Bund für Umwelt und Naturschutz Deutschland, Landesverband Nordrhein-Westfalen eV v Bezirksregierung Arnsberg.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:773
Date16 December 2010
Celex Number62009CC0115
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-115/09

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 16 décembre 2010 (1)

Affaire C-115/09

Bund für Umwelt und Naturschutz Deutschland, Landesverband Nordrhein‑Westfalen eV

contre

Bezirksregierung Arnsberg

[demande de décision préjudicielle formée par l’Oberverwaltungsgericht für das Land Nordrhein-Westfalen (Allemagne)]

«Participation du public à l’élaboration de certains plans et programmes relatifs à l’environnement – Étendue du droit de recours contre les décisions d’autorisation de projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement»





1. La présente demande de décision préjudicielle de l’Oberverwaltungsgericht für das Land Nordrhein-Westfalen (Allemagne) concerne une organisation non gouvernementale de protection de l’environnement (ci-après une «ONG environnementale»), qui a formé un recours contentieux contre une décision administrative susceptible d’affecter l’environnement. Il ne s’agit pas d’un recours collectif (par exemple un recours d’une association regroupant un certain nombre de riverains qui soutiennent qu’ils seront lésés par les effets d’un projet particulier dans la localité dans laquelle ils vivent), mais d’un recours visant à contester la décision administrative litigieuse dans la mesure où celle-ci autorise des activités dont il est allégué qu’elles affecteront l’environnement en soi. À cet égard, on peut dire que l’ONG environnementale entend agir au nom de l’environnement lui-même.

2. En vertu du droit allemand, une partie qui entend former un recours contentieux doit invoquer la violation d’un droit matériel individuel. La juridiction de renvoi sollicite une interprétation de l’article 10 bis de la directive 85/337/CEE (2), telle que modifiée par la directive 2003/35/CE (3). Ce faisant, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 85/337 et la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (ci-après la «convention d’Aarhus») donne, ou exige que les États membres donnent, aux ONG environnementales un droit de recours devant les juridictions nationales, sans qu’elles aient à démontrer ou invoquer la violation d’un droit matériel individuel.

Le droit international

La convention d’Aarhus

3. Le 25 juin 1998, la Communauté européenne, les États membres, individuellement, et 19 autres États ont signé la convention d’Aarhus, qui est entrée en vigueur le 30 octobre 2001. Elle a été approuvée au nom de la Communauté européenne le 17 février 2005 (4) et ratifiée par la République fédérale d’Allemagne le 15 janvier 2007.

4. Les septième, huitième, treizième et dix-huitième considérants de la convention d’Aarhus sont libellés dans les termes suivants:

«Reconnaissant […] que chacun a le droit de vivre dans un environnement propre à assurer sa santé et son bien-être et le devoir, tant individuellement qu’en association avec d’autres, de protéger et d’améliorer l’environnement dans l’intérêt des générations présentes et futures;

Considérant que, afin d’être en mesure de faire valoir ce droit et de s’acquitter de ce devoir, les citoyens doivent avoir accès à l’information, être habilités à participer au processus décisionnel et avoir accès à la justice en matière d’environnement, étant entendu qu’ils peuvent avoir besoin d’une assistance pour exercer leurs droits;

[...]

Reconnaissant en outre le rôle important que les citoyens, les organisations non gouvernementales et le secteur privé peuvent jouer dans le domaine de la protection de l’environnement;

[...]

Souhaitant que le public, y compris les organisations, aient accès à des mécanismes judiciaires efficaces afin que leurs intérêts légitimes soient protégés et la loi respectée».

5. L’article 2, paragraphe 5, de ladite convention définit le «public concerné» comme «le public qui est touché ou qui risque d’être touché par les décisions prises en matière d’environnement ou qui a un intérêt à faire valoir à l’égard du processus décisionnel; aux fins de la présente définition, les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la protection de l’environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne sont réputées avoir un intérêt».

6. L’article 9 de la convention d’Aarhus contient des dispositions relatives au droit de recours tant des particuliers que des organisations non gouvernementales, ainsi que les règles applicables aux procédures contentieuses. L’article 9, paragraphe 2, de ladite convention, en particulier, dispose:

«Chaque partie veille, dans le cadre de sa législation nationale, à ce que les membres du public concerné

a) ayant un intérêt suffisant pour agir ou, sinon,

b) faisant valoir une atteinte à un droit[(5)], lorsque le code de procédure administrative d’une partie pose une telle condition,

puissent former un recours devant une instance judiciaire et/ou un autre organe indépendant et impartial établi par loi pour contester la légalité, quant au fond et à la procédure, de toute décision, tout acte ou toute omission tombant sous le coup des dispositions de l’article 6 et, si le droit interne le prévoit et sans préjudice du paragraphe 3 ci-après, des autres dispositions pertinentes de la présente convention.

Ce qui constitue un intérêt suffisant et une atteinte à un droit est déterminé selon les dispositions du droit interne et conformément à l’objectif consistant à accorder au public concerné un large accès à la justice dans le cadre de la présente convention. À cet effet, l’intérêt qu’a toute organisation non gouvernementale répondant aux conditions visées au paragraphe 5 de l’article 2 est réputé suffisant au sens du point a) ci-dessus. Ces organisations sont également réputées avoir des droits auxquels il pourrait être porté atteinte au sens du point b) ci-dessus.

Les dispositions du présent paragraphe 2 n’excluent pas la possibilité de former un recours préliminaire devant une autorité administrative et ne dispensent pas de l’obligation d’épuiser les voies de recours administratif avant d’engager une procédure judiciaire lorsqu’une telle obligation est prévue en droit interne.»

Le droit de l’Union

La directive 85/337, telle que modifiée par la directive 2003/35

7. La convention d’Aarhus a été incorporée dans le droit communautaire au moyen (entre autres) de la directive 2003/35. Cette directive a modifié deux directives en matière d’environnement, à savoir les directives 85/337 et 96/61/CE (6) afin qu’elles soient «rendues parfaitement compatibles avec les dispositions de la convention d’Aarhus, et notamment avec […] son article 9, paragraphe[…] 2» (7).

8. Les troisième et quatrième considérants de la directive 2003/35 portent sur la participation du public, le quatrième considérant évoquant expressément le rôle des ONG environnementales:

«3) La participation effective du public à la prise de décisions permet à ce dernier de formuler des avis et des préoccupations pouvant être utiles pour les décisions en question et au décideur de tenir compte de ces avis et préoccupations, ce qui favorise le respect de l’obligation de rendre des comptes et la transparence du processus décisionnel et contribue à sensibiliser le public aux problèmes de l’environnement et à obtenir qu’il apporte son soutien aux décisions prises.

4) La participation, y compris celle des associations, organisations et groupes, et notamment des organisations non gouvernementales œuvrant en faveur de la protection de l’environnement, devrait dès lors être encouragée, y compris, entre autres, par la promotion de la formation du public en matière d’environnement.»

9. L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 2003/35, reflète l’article 2, paragraphe 5, de la convention d’Aarhus en définissant le «public concerné» comme étant «le public qui est touché ou qui risque d’être touché par les procédures décisionnelles en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, ou qui a un intérêt à faire valoir dans ce cadre; aux fins de la présente définition, les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la protection de l’environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne sont réputées avoir un intérêt» (8).

10. La directive 2003/35 a également inséré dans la directive 85/337 un nouvel article, l’article 10 bis. Cet article contient des dispositions relatives à l’accès à la justice. Il stipule:

«Les États membres veillent, conformément à leur législation nationale pertinente, à ce que les membres du public concerné:

a) ayant un intérêt suffisant pour agir, ou sinon

b) faisant valoir une atteinte à un droit, lorsque le droit administratif procédural d’un État membre impose une telle condition,

puissent former un recours devant une instance juridictionnelle ou un autre organe indépendant et impartial établi par la loi pour contester la légalité, quant au fond ou à la procédure, des décisions, des actes ou omissions relevant des dispositions de la présente directive relatives à la participation du public.

Les États membres déterminent à quel stade les décisions, actes ou omissions peuvent être contestés.

Les États membres déterminent ce qui constitue un intérêt suffisant pour agir ou une atteinte à un droit, en conformité avec l’objectif visant à donner au public concerné un large accès à la justice. À cette fin, l’intérêt de toute organisation non gouvernementale, répondant aux exigences visées à l’article 1er, paragraphe 2, est réputé suffisant aux fins du point a) du présent article. De telles organisations sont aussi réputées bénéficier de droits susceptibles de faire l’objet d’une atteinte aux fins du point b) du présent article.

Le présent article n’exclut pas la possibilité d’un recours préalable devant une autorité administrative et n’affecte en rien l’obligation d’épuiser toutes les voies de...

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