Opinion of Advocate General Kokott delivered on 7 April 2016.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:215
Date07 April 2016
Celex Number62014CC0442
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-442/14
62014CC0442

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 7 avril 2016 ( 1 )

Affaire C‑442/14

Bayer CropScience SA-NV,

Stichting De Bijenstichting

contre

College voor de toelating van gewasbeschermingsmiddelen en biociden

[demande de décision préjudicielle formée par le College van Beroep voor het bedrijfsleven (cour d’appel du contentieux administratif en matière économique, Pays-Bas)]

«Directive 2003/4/CE — Accès aux informations environnementales — Dérogations — Confidentialité des informations industrielles ou commerciales — Informations relatives à des émissions dans l’environnement — Confidentialité — Règlement (CE) no 1107/2009 — Produits phytopharmaceutiques — Directive 98/8/CE — Produits biocides»

I – Introduction

1.

La transparence est un leitmotiv dans la politique de l’Union en matière d’environnement. Non seulement les autorités publiques et les entreprises, mais également les citoyens, les organisations non gouvernementales et les scientifiques indépendants doivent être en mesure de prendre part de manière éclairée au débat sur la protection de l’environnement et contribuer ainsi à une meilleure protection de celui-ci.

2.

Le rôle joué par les produits phytopharmaceutiques dans la « mortalité des abeilles », c’est-à-dire le déclin du cheptel d’abeilles, mais également d’autres espèces d’insectes qui contribuent à la pollinisation des plantes, suscite un débat particulièrement animé ( 2 ). C’est pourquoi il existe un intérêt particulier du public à accéder aux informations que les fabricants fournissent aux autorités publiques dans le cadre des procédures d’autorisation régies par le droit de l’Union pour obtenir l’approbation de substances actives et de produits phytopharmaceutiques. Toutefois, ces fabricants craignent de subir des désavantages concurrentiels si leurs concurrents ont accès à ces informations.

3.

Ce conflit d’intérêts est régi par la directive 2003/4/CE ( 3 ), qui est applicable à l’accès à cette information ( 4 ). Elle prévoit que, si les autorités publiques peuvent, en principe, refuser l’accès aux informations environnementales pour protéger la confidentialité des informations commerciales ou industrielles dont elles disposent, elles doivent néanmoins fournir les informations relatives à des émissions dans l’environnement ainsi que les informations dont la divulgation relève de l’intérêt public supérieur.

4.

La présente procédure concerne l’accès à des informations qui ont été fournies dans le cadre de procédures d’autorisation relatives à des produits phytopharmaceutiques et à un produit biocide. Outre la question de savoir s’il s’agit d’informations relatives à des émissions, il convient en particulier de préciser les conséquences de l’absence de demande de confidentialité sur une demande d’informations environnementales. Une telle demande peut être présentée par le fabricant dans le cadre des procédures d’autorisation pour les produits phytopharmaceutiques et biocides.

II – Cadre juridique

A – Droit international

5.

Le droit d’accès aux informations environnementales est prévu par la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement ( 5 ) que la Communauté européenne a signée à Aarhus (Danemark) le 25 juin 1998 ( 6 ).

6.

L’article 4, paragraphe 4, sous d), de la convention d’Aarhus régit le refus de divulgation d’informations environnementales en raison de secrets commerciaux et industriels :

« Une demande d’informations sur l’environnement peut être rejetée au cas où la divulgation de ces informations aurait des incidences défavorables sur :

[…]

d)

le secret commercial et industriel lorsque ce secret est protégé par la loi afin de défendre un intérêt économique légitime. Dans ce cadre, les informations sur les émissions qui sont pertinentes pour la protection de l’environnement doivent être divulguées […] »

7.

La protection des secrets commerciaux qui ont été communiqués à des autorités publiques fait également l’objet de l’article 39, paragraphe 3, de l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ci‑après l’« ADPIC ») ( 7 ):

« Lorsqu’ils subordonnent l’approbation de la commercialisation de produits pharmaceutiques ou de produits chimiques pour l’agriculture qui comportent des entités chimiques nouvelles à la communication de données non divulguées résultant d’essais ou d’autres données non divulguées, dont l’établissement demande un effort considérable, les Membres protégeront ces données contre l’exploitation déloyale dans le commerce. En outre, les Membres protégeront ces données contre la divulgation, sauf si cela est nécessaire pour protéger le public, ou à moins que des mesures ne soient prises pour s’assurer que les données sont protégées contre l’exploitation déloyale dans le commerce. »

B – Droit de l’Union

1. La directive sur l’information en matière d’environnement

8.

Le droit d’accès aux informations environnementales est accordé sur la base de la directive sur l’information en matière d’environnement. Celle-ci transpose le droit d’accès aux informations environnementales prévu par la convention d’Aarhus.

9.

L’article 2 de la directive sur l’information en matière d’environnement définit, notamment, la notion d’« information environnementale » :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

1)

« information environnementale » : toute information disponible sous forme écrite, visuelle, sonore, électronique ou toute autre forme matérielle, concernant :

a)

l’état des éléments de l’environnement, tels que l’air et l’atmosphère, l’eau, le sol, les terres, les paysages et les sites naturels, y compris les biotopes humides, les zones côtières et marines, la diversité biologique et ses composantes, y compris les organismes génétiquement modifiés, ainsi que l’interaction entre ces éléments ;

b)

des facteurs, tels que les substances, l’énergie, le bruit, les rayonnements ou les déchets, y compris les déchets radioactifs, les émissions, les déversements et autres rejets dans l’environnement, qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement visés au point a) ;

[…] »

10.

Le droit d’accès aux informations environnementales est prévu à l’article 3, paragraphe 1, de la directive sur l’information en matière d’environnement :

« Les États membres veillent à ce que les autorités publiques soient tenues, conformément à la présente directive, de mettre à la disposition de tout demandeur, et sans que celui-ci soit obligé de faire valoir un intérêt, les informations environnementales qu’elles détiennent ou qui sont détenues pour leur compte. »

11.

Les dérogations sont régies à l’article 4 de la directive sur l’information en matière d’environnement. En l’espèce, l’article 4, paragraphe 2, sous d), e) et g), de la directive présente un intérêt particulier :

« Les États membres peuvent prévoir qu’une demande d’informations environnementales peut être rejetée lorsque la divulgation des informations porterait atteinte :

[…]

d)

à la confidentialité des informations commerciales ou industrielles, lorsque cette confidentialité est prévue par le droit national ou communautaire afin de protéger un intérêt économique légitime, y compris l’intérêt public lié à la préservation de la confidentialité des statistiques et du secret fiscal ;

e)

à des droits de propriété intellectuelle ;

[…]

g)

aux intérêts ou à la protection de toute personne qui a fourni les informations demandées sur une base volontaire sans y être contrainte par la loi ou sans que la loi puisse l’y contraindre, à moins que cette personne n’ait consenti à la divulgation de ces données ;

[…]

Les motifs de refus visés aux paragraphes 1 et 2 sont interprétés de manière restrictive, en tenant compte dans le cas d’espèce de l’intérêt que présenterait pour le public la divulgation de l’information. Dans chaque cas particulier, l’intérêt public servi par la divulgation est mis en balance avec l’intérêt servi par le refus de divulguer. Les États membres ne peuvent, en vertu du paragraphe 2, points a), d), f), g) et h), prévoir qu’une demande soit rejetée lorsqu’elle concerne des informations relatives à des émissions dans l’environnement.

[…] »

2. La directive 91/414/CEE

12.

La directive 91/414 ( 8 ) a d’abord régi la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.

13.

L’article 13, paragraphe 7, sous b), quatrième alinéa, de la directive sur les produits phytopharmaceutiques milite contre la réalisation de tests inutiles sur les animaux :

« Si néanmoins le demandeur et les détenteurs d’autorisations antérieures du même produit ne parviennent pas à un accord sur le partage des informations, les États membres peuvent instituer des mesures nationales obligeant le demandeur et les détenteurs d’autorisations antérieures établis sur leur territoire à partager les informations, de façon à éviter une répétition des essais utilisant des vertébrés, et déterminer à la fois la procédure pour l’utilisation des informations et l’équilibre raisonnable entre les intérêts des parties concernées. »

14.

L’article 14 de la directive sur les produits phytopharmaceutiques énonce la réglementation suivante :

« Sans préjudice [de la directive sur l’information en matière d’environnement], les États membres et la Commission veillent à ce que les indications fournies par les demandeurs, qui constituent un secret industriel ou commercial...

To continue reading

Request your trial

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT