Georges Lornoy en Zonen NV and others v Belgian State.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1992:275
Date25 June 1992
Celex Number61991CC0017
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-144/91,C-145/91
EUR-Lex - 61991C0017 - FR 61991C0017

Conclusions jointes de l'Avocat général Tesauro présentées le 25 juin 1992. - Georges Lornoy en Zonen NV et autres contre État belge. - Demande de décision préjudicielle: Rechtbank van eerste aanleg Turnhout - Belgique. - Taxes parafiscales - Cotisations obligatoires au bénéfice d'un fonds de la santé et de la production des animaux. - Affaire C-17/91. - Gilbert Demoor en Zonen NV et autres contre État belge. - Demandes de décision préjudicielle: Rechtbank van eerste aanleg Brussel - Belgique. - Taxes parafiscales - Cotisations obligatoires au bénéfice d'un fonds de la santé et de la production des animaux. - Affaires jointes C-144/91 et C-145/91. - Procédure pénale contre Gérard Jerôme Claeys. - Demande de décision préjudicielle: Rechtbank van eerste aanleg Ieper - Belgique. - Taxes parafiscales - Cotisations obligatoires au bénéfice d'un office national des débouchés agricoles et horticoles. - Affaire C-114/91.

Recueil de jurisprudence 1992 page I-06523


Conclusions de l'avocat général

++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Les présentes affaires soulèvent, une fois de plus, la question de la compatibilité, avec le droit communautaire, de régimes nationaux de taxes parafiscales. Synthétiquement, les circonstances de l' espèce présentent les caractéristiques suivantes:

- les impositions dont il s' agit frappent tant les produits nationaux que les produits importés et, tout au moins formellement, elles ne présentent aucun caractère discriminatoire, étant perçues au même taux, sur la même base d' imposition et selon les mêmes modalités de perception;

- le produit de ces impositions est destiné (par l' intermédiaire d' un organisme ayant reçu délégation à cet effet) à financer des activités qui profitent aux produits nationaux imposés.

Le régime juridique dont relèvent, en droit communautaire, les taxes parafiscales présentant les caractéristiques précédemment indiquées a progressivement été défini par la pratique administrative et jurisprudentielle. Dans la majeure partie des cas examinés par la Cour, la légalité de telles impositions a essentiellement été appréciée en fonction des dispositions fiscales du traité, à savoir les articles 9 et 12, d' une part, et l' article 95, d' autre part.

A côté de cette jurisprudence, il existe néanmoins d' autres arrêts dont il résulte que les taxes parafiscales en cause - pour la raison précise qu' elles sont spécifiquement destinées à financer des interventions en faveur d' entreprises déterminées - relèvent également des dispositions (de fond et de forme) régissant les aides étatiques. En particulier, il résulte clairement de la pratique de la Commission en matière d' aides que, dans certains cas déterminés, le financement des aides au moyen de taxes parafiscales doit être considéré comme incompatible avec l' article 92 du traité.

A la lumière de ce qui précède, nous nous efforcerons, dans les présentes observations, de préciser les critères en fonction desquels les dispositions mentionnées du traité sont à appliquer aux taxes parafiscales en cause. Nous examinerons ensuite certaines particularités des litiges qui font l' objet des procédures au principal afin de formuler des réponses aussi circonstanciées que possible aux questions déférées par les juges de renvoi.

a) Application des articles 9 et 12 et de l' article 95 aux taxes parafiscales

A cet égard, il y a lieu de commencer par rappeler que les dispositions du traité concernant les taxes d' effet équivalent (articles 9 et 12) et la disposition relative aux impositions internes discriminatoires (article 95) ne s' appliquent pas cumulativement (voir récent arrêt du 9 juin 1992, Simba, C-228/90 à C-234/90, C-339/90 et C-353/90, Rec. p. I-3713). En matière de taxes parafiscales, le caractère alternatif de ces deux groupes de dispositions a été affirmé par la Cour en termes clairs et précis (voir déjà l' arrêt du 18 juin 1975, IGAV, 94/74, Rec. p. 699, et, récemment, les arrêts du 11 mars 1992, Compagnie Commerciale de l' Ouest, C-78/90 à C-83/90, Rec. p. I-1847, et du 11 juin 1992, Sanders, C-149/91 et C-150/91, Rec. p. I-3899).

La Cour a, en outre, précisé que la qualification et l' évaluation juridique des taxes parafiscales répondant aux caractéristiques précédemment mentionnées exigeaient de tenir compte de la destination du produit fiscal. La prise en compte de cet aspect est essentielle en ce qu' elle permet de faire apparaître, au-delà des aspects purement formels, que certaines impositions, bien que frappant dans les mêmes termes tant le produit national que le produit importé, peuvent ensuite, en raison précisément de leur destination, avoir en réalité une incidence différente sur les deux produits, au point de constituer ainsi, selon les cas, soit des taxes d' effet équivalent soit des impositions internes incompatibles avec l' article 95. En effet, selon une jurisprudence bien établie, même des charges fiscales non discriminatoires sur le plan formel, si elles sont destinées à financer des activités qui profitent spécifiquement aux produits nationaux imposés, se traduisent, pour le produit national, par une charge pécuniaire qui est en fait compensée par les avantages reçus, alors que, pour le produit importé, elles représentent une charge financière nette qui ne trouve aucune compensation sous forme d' attribution d' autres avantages ou subventions (outre les arrêts IGAV et Compagnie Commerciale de l' Ouest, précités, voir arrêts du 19 juin 1973, Capolongo, 77/72, Rec. p. 611; du 22 mars 1977, Steinike et Weinlig, 78/76, Rec. p. 595; du 25 mai 1977, Cucchi, 77/76, Rec. p. 987; du 25 mai 1977, Interzuccheri, 105/76, Rec. p. 1029; du 21 mai 1980, Commission/Italie, 73/79, Rec. p. 1533, et du 28 janvier 1981, Kortmann, 32/80, Rec. p. 251).

En pareille hypothèse, comme l' a précisé la Cour dans les arrêts Compagnie Commerciale de l' Ouest et Sanders, il y a donc lieu de vérifier dans quelle mesure l' imposition grevant le produit national est compensée par les avantages reçus. Si la compensation est intégrale, il faudra conclure qu' il s' agit d' une charge qui, en réalité, frappe uniquement le produit importé et qui constitue donc une taxe d' effet équivalent; si la compensation est partielle, il faudra constater que le produit national est tout de même grevé d' une charge inférieure à celle qui frappe le produit importé et qu' on se trouve donc en présence d' une imposition discriminatoire au sens de l' article 95.

Eu égard à ce principe, il y a néanmoins lieu de formuler trois précisions. En premier lieu, comme la Cour l' a expressément déclaré dans les arrêts Cucchi et Interzuccheri, l' application des articles 9 et 12 ou de l' article 95 aux taxes parafiscales présuppose une identité du produit imposé et du produit national favorisé. En effet, pour pouvoir vérifier s' il y a eu compensation de la charge fiscale supportée, il faut évidemment que la recette fiscale profite, au moins partiellement, au produit national imposé, et non exclusivement à des produits autres que celui imposé. Ainsi, il est clair que la question d' une compensation éventuelle ne se pose absolument pas si une taxe parafiscale, par exemple perçue sur la commercialisation des porcins (d' origine nationale et importés), est ultérieurement utilisée pour financer des avantages qui profitent exclusivement à d' autres secteurs, par exemple la production de bovins ou de volaille.

En second lieu, il convient de souligner que la Cour n' a jamais précisé quels étaient les critères sur la base desquels il fallait vérifier si, et dans quelle mesure, une telle compensation avait été réalisée. Néanmoins, dès lors que la ratio decidendi de la jurisprudence citée consiste à déterminer si les produits nationaux ont bénéficié d' avantages de nature à neutraliser, en totalité ou en partie, la taxe qui les a frappés, nous répéterons, comme nous l' avons déjà soutenu dans l' affaire Compagnie Commerciale de l' Ouest, qu' il y a lieu de procéder à une évaluation globale, c' est-à-dire de comparer, sur la base d' une période de temps significative, le montant total de l' imposition supportée par la production nationale considérée et le montant total des avantages économiques obtenus par cette même production (données qui devraient normalement être fournies par la comptabilité et les statistiques de gestion des organismes qui recueillent le produit de la taxe parafiscale et qui attribuent les subventions ou autres avantages à l' industrie nationale en question). Dans l' hypothèse où les avantages compensent intégralement (voire dépassent) la charge grevant la production nationale, la taxe perçue sur le produit importé devra - comme nous l' avons indiqué - être considérée comme entièrement illégale et, si elle a déjà fait l' objet d' un recouvrement, il sera possible d' en réclamer la restitution intégrale; en revanche, dans l' hypothèse où les avantages compensent partiellement la charge grevant la production nationale, la taxe perçue sur le produit importé devra être proportionnellement réduite (et le cas échéant restituée).

En troisième lieu, il reste à déterminer à qui incombe la charge de la preuve. A notre avis, l' assujetti qui s' oppose à la perception de la taxe doit seulement prouver que la recette de la taxe est destinée à financer des aides en faveur du produit national imposé: cela équivaut à établir que le produit national est, en réalité, soumis à un régime plus favorable que le produit importé (en ce que le premier bénéficie d' une compensation que le second ne reçoit pas), ce qui permet donc de considérer que la taxe présente un caractère discriminatoire et qu' elle est, de ce fait, incompatible avec l' article 95. Cela établi, il nous semble qu' il incombe ensuite à l' État membre concerné de démontrer que l' importance de la discrimination découlant des aides accordées au produit national imposé...

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