David Petrie and Others v Università degli studi di Verona and Camilla Bettoni.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1997:176
Date20 March 1997
Celex Number61996CC0090
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-90/96
EUR-Lex - 61996C0090 - FR 61996C0090

Conclusions de l'avocat général Fennelly présentées le 20 mars 1997. - David Petrie e.a. contre Università degli studi di Verona et Camilla Bettoni. - Demande de décision préjudicielle: Tribunale amministrativo regionale per il Veneto - Italie. - Libre circulation des travailleurs - Lecteurs de langue étrangère - Accès aux cours et suppléances universitaires. - Affaire C-90/96.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-06527


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1 La présente affaire a trait à une prétendue discrimination indirecte en raison de la nationalité, exercée à l'encontre de lecteurs de langue étrangère non italiens qui enseignent dans leur langue maternelle au sein d'une université italienne, à propos de l'accès à des enseignements supplémentaires rémunérés. Ces lecteurs sont engagés sur la base de contrats de droit privé, alors que la législation italienne réserve ces enseignements supplémentaires aux membres du personnel enseignant appartenant à certaines catégories, dont les relations de travail sont régies par le droit public. Avant 1994, la loi italienne empêchait les ressortissants étrangers d'accéder à ces emplois universitaires régis par le droit public. Cette restriction applicable aux enseignements supplémentaires constitue-t-elle une discrimination fondée sur la nationalité et, si tel est le cas, s'agit-il d'une réponse proportionnée aux besoins légitimes du système universitaire italien et objectivement justifiée par ceux-ci?

II - Le contexte juridique et factuel

2 Les articles 1er et 3, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté (1), disposent:

«Article premier

1. Tout ressortissant d'un État membre, quel que soit le lieu de sa résidence, a le droit d'accéder à une activité salariée et de l'exercer sur le territoire d'un autre État membre, conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l'emploi des travailleurs nationaux de cet État.

2. Il bénéficie notamment sur le territoire d'un autre État membre de la même priorité que les ressortissants de cet État dans l'accès aux emplois disponibles.

...

Article 3

1. Dans le cadre du présent règlement, ne sont pas applicables les dispositions législatives, réglementaires ou administratives ou les pratiques administratives d'un État membre:

- qui limitent ou subordonnent à des conditions non prévues pour les nationaux la demande et l'offre de l'emploi, l'accès à l'emploi et son exercice par les étrangers,

- ou qui, bien qu'applicables sans acception de nationalité, ont pour but ou pour effet exclusif ou principal d'écarter les ressortissants des autres États membres de l'emploi offert.

Cette disposition ne concerne pas les conditions relatives aux connaissances linguistiques requises en raison de la nature de l'emploi à pourvoir.»

3 Les dispositions de droit italien applicables sont les suivantes. L'article 114 du décret n_ 382 du président de la République du 11 juillet 1980 (ci-après le «décret de 1980»), tel que modifié par l'article 12 de la loi n_ 341 du 19 novembre 1990, prévoit:

«Les cours et les suppléances ne peuvent être conférés qu'à des professeurs titulaires et à des chercheurs universitaires confirmés (2) du même secteur scientifique et de la même discipline ou d'un secteur similaire, appartenant à la même faculté; à défaut et moyennant délibération motivée, à des professeurs titulaires et à des chercheurs universitaires confirmés d'une autre faculté de la même université ou d'une autre université. Dans l'attribution des suppléances et en présence de demandes émanant de professeurs titulaires et de chercheurs confirmés, appartenant au même secteur scientifique et à la même discipline, le conseil de faculté doit donner la préférence aux demandes présentées par les professeurs.»

4 Les deux catégories de membres du personnel universitaire habilitées à recevoir des cours ou des suppléances sont régies par le droit public. Il semble que les cours, dans le cadre de la réglementation italienne en cause, constituent un enseignement supplémentaire par rapport à l'enseignement principal dispensé aux étudiants, et qu'il est possible de recourir à des suppléances d'enseignement soit lorsqu'il est nécessaire de trouver un remplaçant en l'absence d'un professeur, soit lorsque le même cours est assuré plus d'une fois durant une année universitaire donnée en raison du grand nombre d'étudiants intéressés. Les cours supplémentaires et les suppléances ont un caractère accessoire par rapport à l'activité ordinaire du professeur ou du chercheur en cause, et il apparaît qu'ils ne donnent lieu à rétribution que lorsqu'ils entraînent le dépassement de l'horaire complet que le professeur ou le chercheur est normalement tenu d'assurer (3).

5 Les fonctions des chercheurs sont précisées par les articles 31, 32 et 38 du décret de 1980 et incluent la réalisation d'exercices pratiques avec les étudiants, la collaboration avec ces derniers en vue de la préparation de leurs travaux de fin d'études, des activités de guidance, le développement de nouvelles méthodes d'enseignement et la poursuite de travaux de recherche (4). Le concours permettant d'accéder à la fonction de chercheur comporte des épreuves écrites et orales, et une appréciation des qualifications des candidats. Pour être nommés chercheurs confirmés à l'expiration d'une période d'essai de trois ans, les chercheurs sont soumis à un examen de confirmation par une commission nationale, qui évalue l'activité scientifique et didactique exercée au cours de ces trois ans (5).

6 Le statut et les fonctions d'un lecteur/professeur en langues étrangères (lettore/docente, «lecteur de langue maternelle étrangère») sont définis par l'article 28 du décret de 1980:

«... Les recteurs peuvent engager par contrat de droit privé, sur proposition motivée de la faculté intéressée, en fonction des besoins réels de travaux pratiques pour les étudiants qui fréquentent les cours de langue ... des lecteurs de langue maternelle étrangère de compétence qualifiée et reconnue, vérifiée par la faculté ...

La faculté doit dans tous les cas attester la compétence spécifique des lecteurs.

... Les contrats visés à l'alinéa 1 ne peuvent être prorogés au-delà de l'année universitaire pour laquelle ils sont établis et sont renouvelables chaque année pendant une période maximale de cinq ans.

Les prestations demandées aux lecteurs et les rémunérations correspondantes sont déterminées par le conseil d'administration de l'université après consultation du conseil de faculté.

La rétribution ne peut dépasser le niveau de rémunération initial d'un professeur associé engagé à temps partiel» (6).

7 Les arrêts de la Cour rendus dans les affaires Allué I (7) et Allué e.a. (8) portaient sur ces conditions. Dans ces affaires, il a été jugé que le fait de conclure avec les lecteurs de langue étrangère des contrats d'une durée plus limitée (établis pour une seule année et ne pouvant être renouvelés que pendant une période maximale de cinq ans) que ceux qui sont conclus avec les autres travailleurs (9), ou avec d'autres membres du personnel enseignant (10), constituait une discrimination fondée sur la nationalité, étant donné que 75 % de ces lecteurs n'avaient pas la nationalité italienne (11) et qu'il n'existait pas de raison objective pouvant justifier cette différence de traitement. Les requérants dans le litige au principal (ci-après les «requérants») sont des ressortissants britanniques et sont lecteurs de langue étrangère à l'Università degli studi di Verona (université de Vérone, ci-après l'«université»). Conformément aux arrêts Allué I et Allué II, leurs contrats avec l'université ont été considérés par le Pretore di Verona comme étant des contrats de professeurs d'université engagés pour une durée indéterminée (docenti a tempo indeterminato dell'Università), et leur traitement est celui d'un professeur associé travaillant à temps partiel (professore associato a tempo definito) (12). Toutefois, leurs contrats sont toujours considérés comme étant régis par le droit privé, à la différence de ceux de la plupart des membres du personnel universitaire. Dans l'arrêt Allué II, l'avocat général M. Lenz observait que ce point était également considéré comme discriminatoire par les demanderesses, mais qu'il ne faisait pas l'objet du litige (13). En vertu de la loi italienne, les emplois dans les administrations publiques, comprenant les emplois universitaires régis par le droit public, étaient réservés jusqu'en 1994 aux ressortissants italiens. L'article 3 du décret du président du Conseil des ministres n_ 174 du 7 février 1994, qui porte application de l'article 37 du décret législatif n_ 21 du 3 février 1993, a ouvert ces emplois universitaires aux ressortissants des autres États membres.

8 Les requérants ont chacun présenté une demande en vue d'obtenir la suppléance rémunérée d'enseignement des langues modernes à l'université, qui avait fait l'objet d'un avis pour l'année universitaire 1995/1996. Par décisions du 14 avril 1995, le recteur a rejeté leurs demandes, au seul motif qu'ils n'étaient ni professeurs titulaires au sens de la loi applicable ni chercheurs universitaires confirmés. Deux des requérants avaient introduit des demandes semblables en 1994, qui avaient été rejetées pour les mêmes motifs. Par décision du 19 avril 1995, Mme Camilla Bettoni, professeur à l'université de Padoue, s'est vu confier la suppléance d'enseignement en question.

9 Les requérants ont introduit un recours en annulation de ces décisions devant le Tribunale amministrativo regionale per il Veneto (ci-après la «juridiction nationale»). Ils ont invoqué que l'effet principal de l'article 114 du décret de 1980, tel que modifié, est d'exclure les ressortissants d'autres États membres de...

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