Scheuten Solar Technology GmbH v Finanzamt Gelsenkirchen-Süd.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:292
Docket NumberC-397/09
Celex Number62009CC0397
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date12 May 2011

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme E. Sharpston

présentées le 12 mai 2011 (1)

Affaire C‑397/09

Scheuten Solar Technology GmbH

contre

Finanzamt Gelsenkirchen-Süd

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Allemagne)]

«Fiscalité – Paiements d’intérêts effectués entre des sociétés associées d’États membres différents – Déductibilité de ces paiements lors de la détermination de l’assiette imposable de la société débitrice»





1. Par sa demande de décision préjudicielle, le Bundesfinanzhof (Allemagne) invite la Cour à interpréter pour la première fois l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2003/49/CE (2), qui impose aux États membres de s’abstenir d’imposer les paiements d’intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées d’États membres différents. En vertu de l’article 1er, paragraphe 10, de cette directive, les États membres ont cependant la faculté de ne pas appliquer l’exonération lorsque les sociétés n’ont pas été associées pendant une période d’au moins deux ans.

2. La principale question qui se pose dans la présente procédure est de savoir si la directive 2003/49 s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit que les paiements d’intérêts ne sont pas totalement déductibles lors du calcul de l’assiette imposable de la société qui paie les intérêts.

Cadre juridique

La directive 2003/49

3. Le préambule de la directive 2003/49 comporte notamment les considérants suivants:

«(1) Dans un marché unique ayant les caractéristiques d’un marché intérieur, les opérations entre sociétés d’États membres différents ne devraient pas être soumises à des conditions fiscales moins favorables que celles qui sont applicables aux mêmes opérations effectuées entre sociétés du même État membre.

(2) Cette exigence n’est pas satisfaite actuellement en ce qui concerne les paiements d’intérêts et de redevances. Les législations fiscales nationales, combinées, le cas échéant, avec les conventions bilatérales ou multilatérales, ne peuvent pas toujours assurer l’élimination des doubles impositions et leur application entraîne souvent des formalités administratives trop lourdes et des charges de trésorerie pour les entreprises concernées.

(3) Il est nécessaire de faire en sorte que les paiements d’intérêts et de redevances soient soumis une fois à l’impôt dans un État membre.

(4) La suppression de toute imposition sur les paiements d’intérêts et de redevances dans l’État membre d’où ces paiements proviennent, que cette imposition soit perçue par voie de retenue à la source ou recouvrée par voie de rôle, constitue la solution la plus appropriée pour éliminer les formalités et les problèmes susmentionnés et réaliser l’égalité de traitement fiscal entre opérations nationales et opérations transfrontalières. Il est en particulier nécessaire de supprimer les impositions grevant ces paiements lorsqu’ils sont effectués entre sociétés associées d’États membres différents ou entre des établissements stables de ces sociétés.

[…]»

4. L’article 1er est intitulé «Champ d’application et procédure». Ses dispositions pertinentes sont les suivantes:

«1. Les paiements d’intérêts et de redevances échus dans un État membre sont exonérés de toute imposition, retenue à la source ou recouvrée par voie de rôle, dans cet État d’origine, lorsque le bénéficiaire des intérêts ou redevances est une société d’un autre État membre ou un établissement stable, situé dans un autre État membre, d’une société d’un État membre.

2. Un paiement effectué par une société d’un État membre ou par un établissement stable situé dans un autre État membre est réputé échu dans cet État membre, ci-après dénommé ‘État d’origine’.

3. Un établissement stable n’est considéré comme payeur d’intérêts ou de redevances que si les paiements concernés constituent, dans l’État membre dans lequel il est situé, une charge fiscalement déductible pour cet établissement stable.

[…]

7. Le présent article n’est applicable que lorsque la société qui a payé les intérêts et les redevances ou la société dont l’établissement stable est considéré comme ayant payé les intérêts et les redevances est une société associée de la société qui est bénéficiaire des paiements en question ou dont l’établissement stable est considéré comme étant bénéficiaire des intérêts ou des redevances en question.

[…]

9. Le présent article n’empêche pas un État membre de tenir compte, lors de l’application de son droit fiscal, des intérêts et des redevances perçus par ses sociétés, les établissements stables de ses sociétés ou par des établissements stables situés dans cet État membre.

10. Un État membre a la faculté de ne pas appliquer la présente directive à une société d’un autre État membre ou à un établissement stable d’une société d’un autre État membre lorsque les conditions prévues à l’article 3, point b), n’ont pas été remplies pendant une période ininterrompue d’au moins deux ans.

[…]»

5. L’article 2, sous a), dispose que, aux fins de la directive 2003/49, «on entend par ‘intérêts’: les revenus des créances de toute nature, assorties ou non de garanties hypothécaires ou d’une clause de participation aux bénéfices du débiteur, et notamment les revenus d’obligations ou d’emprunts, y compris les primes et lots attachés à ces obligations ou emprunts. Les pénalités pour paiement tardif ne sont pas considérées comme des intérêts».

6. Les termes «société», «société associée» et «établissement stable d’une société» sont définis à l’article 3:

«a) on entend par ‘société d’un État membre’ toute société:

i) qui présente l’une des formes énumérées à l’annexe (3), et

ii) qui est considérée, en vertu de la législation fiscale d’un État membre, comme y ayant sa résidence fiscale et qui, aux termes d’une convention en matière de double imposition sur le revenu conclue avec un État tiers, n’est pas considérée comme ayant sa résidence fiscale en dehors de la Communauté, et

iii) qui est assujettie à l’un des impôts énumérés ci-dessous sans bénéficier d’une exonération, ou à tout impôt de nature identique ou analogue qui serait établi après la date d’entrée en vigueur de la présente directive et qui se substituerait à l’un des impôts existants ou qui s’y ajouterait:

[…]

‘Körperschaftsteuer’ en Allemagne, (4)

[…]

b) la qualité de ‘société associée’ d’une autre société est reconnue, au moins, à toute société

i) lorsqu’elle détient une participation directe d’au moins 25 % dans le capital de l’autre société, ou

ii) lorsque l’autre société détient une participation directe d’au moins 25 % dans son capital, ou

iii) lorsqu’une troisième société détient une participation directe d’au moins 25 % dans son capital et dans le capital de l’autre société.

Les participations ne peuvent concerner que des sociétés établies dans la Communauté.

Les États membres ont toutefois la faculté de remplacer le critère de la participation minimale dans le capital par un critère de détention minimale de droits de vote.

[…]»

7. L’article 9 dispose: «La présente directive n’affecte pas l’application de dispositions nationales ou de dispositions fondées sur une convention, qui vont au-delà des dispositions de la présente directive et visent à éliminer ou à atténuer la double imposition des intérêts et des redevances dans l’État d’origine.»

La directive «mère-filiale» (5)

8. La directive «mère-filiale» n’est pas concernée directement par la présente procédure. Il est cependant nécessaire d’en tenir compte dans l’examen des questions posées par la juridiction nationale.

9. La directive «mère-filiale» vise à éliminer, par l’instauration d’un régime fiscal commun, toute pénalisation de la coopération entre sociétés d’États membres différents (6). Ainsi, l’article 5, paragraphe 1, de cette directive prévoit, afin d’éviter la double imposition, l’exemption de la retenue à la source dans l’État de la filiale lors de la distribution des bénéfices à la société mère (7).

10. L’article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive «mère-filiale» dispose que la qualité de société mère est reconnue à toute société d’un État membre qui remplit certaines conditions énoncées à l’article 2 et qui détient, dans le capital d’une société d’un autre État membre remplissant les mêmes conditions, une participation minimale de 20 %. L’article 3, paragraphe 2, deuxième tiret, de la directive laisse à chaque État membre la faculté, par dérogation au paragraphe 1, de «ne pas appliquer la présente directive à celles de leurs sociétés qui ne conservent pas, pendant une période ininterrompue d’au moins deux ans, une participation donnant droit à la qualité de société mère, ni aux sociétés dans lesquelles une société d’un autre État membre ne conserve pas, pendant une période ininterrompue d’au moins deux ans, une telle participation».

Le droit national

11. La directive 2003/49 a été transposée en droit allemand par l’article 50, sous g), de la loi relative à l’impôt sur le revenu (Einkommensteuergesetz).

12. En Allemagne, en vertu de la loi relative à l’impôt sur les sociétés (Körperschaftsteuergesetz), l’impôt sur les sociétés est perçu par les autorités fédérales. Le Gewerbesteuer (taxe sur les entreprises ou taxe professionnelle) est imposé par les autorités locales et municipales (8). Un trait particulier de cette taxe est que le bénéfice industriel ou commercial est d’abord déterminé conformément aux dispositions de la loi relative à l’impôt sur le revenu ou de la loi relative à l’impôt sur les sociétés (9). Certains montants sont ensuite réintégrés au bénéfice et certains abattements en sont déduits. L’objectif de ces opérations de réintégration et de déduction est de déterminer le bénéfice objectif de l’établissement industriel ou commercial, indépendamment de la question de savoir si ledit bénéfice repose sur l’investissement de capitaux propres ou appartenant à un tiers (10). L’impôt sur les sociétés et le Gewerbesteuer coexistent et frappent tous deux le...

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