Total SA and Elf Aquitaine SA v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2011:378
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-190/06
Date14 July 2011
Celex Number62006TJ0190
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado

Affaire T-190/06

Total SA et Elf Aquitaine SA

contre

Commission européenne

« Concurrence — Ententes — Peroxyde d’hydrogène et perborate de sodium — Décision constatant une infraction à l’article 81 CE — Imputabilité du comportement infractionnel — Droits de la défense — Présomption d’innocence — Obligation de motivation — Égalité de traitement — Principe d’individualité des peines et des sanctions — Principe de légalité des délits et des peines — Principe de bonne administration — Sécurité juridique — Détournement de pouvoir — Amendes »

Sommaire de l'arrêt

1. Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation

(Art. 81 CE et 82 CE)

2. Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation

(Art. 81 CE et 82 CE)

3. Concurrence — Procédure administrative — Communication des griefs — Contenu nécessaire — Respect des droits de la défense — Portée

(Art. 81 CE et 82 CE; règlement du Conseil nº 1/2003, art 27)

4. Actes des institutions — Motivation — Obligation — Portée — Décision d'application des règles de concurrence — Décision concernant une pluralité de destinataires

(Art. 81 CE, 82 CE et 253 CE)

5. Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Société mère et filiales — Unité économique — Critères d'appréciation

(Art. 81 CE et 82 CE; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 23, § 2)

6. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Circonstances atténuantes — Imputation du comportement infractionnel d'une filiale à l'entreprise unique formée par celle-ci et sa société mère — Absence de connaissance, par la société mère, du comportement infractionnel de sa filiale — Exclusion

(Art. 81 CE et 82 CE; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 23)

7. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Circonstances atténuantes — Obligation de prendre en compte les amendes déjà infligées pour d'autres activités anticoncurrentielles — Absence

(Art. 81, § 1 CE; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 23, § 2)

1. Le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques. En effet, il en est ainsi parce que, dans une telle situation, la société mère et sa filiale font partie d’une même unité économique et, partant, forment une seule entreprise, au sens de l'article 81 CE, ce qui permet à la Commission d'adresser une décision imposant des amendes à la société mère, sans qu'il soit requis d'établir l'implication personnelle de cette dernière dans l'infraction.

Dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital social de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence de l'Union, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale.

Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital social d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché.

La structure de détention du capital d’une filiale constitue un critère suffisant pour poser ladite présomption, sans que la Commission soit tenue d’avancer des indices supplémentaires relatifs à l’exercice effectif d’une influence de la société mère. Cette conclusion n’est pas remise en cause par le fait que de tels indices supplémentaires aient pu être relevés dans d'autres affaires. En effet, la mise en œuvre de la présomption en cause n'est pas subordonnée à l'existence de tels indices. De même, il n'est pas exigé que la Commission établisse à cette fin que la société mère avait connaissance, au moment des faits, du comportement infractionnel de sa filiale.

Lorsque la Commission a considéré, au regard de tous les destinataires d'une décision infligeant une amende pour violation du droit de la concurrence, que le contrôle de la totalité ou de la quasi-totalité du capital de la filiale suffisait, en l'absence d'argument réfutant la présomption en résultant, à imputer la responsabilité à une société mère, des indices supplémentaires d'une influence exercée par certaines sociétés mères concernées sur leurs filiales ayant été exposés, lorsqu'ils étaient disponibles, soit pour renforcer la conclusion résultant déjà valablement du contrôle entier du capital de la filiale, soit pour répondre aux arguments développés par les entreprises concernées, le fait que, au regard de certains destinataires de la décision, la Commission ait invoqué, en plus de la présomption, certains indices supplémentaires de l’influence déterminante exercée par des sociétés mères ne saurait signifier que les principes appliqués n’ont pas été les mêmes pour tous les destinataires, et que le principe de l'égalité de traitement aurait été violé.

(cf. points 35-38, 49-50, 190, 196)

2. Lorsque la Commission applique la présomption d'exercice d'une influence déterminante afin d'imputer à une société mère le comportement infractionnel de sa filiale, il incombe à la société mère concernée d’apporter des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte sur le marché de façon autonome. À cet égard, il convient de prendre en considération l’ensemble des éléments pertinents relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent cette filiale à la société mère, lesquels peuvent varier selon les cas. Il n’y a pas lieu, notamment, de restreindre cette appréciation aux seuls éléments se rapportant à la politique commerciale stricto sensu de la filiale, telle que la stratégie de distribution ou des prix. En particulier, la présomption en cause ne saurait être renversée par la seule démonstration que c’est la filiale qui gère ces aspects spécifiques de sa politique commerciale sans recevoir de directives à cet égard. De même, bien que le chevauchement de dirigeants entre la société mère et la filiale constitue un indice de l’exercice d’une influence déterminante, l’absence d’un tel chevauchement ne saurait constituer un indice suffisant de l’autonomie de la filiale.

La seule circonstance que la société mère est un holding non opérationnel ne saurait suffire pour exclure qu'elle ait exercé une influence déterminante sur sa filiale, en coordonnant notamment les investissements financiers au sein du groupe. En effet, dans le contexte d’un groupe de sociétés, un holding est une société ayant vocation à regrouper des participations dans diverses sociétés et dont la fonction est d’en assurer l’unité de direction.

En outre, dans un groupe de sociétés, la division des tâches constitue un phénomène normal qui ne suffit pas à renverser la présomption selon laquelle des sociétés mères et leurs filiales constituent une seule entreprise, au sens de l’article 81 CE. Il en est de même en ce qui concerne le fait qu'une filiale intervient sur le marché en son nom et pour son propre compte, et non en représentation de sa société mère. Aucune conclusion ne saurait davantage être tirée du fait qu'une société mère n’ait jamais eu de clients communs avec sa filiale, qu’elle ait été absente des marchés investis par sa filiale et des marchés connexes, que l’activité relative aux produits concernés ne constitue qu’une très faible part du chiffre d’affaires global de la société mère et que ces produits ne représentent que quelques-uns des très nombreux produits de l’activité de la filiale.

Par ailleurs, étant donné que l’autonomie d'une filiale ne s’apprécie pas au regard des seuls aspects de la gestion opérationnelle de l’entreprise, le fait que cette filiale n’ait jamais mis en œuvre, au profit de sa société mère, une politique d’information spécifique sur un marché concerné ne saurait suffire à démontrer son autonomie. De même, le fait, pour une entreprise, de ne pas se présenter comme un seul interlocuteur, tant au cours de la procédure administrative qu’au stade contentieux, ne permet pas de conclure que la filiale concernée est autonome par rapport à sa ou ses sociétés mères.

De plus, ce n’est pas une implication directe de la société mère dans l’infraction commise par sa filiale, mais le fait qu’elles constituent une seule entreprise, qui habilite la Commission à imputer à la première citée une infraction aux règles de concurrence commise par sa filiale. Une telle imputation ne saurait, dès lors, être remise en cause par le fait qu'une société mère n’a pas été informée par sa filiale et n’a pris connaissance de l’existence d'une entente qu’à la suite des vérifications menées par la Commission dans les locaux de la filiale.

Enfin, la perception par des tiers de l’image d’une société ne saurait suffire en elle-même à démontrer qu’une filiale est autonome vis-à-vis de sa ou de ses sociétés mères.

(cf. points 55-57, 65, 68, 71-73, 75-76, 78)

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