CW v European Parliament.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:F:2015:23
CourtCivil Service Tribunal (European Union)
Date26 March 2015
Docket NumberF-124/13
Celex Number62013FJ0124

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

26 mars 2015 ( *1 )

[Texte rectifié par ordonnance du 3 décembre 2015]

«Fonction publique — Fonctionnaires — Recours en annulation — Article 12 bis du statut — Règles internes relatives au comité consultatif sur le harcèlement et sa prévention sur le lieu de travail — Article 24 du statut — Demande d’assistance — Erreurs manifestes d’appréciation — Absence — Rôle et prérogatives du comité consultatif sur le harcèlement et sa prévention sur le lieu de travail — Saisine facultative par le fonctionnaire — Recours en indemnité»

Dans l’affaire F‑124/13,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

CW, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Me C. Bernard-Glanz, avocat,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par Mmes E. Taneva et M. Dean, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (première chambre),

composé de MM. R. Barents, président, E. Perillo et J. Svenningsen (rapporteur), juges,

greffier : Mme X. Lopez Bancalari, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 décembre 2014,

rend le présent

Arrêt

1

Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 19 décembre 2013, CW demande notamment, d’une part, l’annulation de la décision du Parlement européen, du 8 avril 2013, portant rejet de sa demande d’assistance introduite en raison du harcèlement moral dont elle s’estime victime du fait de ses supérieurs hiérarchiques et, d’autre part, la condamnation du Parlement à lui verser des dommages-intérêts.

Cadre juridique

2

L’article 31, intitulé « Conditions de travail justes et équitables », de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne prévoit en son paragraphe 1 :

« Tout travailleur a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa dignité. »

3

L’article 12 bis, paragraphe 3, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne dans sa version applicable au litige (ci-après le « statut ») dispose :

« Par harcèlement moral, on entend toute conduite abusive se manifestant de façon durable, répétitive ou systématique par des comportements, des paroles, des actes, des gestes et des écrits qui sont intentionnels et qui portent atteinte à la personnalité, la dignité ou l’intégrité physique ou psychique d’une personne. »

4

L’article 24, premier alinéa, du statut dispose :

« L’Union assiste le fonctionnaire, notamment dans toute poursuite contre les auteurs de menaces, outrages, injures, diffamations ou attentats contre la personne et les biens, dont il est, ou dont les membres de sa famille sont l’objet, en raison de sa qualité et de ses fonctions. »

5

Le 21 février 2006, le Parlement a adopté de nouvelles « [règles internes relatives au comité consultatif sur le harcèlement et sa prévention sur le lieu de travail] » en vue de mettre en œuvre l’article 12 bis du statut (ci-après les « règles internes »). Il ressort de l’article 9 des règles internes que tout membre du personnel de cette institution, qui est confronté à un problème qui pourrait constituer un harcèlement ou qui pense qu’un problème de ce type existe dans son environnement de travail, peut soumettre la question au comité consultatif sur le harcèlement et sa prévention sur le lieu de travail (ci-après le « comité » ou le « comité consultatif sur le harcèlement »). L’article 11 des règles internes prévoit qu’un membre du personnel qui se sent victime de harcèlement doit être reçu par le comité dans les dix jours ouvrables suivant la demande formulée par cette personne. Aux termes des articles 12 à 14 des règles internes, le comité peut, s’il l’estime souhaitable, formuler des recommandations à la direction en vue de résoudre le problème ; il doit, en vue d’assurer le suivi du dossier, rester en contact avec le membre du personnel concerné et, si nécessaire, avec ses supérieurs hiérarchiques ; et, si le problème persiste, ledit comité transmet un rapport confidentiel au secrétaire général du Parlement contenant des propositions sur l’action ou les actions à entreprendre et, lorsque cela paraît approprié, il peut lui demander des instructions pour la conduite d’une enquête détaillée.

Faits à l’origine du litige

6

Le 6 octobre 2003, la requérante a été recrutée en tant qu’agent auxiliaire au Parlement. Elle a été initialement affectée à l’unité de l’interprétation slovaque de la direction de l’interprétation de la direction générale (DG) « Infrastructures et interprétation », devenue la DG « Interprétation et conférences ». À partir du 8 octobre 2004, elle a été engagée en tant qu’agent temporaire dans cette même unité.

7

Le 1er octobre 2008, la requérante a été nommée fonctionnaire stagiaire au Parlement et affectée à l’unité de l’interprétation tchèque (ci-après l’« unité »). Elle a été titularisée le 1er juillet 2009.

8

De 2008 à 2010, la requérante et Mme H. étaient collègues au sein de l’unité. Lorsque le poste de chef d’unité s’est libéré, elles ont toutes les deux présenté leur candidature. À l’issue de la procédure de sélection, la candidature de la requérante a été écartée au profit de celle de Mme H. (ci-après le « chef d’unité ») qui a été nommée sur cet emploi le 17 mai 2010.

9

Les relations entre la requérante et le chef d’unité se sont dégradées, notamment à la suite d’une réunion de l’unité qui s’est tenue le 23 mai 2011 (ci-après la « réunion du 23 mai 2011 »).

10

À cet égard, en mai 2011, à la suite de la préparation d’une liste de questions de l’unité en vue d’une réunion avec la hiérarchie prévue le 13 mai 2011, un conflit est apparu entre, d’un côté, la requérante et plusieurs autres membres de l’unité et, de l’autre, le chef d’unité et les membres de l’unité qui lui ont apporté leur soutien. En substance, les questions qui avaient été préparées sous la houlette d’une collègue de la requérante, CQ, ont été soumises telles quelles au directeur de la direction de l’interprétation (ci-après le « directeur ») par l’entremise du chef d’unité. Le directeur a, par courriel, vivement réagi à la teneur des questions envisagées en mettant en doute le fait qu’elles aient pu représenter la position de l’ensemble des membres de l’unité. À cet égard, le chef d’unité a, le 12 mai 2011, envoyé à chacun des membres du personnel de l’unité un courriel formulé comme suit : « […] Les questions au nom des interprètes de la cabine [d’interprétation de l’unité] ont été préparées en vue de la réunion de demain avec la direction. Étais-tu au courant de ces questions et reflètent-elles également pleinement ton opinion ? […] »

11

Lors de la réunion du 23 mai 2011, il aurait notamment été demandé au chef d’unité de préciser la raison pour laquelle elle avait envoyé son courriel du 12 mai 2011 aux membres de l’unité. Une polémique qui a duré plusieurs mois s’en est ensuivie en ce qui concerne la rédaction de la version finale du compte rendu de la réunion du 23 mai 2011. À cet égard, la requérante et plusieurs de ses collègues, parmi lesquelles CQ, ont contesté à plusieurs reprises le contenu de ce compte rendu et ont demandé au chef d’unité, au moyen d’un courriel envoyé à toute l’unité, de leur fournir la base juridique lui permettant d’arrêter, en dernière instance, le contenu du compte rendu de la réunion litigieuse. Le 13 septembre 2011, après consultation du directeur et tout en reconnaissant qu’il n’existait pas de règle écrite en la matière, le chef d’unité a envoyé aux membres de l’unité un courriel leur exposant les principes régissant l’adoption des comptes rendus, notamment le fait qu’elle pouvait, en sa qualité de chef d’unité, refuser de rectifier le procès-verbal d’une réunion lorsque la rectification demandée ne reflétait pas les propos tenus lors de la réunion. Le 6 octobre 2011, la requérante a de nouveau envoyé un courriel à l’ensemble de l’unité, y compris au chef d’unité, au sujet du compte rendu de la réunion du 23 mai 2011.

12

Le 17 février 2012, le directeur a envoyé un courriel à la requérante afin que celle-ci exécute les instructions qu’il lui avait données dans une note, remise en main propre, du 1er février précédent, à savoir qu’elle présente, dans un courriel adressé aux membres de l’unité, y compris au chef d’unité, ses excuses pour avoir sous-entendu que le chef d’unité aurait méconnu les règles relatives aux critères de sélection des candidats aux cours de langue organisés durant la période estivale.

13

Le 19 février 2012, la requérante a, par courriel, expliqué au président du comité consultatif sur le harcèlement (ci-après le « président du comité ») que, « [d]epuis le 1er février 2012, [elle] [était] exposée à une pression énorme exercée par [s]es deux supérieurs, [qu’elle était] dans une situation très difficile et [qu’elle] souhaiterai[t] demander une aide professionnelle à ce sujet ». Bien que la requérante avait, par ce courriel, demandé au président du comité de l’informer sur la possibilité de le rencontrer rapidement, celui-ci n’a pas répondu par écrit audit courriel. Par courriel du 21 février 2012, la requérante a alors contacté Mme W., secrétaire du comité, laquelle, par courriel du lendemain, lui a répondu que le président du comité était en cours de déménagement dans un nouveau bureau, ce qui pouvait expliquer qu’il ne reçoive pas ses courriels, et elle lui a suggéré de prendre contact avec Mme E.-H. ou Mme R., toutes deux membres du comité consultatif sur le harcèlement, lesquelles étaient également mises en copie de ce courriel du secrétariat. Sans avoir...

To continue reading

Request your trial

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT