Fra.bo SpA v Deutsche Vereinigung des Gas- und Wasserfaches eV (DVGW) - Technisch-Wissenschaftlicher Verein.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:176
Date28 March 2012
Celex Number62011CC0171
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑171/11
62011CC0171

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M ME VERICA TRSTENJAK

présentées le 28 mars 2012 ( 1 )

Affaire C‑171/11

Fra.bo SpA

contre

Deutsche Vereinigung des Gas- und Wasserfaches eV (DVGW) — Technisch-Wissenschaftlicher Verein

[demande de décision préjudicielle formée par l’Oberlandesgericht Düsseldorf (Allemagne)]

«Article 34 TFUE — Libre circulation des marchandises — Effet direct horizontal de la libre circulation des marchandises — Élaboration de normes techniques par une association de droit privé — Certification de produits par cette association — Présomption légale que les produits certifiés correspondent aux spécifications en vigueur pour leur utilisation — Entrave considérable à la commercialisation des produits non certifiés»

I – Introduction

1.

En l’espèce, l’Oberlandesgericht Düsseldorf (Allemagne) cherche tout d’abord à savoir si une association de droit privé qui élabore notamment des normes techniques pour des produits du domaine de la fourniture d’eau potable et certifie ou fait certifier des produits sur le fondement de ces normes techniques doit respecter la libre circulation des marchandises lors de l’exercice de ces activités lorsqu’il existe une présomption légale que les produits dotés de tels certificats correspondent aux spécifications en vigueur pour l’utilisation de ces produits dans le domaine de la fourniture d’eau potable. Ce faisant, la juridiction de renvoi aborde la question controversée de l’effet direct horizontal des libertés fondamentales en général et de la libre circulation des marchandises en particulier. Si, dans un cas comme celui de l’affaire au principal, il convenait de répondre par la négative à cette question de l’effet direct horizontal, la juridiction de renvoi voudrait savoir, à titre subsidiaire, si l’activité de l’association en cause peut tomber sous le coup de l’interdiction des ententes prévue à l’article 101 TFUE.

2.

Ci-après, j’examinerai tout d’abord la question de savoir si les activités de normalisation et de certification d’une association de droit privé, en cause au principal, peuvent relever de la libre circulation des marchandises. Comme, selon moi, dans un cas comme celui de l’affaire au principal, il convient de répondre par l’affirmative à cette question de l’effet direct horizontal de la libre circulation des marchandises, je n’examinerai pas la seconde question, posée à titre subsidiaire.

II – Le droit national

3.

L’article 1er, paragraphe 1, du règlement relatifs aux conditions générales de la fourniture d’eau (Verordnung über Allgemeine Bedingungen für die Versorgung mit Wasser, ci-après l’«AVBWasserV») ( 2 ), du 20 juin 1980, est libellé comme suit:

«Lorsque des entreprises de fourniture d’eau utilisent pour le raccordement au réseau public de fourniture d’eau et pour la fourniture d’eau au public des modèles de contrat ou de conditions générales formulés de manière identique pour grand nombre de contrats (conditions générales de vente), il convient d’appliquer les articles 2 à 34. Ces dispositions font partie intégrante du contrat de fourniture, à moins que le paragraphe 3 et l’article 35 n’en disposent autrement.»

4.

Sous l’intitulé «Installation client», l’article 12 de l’AVBWasserV, dans la version en vigueur jusqu’au 27 janvier 2010, disposait:

«(1) L’abonné est responsable du montage, de l’extension, de la modification et de l’entretien de l’installation située après le point de raccordement du bâtiment, à l’exception du dispositif de mesure de la consommation de l’entreprise de fourniture d’eau. S’il a loué à un tiers, ou mis d’une autre manière à la disposition d’un tiers, l’installation ou des parties de celle-ci, il est responsable en plus de ce tiers.

(2) Il est possible de procéder au montage, à l’extension, à la modification et à l’entretien de l’installation uniquement en respectant les dispositions du présent règlement et d’autres dispositions légales ou administratives ainsi que les règles reconnues de la technique. […]

[…]

(4) Seuls peuvent être employés des matériaux et appareils conformes conçus selon les règles reconnues de la technique. La marque d’homologation d’un organisme de contrôle reconnu (par exemple DIN DVGW, DVGW ou GS) atteste que ces conditions sont remplies.

[…]»

5.

Le règlement du 13 janvier 2010 a modifié comme suit l’article 12, paragraphe 4, de l’AVBWasserV, à compter du 28 janvier 2010:

«Seuls peuvent être employés des matériaux et appareils conformes aux règles reconnues de la technique. En présence d’un marquage CE attestant la conformité pour l’emploi dans le domaine de l’eau potable, les conditions prévues à la première phrase sont réputées remplies. Lorsqu’aucun marquage CE n’est prescrit, lesdites conditions sont également réputées remplies lorsque le produit ou l’appareil porte la marque d’homologation d’un organisme de certification accrédité du secteur, notamment DIN DVGW ou DVGW. Les produits et les appareils qui

1.

ont été fabriqués conformément au droit dans un autre État membre de l’Espace économique européen ou

2.

ont été fabriqués ou mis sur le marché conformément au droit dans un autre État membre de l’Union européenne ou en Turquie

et qui ne satisfont pas aux spécifications des marques d’homologation au sens de la troisième phrase sont considérés comme équivalents, y compris les contrôles et vérifications effectués dans les États cités ci-dessus, lorsqu’ils permettent d’atteindre aussi durablement le niveau de protection requis en Allemagne.»

III – La procédure au principal et les questions préjudicielles

6.

La requérante au principal est une entreprise établie en Italie qui produit et distribue des raccords en cuivre. Ces raccords en cuivre sont des éléments reliant deux tubes de canalisation qui sont dotés de joints en élastomère à leurs extrémités afin d’assurer l’étanchéité.

7.

Le défendeur est le Deutscher Verein des Gas- und Wasserfaches eV (ci-après «DVGW»), une association déclarée de droit allemand, dont, d’après le statut, l’objectif est la promotion de la profession du gaz et de l’eau. Il établit, dans le cadre d’une procédure formalisée, des normes techniques pour des produits du secteur du gaz et de l’eau. La fiche technique W 534, élaborée par DVGW, est la norme technique applicable pour l’utilisation, dans le domaine de la fourniture d’eau potable, des raccords fabriqués par la requérante au principal.

8.

À la fin de l’année 1999, la requérante a introduit auprès de DVGW une demande de certification du raccord en cuivre en question pour le secteur de l’eau. DVGW a chargé la Materialprüfungsanstalt Darmstadt (ci-après la «MPA Darmstadt»), organisme qu’il a lui-même agréé, d’effectuer les contrôles prévu par la fiche technique W 534. La MPA Darmstadt a, à son tour, sous-traité à Cerisie Laboratorio (ci-après «CL»), en Italie, qui n’est pas agréée par DVGW mais l’est bien par les autorités italiennes compétentes. À la suite de cela, en novembre 2000, DVGW a délivré à la requérante au principal un certificat limité à cinq ans pour le secteur de l’eau.

9.

À la suite d’objections émises par des tiers, DVGW a ouvert une procédure de contrôle complémentaire dont a été chargée, une fois de plus, la MPA Darmstadt. Le «test ozone» faisait également partie de ces contrôles. En juin 2005, il a informé la requérante au principal que le raccord n’avait pas passé le test ozone, mais que, comme le prévoyait ses règles, celle-ci disposait de trois mois pour présenter un rapport de contrôle positif. DVGW n’a pas accepté un rapport de contrôle effectué par CL présenté à la suite de cela par la requérante au principal, au motif qu’il n’avait pas agréé CL en tant qu’organisme de contrôle.

10.

Dans l’intervalle, la fiche technique W 534 avait été modifiée dans le cadre d’une procédure formalisée, à laquelle la requérante au principal n’avait pas participé. Afin de garantir une durée de vie plus longue des produits certifiés, un «test des 3000 heures» avait été introduit, consistant à soumettre le matériau à une température de 110 degrés centigrades pendant 3000 heures dans de l’eau bouillante. Selon les règles du DVGW, les titulaires de certificats sont tenus de faire une demande de certification complémentaire dans un délai de trois mois après l’entrée en vigueur de la modification de la fiche technique applicable, afin de prouver le respect des prescriptions modifiées. La requérante au principal n’a pas fait une telle demande. Dans le cadre de la procédure au principal, il est établi que son raccord ne satisfait pas aux prescriptions du test des 3000 heures.

11.

En juin 2005, DVGW a retiré son certificat à la requérante au principal au motif qu’elle ne lui avait pas présenté de rapport positif de test des 3000 heures. Il a rejeté une demande de prorogation du certificat au motif qu’il n’existait plus de certificat susceptible d’être prorogé.

12.

La requérante au principal a formé un recours contre le retrait et le refus de prorogation du certificat devant le Landgericht Köln, qui l’a rejeté. Elle a fait appel de cette décision de rejet devant la juridiction de renvoi.

13.

Comme la juridiction de renvoi a des doutes quant au point de savoir si DVGW doit respecter des prescriptions du droit de l’Union dans le cadre de son activité d’élaboration de norme et de certification et, en cas de réponse par l’affirmative, lesquelles il doit respecter, elle a décidé de surseoir à statuer et de saisir la Cour des questions préjudicielles suivantes:

«1)

L’article 28 CE (nouvel article 34 TFUE), le cas échéant en liaison avec l’article 86, paragraphe 2, CE (article 106, paragraphe 2, TFUE), doit-il être interprété en ce sens que, lors...

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