De Danske Bilimportører v Skatteministeriet, Told- og Skattestyrelsen.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:116
Date27 February 2003
Celex Number62001CC0383
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-383/01
EUR-Lex - 62001C0383 - FR 62001C0383

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 27 février 2003. - De Danske Bilimportører contre Skatteministeriet, Told- og Skattestyrelsen. - Demande de décision préjudicielle: Østre Landsret - Danemark. - Libre circulation des marchandises - Taxe sur l'immatriculation des véhicules automobiles neufs - Imposition intérieure - Mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative. - Affaire C-383/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-06065


Conclusions de l'avocat général

1. Au Danemark, les voitures particulières neuves sont soumises à une taxe d'immatriculation dont le taux est particulièrement élevé. Une association d'importateurs de voitures conteste le niveau de la taxe et l'a attaqué devant les juridictions nationales en invoquant plusieurs moyens et en soutenant en particulier qu'elle constitue une mesure d'effet équivalent à une restriction quantitative aux importations interdite par l'article 28 CE. Dans ce contexte, l'Østre Landsret (Danemark) souhaite savoir i) si une telle taxe est susceptible de tomber sous le coup de cette interdiction et ii) dans l'affirmative, si elle peut néanmoins être justifiée par des raisons énoncées à l'article 30 CE ou admises par la Cour dans sa jurisprudence.

Les dispositions pertinentes du traité CE

2. Le traité contient trois ensembles de dispositions interdisant les entraves au commerce de marchandises entre les États membres: les articles 23 CE et 25 CE; les articles 28 CE à 30 CE, sur lesquels il est demandé à la Cour de se prononcer, et l'article 90 CE. Ils s'appliquent à différents types d'entraves - à savoir, respectivement, les droits de douane et taxes d'effet équivalent, les restrictions quantitatives et mesures d'effet équivalent et les impositions intérieures - et leurs conditions d'application sont également différentes.

3. Les articles 23 CE à 31 CE concernent la libre circulation des marchandises. Ils instituent une union douanière et interdisent les restrictions quantitatives aux échanges.

4. Nous citerons en particulier l'article 25 CE, qui dispose: «Les droits de douane à l'importation et à l'exportation ou taxes d'effet équivalent sont interdits entre les États membres. Cette interdiction s'applique également aux droits de douane à caractère fiscal» .

5. L'article 28 CE dispose: «Les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les États membres». L'article 29 CE renferme une interdiction identique pour les exportations.

6. Dans l'arrêt Dassonville , la Cour a défini les mesures ayant un tel effet comme toutes celles qui sont «susceptibles d'entraver ou de restreindre directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, les échanges intracommunautaires».

7. En vertu de l'article 30 CE, toutefois, les articles 28 CE et 29 CE ne font pas obstacle aux «interdictions ou restrictions [...] justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux [...] Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les États membres».

8. En outre, la Cour a développé une jurisprudence, dont le premier élément a été l'arrêt Cassis de Dijon , en vertu de laquelle les mesures «indistinctement applicables» (qui s'appliquent de la même façon aux produits nationaux et aux produits importés) peuvent tomber sous le coup de l'article 28 CE si elles restreignent les échanges, mais peuvent être justifiées si elles sont nécessaires pour satisfaire à des exigences impératives, telles que l'efficacité des contrôles fiscaux, la protection de la santé publique, la loyauté des transactions commerciales et la défense des consommateurs, à condition qu'elles soient également proportionnées à l'objectif poursuivi et qu'elles soient le moyen d'atteindre cet objectif qui soit le moins restrictif pour les échanges.

9. Les articles 90 CE à 93 CE, qui relèvent du titre consacré aux règles communes sur la concurrence, la fiscalité et le rapprochement des législations, concernent les dispositions fiscales. L'article 90 CE dispose:

«Aucun État membre ne frappe directement ou indirectement les produits des autres États membres d'impositions intérieures, de quelque nature qu'elles soient, supérieures à celles qui frappent directement ou indirectement les produits nationaux similaires.

En outre, aucun État membre ne frappe les produits des autres États membres d'impositions intérieures de nature à protéger indirectement d'autres productions.»

Cadre factuel et procédure

10. Tous les États membres, à l'exception de la République fédérale d'Allemagne, de la République française, du grand-duché de Luxembourg, du royaume de Suède et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, perçoivent une taxe d'immatriculation lors de l'acquisition de voitures particulières neuves. En Italie, le montant est fixe, en Belgique et au Portugal, l'assiette de la taxe est la cylindrée du véhicule et, dans les autres États, la taxe est calculée sur le prix de la voiture. En Espagne, en Grèce, aux Pays-Bas, en Autriche et en Finlande, ce prix est le prix hors TVA, tandis qu'au Danemark et en Irlande il inclut déjà la TVA. Les taux en pourcentage varient considérablement d'un État membre à l'autre et ils peuvent également varier selon d'autres critères (tels que la cylindrée ou le type d'usage) à l'intérieur d'un même État membre .

11. Bien que les variations soient donc grandes et que les différences entre les méthodes de calcul rendent les comparaisons précises difficiles, le montant et la proportion de la taxe d'immatriculation perçue au Danemark sont considérablement plus élevés que dans tout autre État membre. Le taux de la taxe est de 105 % du prix d'achat jusqu'à un seuil déterminé chaque année - apparemment environ 53 000 DKK (7 122 euros) en 2002 - et de 180 % sur le solde du prix, le prix servant d'assiette à la taxe incluant déjà 25 % de TVA et une majoration forfaitaire de 9 % pour tenir compte de la marge du distributeur, quelle que soit la marge effectivement prélevée par ce dernier. Il semble par conséquent qu'une voiture dont le prix de base équivaut à 10 000 euros soit susceptible de coûter à l'acheteur quelque 30 000 euros au total, dont 17 000 euros environ de taxe d'immatriculation, et qu'un véhicule dont le prix de base est de 30 000 euros coûterait 107 000 euros environ au total, dont 67 000 euros environ de taxe d'immatriculation.

12. Une telle charge fiscale globale excédant souvent 200 % n'a pas son pareil dans les autres États membres - les autres taux les plus élevés, en Finlande et en Grèce, n'atteignent pas 100 % pour une cylindrée inférieure à 2 000 cc et la proportion de la taxe d'immatriculation y est inférieure parce qu'elle est perçue avant l'application de la TVA. Tout à fait à l'opposé, au Luxembourg, la seule taxe sur le prix d'achat des voitures (neuves) est la TVA de 15 % et la Belgique, l'Allemagne, la Grèce, la France, l'Italie, la Suède et le Royaume-Uni perçoivent tous moins de 30 % au total.

13. La taxe d'immatriculation danoise date apparemment de 1924 et il semble être constant entre les parties que son objet principal a toujours été de collecter des ressources fiscales, bien que d'autres considérations - telles que des préoccupations de protection de l'environnement et de sécurité routière - puissent également être présentes.

14. Il n'existe pas au Danemark d'industrie de la construction automobile, si bien que toutes les voitures neuves arrivant sur le marché danois sont en pratique importées d'un autre État membre ou de l'extérieur de la Communauté. La taxe est perçue lors de la première immatriculation du véhicule au Danemark, mais non lors des reventes ultérieures; elle est également perçue lorsqu'un véhicule d'occasion est importé.

15. Avant 1990, la taxe était appliquée aux véhicules d'occasion importés d'une façon qui ne reflétait pas de manière adéquate la dépréciation de leur valeur. Estimant que la taxe perçue à la fois sur les véhicules neufs et sur les véhicules d'occasion était incompatible avec les règles communautaires, la Commission a engagé une procédure en manquement contre le royaume de Danemark, qui s'est terminée par l'arrêt de la Cour du 11 décembre 1990 , dans lequel il a été jugé que, en percevant une taxe d'immatriculation sur les voitures d'occasion importées généralement assise sur une valeur forfaitaire supérieure à la valeur réelle du véhicule , avec pour conséquence que les véhicules automobiles d'occasion importés étaient taxés plus lourdement que les véhicules automobiles d'occasion vendus au Danemark après y avoir été préalablement immatriculés, le royaume de Danemark avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de ce qui est maintenant l'article 90 CE.

16. La Cour a toutefois rejeté l'allégation de manquement en ce qui concerne la taxe perçue sur les véhicules neufs. Son raisonnement était le suivant .

17. Le recours de la Commission était uniquement fondé sur ce qui est maintenant l'article 90 CE et il était constant entre les parties que la taxe était une imposition intérieure aux fins de l'application de cet article. Toutefois, le rôle de cet article est de garantir la parfaite neutralité des impositions intérieures entre produits nationaux et produits importés. Il ne saurait être invoqué à l'encontre d'une imposition frappant des produits importés en l'absence de production nationale similaire ou concurrente; en particulier, en l'absence de tout effet discriminatoire ou protecteur, il ne permet pas de censurer le caractère excessif du niveau de taxation qu'un État membre pourrait arrêter pour des produits donnés.

18. La Cour a reconnu que, comme elle l'avait jugé dans l'arrêt Stier...

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