Duomo Gpa Srl (C-357/10), Gestione Servizi Pubblici Srl (C-358/10) and Irtel Srl (C-359/10) v Comune di Baranzate (C-357/10 and C-358/10) and Comune di Venegono Inferiore (C-359/10).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:736
Docket NumberC-357/10,C-359/10
Celex Number62010CC0357
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date16 November 2011
62010CC0357

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PEDRO CRUZ VILLALÓN

présentées le 16 novembre 2011 ( 1 )

Affaire C-357/10

Duomo Gpa Srl

contre

Comune di Baranzate

Affaire C-358/10

Gestione Servizi Pubblici Srl

contre

Comune di Baranzate

Affaire C-359/10

Irtel Srl

contre

Comune di Venegono Inferiore

[demandes de décisions préjudiciellesformées par le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (Italie)]

«Services dans le marché intérieur — Liberté d’établissement — Libre prestation de services — Concession de services de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances — Législation nationale exigeant un capital social minimal à la société concessionnaire — Applicabilité de la directive 2006/123/CEArticles 15 et 16 de la directive 2006/123 — Proportionnalité»

I – Introduction

1.

Les trois affaires jointes en l’espèce portent sur la compatibilité avec le droit de l’Union d’une disposition nationale en vertu de laquelle les entreprises souhaitant se voir attribuer un service de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances et autres recettes des collectivités locales doivent disposer d’un capital social minimal entièrement libéré de dix millions d’euros, sous peine, en simplifiant, de ne pouvoir participer à la procédure correspondante ou, le cas échéant, que l’attribution soit déclarée nulle.

2.

La juridiction de renvoi nous interroge notamment sur la compatibilité de ladite disposition nationale avec, d’une part, les articles 15 et 16 de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur ( 2 ), et, d’autre part, le droit primaire.

3.

L’insertion de cette directive dans le droit de l’Union a soulevé plusieurs questions: en premier lieu quant à son caractère d’harmonisation ( 3 ), mais également concernant son applicabilité à des affaires purement internes ( 4 ) ainsi que la portée et la validité de l’article 16 ( 5 ), entre autres. La présente affaire ne nécessite toutefois pas l’examen de tous ces problèmes, ni même de la plupart d’entre eux. Notamment, dans l’hypothèse d’une prestation de services sans recours à la liberté d’établissement, nous proposerons à la Cour, sans nécessité de «parcourir» à cette occasion tous les points indiqués, de se pencher directement sur la conformité de la disposition nationale concernée avec le droit de l’Union du point de vue du principe de proportionnalité.

II – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union: la directive 2006/123

4.

La directive 2006/123, dite «directive sur les services», établit les «dispositions générales permettant de faciliter l’exercice de la liberté d’établissement des prestataires ainsi que la libre circulation des services, tout en garantissant un niveau de qualité élevé pour les services» (article 1er, paragraphe 1).

5.

Son chapitre III porte sur la liberté d’établissement des prestataires. Son article 15, paragraphe 2, stipule que «[l]es États membres examinent si leur système juridique subordonne l’accès à une activité de service ou son exercice au respect» d’une série d’exigences, dont les «exigences relatives à la détention du capital d’une société» [sous c)].

6.

Aux termes de l’article 15, paragraphe 3:

«Les États membres vérifient que les exigences visées au paragraphe 2 remplissent les conditions suivantes:

a)

non-discrimination: les exigences ne sont pas directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, de l’emplacement de leur siège statutaire;

b)

nécessité: les exigences sont justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général;

c)

proportionnalité: les exigences doivent être propres à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d’autres mesures moins contraignantes ne doivent pas permettre d’atteindre le même résultat.»

7.

Le chapitre IV de la directive est consacré à la libre circulation des services. L’article 16, qui en fait partie, est intitulé «Libre prestation des services» et établit, dans son paragraphe 1:

«Les États membres respectent le droit des prestataires de fournir des services dans un État membre autre que celui dans lequel ils sont établis.

L’État membre dans lequel le service est fourni garantit le libre accès à l’activité de service ainsi que son libre exercice sur son territoire.

Les États membres ne peuvent pas subordonner l’accès à une activité de service ou son exercice sur leur territoire à des exigences qui ne satisfont pas aux principes suivants:

a)

la non-discrimination: l’exigence ne peut être directement ou indirectement discriminatoire en raison de la nationalité ou, dans le cas de personnes morales, en raison de l’État membre dans lequel elles sont établies;

b)

la nécessité: l’exigence doit être justifiée par des raisons d’ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou de protection de l’environnement;

c)

la proportionnalité: l’exigence doit être propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.»

B – La réglementation italienne

8.

L’article 32, paragraphe 7 bis, du décret-loi no 185, du 29 novembre 2008 ( 6 ), validé par la loi no 2, du 28 janvier 2009 ( 7 ), disposait:

«[l]e montant minimal du capital exigé des sociétés, aux termes de l’article 53, paragraphe 3, du décret législatif no 446 du 15 décembre 1997, tel que modifié, en vue de l’inscription au registre des personnes privées habilitées à réaliser des activités de liquidation, établissement et recouvrement des redevances et autres recettes des provinces et des communes, est de dix millions d’euros au moins, entièrement libéré. Ce seuil ne s’applique pas aux sociétés à participation publique majoritaire. L’attribution de services de liquidation, établissement et recouvrement des redevances et autres recettes des collectivités locales à des personnes qui ne satisfont pas à cette exigence financière est frappée de nullité. Les personnes inscrites au registre susmentionné doivent adapter leur capital social au seuil minimal précité. En tout état de cause, jusqu’à cette adaptation, elles ne peuvent obtenir l’attribution de nouveaux marchés ou participer à des appels d’offres ouverts à cet effet».

9.

Cette disposition a été abrogée par l’article 3 bis, paragraphe 3, du décret-loi no 40, du 25 mars 2010 ( 8 ), validé par la loi no 73, du 22 mai 2010 ( 9 ). La nouvelle réglementation exige différents niveaux de capital social minimal en fonction du nombre d’habitants de l’entité locale concernée.

III – Les litiges au principal et les questions préjudicielles

10.

Les affaires C-357/10 et C-358/10 ont pour origine l’ouverture, par la commune de Baranzate (Italie), d’une procédure d’appel d’offres pour l’attribution d’une concession pour le service de gestion, de liquidation, d’établissement et de recouvrement de certaines redevances et autres recettes locales pendant une période de cinq ans allant du 1er mai 2009 au 30 avril 2014. La valeur des services pour la totalité de la période a été estimée à 57 000 euros. Six entreprises privées, toutes établies en Italie, ont présenté des offres. Parmi elles se trouvaient les entreprises Duomo Gpa Srl (ci-après «Duomo»), Gestione Servizi Pubblici Srl (ci-après «GSP») et Agenzia Italiana per le Pubbliche Amministrazioni SpA (ci-après «AIPA»). Les 1er et 3 avril 2009, la commune de Baranzate a informé Duomo et GSP qu’elles avaient été exclues de la procédure pour non-respect de l’exigence prévue à l’article 32, paragraphe 7 bis, du décret-loi no 185/08.

11.

L’affaire C-359/10 a pour origine l’ouverture d’une procédure similaire par la commune de Venegono Inferiore, en vue de la concession du service d’établissement et de recouvrement ordinaire et forcé de l’impôt communal sur la publicité et des droits sur les affichages publics, pour une période de quatre ans allant du 23 février 2009 au 31 décembre 2012, d’un montant total prévu de 48765 euros. Parmi les entreprises ayant présenté des offres se trouvaient Irtel SpA (ci-après «Irtel») et AIPA. Le 9 mars 2009, l’organisme adjudicateur a décidé d’exclure Irtel de la procédure pour non-respect de l’exigence prévue à l’article 32, paragraphe 7 bis, du décret-loi no 185/08.

12.

Duomo, GSP et Irtel ont introduit des recours contre les décisions d’exclusion des procédures d’adjudication précitées.

13.

Le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia a sursis à statuer dans les procédures en cause, posant relativement à chacune d’entre elles les questions préjudicielles suivantes:

«A)

Les dispositions nationales de l’article 32, paragraphe 7 bis, du décret-loi no 185, du 29 novembre 2008, ajouté par la loi de conversion no 2, du 28 janvier 2009, et ensuite modifié par la loi no 14, du 27 février 2009, qui prévoient, sauf pour les sociétés à participation publique majoritaire:

la nullité de l’attribution du service de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances et autres recettes des collectivités locales à des personnes qui ne satisfont pas à la condition financière aux termes de laquelle le capital social minimal entièrement libéré doit s’élever à dix millions d’euros;

l’obligation, pour les personnes inscrites au registre des personnes privées habilitées à poursuivre des activités d’établissement et de recouvrement des redevances et autres recettes des provinces et des communes, d’adapter leur...

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