell’Istruzione, dell’Università e della Ricerca – MIUR (ministère de l’Éducation, des Universités et de la Recherche, Italie) (ci-après le « ministère ») au sujet de la légalité d’un décret ministériel qui prévoit que ne sont admis à la procédure d’inscription sur les listes en vue du recrutement, au moyen de contrats de travail à durée indéterminée et à durée déterminée, de personnel dans les établissements publics de formation supérieure artistique, musicale et chorégraphique italiens que les candidats ayant acquis une certaine expérience professionnelle dans ces établissements.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement no 492/2011

3

L’article 3, paragraphe 1, du règlement no 492/2011 dispose :

« Dans le cadre du présent règlement, ne sont pas applicables les dispositions législatives, réglementaires ou administratives ou les pratiques administratives d’un État membre :

[...]

b)

qui, bien qu’applicables sans acception de nationalité, ont pour but ou effet exclusif ou principal d’écarter les ressortissants des autres États membres de l’emploi offert.

[...] »

L’accord-cadre sur le travail à durée déterminée

4

La clause 5 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999, qui figure à l’annexe de la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (JO 1999, L 175 p. 43), intitulée « Mesures visant à prévenir l’utilisation abusive », est libellée comme suit :

« 1. Afin de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, les États membres, après consultation des partenaires sociaux, conformément à la législation, aux conventions collectives et pratiques nationales, et/ou les partenaires sociaux, quand il n’existe pas des mesures légales équivalentes visant à prévenir les abus, introduisent d’une manière qui tienne compte des besoins de secteurs spécifiques et/ou de catégories de travailleurs, l’une ou plusieurs des mesures suivantes :

a)

des raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats ou relations de travail ;

b)

la durée maximale totale de contrats ou relations de travail à durée déterminée successifs ;

c)

le nombre de renouvellements de tels contrats ou relations de travail.

2. Les États membres, après consultation des partenaires sociaux et/ou les partenaires sociaux, lorsque c’est approprié, déterminent sous quelles conditions les contrats ou relations de travail à durée déterminée :

a)

sont considérés comme “successifs” ;

b)

sont réputés conclus pour une durée indéterminée. »

Le droit italien

5

L’article 1, paragraphes 653 et 655, de la legge n. 205 – Bilancio di previsione dello Stato per l’anno finanziario 2018 e bilancio pluriennale per il triennio 2018-2020 (loi no 205, portant budget de l’État pour l’exercice 2018 et budget pluriannuel pour la période triennale 2018‑2020), du 27 décembre 2017 (GURI no 302, du 29 décembre 2017) (ci-après la « loi no 205/2017 »), prévoit :

« 653. Afin de remédier à la précarité dans les établissements de formation supérieure artistique, musicale et chorégraphique, 1 million d’euros sont alloués pour l’année 2018, 6,6 millions d’euros pour l’année 2019, 11,6 millions d’euros pour l’année 2020, 15,9 millions d’euros pour l’année 2021, 16,4 millions d’euros pour l’année 2022, 16,8 millions d’euros pour chacune des années de 2023 à 2025, 16,9 millions d’euros pour l’année 2026, 17,5 millions d’euros pour l’année 2027, 18,1 millions d’euros pour l’année 2028 et 18,5 millions d’euros par an à partir de l’année 2029. [...]

[...]

655. Le personnel enseignant qui n’est pas déjà titulaire d’un contrat à durée indéterminée dans les établissements visés au paragraphe 653, qui a passé un concours sélectif aux fins de l’inscription au classement des écoles et qui a accumulé, jusqu’à l’année académique 2020/2021 incluse, au moins trois années académiques d’enseignement, même non consécutives, au cours des huit dernières années académiques, dans l’un des établissements susmentionnés dans les cours prévus à l’article 3 du règlement visé au décret du président de la République no 212, du 8 juillet 2005, et dans les cours de formation prévus par l’article 3, paragraphe 3, du règlement d’application du décret du ministre de l’Éducation, des Universités et de la Recherche no 249, du 10 septembre 2010, est inscrit dans des classements nationaux spéciaux pour l’attribution de postes d’enseignement permanents et à durée déterminée, subordonnés aux classements nationaux existants sur titres et à ceux visés au paragraphe 653, dans la limite des postes vacants disponibles. L’inclusion est prévue selon des modalités définies par arrêté du ministre de l’Éducation nationale, des Universités et de la Recherche. »

6

L’article 2, paragraphe 1, du decreto ministeriale n. 597 – Costituzione graduatorie riservate per il personale docente delle Istituzioni AFAM (décret ministériel no 597, relatif à la procédure d’établissement de classements réservés au personnel enseignant des établissements de formation supérieure artistique, musicale et chorégraphique), du 14 août 2018 (ci-après le « décret ministériel no 597/2018 »), dispose que seuls peuvent participer à cette procédure les candidats qui ont enseigné au cours d’au moins trois années académiques dans les cours visés à l’article 3 du décret du président de la République no 212, du 8 juillet 2005, ou dans les cours de formation visés à l’article 3, paragraphe 3, du décret ministre de l’Éducation, des Universités et de la Recherche no 249, du 10 septembre 2010.

7

L’article 8, paragraphe 1, point A, du décret ministériel no 597/2018 prévoit la possibilité de prendre en compte, aux fins de l’évaluation des qualifications des candidats admis à participer à ladite procédure, l’expérience professionnelle acquise auprès d’établissements de même niveau que les établissements italiens de formation supérieure artistique, musicale et chorégraphique, situés à l’étranger.

Le litige au principal et la question préjudicielle

8

Par des recours distincts introduits au cours de l’année 2018 devant le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional du Latium, Italie), qui est la juridiction de renvoi, les requérants au principal ont demandé l’annulation du décret ministériel no 597/2018, en faisant valoir, notamment, que, en ne reconnaissant pas, aux fins de la participation à la procédure d’attribution de postes d’enseignants, à durée indéterminée et à durée déterminée, dans les établissements publics de formation supérieure artistique, musicale et chorégraphique italiens, visée à l’article 1er, paragraphe 655, de la loi no 205/2017, l’expérience professionnelle de trois années académiques ou plus acquise dans des établissements de même niveau situés dans des États membres autres que la République italienne, ledit décret ministériel méconnaît l’article 45 TFUE et l’article 3 du règlement no 492/2011.

9

Le ministère fait valoir que le décret ministériel no 597/2018 ne peut pas être considéré comme illégal, puisqu’il a été adopté sur la base de la loi no 205/2017, laquelle viserait, ainsi qu’il ressortirait de son article 1er, paragraphe 653, à remédier à la...

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