Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság v Invitel Távközlési Zrt.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:806
Date06 December 2011
Celex Number62010CC0472
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑472/10
62010CC0472

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME VERICA TRSTENJAK

présentées le 6 décembre 2011 ( 1 )

Affaire C-472/10

Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság

contre

Invitel Távközlési Zrt

[demande de décision préjudicielle formée par le Pest Megyei Bíróság (Hongrie)]

«Protection des consommateurs — Directive 93/13/CEE — Article 3, paragraphe 1, lu en combinaison avec les points 1, sous j), et 2, sous d), de l’annexe — Articles 6 et 7 — Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs — Clause autorisant le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans décrire clairement le mode de variation du prix ni spécifier de raison valable — Caractère abusif de la clause — Effets juridiques de la constatation du caractère abusif de la clause dans le cadre d’un recours d’intérêt public — Action de groupe — Effet erga omnes de décisions d’une juridiction nationale constatant le caractère abusif»

I – Introduction

1.

La présente affaire a pour origine une demande de décision préjudicielle du Pest Megyei Bíróság (tribunal du comitat de Pest, Hongrie, ci-après la «juridiction de renvoi») introduite au titre de l’article 267 TFUE, par laquelle cette juridiction a saisi la Cour de plusieurs questions relatives à l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ( 2 ). Cette affaire fournit à la Cour l’occasion de se prononcer, dans l’exercice de ses compétences en matière d’interprétation, sur des questions juridiques inédites en relation avec la directive précitée. En effet, alors même que ladite directive n’a guère été modifiée depuis son adoption, elle continue à soulever des questions juridiques variées, tant sur le fond qu’au niveau procédural, comme le démontre le nombre considérable de renvois préjudiciels qu’elle suscite. À cet égard, il convient de relever que la directive 2011/83/UE relative aux droits des consommateurs, adoptée le 25 octobre 2011 par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ( 3 ), qui repose sur une approche d’harmonisation intégrale des règles nationales de protection des consommateurs, n’a apporté que des modifications ponctuelles à la directive 93/13 qui sont sans incidence sur la solution à apporter aux questions juridiques soulevées par le cas d’espèce.

2.

La demande de décision préjudicielle a pour origine un litige opposant le Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság (autorité nationale de protection des consommateurs, ci-après la «demanderesse au principal») à la société Invitel Távközlési Zrt (ci-après la «défenderesse au principal») au sujet de la validité d’une clause contractuelle déterminée qui figure habituellement dans les conditions générales des contrats conclus par la défenderesse au principal avec ses clients et qui lui confère le droit de facturer a posteriori auxdits clients des frais et des coûts afférents à différents services, sans que leur mode de calcul ait été préalablement déterminé dans les clauses contractuelles. La demanderesse, qui en déduit le caractère abusif de la clause contractuelle, a saisi la juridiction de renvoi d’une demande tendant, d’une part, à constater la nullité de ladite clause et, d’autre part, à ordonner le remboursement desdits frais et coûts.

3.

Par la première question préjudicielle, qui se compose en réalité de deux sous-questions, la juridiction de renvoi cherche en substance à savoir comment doit être aménagé, au sein de l’ordre juridique des États membres, le système que le législateur de l’Union a instauré par la directive 93/13 en vue de protéger les consommateurs de façon à atteindre cet objectif. Il s’agit, en particulier, de savoir quelles sont les exigences de la directive 93/13 en ce qui concerne la possibilité ouverte aux organisations de protection des consommateurs d’agir elles-mêmes en justice, dans l’intérêt des consommateurs, à l’encontre de clauses abusives. La juridiction de renvoi soulève également la question de savoir quel est l’effet juridique susceptible d’être reconnu, au sein de l’ordre juridique national, à la décision d’une juridiction nationale qui constate le caractère abusif d’une clause contractuelle. La seconde question préjudicielle se distingue, quant à son objet, des deux questions ci-dessus visées en ce qu’elle porte sur l’éventuelle qualification de la clause litigieuse de clause «abusive» au sens de la directive 93/13.

II – Cadre normatif

A – Droit de l’Union

4.

Selon son article 1er, paragraphe 1, la directive 93/13 a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur.

5.

L’article 3 de ladite directive prévoit ce qui suit:

«1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

[…]

3. L’annexe contient une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives.»

6.

Aux termes de l’article 4 de ladite directive:

«1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.»

7.

L’article 6, paragraphe 1, de ladite directive est ainsi rédigé:

«Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives.»

8.

L’article 7 de ladite directive dispose:

«1. Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel.

2. Les moyens visés au paragraphe 1 comprennent des dispositions permettant à des personnes ou à des organisations ayant, selon la législation nationale, un intérêt légitime à protéger les consommateurs de saisir, selon le droit national, les tribunaux ou les organes administratifs compétents afin qu’ils déterminent si des clauses contractuelles, rédigées en vue d’une utilisation généralisée, ont un caractère abusif et appliquent des moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l’utilisation de telles clauses.

3. Dans le respect de la législation nationale, les recours visés au paragraphe 2 peuvent être dirigés, séparément ou conjointement, contre plusieurs professionnels du même secteur économique ou leurs associations qui utilisent ou recommandent l’utilisation des mêmes clauses contractuelles générales, ou de clauses similaires.»

9.

Selon l’article 8 de la directive 93/13:

«Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la [...] directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur.»

10.

L’annexe de la directive contient la liste des clauses qui peuvent être déclarées abusives selon l’article 3, paragraphe 3:

«1. Clauses ayant pour objet ou pour effet:

[…]

j)

d’autoriser le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable et spécifiée dans le contrat;

[…]

l)

de prévoir que le prix des biens est déterminé au moment de la livraison, ou d’accorder au vendeur de biens ou au fournisseur de services le droit d’augmenter leurs prix, sans que, dans les deux cas, le consommateur n’ait de droit correspondant lui permettant de rompre le contrat au cas où le prix final est trop élevé par rapport au prix convenu lors de la conclusion du contrat;

[…]

2. Portée des points g), j) et l)

[…]

d)

Le point l) ne fait pas obstacle aux clauses d’indexation de prix pour autant qu’elles soient licites et que le mode de variation du prix y soit explicitement décrit.»

B – Droit national

11.

Selon l’article 209/A, paragraphe 2, du code civil hongrois (Polgári Törvénykönyv, ci-après le «Ptk.») sont nulles les clauses abusives qui figurent dans des contrats de consommation en tant que conditions générales contractuelles ou que le professionnel a rédigées de manière unilatérale, au préalable et sans négociation individuelle.

12.

L’article 209/B, paragraphe 1, du Ptk. dispose que la déclaration de nullité d’une clause abusive qui figure dans un contrat de consommation, en tant que condition générale contractuelle, prévue à l’article 209/A, paragraphe 2, peut également être demandée au juge par un organisme à désigner par un texte spécifique. La déclaration de nullité de la clause abusive réalisée par le juge vaudra à l’égard de toute partie ayant conclu un contrat avec le professionnel utilisant ladite clause.

13.

En vertu de...

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