Commission of the European Communities v French Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2004:747
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-264/03
Date24 November 2004
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number62003CC0264
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. M. POIARES MADURO
présentées le 24 novembre 2004(1)



Affaire C-264/03

Commission des Communautés européennes
contre
République française




«Recours en manquement – Marchés publics – Procédure de passation des marchés publics de services – Directive 92/50/CEE – Maîtrise d'ouvrage publique – Liste exhaustive de personnes morales de droit français»






1. Par le présent recours en manquement, la Commission vise à faire constater que, en réservant à l’article 4 de la loi nº 85-704, du 12 juillet 1985, relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, telle que modifiée par la loi nº 91-662, du 13 juillet 1991, et par la loi nº 96-987, du 14 novembre 1996 (2) , la mission de maîtrise d’ouvrage déléguée à une liste limitative de personnes morales de droit français, la République française a manqué à ses obligations découlant de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (3) , et plus particulièrement de ses articles 8 et 9, ainsi que de l’article 49 CE. 2. Ce recours permet de préciser le champ d’application matériel de la directive 92/50 et notamment la notion de marché. En outre, il fait référence à la fois au respect de la directive précitée et au principe de libre prestation de services inscrit à l’article 49 CE, ce qui nécessite de définir une articulation entre ces deux textes. I – Contexte factuel et réglementaire 3. Il convient à titre liminaire de préciser que l’article 4 de la loi nº 85-704 qui fait l’objet du présent recours est en cours de modification. L’ordonnance nº 2004-566, du 17 juin 2004, amende cet article en autorisant que le mandat soit désormais confié aussi bien à une personne publique qu’à une personne privée (4) . L’ordonnance crée une incompatibilité entre la fonction de mandataire et «toute mission de maîtrise d’œuvre, de réalisation de travaux ou de contrôle technique portant sur le ou les ouvrages auxquels se rapporte le mandat» afin d’éviter les situations de conflit d’intérêts (5) . L’incompatibilité est étendue aux entreprises liées au mandataire. Un projet de loi visant à ratifier ladite ordonnance a été présenté à l’Assemblée nationale le 15 septembre 2004 dernier. Toutefois, d’après une jurisprudence constante, le manquement doit s’apprécier à la date de l’expiration du délai de deux mois à compter de l’avis motivé, datant du 27 juin 2002. C’est pourquoi nous ferons référence dans la suite de ces conclusions à la loi française telle qu’elle était en vigueur à ce moment-là. 4. Avant d’expliquer les positions respectives de la République française et de la Commission sur ces deux points, exposons brièvement les dispositions nationales et communautaires pertinentes. 5. La directive 92/50 coordonne la passation de marchés publics de services. Elle vise à «supprimer les entraves à la libre circulation des services et donc à protéger les intérêts des opérateurs économiques établis dans un État membre désireux d’offrir des biens ou des services aux pouvoirs adjudicateurs établis dans un autre État membre» (6) . Pour atteindre cet objectif, la directive s’efforce de «garantir que des entreprises d’autres États membres seront en mesure de soumissionner des marchés ou des ensembles de marchés susceptibles de présenter un intérêt pour des raisons objectives tenant à leur valeur» (7) . La directive 92/50 soumet à un régime différent deux catégories de services, classés à ses annexes I A et I B. Conformément à l’article 9 de la directive, les règles applicables aux services inscrits à l’annexe I B portent uniquement sur une exigence de définition des spécifications techniques et la transmission d’un avis concernant le résultat de la procédure d’attribution. En revanche, les services inscrits à l’annexe I A de la directive sont soumis, conformément à son article 8, à des obligations plus complètes: ils doivent par exemple faire l’objet d’une publicité préalable selon des modalités précises et dans des délais fixés. 6. Le principe de libre prestation de services inscrit à l’article 49 CE s’applique à toutes les prestations de services, pour autant que ces dernières ne relèvent pas des exceptions prévues aux articles 45 CE et 46 CE. La directive 92/50 ne s’appliquant qu’aux prestations de services fondées sur un marché public (8) , les services effectués sur d’autres bases sont uniquement soumis au principe de libre prestation de services. Les marchés ne franchissant pas les seuils financiers définis à l’article 13 de la directive 92/50 sont également soumis à l’article 49 CE. 7. La loi faisant l’objet du présent recours organise et réglemente la maîtrise d’ouvrage publique. Elle a vocation à s’appliquer à la réalisation de tous ouvrages de bâtiment ou d’infrastructure ainsi qu’aux établissements industriels destinés à leur exploitation dont les maîtres d’ouvrage sont l’État, des organismes publics ou certains organismes privés désignés (9) . Dans ce cadre, le maître de l’ouvrage peut conclure un contrat de mandat conformément aux dispositions de ladite loi. 8. Les caractéristiques d’un tel contrat sont précisées à l’article 5 de la loi nº 85-704: «Les rapports entre le maître de l’ouvrage et [le mandataire] sont définis par une convention qui prévoit, à peine de nullité: l’ouvrage qui fait l’objet de la convention, les attributions confiées au mandataire, les conditions dans lesquelles le maître de l’ouvrage constate l’achèvement de la mission du mandataire, les modalités de la rémunération de ce dernier, les pénalités qui lui sont applicables en cas de méconnaissance de ses obligations et les conditions dans lesquelles la condition peut être résiliée […]». 9. Ladite loi procède, à son article 3, à une énumération des attributions qui peuvent être confiées à un mandataire par le maître d’ouvrage:
«–
définition des conditions administratives et techniques selon lesquelles l’ouvrage sera étudié et exécuté;
préparation du choix du maître d’œuvre, signature du contrat de maîtrise d’œuvre, après approbation du choix du maître d’œuvre par le maître de l’ouvrage, et gestion du contrat de maîtrise d’œuvre;
approbation des avant-projets et accords sur le projet;
préparation du choix de l’entrepreneur, signature du contrat de travaux, après approbation du choix de l’entrepreneur par le maître de l’ouvrage, et gestion du contrat de travaux;
versement de la rémunération de la mission de maîtrise d’œuvre et des travaux;
réception de l’ouvrage,
et l’accomplissement de tous les actes afférents aux attributions mentionnées ci-dessus.»
10. Conformément à l’article 2 de ladite loi, certaines missions ne sont pas susceptibles d’être déléguées par le maître d’ouvrage. Il s’agit de la conception générale de l’ouvrage et de la conduite de sa réalisation. 11. Ainsi qu’il ressort des dispositions précitées de la loi faisant l’objet du recours, les attributions qui peuvent être confiées par le maître de l’ouvrage au mandataire sont très larges. Ce qui fait toutefois la spécificité du contrat de mandat est l’identité du mandataire, que le maître de l’ouvrage ne peut choisir que parmi les catégories limitativement désignées à l’article 4 de la loi en cause:
«–
les personnes morales mentionnées aux 1º et 2º de l’article 1 er de la présente loi [c’est-à-dire l’État et ses établissements publics, les collectivités territoriales, leurs établissements publics, les établissements publics d’aménagement de villes nouvelles, leurs groupements et les syndicats mixtes], à l’exception des établissements publics sanitaires et sociaux qui ne pourront être mandataires que pour d’autres établissements publics sanitaires et sociaux;
les personnes morales dont la moitié au moins du capital est, directement ou par personne interposée, détenue par les personnes morales mentionnées aux 1º et 2º de l’article 1 er et qui ont pour vocation d’apporter leur concours au maître d’ouvrage à condition qu’elles n’aient pas une activité de maître d’œuvre ou d’entrepreneur pour le compte de tiers;
les organismes privés d’habitations à loyer modéré mentionnés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation, mais seulement au profit d’autres organismes d’habitations à loyer modéré ainsi que pour les ouvrages liés à une opération de logements aidés;
les sociétés d’économie mixtes locales régies par la loi nº 83-597 du 7 juillet 1983 relative aux sociétés d’économie mixte locale,
les établissements publics créés en application de l’article L. 321‑1 du code de l’urbanisme ainsi que les associations foncières urbaines autorisées ou constituées d’office en application des articles L. 322-1 du code de l’urbanisme;
les sociétés créées en application de l’article 9 de la loi nº 51-592 du 24 mai 1951 relative aux comptes spéciaux du trésor de l’année 1951, modifié par l’article 28 de la loi nº 62-933 du 8 août 1962 complémentaire à la loi d’orientation agricole;
toute personne publique ou privée à laquelle est confiée la réalisation d’une zone d’aménagement concerté ou d’un lotissement au sens du titre premier du livre III du code de l’urbanisme pour ce qui concerne les ouvrages inclus dans ces opérations;
les sociétés concluant le contrat prévu à l’article L. 122-1 du code de la construction et de l’habitation pour la réalisation d’opérations de restructuration urbaine des grands ensembles et quartiers d’habitat dégradé mentionnés au I de l’article 1466 A du code général des impôts.»
12. Les...

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