Fonderie 2A v Ministre de l'Économie et des Finances.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2014:2047
Date03 July 2014
Celex Number62013CC0446
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-446/13
62013CC0446

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 3 juillet 2014 ( 1 )

Affaire C‑446/13

Société Fonderie 2A

contre

Ministre de l’Économie et des Finances

[demande de décision préjudicielle formée par le Conseil d’État (France)]

«Fiscalité — TVA — Article 8, paragraphe 1, sous a), première phrase, de la sixième directive 77/388/CEE — Lieu de la livraison de biens en cas d’expédition ou de transport — Moment où l’expédition à destination de l’acquéreur prend son départ en cas d’interruption pour transformation du bien dans l’État membre de l’acquéreur — Article 28 bis, paragraphes 5, 6 et 7, de la sixième directive 77/388 — Transfert et affectation intracommunautaires d’un bien — Article 28 quater, A, sous a), de la sixième directive 77/388 — Exonération des livraisons intracommunautaires»

I – Introduction

1.

La présente affaire montre une nouvelle fois la complexité du système de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») dans la taxation des échanges entre les États membres. La solution même d’affaires claires se trouve compliquée par des règles difficilement compréhensibles du droit de la TVA de l’Union.

2.

En l’espèce, une société a vendu des pièces métalliques d’Italie en France. Ces pièces métalliques ayant été peintes en France en cours d’acheminement vers l’acheteur, la question de savoir où la vente doit être taxée, en France ou en Italie, n’est malheureusement pas simple à résoudre.

3.

La présente affaire donne toutefois à la Cour l’occasion de compléter sa jurisprudence sur le départ, l’arrivée, la durée et l’imputation d’un transport dit intracommunautaire ( 2 ).

II – Cadre juridique

4.

À l’époque qui intéresse la procédure au principal, la TVA était régie par la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme ( 3 ), dans sa version en vigueur pour l’année 2001 (ci-après la «sixième directive»).

Faits générateurs de la taxe

5.

Aux termes de l’article 2, point 1, de la sixième directive, sont en principe soumises à la taxe: «les livraisons de biens […] effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel». L’article 5, paragraphe 1, de la sixième directive définit la livraison d’un bien comme étant «le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire».

6.

Le «régime transitoire de taxation des échanges entre les États membres» (titre XVI bis de la sixième directive) a créé un fait générateur supplémentaire en son article 28 bis, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive:

«a)

les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel, ou par une personne morale non assujettie, lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel […]».

7.

Le régime transitoire assimile également certaines opérations aux deux faits générateurs de la taxe précités de l’article 2, point 1, et de l’article 28 bis, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive.

8.

C’est ainsi que l’article 28 bis, paragraphe 5, de la sixième directive prévoit:

«Est assimilé à une livraison de biens effectuée à titre onéreux:

a)

[abrogé]

b)

le transfert par un assujetti d’un bien de son entreprise à destination d’un autre État membre.

Est considéré comme transféré à destination d’un autre État membre, tout bien corporel expédié ou transporté, par l’assujetti ou pour son compte, en dehors du territoire visé à l’article 3, mais à l’intérieur de la Communauté, pour les besoins de son entreprise, autres que les besoins de l’une des opérations suivantes:

[…]

[…]

la livraison de ce bien effectuée par l’assujetti à l’intérieur du pays dans les conditions prévues à l’article […] 28 quater titre A,

[…]»

9.

L’article 28 bis, paragraphe 6, premier alinéa, de la sixième directive dispose:

«Est assimilée à une acquisition intracommunautaire de biens effectuée à titre onéreux l’affectation par un assujetti aux besoins de son entreprise d’un bien expédié ou transporté, par l’assujetti ou pour son compte, à partir d’un autre État membre à l’intérieur duquel le bien a été produit, extrait, transformé, acheté, acquis au sens du paragraphe 1 ou importé par l’assujetti, dans le cadre de son entreprise, dans cet autre État membre.»

10.

Enfin, l’article 28 bis, paragraphe 7, de la sixième directive impose:

«Les États membres prennent les mesures assurant que sont qualifiées d’acquisitions intracommunautaires de biens les opérations qui, si elles avaient été effectuées à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel, auraient été qualifiées de livraisons de biens au sens du paragraphe 5 et au sens de l’article 5.»

Lieu des livraisons et des acquisitions intracommunautaires de biens

11.

Le lieu que le régime TVA assigne à une opération détermine l’État membre auquel revient la TVA née de la réalisation d’un fait générateur.

12.

Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous a), de la sixième directive, le lieu d’une livraison de biens est réputé se situer:

«a) dans le cas où le bien est expédié ou transporté soit par le fournisseur, soit par l’acquéreur, soit par une tierce personne: à l’endroit où le bien se trouve au moment du départ de l’expédition ou du transport à destination de l’acquéreur. […]»

13.

L’article 28 ter, A, paragraphe 1, de la sixième directive détermine en revanche le lieu des acquisitions intracommunautaires de biens comme suit:

«Le lieu d’une acquisition intracommunautaire de biens est réputé se situer à l’endroit où les biens se trouvent au moment de l’arrivée de l’expédition ou du transport à destination de l’acquéreur.»

Exonération

14.

Dans les échanges entre les États membres, l’article 28 quater, A, de la sixième directive exonère dans certains cas la livraison de biens dans un autre État membre:

«Sans préjudice d’autres dispositions communautaires et dans les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et simple des exonérations prévues ci-après et de prévenir toute fraude, évasion ou abus éventuels, les États membres exonèrent:

a)

les livraisons de biens, au sens de l’article 5, expédiés ou transportés, par le vendeur ou par l’acquéreur ou pour leur compte, en dehors du territoire visé à l’article 3 mais à l’intérieur de la Communauté, effectuées pour un autre assujetti, ou pour une personne morale non assujettie, agissant en tant que tel dans un État membre autre que celui du départ de l’expédition ou du transport des biens.

[…]»

Droit à déduction

15.

Enfin, les dispositions relatives au droit à déduction et en particulier aux modalités d’exercice du droit à déduction intéressent également la présente affaire.

16.

Aux termes de l’article 17, paragraphe 2, sous a), tel que remplacé par l’article 28 septies, point 1, de la sixième directive, tout assujetti a le droit de déduire notamment «la taxe sur la valeur ajoutée […] acquittée à l’intérieur du pays pour les biens qui lui sont […] livrés et pour les services qui lui sont […] rendus par un autre assujetti» (opérations en amont), «[d]ans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées» (opérations en aval).

17.

Aux termes de l’article 17, paragraphe 3, sous a), tel que remplacé par l’article 28 septies, point 1, de la sixième directive, ce droit à déduction est également accordé lorsque les opérations en aval «relevant des activités économiques […] effectuées à l’étranger […] ouvriraient droit à déduction si ces opérations étaient effectuées à l’intérieur du pays».

18.

La déduction est opérée globalement par l’assujetti, conformément à l’article 18, paragraphe 2, premier alinéa, de la sixième directive, «par imputation, sur le montant de la taxe due pour une période de déclaration, du montant de la taxe pour laquelle le droit à déduction a pris naissance». Quand le montant des déductions dépasse celui de la taxe due, l’excédent est en principe remboursé conformément à l’article 18, paragraphe 4, de la sixième directive.

19.

L’article 17, paragraphe 4, premier alinéa, premier tiret, tel que remplacé par l’article 28 septies, point 1, de la sixième directive, prévoit toutefois que le «remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée» visé à l’article 17, paragraphe 3, est effectué «en faveur des assujettis qui ne sont pas établis à l’intérieur du pays mais qui sont établis dans un autre État membre, selon les modalités d’application déterminées par la directive 79/1072/CEE».

20.

Aux termes de l’article 1er de cette huitième directive 79/1072/CEE du Conseil, du 6 décembre 1979, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Modalités de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée aux assujettis non établis à l’intérieur du pays ( 4 ) (ci-après la «huitième directive»), «est considéré comme un assujetti qui n’est pas établi à l’intérieur du pays l’assujetti […] qui, au cours de la période [de remboursement], n’a eu dans ce pays ni le siège de son activité économique, ni un établissement stable […] et […] n’a effectué aucune livraison de biens ou prestation de services réputée se situer dans ce pays […]».

III – Procédure au principal

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