Unionen v Almega Tjänsteförbunden and ISS Facility Services AB.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2017:77
Date01 February 2017
Celex Number62015CC0336
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-336/15
62015CC0336

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. EVGENI TANCHEV

présentées le 1er février 2017 ( 1 )

Affaire C‑336/15

Unionen

contre

Almega Tjänsteförbunden et

ISS Facility Services AB

[demande de décision préjudicielle formée par l’Arbetsdomstolen (Cour du travail, Suède)]

«Politique sociale — Directive 2001/23/CE — Maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises, d’établissements ou de parties d’entreprises ou d’établissements — Article 3, paragraphes 1 et 3 — Droits de nature pécuniaire — Périodes d’ancienneté à prendre en compte pour déterminer la durée du préavis de licenciement»

1.

En 2005, l’emploi de BSA dans la société Apoteket AB a été transféré à la société ISS Facility Services AB (ci-après la « seconde défenderesse ») et, en 2008 et 2009, les emplois de JAH, JH et BL dans la société AstraZeneca AB ont été également transférés à la seconde défenderesse. En 2011, la seconde défenderesse a cependant licencié ces quatre travailleurs pour cause économique.

2.

La question soulevée dans la présente affaire est celle de savoir si l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/23/CE du Conseil ( 2 ) oblige la seconde défenderesse à prendre en compte l’ancienneté acquise auprès des cédants, AstraZeneca et Apoteket, lors du calcul des délais de préavis de licenciement des quatre travailleurs concernés, ou celle de savoir si de tels délais de préavis doivent être calculés uniquement en se référant à la période d’emploi accomplie auprès de la seconde défenderesse cessionnaire.

3.

Les questions juridiques qu’il s’agit de trancher en l’espèce présentent une tournure additionnelle. Conformément à la marge d’appréciation laissée aux États membres en vertu de l’article 3, paragraphe 3, seconde phrase, de la directive relative au transfert d’entreprises, le droit suédois oblige les cessionnaires, comme la seconde défenderesse, à se conformer, uniquement pendant une période d’un an à compter du transfert (ci-après le « délai d’un an optionnel »), aux conventions collectives en vigueur auprès des cédants. Au moment où BSA, JAH, JH et BL ont été licenciés par la seconde défenderesse, cette période d’un an s’était écoulée. Toutefois, il semble ressortir du dossier que la convention collective venant par la suite régir les relations de travail entre les quatre travailleurs et la seconde défenderesse ait été négociée à la date du transfert ou antérieurement à celle-ci et qu’elle ait inclus des clauses au libellé identique sur le rôle que l’ancienneté joue dans le calcul des délais de préavis de licenciement ( 3 ). Dans ce contexte, le recours par le droit suédois au délai d’un an optionnel prévu à l’article 3, paragraphe 3, de la directive relative au transfert d’entreprises a-t-il une incidence sur l’interprétation qu’il convient de donner à l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive ?

I. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

4.

Le chapitre II de la directive relative au transfert d’entreprises, intitulé « Maintien des droits des travailleurs », comprend un article 3 dont les paragraphes 1 et 3 disposent ce qui suit :

« 1. Les droits et les obligations qui résultent pour le cédant d’un contrat de travail ou d’une relation de travail existant à la date du transfert sont, du fait de ce transfert, transférés au cessionnaire.

[…]

3. Après le transfert, le cessionnaire maintient les conditions de travail convenues par une convention collective dans la même mesure que celle-ci les a prévues pour le cédant, jusqu’à la date de la résiliation ou de l’expiration de la convention collective ou de l’entrée en vigueur ou de l’application d’une autre convention collective.

Les États membres peuvent limiter la période du maintien des conditions de travail, sous réserve que celle-ci ne soit pas inférieure à un an. »

B. Le droit suédois

5.

Il ressort de la décision de renvoi qu’un article 6 b a été introduit dans la lagen (1982:80) om anställningsskydd (loi sur la protection de l’emploi, ci-après la « LAS ») afin de transposer la directive relative au transfert d’entreprises en droit suédois. La LAS prévoit notamment que, lors du transfert d’une entreprise, d’un établissement ou d’une partie d’un établissement d’un employeur à un autre, les droits et les obligations qui résultent des contrats de travail et des conditions de travail en vigueur à la date du transfert sont également transférés au nouvel employeur.

6.

En outre, il ressort de la décision de renvoi que l’article 28 de la lagen (1976:580) om medbestämmande i arbetslivet (loi sur la participation des salariés aux décisions négociées, ci-après la « MBL ») transpose l’article 3, paragraphe 3, de la directive relative au transfert d’entreprises en droit suédois. La MBL comporte des dispositions sur les effets sur les conventions collectives des transferts d’établissements visés à l’article 6 b de la LAS. Aux termes de la décision de renvoi, il ressort de la disposition que, tout d’abord, le cessionnaire est tenu en ses parties applicables par la convention collective en vigueur auprès du cédant. Toutefois, en vertu de son premier alinéa, seconde phrase, il n’en ira pas ainsi si une autre convention collective pouvant être applicable aux travailleurs transférés est déjà en vigueur auprès du cessionnaire.

7.

La décision de renvoi indique également que, dans ce cas, le troisième alinéa de cette disposition de la MBL dispose toutefois que le cessionnaire est tenu d’appliquer pendant une période d’un an à compter du transfert les conditions de travail prévues par la convention collective en vigueur auprès du cédant. En vertu de ces dispositions, lesdites conditions doivent être appliquées de la même manière que la convention collective en question les prévoyait pour le cédant. Ces dispositions ne sont cependant pas applicables si la convention collective arrive à son terme ou si une nouvelle convention collective a commencé à être applicable aux travailleurs transférés.

II. Les faits au principal et la question préjudicielle

8.

Unionen, un syndicat suédois, a formé un recours devant l’Arbetsdomstolen (Cour du travail, Suède) tendant à condamner la seconde défenderesse à lui verser, ainsi qu’à BSA, JAH, JH et BL, des dommages et intérêts en raison du préjudice résultant, notamment, du non-respect de l’article 3 de la directive relative au transfert d’entreprises.

9.

La première défenderesse est une organisation d’employeurs dont la seconde défenderesse est membre. Tant la première que la seconde défenderesse soutiennent que l’article 3, paragraphe 1, de la directive relative au transfert d’entreprises n’oblige pas les cessionnaires à prendre en compte la période d’emploi accomplie auprès des cédants lors de la détermination des délais de préavis de licenciement, tandis qu’Unionen fait valoir qu’il les oblige. Elles invoquent également l’article 3, paragraphe 3, de ladite directive et le fait que, au moment où BSA, JAH, JH et BL ont été licenciés, il s’était écoulé plus d’un an depuis les dates respectives du transfert de leur emploi, de sorte que la seconde défenderesse cessionnaire ne serait plus tenue par la convention collective en vigueur auprès des cédants.

10.

BSA, JAH, JH et BL sont membres d’Unionen et employés par la seconde défenderesse.

11.

BSA a été embauché par Apoteket en 1997. Le 9 mai 2005, son emploi a été transféré à la seconde défenderesse. Ainsi, lors de son transfert, BSA avait acquis une ancienneté de sept ans auprès d’Apoteket et était âgée de 49 ans ( 4 ).

12.

Le 27 juillet 2011, la seconde défenderesse a licencié BSA pour cause économique moyennant un préavis de six mois. Lors de son licenciement, elle était âgée de 56 ans et avait acquis une ancienneté ininterrompue cumulée de plus de dix ans auprès d’Apoteket et de la seconde défenderesse mais une ancienneté de seulement d’un peu plus de six ans auprès de la seconde défenderesse.

13.

JAH a été embauché par AstraZeneca au mois d’août 1969 et JH au mois d’octobre 1972. Leur emploi a été transféré à la seconde défenderesse le 1er mai 2009. Ainsi, lors de leur transfert, JAH avait acquis une ancienneté de 39 ans auprès d’AstraZeneca et JH une ancienneté de 36 ans ( 5 ). Tant JAH que JH étaient âgés de plus de 55 ans au moment des transferts.

14.

Leur collègue BL a été embauché par AstraZeneca au mois de mars 1976 et son emploi a été transféré à la seconde défenderesse le 1er mai 2008, date à laquelle il était âgé de 54 ans et onze mois. Au moment du transfert, BL avait acquis une ancienneté d’un peu plus de 32 ans auprès d’AstraZeneca.

15.

Comme je l’ai mentionné ci-dessus, BSA a été licenciée pour cause économique par la seconde défenderesse le 27 juillet 2011. JAH, JH et BL ont été licenciés pour cause économique le 31 octobre 2011. La seconde défenderesse a donné initialement un préavis de licenciement de six mois. Le délai de préavis a par la suite été prolongé de cinq mois. Tous les travailleurs étaient âgés de plus de 55 ans lorsqu’ils ont été licenciés pour cause économique et ils avaient acquis bien plus de dix ans d’ancienneté ininterrompue auprès soit d’Apoteket, soit d’AstraZeneca et de la seconde défenderesse.

16.

Toutefois, au moment de leur licenciement, ils avaient tous acquis une ancienneté bien moindre auprès de la seconde défenderesse prise isolément. Il ressortirait du dossier que, dans les cas de JAH et de JH, ils avaient chacun acquis une ancienneté de deux ans et six mois, BL une ancienneté de trois ans et six mois ainsi que, comme cela a été indiqué ci-dessus, BSA une ancienneté de six ans et presque trois mois.

17.

Lors des transferts, étaient en...

To continue reading

Request your trial

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT