República Francesa y Irlanda contra Comisión de las Comunidades Europeas.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1995:202
Date29 June 1995
Docket NumberC-296/93,C-307/93
Celex Number61993CC0296
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado
CourtCourt of Justice (European Union)
61993C0296

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. CARL OTTO LENZ

présentées le 29 juin 1995 ( *1 )

A — Introduction

B — Appréciation

1) La compétence de la Commission — Violation de l'article 6, paragraphe 7, du règlement no 805/68

a) Jurisprudence

b) Étendue de la compétence inscrite à l'article 6, paragraphe 7, cinquième tiret

c) L'article 5 du règlement no 805/68

d) L'article 155 du traité CEE

2) Conclusion incidente

3) La proportionnalité

a) Objectif de la Commission

b) Appréciation des faits

c) Le caractère adéquat

d) Le caractère nécessaire

4) Le principe de non-discrimination

a) Inégalité de traitement

b) Justification

5) La confiance légitime

a) Confiance légitime née de l'incitation de la Commission à adopter un comportement déterminé

b) Prise en compte suffisante de la confiance légitime

6) La violation de droits fondamentaux

a) La propriété

b) La liberté d'exercer une activité professionnelle

7) Le détournement de pouvoir

8) Violation de formes substantielles

Dépens

C — Conclusions

A — Introduction

1.

Les présentes affaires soulèvent avant tout la question de la répartition des compétences entre la Commission et le Conseil dans l'organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine. Celle-ci a été établie en 1968 par le règlement (CEE) no 805/68 du Conseil, du 27 juin 1968 ( 1 ). Cette organisation des marchés a pour but de « stabiliser les marchés et d'assurer un niveau de vie équitable à la population agricole intéressée ». A cette fin, le règlement prévoit un certain nombre de mesures d'intervention ( 2 ).

2.

Aux termes de l'article 5, paragraphe 1, ces mesures sont les suivantes:

aides au stockage privé,

achats effectués par les organismes d'intervention.

Le paragraphe 2 énumère les produits susceptibles de faire l'objet des mesures d'intervention. Il s'agit des gros bovins, des viandes fraîches ou réfrigérées de ces animaux, présentées sous forme de carcasses, demicarcasses, quartiers compensés, quartiers avant ou quartiers arrière et qui correspondent à la grille communautaire de classement définie par le règlement (CEE) no 1208/81. Aux termes de l'article 5, paragraphe 3, le Conseil, statuant sur proposition de la Commission selon la procédure de vote prévue à l'article 43, paragraphe 2, du traité, peut modifier cette liste.

3.

Les présentes affaires concernent les achats des organismes d'intervention: si le prix du marché descend au-dessous d'un certain seuil, les organismes d'intervention achètent de la viande bovine. Il y a dès lors moins de viande bovine sur le marché libre en sorte que le prix résultant de l'offre et de la demande se remet à augmenter.

4.

L'article 26 du règlement no 805/68 institue un comité de gestion de la viande bovine. Il est composé de représentants des États membres et présidé par un représentant de la Commission.

5.

L'article 27 organise ce qu'il est convenu d'appeler la « procédure de comité de gestion ». Dans cette procédure, le représentant de la Commission soumet des mesures au comité. Le comité peut émettre son avis dans un délai que le président fixe. Sans devoir attendre cet avis, la Commission peut arrêter des mesures qui sont immédiatement applicables. Ce n'est que si elles ne sont pas conformes à l'avis du comité que le Conseil en est avisé. Le Conseil statuant selon la procédure de vote prévue à l'article 43, paragraphe 2, du traité CEE, peut dans ce cas prendre une décision différente.

6.

La disposition du règlement no 805/68 qui intéresse les présentes affaires au premier plan est l'article 6, modifié par le règlement (CEE) no 2066/92 du Conseil, du 30 juin 1992 ( 3 ) (ci-après: l'article 6 du règlement no 805/68). Le règlement no 2066/92 a été adopté dans le contexte de la réforme de la politique agricole.

7.

Ainsi qu'il ressort des considérants, il régnait sur le marché communautaire de la viande bovine un déséquilibre entre l'offre et la demande qui appelait des mesures de réduction du prix d'intervention ( 4 ). Il fallait compenser par certaines primes les conséquences néfastes qu'elles pouvaient avoir pour les producteurs. Il ne fallait toutefois en aucun cas qu'elles aboutissent à accroître la production globale ( 5 ).

8.

Ainsi qu'il ressort par ailleurs des considérants, le Conseil s'est aussi donné pour but d'encourager l'élevage extensif ( 6 ). Contrairement à l'élevage intensif, l'élevage extensif consiste à faire paître le bétail sans le nourrir avec des aliments spéciaux ni le traiter aux hormones.

9.

Le règlement no 2066/92 modifie l'article 6 en assignant aux achats d'intervention des plafonds annuels qui s'échelonnent comme suit:

750000 tonnes pour l'année 1993,

650000 tonnes pour l'année 1994,

550000 tonnes pour l'année 1995,

400000 tonnes pour l'année 1996,

350000 tonnes à partir de l'année 1997.

10.

Au reste, l'article 6 soumet les mesures d'intervention à des dispositions et à des conditions d'ordre général.

11.

Le paragraphe 7 de l'article 6 renvoie à la procédure précitée de l'article 27:

« Selon la procédure prévue à l'article 27:

sont déterminées les catégories, qualités ou groupes de qualités des produits éligibles à l'intervention,

sont décidées l'ouverture ou la réouverture des adjudications et leur suspension dans le cas visé au paragraphe 3, dernier tiret,

sont fixés les prix d'achat ainsi que les quantités acceptées à l'intervention,

est déterminé le montant de la majoration visée au paragraphe 5,

sont arrêtées les modalités d'application du présent article, et notamment celles visant à éviter une spirale à la baisse des prix de marché,

sont arrêtées, le cas échéant, les dispositions transitoires nécessaires à l'application du présent régime.

Sont décidées par la Commission:

l'ouverture des achats visés au paragraphe 4 ainsi que leur suspension dans le cas où une ou plusieurs des conditions prévues par ledit paragraphe ne sont plus remplies,

la suspension des achats visés au paragraphe 3, premier tiret. »

12.

L'article 6a, paragraphe 2, prévoit une dérogation à la liste, arrêtée par le Conseil, des produits pouvant faire l'objet des mesures d'intervention. C'est d'après le poids des bovins que l'on détermine ceux qui relèvent de cette exception.

13.

La Commission a arrêté le règlement (CEE) no 859/89 du 29 mars 1989 ( 7 ) sur la base de l'article 6, paragraphe 7. Le cinquième considérant et l'article 4, paragraphe 1, se réfèrent à un autre règlement du Conseil, à savoir le règlement (CEE) no 1208/81 du 28 avril 1981 ( 8 ). Ce règlement établit la grille communautaire de classement des carcasses de gros bovins. Ainsi qu'il ressort de l'article 3, paragraphes 1 et 2, le classement est établi d'après l'âge et le sexe des animaux et d'après la conformation et l'état d'engraissement.

14.

Le règlement no 859/89 de la Commission, qui comporte les modalités d'application des mesures d'intervention, définit en son article 4, paragraphe 1, les produits qui sont achetés par les organismes d'intervention. Il fixe notamment les catégories et qualités des produits éligibles à l'intervention, ainsi que le prévoit l'article 6, paragraphe 7, premier tiret, du règlement no 805/68.

15.

Par règlement (CEE) no 685/93 ( 9 ), la Commission a ajouté un autre critère aux dispositions de l'article 4. La nouvelle réglementation limite l'achat aux seuls produits « provenant de carcasses dont le poids ne dépasse pas les niveaux suivants:

380 kilogrammes à partir de la première adjudication de juillet 1993,

360 kilogrammes à partir de la première adjudication de janvier 1994,

340 kilogrammes à partir de la première adjudication de juillet 1994. »

C'est contre cette réglementation que tant la République française que l'Irlande agissent.

16.

Le 25 mai 1993, la République française a introduit un recours en demandant qu'il plaise à la Cour:

«—

déclarer nul et non avenu le règlement (CEE) no 685/93 de la Commission, du 24 mars 1993, modifiant le règlement (CEE) no 859/89 relatif aux modalités d'application des mesures générales et des mesures spéciales d'intervention dans le secteur de la viande bovine;

condamner la défenderesse aux dépens. »

17.

Le 4 juin 1993, l'Irlande a, à son tour, introduit un recours en demandant qu'il plaise à la Cour:

« —

annuler le règlement (CEE) no 685/93 de la Commission, du 24 mars 1993, modifiant le règlement (CEE) no 859/89 relatif aux modalités d'application des mesures générales et des mesures spéciales d'intervention dans le secteur de la viande bovine;

prendre toute décision complémentaire ou différente se révélant nécessaire ou appropriée en vue d'accéder à la demande introduite en l'espèce par l'Irlande;

condamner la Commission des Communautés européennes aux dépens. »

18.

Dans les deux affaires, la Commission conclut à ce qu'il plaise à la Cour:

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