Manfred Danzer and Hannelore Danzer v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2006:167
CourtGeneral Court (European Union)
Date21 June 2006
Docket NumberT-47/02
Celex Number62002TJ0047

Affaire T-47/02

Manfred Danzer et Hannelore Danzer

contre

Conseil de l'Union européenne

« Droit des sociétés — Directives 68/151/CEE et 78/660/CEE — Publicité des comptes annuels — Protection du secret d'affaires — Violation des droits fondamentaux — Base juridique — Recours en indemnité — Irrecevabilité »

Arrêt du Tribunal (troisième chambre) du 21 juin 2006

Sommaire de l'arrêt

1. Recours en indemnité — Autonomie par rapport au recours en annulation

(Art. 235 CE et 288, al. 2, CE)

2. Questions préjudicielles — Saisine de la Cour — Contestation de la validité d'un acte communautaire devant le juge national

(Art. 234, al. 3, CE)

3. Responsabilité non contractuelle — Conditions

(Art. 288, al. 2, CE; directives du Conseil 68/151, art. 2, § 1, f), et 78/660, art. 47)

1. L'action en indemnité fondée sur l'article 288, deuxième alinéa, CE est une voie de recours autonome, ayant sa fonction particulière dans le cadre du système des voies de recours et subordonnée à des conditions d'exercice conçues en vue de son objet spécifique. Elle se différencie du recours en annulation en ce qu'elle tend non à la suppression d'une mesure déterminée, mais à la réparation du préjudice causé par une institution. Le principe de l'autonomie du recours en indemnité trouve ainsi sa justification dans le fait qu'un tel recours se singularise par son objet du recours en annulation. Dès lors, un recours en indemnité doit être déclaré irrecevable lorsqu'il tend, en réalité, au retrait d'un acte devenu définitif et qu'il aurait pour effet, s'il était accueilli, d'annihiler les effets juridiques de l'acte en question. Tel est en particulier le cas lorsque le recours en indemnité vise au paiement d'une somme dont le montant correspond exactement à celui de droits qui ont été payés par le requérant en exécution de l'acte devenu définitif.

(cf. points 27-28)

2. Lorsqu'une question d'interprétation du droit communautaire est soulevée devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, celle-ci est, en principe, tenue, conformément à l'article 234, troisième alinéa, CE, de saisir la Cour à titre préjudiciel. Néanmoins, dans l'hypothèse où l'application du droit communautaire s'impose avec une telle évidence qu'elle ne laisse place à aucun doute raisonnable, cette juridiction peut s'abstenir, dans l'exercice d'un pouvoir d'appréciation qui appartient à elle seule, de soumettre à la Cour une question d'interprétation du droit communautaire qui a été soulevée devant elle.

À plus forte raison, cette juridiction ne saurait être contrainte d'accéder à toute demande de renvoi préjudiciel en appréciation de validité d'un acte communautaire formulée devant elle.

En effet, il ne suffit pas qu'une partie soutienne que le litige pose une question de validité du droit communautaire pour que la juridiction concernée soit tenue de considérer qu'une telle question est soulevée au sens de l'article 234 CE. En particulier, elle est en droit de considérer que la validité de l'acte communautaire contesté ne fait aucun doute et qu'ainsi il n'y a pas lieu d'interroger la Cour à cet égard. La juridiction en cause peut examiner la validité d'un acte communautaire et, si elle n'estime pas fondés les moyens d'invalidité que les parties invoquent devant elle, rejeter ces moyens en concluant que l'acte est pleinement valide. En effet, en agissant de la sorte, elle ne met pas en cause l'existence de l'acte communautaire.

(cf. points 36-37)

3. L'adoption de l'article 2, paragraphe 1, sous f), de la directive 68/151, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au sens de l'article 58, deuxième alinéa, du traité, pour protéger les intérêts tant des associés que des tiers, et de l'article 47 de la directive 78/660 concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés, lesquelles dispositions prévoient la publication obligatoire des comptes annuels, ne saurait être constitutive d'un comportement fautif de nature à engager la responsabilité de la Communauté. En effet, l'illégalité éventuelle d'une directive de coordination ne serait pas, à elle seule, suffisante pour engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté, cette responsabilité ne pouvant être engagée qu'en présence d'une violation suffisamment caractérisée d'une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers.

(cf. point 52)




ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

21 juin 2006 (*)

« Droit des sociétés – Directives 68/151/CEE et 78/660/CEE – Publicité des comptes annuels – Protection du secret d’affaires – Violation des droits fondamentaux – Base juridique – Recours en indemnité – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T 47/02,

Manfred Danzer, demeurant à Linz (Autriche),

Hannelore Danzer, demeurant à Linz,

représentés initialement par Mes J. Hintermayr, M. Krüger, F. Haunschmidt, G. Minichmayr et P. Burgstaller, puis par Mes Hintermayr, Haunschmidt, Minichmayr, Burgstaller, G. Tusek, T. Riedler et C. Hadeyer, avocats,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme M. Giorgi Fort et M. M. Bauer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande d’indemnisation au titre de l’article 288 CE, visant à la réparation du préjudice prétendument subi par les requérants du fait de l’obligation de publier certaines informations dans les comptes annuels des sociétés dont ils sont gérants, résultant de l’article 2, paragraphe 1, sous f), de la première directive 68/151/CEE du Conseil, du 9 mars 1968, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au sens de l’article 58, deuxième alinéa, du traité CEE (devenu article 58, deuxième alinéa, du traité CE, lui-même devenu article 48, deuxième alinéa, CE), pour protéger les intérêts tant des associés que des tiers (JO L 65, p. 8), et de l’article 47 de la quatrième directive 78/660/CEE du Conseil, du 25 juillet 1978, fondée sur l’article 54, paragraphe 3, sous g), du traité CEE [devenu article 54, paragraphe 3, sous g), du traité CE, lui-même devenu, après modification, article 44, paragraphe 2, sous g), CE] et concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés (JO L 222, p. 11), et, d’autre part, une demande de constatation d’invalidité des dispositions précitées,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme V. Tiili et M. O. Czúcz, juges,

greffier : M. I. Natsinas, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 novembre 2005,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique et factuel du litige

1 L’article 2, paragraphe 1, sous f), de la première directive 68/151/CEE du Conseil, du 9 mars 1968, tendant à coordonner, pour les rendre équivalentes, les garanties qui sont exigées, dans les États membres, des sociétés au sens de l’article 58, deuxième alinéa, du traité CEE (devenu article 58, deuxième alinéa, du traité CE, lui-même devenu article 48, deuxième alinéa, CE), pour protéger les intérêts tant des associés que des tiers (JO L 65, p. 8) (ci-après la « première directive sociétés »), dans sa version en vigueur à l’époque des faits de l’espèce, prévoit :

« 1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que la publicité obligatoire relative aux sociétés porte au moins sur les actes et indications suivants :

[…]

f) le bilan et le compte de profits et pertes de chaque exercice […] »

2 Aux termes de l’article 6 de cette même directive :

« Les États membres prévoient des sanctions appropriées en cas :

– de défaut de publicité du bilan et du compte de profits et pertes telle qu’elle est prescrite à l’article 2, paragraphe 1, sous f). »

3 Selon l’article 47, paragraphe 1, de la quatrième directive 78/660/CEE du Conseil, du 25 juillet 1978, fondée sur l’article 54, paragraphe 3, sous g), du traité CEE [devenu article 54, paragraphe 3, sous g), du traité CE, lui-même devenu, après modification, article 44, paragraphe 2, sous g), CE] et concernant les comptes annuels de certaines formes de sociétés (JO L 222, p. 11, ci-après la « quatrième directive sociétés »), tel que modifié par la septième directive 83/349/CEE du Conseil, du 13 juin 1983 (JO L 193, p. 1) :

« 1. Les comptes annuels régulièrement approuvés et le rapport de gestion ainsi que le rapport établi par la personne chargée du contrôle des comptes font l’objet d’une publicité effectuée selon les modes prévus par la législation de chaque État membre conformément à l’article 3 de la [première directive sociétés].

Toutefois, la législation d’un État membre peut permettre que le rapport de gestion ne fasse pas l’objet de la publicité visée ci-dessus. Dans ce cas, le rapport de gestion est tenu à la disposition du public au siège de la société dans l’État membre concerné. Une copie intégrale ou partielle de ce rapport doit pouvoir être obtenue sur simple demande. Le prix réclamé pour cette copie ne peut excéder son coût administratif. »

4 Les articles 9 et 10, et 22 à 27 de cette directive décrivent les schémas, respectivement, de la structure du bilan et de la structure du compte de profits et pertes que les États membres mettent en place. Les articles 43 à 45 et 46 décrivent, respectivement, le contenu de l’annexe et du rapport de gestion.

5 Ces dispositions ont été transposées en droit autrichien par la Rechnungslegungsgesetz (loi relative à l’établissement des comptes) (BGBl 475/1990) et par la EU-GesRÄG (loi modificative du droit des sociétés) (BGBl 304/1996), modifiant certains articles du Handelsgesetzbuch (code de commerce autrichien, ci-après le « HGB »). Conformément à la quatrième directive sociétés, le HGB prévoit un régime de publicité différencié selon la taille des sociétés.

6 M. Danzer et Mme ...

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