Criminal proceedings against Felix Kapper.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:552
Date16 October 2003
Celex Number62001CC0476
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-476/01
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. PHILIPPE LÉGER
présentées le 16 octobre 2003(1)



Affaire C-476/01

Staatsanwaltschaft Frankenthal (Pfalz)
contre
Felix Kapper


[demande de décision préjudicielle formée par l'Amtsgericht Frankenthal (Pfalz) (Allemagne)]

«Directive 91/439/CEE – Refus de reconnaissance par un État membre d'un permis de conduire délivré par un autre État membre – Motifs de refus – Absence de résidence normale du titulaire du permis dans l'État membre de délivrance – Mesure de retrait d'un permis délivré antérieurement dans l'État membre d'accueil»






1. Un État membre est‑il en droit de s’opposer à la reconnaissance d’un permis de conduire délivré par un autre État membre? Si oui, pour quels motifs? Telles sont, en substance, les questions posées par l’Amtsgericht Frankenthal (Pfalz) (Allemagne), dans le cadre de poursuites pénales engagées contre un particulier, et qui touchent de près à certains aspects significatifs de la vie quotidienne du citoyen européen. I – Le cadre juridique A – La réglementation communautaire 2. La délivrance et l’usage des permis de conduire ont fait l’objet d’une première harmonisation par l’adoption de la première directive 80/1263/CEE (2) . Celle‑ci était destinée, d’une part, à contribuer à l’amélioration de la sécurité routière et, d’autre part, à faciliter la circulation des personnes s’établissant dans un autre État membre que celui dans lequel elles ont passé leur examen de conduite, ou se déplaçant à l’intérieur de la Communauté économique européenne. 3. À cette fin, la directive 80/1263 a rapproché certaines règles nationales tenant notamment à la délivrance des permis et aux conditions auxquelles est subordonnée leur validité. Elle a défini un modèle communautaire de permis, a institué un principe de reconnaissance mutuelle desdits permis et a prévu l’échange de ces derniers lorsque les titulaires transfèrent leur résidence ou leur lieu de travail d’un État membre à un autre. 4. La directive 80/1263 a été abrogée par la directive 91/439/CEE (3) . Cette dernière marque une nouvelle étape dans l’harmonisation des dispositions nationales, en particulier en ce qui concerne les conditions de délivrance des permis et la portée du principe de reconnaissance mutuelle y afférent. 5. S’agissant de la délivrance des permis, elle est subordonnée à des conditions d’âge minimal (4) , à la réussite de certaines épreuves (5) , à la conformité avec certaines normes médicales (6) ainsi qu’à l’existence d’une résidence normale ou à la preuve de la qualité d’étudiant pendant une période d’au moins six mois sur le territoire de l’État membre délivrant le permis (7) . L’article 7, paragraphe 5, de la directive prévoit que toute personne ne peut être titulaire que d’un seul permis de conduire délivré par un État membre. Ainsi, dès lors qu’une personne est titulaire d’un permis de conduire (en cours de validité) délivré par un État membre, et voué à être reconnu dans les autres États membres, il est exclu que cette personne obtienne un autre permis du même ou d’un autre État membre. 6. S’agissant du principe de reconnaissance mutuelle des permis, il est posé à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive, dans les termes généraux suivants: «Les permis de conduire délivrés par les États membres sont mutuellement reconnus». 7. Toutefois, dans le cas où le titulaire d’un permis en cours de validité délivré par un État membre a établi sa résidence normale dans un autre État membre, l’article 8, paragraphe 2, de la directive prévoit que, «[s]ous réserve du respect du principe de territorialité des lois pénales et de police, l’État membre de résidence normale peut appliquer au titulaire […] [en question] ses dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l’annulation du droit de conduire et, si nécessaire, procéder à ces fins à l’échange de ce permis». 8. Par ailleurs, selon l’article 8, paragraphe 4, de la directive, «[u]n État membre peut refuser de reconnaître, à une personne faisant l’objet sur son territoire d’une des mesures visées au paragraphe 2, la validité de tout permis de conduire établi par un autre État membre». La mise en œuvre de ces dispositions par les États membres, à la faveur d’aménagements de leur législation nationale, est subordonnée à l’accord de la Commission (8) . B – La réglementation nationale 9. Depuis le 1er janvier 1999, la conduite de véhicules automobiles sur le territoire allemand par des titulaires de permis délivrés par un autre État membre et ayant établi leur résidence en Allemagne est régie par la Verordnung über die Zulassung von Personen zum Straßenverkehr, du 18 août 1998, également dénommée la Fahrerlaubnisverordnung (9) (règlement relatif à l’accès des personnes à la circulation routière, ci‑après la «FeV»). 10. Aux termes de l’article 28, paragraphes 1 et 4, de la FeV, le titulaire d’un permis de conduire délivré par un État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen (ci‑après l’«EEE») n’est pas autorisé à conduire sur le territoire allemand lorsque, au moment de la délivrance dudit permis, il avait déjà établi sa résidence normale en Allemagne (à moins qu’il n’ait obtenu son permis au cours d’un séjour scolaire ou universitaire dans l’État membre de délivrance) (10) . 11. Il en va de même lorsqu’un permis délivré par un État membre de l’Union européenne ou de l’EEE a fait l’objet en Allemagne d’une mesure judiciaire de retrait (provisoire ou définitif) ou d’une mesure administrative équivalente (immédiatement exécutoire ou définitive), lorsque la délivrance d’un tel permis a été refusée, lorsque son usage a fait l’objet d’une renonciation (11) , ou lorsque le titulaire dudit permis est soumis à une interdiction de conduire sur le territoire allemand ou à une mesure de confiscation, de saisie ou de mise sous séquestre de leur permis (12) . 12. Il résulte de ces dispositions que le titulaire d’un permis allemand n’est plus en droit de conduire en Allemagne dès lors qu’une mesure de retrait dudit permis (13) ou qu’une mesure d’interdiction de conduire a été prise à son encontre par les autorités allemandes, même s’il a obtenu ultérieurement un permis de la part d’un autre État membre (14) . 13. En outre, selon l’interprétation qui est donnée à ces dispositions par la jurisprudence (15) , les effets dans le temps d’une telle déchéance du droit de conduire sur le territoire allemand ne se limitent pas au délai dont serait assortie une mesure d’interdiction de conduire ou à la durée de la période de blocage qui serait attachée à une mesure de retrait de permis. Contrairement à ce qui était le cas auparavant en vertu du règlement portant transposition de la directive (16) , une telle déchéance du droit de conduire en Allemagne aurait vocation à jouer indéfiniment, même après l’expiration des délais en question (17) . II – Les faits et la procédure au principal 14. Le 26 février 1998, l’Amstgericht Frankenthal (Pfalz) a ordonné le retrait (assimilable à une annulation) du permis de conduire de M. Felix Kapper, ressortissant allemand et titulaire d’un permis allemand, et donné instruction aux autorités nationales compétentes de ne pas lui délivrer de nouveau permis avant l’expiration d’un délai de neuf mois, c’est‑à‑dire pas avant le 25 novembre 1998. 15. Depuis lors, aucun nouveau permis ne lui a été délivré en Allemagne. En revanche, le 11 août 1999, il a obtenu un permis de conduire néerlandais. 16. Le 17 mars 2000, la même juridiction a condamné M. Kapper à une amende pour avoir en Allemagne, les 20 novembre et 11 décembre 1999, conduit un véhicule automobile sans permis valable, ou plus exactement en possession d’un permis néerlandais dont la validité n’est pas reconnue par les autorités allemandes. Se prévalant de son permis néerlandais, ce dernier a formé opposition contre cette décision (toujours devant la même juridiction). III – La question préjudicielle 17. Eu égard aux thèses avancées par les parties, l’Amtsgericht Frankenthal (Pfalz) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante: «L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/439/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire, interdit‑il à un État membre de refuser la reconnaissance d’un permis s’il ressort de ses investigations que ce permis a été délivré par un autre État membre bien que le titulaire n’y eût pas sa résidence normale, et la disposition citée reçoit‑elle à cet égard, le cas échéant, un effet concret?» IV – Analyse A – Sur la recevabilité de la question préjudicielle 18. Le gouvernement néerlandais s’interroge sur la recevabilité de la question préjudicielle, en l’absence, selon lui, d’éléments suffisants dans l’ordonnance de renvoi quant aux faits, aux dispositions pertinentes du droit national et à l’intérêt de la question posée pour résoudre le litige au principal, en particulier dans l’hypothèse où l’intéressé demeurerait sous le coup d’une mesure de privation du droit de conduire en Allemagne. 19. À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la procédure prévue à l’article 234 CE est un instrument de coopération entre la Cour et les juridictions nationales (18) . Dans le cadre de cette coopération, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier tant la nécessité d’une décision préjudicielle que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation...

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