Opinion of Advocate General Bot delivered on 2 May 2019.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:360
Docket NumberC-42/18
Celex Number62018CC0042
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date02 May 2019

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 2 mai 2019 (1)

Affaire C42/18

Finanzamt Trier

contre

Cardpoint GmbH, successeur en droit de Moneybox Deutschland GmbH

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Sixième directive 77/388/CEE – Exonérations – Article 13, B, sous d), point 3 – Paiements – Opérations concernant les paiements – Notions – Retrait d’argent à un distributeur automatique de billets – Service fourni par une société à une banque dans le cadre de l’externalisation de l’exploitation de distributeurs automatiques de billets »






I. Introduction

1. Né du refus du Finanzamt Trier (centre des impôts de Trèves, Allemagne) (2) d’accorder à Cardpoint GmbH (3) une exonération fiscale pour une prestation de services fournie à une banque dans le cadre de l’exploitation de distributeurs automatiques de billets, le présent renvoi préjudiciel du Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne) invite la Cour à se prononcer sur l’interprétation de l’article 13, B, sous d), point 3, de la sixième directive 77/388/CEE (4).

2. En vertu de cette disposition, les opérations concernant notamment les paiements et les virements sont exonérées de TVA.

3. Si la Cour a déjà eu l’occasion d’interpréter ladite disposition, elle est ici invitée à le faire dans un contexte spécifique. En effet, elle doit déterminer si la prestation de services relative à l’exploitation des distributeurs automatiques de billets fournie aux banques exploitant ces distributeurs peut être exonérée de TVA en tant qu’opérations concernant les paiements. Dans un contexte d’externalisation croissante par les banques de l’exploitation des distributeurs automatiques de billets, l’interprétation fournie par la Cour est susceptible d’avoir des répercussions importantes pour les prestataires de tels services.

4. Dans les présentes conclusions, nous exposerons les raisons pour lesquelles nous estimons que, dans le cadre de l’externalisation par une banque à une entreprise tierce, les activités relatives à l’exploitation de distributeurs automatiques de billets effectuées par l’entreprise tierce, consistant à rendre et à maintenir opérationnels les distributeurs de billets, à approvisionner ces derniers, à y installer du matériel informatique ainsi que des logiciels afin de lire les données des cartes bancaires, à transmettre une demande d’autorisation d’effectuer un retrait à la banque émettrice de la carte bancaire utilisée et à enregistrer les opérations de retrait, ne relèvent pas de l’exonération prévue à l’article 13, B, sous d), point 3, de la sixième directive.

II. Le cadre juridique

A. La sixième directive

5. En vertu de l’article 2 de la sixième directive :

« Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée :

1. les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel ;

[...] »

6. Le titre X de cette directive prévoit des exonérations de TVA qui doivent être accordées par les États membres. Dans ce cadre, l’article 13, B, sous d), points 3 et 4, de ladite directive est rédigé comme suit :

« Sans préjudice d’autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels :

[...]

d) les opérations suivantes :

[...]

3. les opérations, y compris les négociations, concernant les dépôts de fonds, comptes courants, paiements, virements, créances, chèques et autres effets de commerce, à l’exception du recouvrement de créances ;

4. les opérations, y compris la négociation, portant sur les devises, les billets de banque et les monnaies qui sont des moyens de paiement légaux, à l’exception des monnaies et billets de collection ; sont considérés comme de collection les pièces en or, en argent ou en autre métal, ainsi que les billets, qui ne sont pas normalement utilisés dans leur fonction comme moyen de paiement légal ou qui présentent un intérêt numismatique. »

B. Le droit allemand

7. Aux termes de l’article 4, point 8, sous d), de l’Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires) sont exonérées de TVA, « les opérations, et la négociation des opérations, concernant les dépôts de fonds, les comptes courants, les paiements et les virements, et le recouvrement d’effets de commerce ».

III. Les faits du litige au principal et la question préjudicielle

8. En vertu de ses obligations contractuelles avec une banque, Cardpoint fournissait une prestation de services pour l’exploitation de distributeurs automatiques de billets. Plus précisément, Cardpoint plaçait aux endroits prévus des distributeurs automatiques de billets en état opérationnel, avec logiciels et matériel informatiques, pourvus du logo de la banque exploitant ces distributeurs et était responsable de leur bon fonctionnement. Pour ce faire, tout d’abord, elle était en charge du transport de billets, mis à disposition par cette banque, et de l’approvisionnement des distributeurs. Ensuite, il lui incombait d’installer du matériel informatique dans les distributeurs concernés ainsi que certains logiciels nécessaires au bon fonctionnement de ceux-ci. Enfin, elle donnait des conseils quant au fonctionnement courant des distributeurs.

9. En ce qui concerne les opérations de retrait d’argent, au moment de l’utilisation des distributeurs à de telles fins, dès l’introduction de la carte bancaire dans le distributeur, un logiciel spécial lisait des données déterminées de cette carte. Tout d’abord, Cardpoint contrôlait ces données et transmettait par voie électronique, à Bank‑Verlag GmbH (5), une demande d’autorisation de l’opération souhaitée par le détenteur de la carte. Ensuite, Bank-Verlag adressait la demande au réseau interbancaire, qui la transmettait, à son tour, à la banque émettrice de la carte bancaire concernée. Cette dernière contrôlait la couverture du compte du titulaire et renvoyait, par la même chaîne de transmission, l’approbation ou le refus du retrait souhaité. Une fois la réponse reçue, Cardpoint générait un enregistrement sur le retrait d’argent et, en cas d’acceptation, exécutait l’opération souhaitée et générait un enregistrement du retrait. Enfin, cet enregistrement était transmis en tant qu’instruction comptable à son cocontractant, c’est-à-dire la banque qui exploitait le distributeur en question. Celle-ci introduisait les enregistrements sans modification dans le système de la Deutsche Bundesbank (Banque fédérale d’Allemagne) (6). Cardpoint générait également une liste journalière non modifiable comportant toutes les opérations du jour, qui était également remise à la BBK.

10. Dans la mesure où seules les banques peuvent être titulaires de comptes de règlement auprès de la BBK, elles effectuaient l’enregistrement dans le système de cette dernière. Cet enregistrement permettait d’établir avec effet obligatoire le droit de créance de la banque qui exploitait le distributeur en question à l’égard de la banque du titulaire du compte concerné par l’opération, ainsi que les frais encourus de ce fait. En outre, par l’enregistrement des données, le règlement, entre la banque exploitant le distributeur et la banque émettrice de la carte du client, du montant versé majoré des frais éventuels d’utilisation du distributeur était immédiatement comptabilisé.

11. Le 7 février 2007, estimant que les prestations fournies devaient être exonérées de TVA, Cardpoint a introduit une déclaration modifiée de la TVA pour l’année 2005 et a demandé une modification de l’avis d’imposition existant.

12. Cette demande a été rejetée par les autorités fiscales, mais le Finanzgericht Rheinland-Pfalz (tribunal des finances de Rhénanie-Palatinat, Allemagne) a fait droit au recours de Cardpoint contre ce rejet.

13. Les autorités fiscales ont introduit un recours devant le juge de renvoi dans le cadre d’une procédure en Revision, cette procédure a été suspendue jusqu’au prononcé de l’arrêt Bookit.

14. Ayant pris note du fait que, selon cet arrêt, l’exonération pour les opérations concernant les paiements et les virements ne s’applique pas à un service dit « de traitement du paiement par carte de débit ou par carte de crédit » effectué par un assujetti, prestataire de ce service, lorsqu’une personne achète, par l’intermédiaire de ce prestataire, un billet de cinéma qu’il vend au nom et pour le compte d’une autre entité, que cette personne paye par carte de débit ou par carte de crédit, le juge de renvoi se demande s’il en est de même pour les prestations fournies par Cardpoint.

15. Selon le juge de renvoi, les prestations fournies par Cardpoint sont des prestations techniques et administratives permettant le retrait d’espèces depuis les distributeurs automatiques de billets, dès lors qu’elles constituent des prestations d’assistance similaires à celles en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Bookit et que Cardpoint se limite à appliquer techniquement les instructions contenues dans un code d’autorisation.

16. À cet égard, le juge de renvoi souligne les similitudes entre la situation en cause au principal et celle ayant donné lieu à l’arrêt Bookit. Ainsi, Cardpoint obtiendrait les données relatives à la carte bancaire du titulaire du compte concerné et procéderait à la transmission de ces données à la banque émettrice de la carte. En outre, Cardpoint ne serait pas responsable du contrôle et de l’approbation des ordres individuels, dès lors qu’elle ne réaliserait...

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