Club Hotel Loutraki AE and Others v Ethnico Symvoulio Radiotileorasis and Ypourgos Epikrateias (C-145/08) and Aktor Anonymi Techniki Etaireia (Aktor ATE) v Ethnico Symvoulio Radiotileorasis (C-149/08).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:668
Docket NumberC-149/08,C-145/08
Celex Number62008CC0145
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date29 October 2009

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme ELEANOR Sharpston

présentées le 29 octobre 2009 (1)

Affaires jointes C‑145/08 et C‑149/08

Club Hotel Loutraki AE

Athinaïki Techniki AE

Evangelos Marinakis

contre

Ethniko Symvoulio Radiotileorasis

Ypourgos Epikrateias


et

Aktor ATE

contre

Ethniko Symvoulio Radiotileorasis


[demandes de décision préjudicielle formées par le Symvoulio tis Epikrateias, (Grèce)]

«Marchés publics – Contrat ayant pour objet une cession d’actions et un volet relatif à des services – Classification – Procédure de recours en matière de passation des marchés publics – Législation nationale interdisant l’exercice individuel d’un recours par l’un des membres d’une association momentanée dépourvue de personnalité juridique – Revirement de jurisprudence.»





Introduction

1. Les deux présentes affaires jointes par la Cour, complexes du point de vue des faits et de la procédure, soulèvent des questions de droit communautaire en matière de marchés publics relatives notamment à la directive «recours» (2) et à la directive «services» (3).

2. Dans ces deux affaires, la question fondamentale porte sur la recevabilité du recours en annulation d’une décision adoptée au cours d’une procédure de passation de marché public, formé à titre individuel par un membre d’une association momentanée dépourvue de personnalité juridique, ayant participé sans succès à ladite procédure.

3. La Cour a déjà indiqué que la directive recours ne s’oppose pas à ce que, selon le droit national, lorsque les membres d’une telle association momentanée souhaitent former un recours à l’encontre de la décision d’attribution du marché, ils doivent agir ensemble et l’action doit être recevable à l’égard de chacun d’entre eux pris individuellement (4).

4. Dans les cas d’espèce, cependant, la situation présente des caractéristiques supplémentaires: la décision attaquée n’est pas la décision finale d’attribution, mais une décision préliminaire d’éligibilité à l’attribution du marché, adoptée non pas par le pouvoir adjudicateur, mais par une autorité réglementaire distincte, et cette décision ne concerne spécifiquement que l’un des membres de l’association momentanée, et/ou son annulation est recherchée non pas dans le but d’obtenir l’attribution finale, mais de pouvoir demander des dommages‑intérêts en raison de prétendues irrégularités entachant la décision. Le problème est davantage compliqué par le fait que la jurisprudence nationale a changé au cours de la procédure, de sorte qu’un recours qui aurait initialement pu être déclaré recevable ne peut plus l’être.

5. Ces problématiques se posent en lien avec la directive recours. L’applicabilité de cette directive dépend du fait que le contrat relève du champ d’application, notamment, de la directive services ou de la directive «travaux» (5). Son applicabilité ne fait aucun doute dans la seconde affaire, dès lors qu’il est constant que le contrat relève de la directive travaux. Dans la première affaire, cependant, cela est moins certain, la directive services pouvant ou non s’appliquer selon que le contrat en question est qualifié de marché de services ou de concession de services (qui n’entrerait pas dans le champ de la directive).

6. Se pose donc, dans la première affaire, la question préalable de la classification du contrat en question, qui est un contrat mixte dans lequel: une autorité publique cède 49 % du capital social d’un casino public au prix proposé par le mieux-disant, à qui elle confie la gestion du casino et le droit de nommer la majorité de son conseil d’administration; ladite gestion est rémunérée par un pourcentage des bénéfices d’exploitation; l’adjudicataire s’engage à mettre en œuvre un plan d’amélioration et de modernisation; et l’autorité publique s’engage, si elle devait à l’avenir exploiter un autre casino dans la région concernée, à indemniser l’adjudicataire.

7. Se pose également la question de savoir dans quelle mesure l’accès au recours en question peut être requis par les règles et principes fondamentaux du droit communautaire, même si la directive recours ne s’applique pas.

Cadre législatif

Le droit communautaire

La directive services (92/50)

8. L’article 1er, sous a), définit les marchés publics de services comme des:

«contrats à titre onéreux, conclus par écrit entre un prestataire de services et un pouvoir adjudicateur»,

à l’exclusion notamment des marchés publics de fournitures et des marchés publics de travaux, et des marchés passés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des télécommunications, qui sont tous régis par d’autres directives. Un certain nombre d’autres types de marchés, définis par leur objet, sont également exclus, mais ils sont apparemment dépourvus de pertinence en l’espèce. L’article 1er, sous b), définit les pouvoirs adjudicateurs comme:

«l’État, les collectivités territoriales, les organismes de droit public, les associations formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou de ces organismes de droit public»,

et, aux termes de l’article 1er, sous c), le prestataire de services est:

«toute personne physique ou morale, y inclus un organisme public, qui offre des services».

9. L’article 2 dispose que, si un marché public a pour objet à la fois des produits et des services, il relève de la directive si la valeur des services en question dépasse celle des produits.

10. L’article 3, paragraphe 1, exige des pouvoirs adjudicateurs qu’ils appliquent des procédures adaptées aux dispositions de la directive et l’article 3, paragraphe 2, exige d’eux qu’ils veillent à ce qu’il n’y ait pas de discrimination entre les différents prestataires de services.

11. L’article 8 dispose que les marchés qui ont pour objet des services figurant à l’annexe I A (6) sont passés conformément aux dispositions des titres III à VI (7), tandis que, d’après l’article 9, les marchés qui ont pour objet des services figurant à l’annexe I B sont passés conformément aux articles 14 et 16, compris respectivement dans les titres IV et V. Aux termes de l’article 10, les marchés qui ont pour objet à la fois des services figurant à l’annexe I A et des services figurant à l’annexe I B sont passés conformément aux dispositions des titres III à VI lorsque la valeur des services figurant à l’annexe I A dépasse celle des services figurant à l’annexe I B. Dans les autres cas, les marchés sont passés conformément aux articles 14 et 16.

12. L’article 14 traite essentiellement des spécifications techniques devant figurer dans les documents généraux ou dans les documents contractuels propres à chaque marché, et l’article 16 est relatif à la publication de l’avis concernant les résultats de la procédure d’attribution.

13. Aucun des services énumérés à l’annexe I A ne semble pertinent aux fins de la question de la classification soulevée dans le cadre de la première affaire. L’annexe I B, cependant (à laquelle s’appliquent uniquement les articles 14 et 16), comprend (sous 17) les services de l’hôtellerie et de la restauration, (sous 26) les services de loisirs et services culturels et sportifs et (sous 27) les autres services. Il est constant que les services en question relèvent d’une ou de plusieurs de ces catégories.

14. L’article 26, paragraphe 1, dispose que «[l]es groupements de prestataires de services sont autorisés à soumissionner. La transformation de tels groupements dans une forme juridique déterminée ne peut être exigée pour la présentation de l’offre, mais le groupement retenu peut être contraint d’assurer cette transformation lorsque le marché lui a été attribué» (8).

La directive recours (89/665)

15. Même si le titre de la directive recours fait toujours référence uniquement aux marchés publics de fournitures et de travaux, elle n’en a pas moins été modifiée par la directive services pour couvrir les marchés relevant du champ d’application de cette dernière.

16. À la suite de cette modification (9), l’article 1er dispose que:

«1. Les États membres prennent, en ce qui concerne les procédures de passation des marchés publics relevant du champ d’application [des directives travaux et services entre autres], les mesures nécessaires pour assurer que les décisions prises par les pouvoirs adjudicateurs peuvent faire l’objet de recours efficaces et, en particulier, aussi rapides que possible, dans les conditions énoncées aux articles suivants, et notamment à l’article 2 paragraphe 7, au motif que ces décisions ont violé le droit communautaire en matière de marchés publics ou les règles nationales transposant ce droit.

2. Les États membres veillent à ce qu’il n’y ait, entre les entreprises susceptibles de faire valoir un préjudice dans le cadre d’une procédure d’attribution de marché, aucune discrimination du fait de la distinction opérée par la présente directive entre les règles nationales transposant le droit communautaire et les autres règles nationales.

3. Les États membres assurent que les procédures de recours sont accessibles, selon des modalités que les États membres peuvent déterminer, au moins à toute personne ayant ou ayant eu un intérêt à obtenir un marché public de fournitures ou de travaux déterminé et ayant été ou risquant d’être lésée par une violation alléguée. En particulier, ils peuvent exiger que la personne qui souhaite utiliser une telle procédure ait préalablement informé le pouvoir adjudicateur de la violation alléguée et de son intention d’introduire un recours.»

17. L’article 2 prévoit en particulier que:

«1. Les États membres veillent à ce que les mesures prises aux fins des recours visés à l’article 1er prévoient les pouvoirs permettant:

a) de prendre, dans les délais les plus brefs et par voie de référé, des mesures provisoires ayant pour but de corriger la violation alléguée ou d’empêcher d’autres dommages d’être causés aux intérêts concernés, y compris des mesures destinées à suspendre ou à faire suspendre la procédure de passation de marché public en...

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