European Parliament v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:447
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-436/03
Date12 July 2005
Celex Number62003CC0436
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme CHRISTINE Stix-Hackl

présentées le 12 juillet 2005 (1)

Affaire C-436/03

Parlement européen

contre

Conseil de l’Union européenne

«Règlement du Conseil – Société coopérative européenne (SEC) – Base juridique – Article 95 CE – Article 308 CE»





I – Remarques introductives

1. Ce litige opposant le Parlement européen au Conseil de l’Union européenne concerne la création de la société coopérative européenne (SEC). Par le présent recours, le Parlement demande l’annulation du règlement (CE) n° 1435/2003 du Conseil, du 22 juillet 2003, relatif au statut de la société coopérative européenne (SEC) (2) (ci-après le «règlement»), fondé sur l’article 308 CE. La question de principe qui se pose à cet égard est de savoir si, et à quelles conditions, le Conseil peut adopter des actes sur le fondement de l’article 308 CE. Au premier plan, c’est donc pour l’essentiel l’interprétation de l’article 95 CE qui est en cause dans la présente procédure.

II – Le règlement litigieux

A – La procédure législative

2. Le 6 mars 1992, la Commission des Communautés européennes a présenté au Conseil sa proposition initiale (3) concernant la SEC. Cette proposition était fondée sur l’article 100 A du traité CE, c’est-à-dire la disposition à laquelle a succédé l’article 95 CE. Le 6 juillet 1993, la Commission a adopté, après une première lecture par le Parlement, une proposition modifiée (4) qu’elle a transmise au Conseil.

3. À la suite des modifications apportées aux traités par le traité de Maastricht et par le traité d’Amsterdam, la base juridique a été adaptée aux besoins de l’article 95 CE (5). Le Parlement a confirmé cette base juridique dans son avis.

4. À compter du printemps 2002, des discussions au sein du Conseil ont amené à modifier la base juridique, l’article 308 CE étant substitué à l’article 95 CE. En raison de cette modification, le Conseil a décidé de consulter une nouvelle fois le Parlement.

5. Le 14 mai 2003, celui-ci a rendu son avis, dans lequel il demandait que la base juridique soit de nouveau l’article 95 CE. Lorsqu’elle s’est exprimée sur les amendements du Parlement, la Commission s’est ralliée à la position de ce dernier.

6. Le 22 juillet 2003, le Conseil a formellement adopté le règlement, sans renoncer au choix de l’article 308 CE comme base juridique.

B – La finalité et le contenu du règlement

7. S’agissant de l’objectif poursuivi par le règlement, on peut lire, dans son deuxième considérant: «L’achèvement du marché intérieur et l’amélioration de la situation économique et sociale dans l’ensemble de la Communauté qui en découle impliquent non seulement que les obstacles aux échanges commerciaux devraient être éliminés, mais aussi que les structures de production devraient être adaptées à la dimension communautaire du marché. À cette fin, il est essentiel que les entreprises, quelle qu’en soit la forme, dont les activités ne sont pas destinées à répondre exclusivement à des besoins existant au niveau local, soient en mesure de planifier et de réorganiser leurs activités à l’échelle de la Communauté».

8. Le troisième considérant est en ces termes:

«Le cadre juridique dans lequel les entreprises devraient exercer leurs activités dans la Communauté reste principalement fondé sur des législations nationales et ne correspond donc plus au cadre économique dans lequel elles doivent se développer pour permettre la réalisation des objectifs énoncés à l’article 18 du traité. Cette situation entrave considérablement le regroupement entre sociétés d’États membres différents.»

9. Il découle du sixième considérant que la Communauté doit doter les coopératives normalement reconnues dans tous les États membres d’instruments juridiques adéquats et propres à faciliter le développement de leurs activités transnationales.

10. Le onzième considérant explicite la situation en ces termes:

«La coopération transnationale entre coopératives se heurte actuellement dans la Communauté à des difficultés d’ordre juridique et administratif qu’il convient d’éliminer dans un marché sans frontières.»

11. Le douzième considérant donne des indications sur les moyens permettant d’atteindre cet objectif:

«L’instauration d’une forme juridique européenne, fondée sur des principes communs, mais prenant en compte les spécificités des coopératives, devrait permettre à celles-ci d’opérer au-delà de leurs frontières nationales, sur tout ou une partie du territoire de la Communauté.»

12. Le treizième considérant précise que l’objet essentiel de ce règlement «est de permettre la création d’une SEC par des personnes physiques résidant dans des États membres différents ou des personnes morales relevant du droit d’États membres différents».

13. Le seizième considérant signale que la fiscalité, la concurrence, la propriété intellectuelle ou l’insolvabilité ne sont pas des questions couvertes par le règlement.

14. Le dix-huitième considérant expose les raisons pour lesquelles une partie du cadre juridique est déterminée par le renvoi au droit national:

«Les travaux de rapprochement du droit national des sociétés ont notablement progressé, ce qui permet en ce qui concerne la SEC, dans des domaines où son fonctionnement n’exige pas de règles communautaires uniformes, de renvoyer, par analogie, à certaines dispositions de l’État membre du siège de la SEC prises en vue de mettre en œuvre les directives sur les sociétés commerciales, dans la mesure où ces dispositions sont pertinentes du point de vue de la réglementation applicable à la SEC.»

15. L’objet principal d’une SEC est, selon l’article 1er, paragraphe 3, de satisfaire les besoins de ses membres et/ou de développer les activités économiques et/ou sociales de ces derniers.

16. L’article 1er, paragraphe 5, du règlement prévoit expressément que la SEC est dotée de la personnalité juridique, qu’elle acquiert, conformément à l’article 18, par son immatriculation dans un registre.

17. Le règlement contient en outre un certain nombre de dispositions sur le capital (articles 3 et 4), les statuts (article 5), le siège et son transfert (articles 6 et 7), l’immatriculation et la publicité (articles 11 à 13), la qualité de membre (articles 14 à 16), les types de constitution et notamment par voie de fusion et de transformation (articles 2 et 19 à 35), la structure (articles 36 à 63), l’émission de titres (article 64), l’affectation du résultat (articles 65 et 67), les comptes annuels et les comptes consolidés (articles 68 à 71), et également sur la dissolution, la liquidation, l’insolvabilité et la cessation des paiements (articles 72 à 76).

18. Une caractéristique particulière de la SEC à souligner est sa faculté, conformément à l’article 7, de transférer son siège sans que cela donne lieu à dissolution.

19. L’article 8 constitue la disposition clé s’agissant du droit applicable. Cette disposition établit une hiérarchie claire: elle prévoit que la SEC est régie en premier lieu par le règlement, et seulement ensuite par les dispositions des statuts de la SEC concernée – lorsque le règlement l’autorise expressément – et par le droit national.

20. L’article 9 nous renseigne sur le traitement de la SEC dans les États membres. Sous réserve du règlement, une SEC est traitée dans chaque État membre comme une coopérative constituée conformément à la législation de l’État membre dans lequel la SEC a son siège statutaire.

21. Il ressort par conséquent de son but et de son contenu que le règlement concerne la création d’une certaine forme de société, à savoir la SEC.

III – Procédure devant la Cour et conclusions des parties

22. Le recours du Parlement a été enregistré au greffe de la Cour le 15 octobre 2003. Par décision de son président, la Cour a autorisé le Royaume d’Espagne et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord à intervenir au soutien des conclusions du Conseil et la Commission à intervenir au soutien des conclusions du Parlement.

23. Le Parlement conclut à l’annulation du règlement, auquel cas il demande que ses effets soient maintenus en vigueur jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle réglementation en la matière adoptée dans un délai raisonnable sur la base juridique appropriée; il conclut également à la condamnation du Conseil aux dépens.

24. Le Conseil conclut au rejet du recours comme non fondé et à la condamnation du requérant aux dépens.

IV – Les principaux arguments des parties et des parties intervenantes

A – La partie requérante et la partie intervenant au soutien de ses conclusions

25. À l’appui de son recours en annulation, le Parlement reproche au Conseil d’avoir pris pour base juridique du règlement l’article 308 CE, alors que ce règlement aurait dû être fondé sur l’article 95 CE. Tandis que l’article 308 CE prévoit une simple consultation du Parlement, l’article 95 CE déclenche la procédure de codécision conformément à l’article 251 CE.

26. Selon le Parlement, l’article 95 CE est la base juridique appropriée pour l’adoption du statut de la SEC, car le règlement rapproche les dispositions des États membres afin de permettre la constitution d’une SEC. Il s’agit dans sa forme juridique d’une société nationale de caractère européen, en raison des renvois au droit national qui reste déterminant pour certains aspects.

27. La Commission, intervenant au soutien du Parlement, défend également une conception large de la notion de rapprochement des législations, dont relève également selon elle l’introduction de règles nouvelles, c’est-à-dire également le fait de compléter le droit national applicable aux sociétés coopératives par le statut de la SEC. Elle fait valoir que le règlement, compte tenu de son but et de son contenu, aurait dû être fondé sur l’article 95 CE, en particulier parce qu’il contribue à l’établissement et au fonctionnement du marché intérieur.

B – La partie défenderesse et les parties intervenant au soutien de ses conclusions

28. Le Conseil, en tant que partie...

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