Commission of the European Communities v Ireland.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:424
CourtCourt of Justice (European Union)
Date22 June 2006
Docket NumberC-216/05
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62005CC0216

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME CHRISTINE STIX-HACKL

présentées le 22 juin 2006 1(1)

Affaire C-216/05

Commission des Communautés européennes

contre

Irlande

«««Recours en manquement – Directive 85/337/CEE – Évaluation des incidences sur l’environnement – Consultation du public – Perception de redevances»





I – Introduction

1. Dans le présent recours en manquement, la Commission des Communautés européennes conclut à ce qu’il plaise à la Cour constater que, en soumettant la participation pleine et entière du public à certaines études d’impact sur l’environnement au paiement préalable d’un droit de participation (2), l’Irlande a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 6 et 8 de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (3), telle que modifiée par la directive 97/11/CE du Conseil, du 3 mars 1997 (4) (ci-après la «directive 85/337»).

2. La directive 85/337 ne comporte aucune disposition relative à une redevance, telle qu’elle est perçue en l’espèce en Irlande, dans le cadre de l’étude d’impact sur l’environnement, pour la participation du public à la procédure de consultation. Si le manquement invoqué dans la présente procédure doit être apprécié concrètement au regard de la directive 85/337, la question plus générale se pose néanmoins aussi de savoir dans quelle mesure les États membres sont habilités à percevoir des redevances dans le cadre d’une procédure administrative nationale se déroulant sur la base, ou en exécution, de dispositions du droit communautaire.

II – Cadre juridique

A – La directive 85/337

3. La directive 85/337 prévoit que soit effectuée, avant la réalisation de certains travaux ou autres interventions dans le milieu naturel, une évaluation de leurs incidences sur l’environnement.

4. L’article 6 de ladite directive dispose:

«1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d’être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d’environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d’ouvrage et sur la demande d’autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d’une manière générale ou cas par cas. Celles-ci reçoivent les informations recueillies en vertu de l’article 5. Les modalités de cette consultation sont fixées par les États membres.

2. Les États membres veillent à ce que toute demande d’autorisation ainsi que les informations recueillies aux termes de l’article 5 soient mises à la disposition du public dans un délai raisonnable afin de donner au public concerné la possibilité d’exprimer son avis avant que l’autorisation ne soit délivrée.

3. Les modalités de cette information et de cette consultation sont définies par les États membres, qui peuvent notamment, en fonction des caractéristiques particulières des projets ou des sites concernés:

– déterminer quel est le public concerné;

– préciser les endroits où les informations peuvent être consultées;

– détailler la façon dont le public peut être informé, par exemple par affichage dans un certain rayon, publications dans les journaux locaux et organisation d’expositions avec plans, dessins, tableaux, graphiques et maquettes;

– déterminer la manière selon laquelle le public doit être consulté, par exemple par soumission écrite et enquête publique;

– fixer des délais appropriés pour les diverses étapes de la procédure afin d’assurer une prise de décision dans des délais raisonnables.»

5. L’article 8 de la directive 85/337 prévoit:

«Le résultat des consultations et les informations recueillies conformément aux articles 5, 6 et 7 doivent être pris en considération, dans le cadre de la procédure d’autorisation.»

B – Les dispositions nationales relatives aux redevances litigieuses

6. Le droit irlandais de la planification prévoit que des redevances peuvent être perçues du public qui soumet des observations ou exprime des avis au cours des procédures d’évaluation, ainsi que dans les recours en matière de planification, et cela à deux niveaux: d’une part, dans les procédures devant les autorités locales de planification et, d’autre part, dans les procédures devant la commission de recours en matière de planification. Ces redevances s’appliquent à l’ensemble des procédures administratives, y compris les procédures d’évaluation des incidences de certains projets sur l’environnement. Le montant desdites redevances est indépendant de l’ampleur du projet ou des contributions. En outre, la redevance en cause n’est exigée qu’une seule fois, de sorte qu’aucune autre taxe n’est due au titre d’observations ou d’avis supplémentaires dans la même procédure.

7. La base juridique de la perception des redevances litigieuses est constituée par la loi irlandaise de 2000 sur la planification (Planning and Development Act 2000, ci-après la «loi sur la planification»).

8. L’article 33 de la loi sur la planification habilite notamment le ministre de l’Environnement à établir par règlement une redevance, que le public est tenu d’acquitter pour soumettre des observations ou exprimer des avis au cours de la procédure de planification auprès des autorités locales de planification. À l’époque sur laquelle porte la présente procédure, cette redevance établie par le ministre de l’Environnement s’élevait à 20 euros.

9. En ce qui concerne ensuite le dépôt d’observations et d’avis au cours de la procédure de recours en matière de planification, l’article 144 de la loi sur la planification habilite la commission de recours en matière de planification («An Bord Pleanála») à établir, sous réserve d’autorisation du ministre de l’Environnement, une redevance. Cette redevance s’élevait, à l’époque pertinente en l’espèce, selon les indications de la Commission, à 45 euros.

10. Selon la loi sur la planification, différents organismes étatiques et certaines organisations sont exemptés des redevances exigées à ces deux niveaux. Relèvent de cette exemption, outre les autorités régionales et étatiques, des organismes qui défendent des intérêts liés à des projets de planification, tels Fáilte Ireland, An Taisce et l’agence de protection de l’environnement.

III – Faits et procédure

11. À partir de deux plaintes qui lui sont parvenues en 2000, la Commission a prié les autorités irlandaises, par lettre du 29 août 2000, de prendre position sur certains aspects de la loi sur la planification, qui n’était alors pas encore en vigueur, en particulier sur la disposition aux termes de laquelle le public intéressé était tenu d’acquitter au préalable des redevances pour pouvoir participer à des procédures de planification.

12. Après une première réponse écrite des autorités irlandaises, la Commission a adressé à l’Irlande, le 23 octobre 2001, une lettre de mise en demeure lui enjoignant de prendre position sur le fait que, dans le droit irlandais de la planification, l’exercice de droits conférés par la directive 85/337 était subordonné au paiement de droits de participation.

13. Par lettre du 7 mars 2002, les autorités irlandaises ont répondu que, à leur avis, la directive 85/337 ne s’oppose pas à la perception de redevances, telles qu’elles ont été établies sur la base de la loi sur la planification. Les autorités irlandaises ont notamment fait valoir que, en vertu de ladite directive, il incombe aux États membres de réglementer les détails de la consultation du public, et que les redevances en cause n’ont pas dissuadé ce dernier de prendre part à la consultation.

14. La Commission a alors adressé à l’Irlande, le 23 janvier 2003, un avis motivé, dans lequel elle a réaffirmé le grief selon lequel l’Irlande enfreignait, en percevant les redevances litigieuses, les articles 6 et 8 de la directive 85/337.

15. Dans leur réponse du 16 mai 2003, les autorités irlandaises ont à nouveau contesté que la perception de redevances soit contraire à la directive 85/337, et elles ont notamment exposé que ces taxes sont proportionnelles et nécessaires, pour couvrir le surcoût du renforcement des droits du public à être consulté dans le droit irlandais de la planification.

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