Terveys- ja sosiaalialan neuvottelujärjestö (TSN) ry v Terveyspalvelualan Liitto ry (C-512/11) and Ylemmät Toimihenkilöt (YTN) ry v Teknologiateollisuus ry and Nokia Siemens Networks Oy (C-513/11).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:89
Docket NumberC-512/11,C-513/11
Celex Number62011CC0512
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date21 February 2013
62011CC0512

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M ME JULIANE KOKOTT

présentées le 21 février 2013 ( 1 )

Affaires jointes C‑512/11 et C‑513/11

Terveys- ja sosiaalialan neuvottelujärjestö TSN ry

contre

Terveyspalvelualan Liitto ry

et

Mehiläinen Oy

et

Ylemmät Toimihenkilöt YTN ry

contre

Teknologiateollisuus ry

et

Nokia Siemens Networks Oy

[demande de décision préjudicielle formée par le työtuomioistuin (Finlande)]

«Congé de maternité — Directive 92/85/CEE — Conditions du maintien intégral du salaire pendant le congé de maternité — Égalité de traitement entre les hommes et les femmes — Directive 2006/54/CE — Congé parental — Directive 96/34/CE — Convention collective»

I – Introduction

1.

Dans l’affaire Kiiski, la Cour a décidé que le droit de l’Union s’oppose à ce qu’un congé d’éducation ne puisse pas être interrompu au cours d’une nouvelle grossesse pour permettre à la travailleuse de prendre un congé de maternité ( 2 ).

2.

Les présentes affaires concernent deux travailleuses finlandaises devenues enceintes au cours d’un congé d’éducation ( 3 ) et qui ont alors pris un congé de maternité. La législation finlandaise ne garantit aux travailleuses qu’une prestation sociale adéquate pendant le congé de maternité. Les conventions collectives dont relève chacune des travailleuses prévoient toutefois, pendant le congé de maternité, le maintien de la partie de la rémunération qui dépasse l’allocation de maternité, à la condition toutefois que le congé de maternité ne commence pas au cours d’un congé non rémunéré, tel le congé d’éducation.

3.

Dans les présentes affaires, il convient dès lors de préciser si une travailleuse qui, durant le congé d’éducation, exerce le droit que lui a reconnu l’arrêt Kiiski de le changer en congé de maternité peut également tirer du droit de l’Union un droit au maintien de la rémunération.

II – Cadre juridique

A – Droit de l’Union

4.

En droit de l’Union, le cadre juridique de la présente affaire est tracé par la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail ( 4 ).

5.

Son article 11 dispose:

«[…]

2)

dans le cas visé à l’article 8, doivent être assurés:

[…]

b)

le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate des travailleuses au sens de l’article 2;

3)

la prestation visée au point 2 b) est jugée adéquate lorsqu’elle assure des revenus au moins équivalents à ceux que recevrait la travailleuse concernée dans le cas d’une interruption de ses activités pour des raisons liées à son état de santé, dans la limite d’un plafond éventuel déterminé par les législations nationales;

4)

les États membres ont la faculté de soumettre le droit à la rémunération ou à la prestation visée au point 1 et au point 2 b) à la condition que la travailleuse concernée remplisse les conditions d’ouverture du droit à ces avantages prévues par les législations nationales.

Ces conditions ne peuvent en aucun cas prévoir des périodes de travail préalable supérieures à douze mois immédiatement avant la date présumée de l’accouchement.»

6.

De surcroît, la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail (refonte), présente aussi un intérêt ( 5 ).

7.

Son article 2 comporte les définitions suivantes:

«1. Aux fins de la présente directive, on entend par:

a)

‘discrimination directe’, la situation dans laquelle une personne est traitée de manière moins favorable, en raison de son sexe, qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable;

b)

‘discrimination indirecte’, la situation dans laquelle une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre désavantagerait particulièrement des personnes d’un sexe par rapport à des personnes de l’autre sexe, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour parvenir à ce but soient appropriés et nécessaires; […]

2. Aux fins de la présente directive, la discrimination inclut:

[…]

c)

tout traitement moins favorable d’une femme lié à la grossesse ou au congé de maternité au sens de la directive 92/85/CEE

8.

L’article 4 énonce le principe de non-discrimination en matière de rémunération:

«Pour un même travail ou pour un travail auquel est attribuée une valeur égale, la discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe est éliminée dans l’ensemble des éléments et conditions de rémunération. […]»

B – Droit national

9.

En vertu des dispositions du titre 4, article 1er, de la työsopimuslaki ( 6 ) et de celles du titre 9 de la sairausvakuutuslaki ( 7 ), les travailleuses ont droit à un congé de maternité de 105 jours ouvrables, et, à l’issue de ce congé, à un congé parental de 158 jours ouvrables. En sus de ces congés, les travailleuses ont droit, en vertu du titre 4, article 3, de la loi sur le contrat de travail, à un congé d’éducation qui peut durer jusqu’à ce que l’enfant ait atteint l’âge de trois ans.

10.

Les travailleuses bénéficient pendant leur congé de maternité ou leur congé parental d’une allocation journalière en vertu de la loi sur l’assurance maladie. Aucune allocation journalière n’est versée pendant le congé d’éducation.

11.

D’après le titre 4, article 8, de la loi sur le contrat de travail, l’employeur n’est pas tenu de verser de rémunération à la travailleuse pendant les congés familiaux décrits ci-dessus.

12.

L’article 21, paragraphe 3, de la convention collective dont relèvent les parties dans l’affaire C‑512/11 comporte une disposition aux termes de laquelle l’employeur verse durant le congé de maternité 72 jours de salaire à taux plein. Si le nouveau congé de maternité de la travailleuse commence pendant des congés non rémunérés, et notamment pendant le congé d’éducation, le salaire en question n’est pas versé, sauf disposition légale contraire.

13.

Aux termes de l’article 8 de la convention collective du personnel d’encadrement supérieur des industries technologiques dont relèvent les parties dans l’affaire C‑513/11, durant le congé de maternité, le salaire est versé à taux plein pendant trois mois. La juridiction de renvoi indique qu’il avait été convenu entre les parties à la convention collective d’en interpréter l’article 8 de la même manière que les dispositions équivalentes des autres conventions collectives applicables aux travailleurs et aux cadres du secteur. D’après les lignes directrices d’application afférentes à ces dispositions, si un nouveau congé de maternité commence alors qu’un congé familial antérieur est en cours, l’employeur n’a pas d’obligation de verser de salaire pour le nouveau congé de maternité. Aux dires des employeurs, la disposition de la convention collective des cadres supérieurs a toujours été interprétée de la sorte.

14.

L’objectif commun des parties à une convention collective et la pratique constante dans son application jouent, d’après la juridiction de renvoi, un rôle considérable dans l’interprétation d’une convention. La teneur des clauses de la convention ne saurait toutefois aller à l’encontre de règles de droit impératives.

III – Demande de décision préjudicielle

15.

La demande de décision préjudicielle C‑512/11 s’inscrit dans le contexte suivant: Mme Noora Kultarinta, infirmière, a été employée sans interruption depuis le 15 août 2008 par la société Mehiläinen Oy ( 8 ). Après un premier congé de maternité, elle a pris un congé d’éducation entre le 7 janvier 2010 et le 11 avril 2012. Mme Kultarinta a été à nouveau enceinte et a déclaré à son employeur qu’elle interrompait le congé d’éducation pour être de nouveau en congé de maternité à partir du 9 avril 2010.

16.

Elle a demandé à Mehiläinen de lui payer 72 jours de salaire à taux plein au titre du congé de maternité en vertu de la convention collective du secteur des services de santé. L’employeur a accepté l’interruption du congé d’éducation de Mme Kultarinta, mais, se référant à une restriction contenue dans la convention collective, il a refusé de verser le salaire pendant le congé de maternité.

17.

Dans le litige au principal, la Terveys- ja sosiaalialan Neuvottelujärjestö TSN ry ( 9 ) a cité Terveyspalvelualan Liitto ry ( 10 ) et Mehiläinen. La TSN demande la condamnation de l’employeur de Mme Kultarinta au payement de 5770,05 euros à majorer des intérêts, à titre de rémunération pendant le congé de maternité.

18.

Les faits qui ont donné lieu à la demande de décision préjudicielle C‑513/11 sont analogues : Mme Jenni Novamo est travailleuse salariée depuis le 6 juin 2005 dans la société Nokia Siemens Networks Oy (ci-après «Nokia Siemens»). Elle a pris un congé de maternité le 8 mars 2008, puis indiqué qu’elle prendrait un congé d’éducation pendant la période du 19 mars 2009 au 4 avril 2011. En 2010, Mme Novamo a déclaré à son employeur qu’elle était enceinte et qu’elle souhaitait interrompre son congé parental le 23 mai 2010, pour entamer un congé de maternité le 24 mai 2010.

19.

Mme Novamo a demandé à Nokia Siemens de lui verser, en vertu de la convention collective, trois mois de salaire pendant son congé de maternité, déduction faite des prestations sociales...

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