EOC Belgium contre Commission européenne.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2022:837
Date21 December 2022
Docket NumberT-747/20
Celex Number62020TJ0747
CourtGeneral Court (European Union)
62020TJ0747

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre élargie)

21 décembre 2022 ( *1 )

« Dumping – Importations de certains alcools polyvinyliques originaires de Chine – Droits antidumping définitifs – Exonération d’importations faisant l’objet d’une utilisation particulière – Recours en annulation – Caractère détachable – Acte réglementaire comportant des mesures d’exécution – Affectation directe – Acte susceptible de recours – Recevabilité – Article 9, paragraphe 5, premier alinéa, du règlement (UE) 2016/1036 – Droit imposé d’une manière non discriminatoire – Égalité de traitement »

Dans l’affaire T‑747/20,

EOC Belgium, établie à Oudenaarde (Belgique), représentée par Mes Y. Melin et I. Fressynet, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme K. Blanck, MM. G. Luengo et M. Gustafsson, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (septième chambre élargie),

composé, lors des délibérations, de MM. R. da Silva Passos, président, V. Valančius, Mme I. Reine, MM. L. Truchot (rapporteur) et M. Sampol Pucurull, juges,

greffier : Mme H. Eriksson, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 9 juin 2022,

rend le présent

Arrêt

1

Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, EOC Belgium, demande l’annulation de l’article 1er, paragraphe 4, du règlement d’exécution (UE) 2020/1336 de la Commission, du 25 septembre 2020, instituant des droits antidumping définitifs sur les importations de certains alcools polyvinyliques originaires de la République populaire de Chine (JO 2020, L 315, p. 1).

I. Antécédents du litige

2

Le 25 septembre 2020, la Commission européenne a adopté le règlement d’exécution 2020/1336.

3

Par l’article 1er, paragraphe 1, du règlement d’exécution 2020/1336, la Commission a imposé les droits antidumping mentionnés au point 1 ci-dessus.

4

Par l’article 1er, paragraphe 4, du règlement d’exécution 2020/1336, la Commission a introduit une exonération à l’imposition de ces droits (ci-après l’« exonération en cause »). Cette disposition prévoit ce qui suit :

« Les produits décrits au paragraphe 1 sont exonérés du droit antidumping définitif s’ils sont importés pour la fabrication d’adhésifs à base de mélange sec produits et vendus sous forme de poudre pour l’industrie du carton. Ces produits sont placés sous le régime de la destination particulière visé à l’article 254 du règlement (UE) no 952/2013 afin de démontrer qu’ils sont importés exclusivement pour l’utilisation susmentionnée. »

5

Au point 6.3.4, intitulé « Producteurs d’adhésifs », de la partie du règlement d’exécution 2020/1336 consacrée à l’intérêt de l’Union européenne, la Commission a exposé les motifs pour lesquels elle avait décidé d’exonérer des droits antidumping définitifs imposés par ledit règlement les importations de certains alcools polyvinyliques (ci-après le « PVAL »). Cette exonération, qui s’applique aux fabricants d’adhésifs à base de mélange sec, vise à préserver leurs intérêts contre les effets négatifs que pourrait produire sur leur situation l’imposition desdits droits.

6

La requérante est une société établie en Belgique qui importe du PVAL et fabrique de l’adhésif liquide à partir de PVAL.

II. Conclusions des parties

7

La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler l’article 1er, paragraphe 4, du règlement d’exécution 2020/1336 ;

condamner la Commission aux dépens.

8

La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.

III. En droit

9

La Commission ayant opposé plusieurs fins de non-recevoir, il y a lieu d’examiner la recevabilité du recours.

A. Sur la recevabilité

10

Pour conclure à l’irrecevabilité du recours, tout d’abord, la Commission soutient, premièrement, que l’article 1er, paragraphe 4, du règlement d’exécution 2020/1336 n’est pas détachable du reste dudit règlement, deuxièmement, que ce règlement implique des mesures d’exécution et, troisièmement, que celui-ci n’affecte la requérante ni directement ni individuellement.

11

Ensuite, la Commission soutient que la requérante ne peut pas s’appuyer sur le droit à un recours effectif afin d’établir sa qualité pour agir.

12

Enfin, la Commission fait valoir, pour le cas où le Tribunal jugerait que la requérante est directement affectée par l’article 1er, paragraphe 4, du règlement d’exécution 2020/1336, que cette disposition n’est pas un acte attaquable.

13

La requérante soutient que son recours est recevable.

1. Sur le caractère détachable de l’article 1er, paragraphe 4, du règlement d’exécution 2020/1336

14

Il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de l’acte. À cet égard, la Cour a itérativement jugé qu’il n’était pas satisfait à cette exigence lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait eu pour effet de modifier la substance de celui-ci (voir arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C‑204/16 P, EU:C:2017:838, point 36 et jurisprudence citée).

15

Aussi, la vérification du caractère détachable d’éléments d’un acte de l’Union suppose l’examen de la portée de ceux-ci, afin d’évaluer si une annulation de ces éléments modifierait l’esprit et la substance de cet acte (voir arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C‑204/16 P, EU:C:2017:838, point 37 et jurisprudence citée).

16

En l’espèce, la requérante demande l’annulation du seul article 1er, paragraphe 4, du règlement d’exécution 2020/1336 (voir point 7 ci-dessus), lequel instaure l’exonération en cause.

17

Une telle exonération, dans la mesure où elle prévoit une exception à une règle instaurant des droits antidumping, est, en principe, détachable du règlement qui fixe cette règle.

18

Dans l’arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil (C‑204/16 P, EU:C:2017:838, points 44 à 53), invoqué par la Commission, la Cour a énoncé des indices permettant de déterminer dans quelles hypothèses une exonération de droits antidumping pouvait ne pas être détachable du règlement instaurant lesdits droits.

19

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil (C‑204/16 P, EU:C:2017:838), était en cause le règlement d’exécution (UE) no 1238/2013 du Conseil, du 2 décembre 2013, instituant un droit antidumping définitif et collectant définitivement le droit antidumping provisoire institué sur les importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et leurs composants essentiels (cellules) originaires ou en provenance de la République populaire de Chine (JO 2013, L 325, p. 1).

20

La Cour a jugé que l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 1238/2013, qui prévoyait que les importations de certains produits facturés par des sociétés dont la Commission avait accepté les engagements étaient exonérées des droits antidumping institués à l’article 1er dudit règlement, n’était pas détachable du reste des dispositions dudit règlement et, en particulier, de celles prévoyant l’imposition desdits droits (arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C‑204/16 P, EU:C:2017:838, point 55).

21

La Cour a considéré que, si, formellement, l’imposition des droits apparaissait comme étant la règle et l’exonération des droits à la suite d’un engagement comme étant l’exception, en réalité, les deux dispositions en cause constituaient des mesures alternatives et complémentaires visant à atteindre un même objectif (arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C‑204/16 P, EU:C:2017:838, points 44 à 53).

22

Pour parvenir à cette conclusion, la Cour s’est fondée sur un ensemble d’indices. En premier lieu, elle a constaté une identité des objectifs poursuivis tant par la mesure imposant des droits que par celle prévoyant une exonération. Ainsi, tant l’imposition de droits que l’acceptation d’engagements visaient en l’espèce à éliminer l’effet préjudiciable sur l’industrie de l’Union du dumping relatif aux importations de modules photovoltaïques en silicium cristallin et à leurs composants essentiels (arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C‑204/16 P, EU:C:2017:838, points 44 à 48). En deuxième lieu, la Cour a relevé que les deux dispositions en cause étaient complémentaires. Elle s’est fondée, à cet égard, sur les conséquences économiques qu’elles emportaient (arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C‑204/16 P, EU:C:2017:838, points 49 à 51). Enfin, en troisième lieu, la Cour a constaté que l’exonération n’avait pas un caractère exceptionnel. Elle a indiqué, à cet égard, que l’exonération s’appliquait à 70 % des importations des produits concernés (arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C‑204/16 P, EU:C:2017:838, points 52 et 53).

23

La solution retenue par la Cour dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil (C‑204/16 P, EU:C:2017:838), est donc fondée sur un ensemble d’indices de nature à caractériser une situation particulière dans laquelle ce qui pourrait, en première analyse, apparaître comme une simple exonération et, donc, comme une exception à une règle, constitue en réalité une partie indissociable de la mesure contestée et, partant, non détachable.

24

Il y a donc lieu, aux fins de statuer sur le caractère détachable de l’exonération en cause, de déterminer si des indices d’une telle...

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