British American Tobacco International Ltd and Newman Shipping & Agency Company NV v Belgische Staat.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:301
Date25 May 2005
Celex Number62003CC0435
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-435/03

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. M. POIARES MADURO

présentées le 25 mai 2005 (1)

Affaire C-435/03

British American Tobacco International Ltd,

Newman Shipping & Agency Company NV

contre

Ministerie van Financiën

[demande de décision préjudicielle formée par le hof van beroep te Antwerpen (Belgique)]

«Sixième directive TVA – Articles 2, point 1, 5, paragraphe 1, et 27, paragraphes 1 et 5 – Champ d’application – Fait générateur de la taxe – Livraison de biens à titre onéreux – Vol dans un entrepôt fiscal de produits soumis à accise – Mesure nationale dérogatoire»





1. Par cette demande de décision préjudicielle, le hof van beroep te Antwerpen (cour d’appel d’Anvers) (Belgique) pose à la Cour des questions concernant l’interprétation de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (2) (ci-après la «sixième directive»).

I – Les faits de la procédure au principal et les questions soumises à la Cour

2. La société Newman Shipping & Agency Company NV (ci-après «Newman») exploite un entrepôt fiscal à Anvers, où étaient entreposés des tabacs manufacturés produits et emballés en Belgique par la société British American Tobacco International Ltd (ci-après «BATI») à laquelle ils appartiennent. Aucune bandelette fiscale n’était apposée sur ces marchandises.

3. Des cigarettes ont été volées dans l’entrepôt le 4 décembre 1995 et le 29 janvier 1996 ainsi que dans la nuit du 14 au 15 juin 1998. L’administration belge des douanes et accises a communiqué à Newman un avis d’imposition lui enjoignant de verser, au titre des cigarettes manquantes, le droit d’accise et la TVA, conformément au régime institué par l’article 58 , paragraphe 1, du code belge de la TVA et de l’article 1er de l’arrêté royal n° 13, du 29 décembre 1992, relatif au régime des tabacs manufacturés en matière de taxe sur la valeur ajoutée (Moniteur belge du 31 décembre 1992, p. 28086, ci-après l’«arrêté royal») au motif que la TVA afférente aux tabacs manufacturés est exigible au même moment que le droit d’accise et que, le droit d’accise ayant été acquitté à la suite de la constatation des manquants de l’entrepôt, la TVA est également exigible.

4. Selon l’article 58, paragraphe 1, du code belge de la TVA de 1969:

«En ce qui concerne les tabacs manufacturés qui sont importés, acquis au sens de l’article 25ter ou produits, en Belgique, la taxe est perçue dans tous les cas où, en vertu des dispositions légales ou réglementaires relatives au régime fiscal des tabacs, le droit d’accise belge doit être acquitté.

[…]

Le Roi détermine les modalités de perception de la taxe applicable aux tabacs manufacturés et les personnes tenues au paiement de celle-ci.»

5. Aux termes de l’article 1er de l’arrêté royal, «[l]a taxe sur la valeur ajoutée frappant les tabacs manufacturés […] est exigible au même moment que le droit d’accise».

6. Après une réclamation infructueuse, Newman a payé les montants exigés mais sous réserve de tout droit en ce qui concerne la TVA. BATI a intégralement remboursé lesdits montants à Newman.

7. Newman et BATI ont introduit un recours tendant au remboursement des montants acquittés auprès du rechtbank van eerste aanleg te Antwerpen (tribunal de première instance d’Anvers). Ce recours a été rejeté par un jugement du 4 avril 2001 qui a considéré que le droit d’accise était dû pour les marchandises manquantes à la suite de vols et que, dès lors, en vertu de l’article 58, paragraphe 1, du code de la TVA et de l’article 1er de l’arrêté royal, la TVA était également exigible pour lesdites marchandises. En outre, le rechtbank van eerste aanleg a jugé que ces dispositions visaient à simplifier la perception de la taxe et qu’elles étaient donc conformes à l’article 27 de la sixième directive.

8. Le 7 mai 2001, Newman et BATI ont interjeté appel de ce jugement devant le hof van beroep te Antwerpen qui a décidé de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) Une livraison peut-elle intervenir, au sens de la sixième directive, avec cette conséquence que la taxe sur la valeur ajoutée peut être perçue:

– en l’absence de toute contrepartie ou transaction à titre onéreux?

– en l’absence de transfert du droit de disposer librement des biens comme un propriétaire?

– si les biens n’ont pas pu être mis légalement sur le marché, parce qu’il s’agit d’objets volés et de marchandises de contrebande?

2) La réponse à la première question est-elle différente s’il s’agit de produits d’accise, et plus particulièrement de tabacs manufacturés?

3) Si aucun droit d’accise n’est prélevé sur les produits d’accise, est-il en pareil cas compatible avec les dispositions de la sixième directive de prélever la taxe sur la valeur ajoutée?

4) Les États membres peuvent-ils compléter les catégories d’opérations assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée en procédant à une notification au sens de l’article 27, paragraphes 2 ou 5, de la sixième directive, afin d’imposer la taxe sur la valeur ajoutée au niveau national en cas de vol de produits d’accise dans un entrepôt fiscal, ou bien l’article 2 de la sixième directive est-il exhaustif?

5) Dans le cas d’une notification, au sens de l’article 27, paragraphe 5, de la sixième directive, qui ne porte que sur le paiement anticipé de la taxe sur la valeur ajoutée au moyen de bandelettes fiscales, un État membre est-il habilité à compléter les catégories d’opérations assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée, par exemple à imposer le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée lorsque des produits d’accise ont été volés d’un entrepôt fiscal?»

9. Ces questions nous amènent à interpréter plusieurs dispositions de la sixième directive, notamment l’article 2, point 1, selon lequel «[s]ont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée […] les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel».

10. L’article 5, paragraphe 1, de la sixième directive dispose, en outre, que «[e]st considéré comme ‘livraison d’un bien’ le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire».

11. D’autre part, l’article 10 de la même directive, dispose que:

«1. Sont considérés comme:

a) ‘fait générateur de la taxe’ le fait par lequel sont réalisées les conditions légales, nécessaires pour l’exigibilité de la taxe;

b) ‘exigibilité de la taxe’ le droit que le Trésor peut faire valoir aux termes de la loi, à partir d’un moment donné, auprès du redevable pour le paiement de la taxe, même si le paiement peut en être reporté.

2. Le fait générateur de la taxe intervient et la taxe devient exigible au moment où la livraison du bien ou la prestation de services est effectuée. […]

[…]»

12. De plus, l’article 27 de la sixième directive, concernant les mesures de simplification (3), dispose que:

«1. Le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser tout État membre à introduire des mesures particulières dérogatoires à la présente directive, afin de simplifier la perception de la taxe ou d’éviter certaines fraudes ou évasions fiscales. Les mesures destinées à simplifier la perception de la taxe ne peuvent influer, sauf de façon négligeable, sur le montant de la taxe due au stade de la consommation finale.

2. L’État membre qui souhaite introduire des mesures visées au paragraphe 1 en saisit la Commission et lui...

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