Opinion of Advocate General Bot delivered on 26 May 2016.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:371
Docket NumberC-395/15
Celex Number62015CC0395
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date26 May 2016
62015CC0395

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 26 mai 2016 ( 1 )

Affaire C‑395/15

Mohamed Daouidi

contre

Bootes Plus SL,

Fondo de Garantía Salarial,

Ministerio Fiscal

[demande de décision préjudicielle formée par le Juzgado de lo Social no 33 de Barcelona (tribunal du travail no 33 de Barcelone, Espagne)]

«Renvoi préjudiciel — Politique sociale — Directive 2000/78/CE — Articles 1 à 3 — Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Licenciement d’un travailleur en situation d’incapacité temporaire de travail — Discrimination fondée sur le handicap — Notion de “handicap” — Caractère durable de la limitation»

1.

La présente demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 3, 15, de l’article 21, paragraphe 1, des articles 30, 31, de l’article 34, paragraphe 1, et de l’article 35, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ( 2 ) ainsi que des articles 1 à 3 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ( 3 ).

2.

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Mohamed Daouidi à Bootes Plus SL, au Fondo de Garantía Salarial (Fonds de garantie salariale, Espagne) et au Ministerio Fiscal (ministère public, Espagne), au sujet de son licenciement pendant qu’il était dans une situation d’incapacité de travail résultant d’un accident sur son lieu professionnel.

3.

Les présentes conclusions seront ciblées sur la cinquième question posée par le Juzgado de lo Social no 33 de Barcelona (tribunal du travail no 33 de Barcelone, Espagne), qui concerne l’interprétation de la notion de « handicap », au sens de la directive 2000/78.

I – Le cadre juridique

A – Le droit international

4.

La convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, qui a été approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2010/48/CE du Conseil, du 26 novembre 2009 ( 4 ), énonce, au point e) de son préambule :

« Reconnaissant que la notion de handicap évolue et que le handicap résulte de l’interaction entre des personnes présentant des incapacités et les barrières comportementales et environnementales qui font obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres. »

5.

Aux termes de l’article 1er de la convention de l’ONU :

« La présente convention a pour objet de promouvoir, protéger et assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales par les personnes handicapées et de promouvoir le respect de leur dignité intrinsèque.

Par personnes handicapées, on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres. »

B – Le droit de l’Union

6.

Aux termes du considérant 16 de la directive 2000/78 :

« La mise en place de mesures destinées à tenir compte des besoins des personnes handicapées au travail remplit un rôle majeur dans la lutte contre la discrimination fondée sur un handicap. »

7.

L’article 1er de cette directive énonce :

« La présente directive a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, [le] handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement. »

8.

L’article 2, paragraphes 1 et 2, de ladite directive dispose :

« 1. Aux fins de la présente directive, on entend par “principe de l’égalité de traitement” l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er.

2. Aux fins du paragraphe 1 :

a)

une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er ;

b)

une discrimination indirecte se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une religion ou de convictions, d’un handicap, d’un âge ou d’une orientation sexuelle donnés, par rapport à d’autres personnes, à moins que :

i)

cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires, ou que

ii)

dans le cas des personnes d’un handicap donné, l’employeur ou toute personne ou organisation auquel s’applique la présente directive ne soit obligé, en vertu de la législation nationale, de prendre des mesures appropriées conformément aux principes prévus à l’article 5 afin d’éliminer les désavantages qu’entraîne cette disposition, ce critère ou cette pratique. »

9.

L’article 3, paragraphe 1, sous c), de la même directive prévoit :

« 1. Dans les limites des compétences conférées à la Communauté, la présente directive s’applique à toutes les personnes, tant pour le secteur public que pour le secteur privé, y compris les organismes publics, en ce qui concerne :

[...]

c)

les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération ».

C – Le droit espagnol

10.

L’article 55 du Real Decreto Legislativo 1/1995, por el que se aprueba el texto refundido de la Ley del Estatuto de los Trabajadores (décret royal législatif 1/1995, portant approbation du texte refondu de la loi sur le statut des travailleurs), du 24 mars 1995 ( 5 ), dans sa version en vigueur à la date des faits au principal ( 6 ), intitulé « Forme et effets du licenciement disciplinaire », prévoit, à ses paragraphes 3 à 6 :

« 3. Le licenciement sera qualifié de fondé, d’abusif ou de nul.

4. Le licenciement sera jugé fondé lorsque le manquement allégué par l’entreprise dans l’avis de licenciement est avéré. Il sera abusif dans le cas contraire ou lorsque les conditions de forme énoncées au paragraphe 1 du présent article n’ont pas été respectées.

5. Tout licenciement ayant pour motif une des causes de discrimination prohibées par la Constitution ou par la loi, ou résultant d’une violation de droits fondamentaux et de libertés publiques du travailleur est nul.

[...]

6. La nullité d’un licenciement a pour effet la réintégration immédiate du travailleur, avec versement des salaires non perçus. »

11.

L’article 56, paragraphe 1, du statut des travailleurs, intitulé « Licenciement abusif », énonce :

« Lorsque le licenciement est déclaré abusif, l’employeur, dans un délai de cinq jours à compter de la signification du jugement, soit réintègre le salarié dans l’entreprise, soit lui verse une indemnité équivalent à 33 jours de salaire par année d’ancienneté, les périodes inférieures à une année étant prises en considération au prorata des mois accomplis, avec un maximum de 24 mensualités. En cas d’indemnisation, le contrat de travail prendra fin et sera réputé avoir été résilié à la date à laquelle le travailleur a effectivement cessé de travailler. »

12.

L’article 96, paragraphe 1, de la Ley 36/2011, reguladora de la jurisdicción social (loi 36/2011, portant réglementation de la juridiction en matière sociale), du 10 octobre 2011 ( 7 ), est libellé comme suit :

« Lorsque les allégations de la partie requérante permettent de conclure à l’existence d’indices sérieux de discrimination fondée sur le sexe, l’orientation ou l’identité sexuelle, l’origine raciale ou ethnique, la religion ou les convictions, le handicap, l’âge, le harcèlement ou toute autre hypothèse de violation d’un droit fondamental ou d’une liberté publique, c’est à la partie défenderesse qu’il appartiendra de fournir une justification objective et raisonnable, suffisamment fondée, des mesures adoptées et de leur proportionnalité. »

13.

L’article 108, paragraphes 1 et 2, de la loi 36/2011 dispose :

« 1. Lorsqu’il statuera, le juge qualifiera le licenciement de fondé, d’abusif ou de nul.

Il sera qualifié de fondé lorsque le manquement allégué par l’employeur dans l’avis de licenciement est avéré. Dans le cas contraire ou lorsque les conditions de forme énoncées à l’article 55, paragraphe 1, du [statut des travailleurs] n’ont pas été respectées, il sera qualifié d’abusif.

[...]

2. Tout licenciement ayant pour motif une des causes de discrimination prévues par la Constitution ou par la loi, ou résultant d’une violation de droits fondamentaux et de libertés publiques du travailleur est nul.

[...] »

14.

L’article 110, paragraphe 1, de cette loi énonce :

« Si le licenciement est déclaré abusif, l’employeur sera condamné à réintégrer le travailleur dans les mêmes conditions que celles dont il bénéficiait avant le licenciement et à lui verser les arriérés de salaire auxquels se réfère l’article 56, paragraphe 2, du [statut des travailleurs] ou, selon son choix, à lui verser une indemnité dont le montant sera fixé conformément aux dispositions de l’article 56, paragraphe 1, de [ce statut] [...]

[...] »

15.

L’article 113 de ladite loi prévoit :

« Si le licenciement a été déclaré nul, l’employeur sera condamné à réintégrer immédiatement le travailleur et à lui verser les arriérés de salaire. [...] »

16.

L’article 181, paragraphe 2, de la loi 36/2011...

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