Weber's Wine World Handels-GmbH and Others v Abgabenberufungskommission Wien.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:172
Docket NumberC-147/01
Celex Number62001CC0147
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date20 March 2003
EUR-Lex - 62001C0147 - FR 62001C0147

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 20 mars 2003. - Weber's Wine World Handels-GmbH et autres contre Abgabenberufungskommission Wien. - Demande de décision préjudicielle: Verwaltungsgerichtshof - Autriche. - Impôts indirects - Taxe sur la vente de boissons alcoolisées - Incompatibilité avec le droit communautaire - Répétition de la taxe. - Affaire C-147/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-11365


Conclusions de l'avocat général

1. Le 9 mars 2000, en réponse aux questions qui lui avaient été soumises par le Verwaltungsgerichtshof (Autriche), la Cour de justice a jugé dans l'affaire EKW et Wein & Co que l'article 3, paragraphe 2, de la directive 92/12/CEE du Conseil s'opposait au maintien de certaines taxes locales et régionales sur les boissons en Autriche dans la mesure où elles frappaient des boissons alcoolisées. Toutefois, elle a limité l'effet de cette décision, en ce qui concerne les demandes de remboursement de la taxe payée ou devenue exigible avant la date de l'arrêt, aux demandeurs qui avaient déjà introduit un recours en justice ou soulevé une réclamation équivalente.

2. Une semaine avant le prononcé de l'arrêt, le Wiener Landtag (parlement régional de Vienne) avait modifié les règles régissant le remboursement des crédits d'impôt. En vertu de cette modification, qui s'appliquait également aux situations nées avant sa promulgation, la taxe perçue à tort ne pouvait plus être récupérée par l'assujetti lorsqu'elle avait été supportée économiquement par un tiers.

3. Le Verwaltungsgerichtshof désire savoir à présent si l'application d'une telle modification aux réclamations soulevées avant la date de l'arrêt EKW et Wein & Co est compatible avec la décision rendue dans cet arrêt et avec l'obligation de coopération qui incombe à la république d'Autriche en vertu de l'article 10 CE.

Antécédents du litige et procédure

4. Jusqu'en l'an 2000 , différentes taxes, toutes apparemment comparables quant à leurs effets et à leur base juridique interne, étaient prélevées sur les ventes au détail de crèmes glacées et de boissons par les collectivités régionales et municipales en Autriche. Elles fournissaient une proportion importante des ressources de ces collectivités. Elles étaient, semble-t-il, autoliquidées (du moins à Vienne, où les taxes en cause dans la présente affaire étaient perçues): les commerçants en calculaient le montant en pourcentage de leurs ventes imposables et le déclaraient à l'administration.

5. En 1997, à la suite d'objections soulevées par des commerçants qui mettaient en cause la compatibilité de ces taxes avec le droit communautaire - en particulier avec les règles en matière de TVA, la directive 92/12 et la réglementation régissant les aides d'État - le Verwaltungsgerichtshof a demandé à la Cour des précisions sur cet aspect de l'arrêt EKW et Wein & Co, lequel concernait une cafétéria d'hôpital à Vienne et un négociant en vins d'une commune de Haute-Autriche.

6. Le 1er juillet 1999, l'avocat général Saggio a présenté ses conclusions dans cette affaire, et a proposé à la Cour de déclarer la taxe incompatible avec la directive 92/12 et la réglementation régissant les aides d'État.

7. Il a examiné également la demande du gouvernement autrichien tendant à limiter les effets dans le temps de l'arrêt au cas où la Cour déclarerait la taxe incompatible avec le droit communautaire, mais a conclu qu'il n'existait pas en l'occurrence de circonstances exceptionnelles justifiant une telle limitation.

8. Aux points 66 à 68 de ses conclusions, il a examiné l'argument selon lequel le fait d'autoriser des demandes de remboursement de taxes perçues à tort dans le passé aboutirait à un enrichissement sans cause des commerçants ayant effectivement répercuté la taxe sur les consommateurs. À cet égard, il a souligné que (conformément à la jurisprudence), pour s'opposer aux demandes de remboursement, l'administration devrait prouver que la taxe a bien été répercutée sur les consommateurs. Toutefois, non seulement une telle preuve serait difficile à fournir, mais il serait tout à fait possible qu'en réalité les commerçants n'aient pas répercuté la taxe et qu'ils aient été obligés d'en assumer eux-mêmes la charge .

9. Les conclusions de l'avocat général ont suscité une vive inquiétude à l'idée que des sommes considérables devraient être remboursées, compromettant ainsi gravement les finances locales et régionales. Devant la Cour, le gouvernement autrichien avait affirmé que 22 milliards de ATS, soit 0,9 % environ du produit national brut, devraient être reversés au titre des années 1995 à 1998.

10. Selon l'ordonnance de renvoi dans la présente affaire, tous les Länder autrichiens ont modifié leurs codes des impôts régionaux en ce sens qu'une taxe perçue à tort ne serait plus ni remboursée ni compensée lorsqu'elle aurait été répercutée sur un tiers. Dans tous les cas, ces modifications ont été introduites après le prononcé des conclusions dans l'affaire EKW et Wein & Co et, dans tous les cas sauf un, avant le prononcé de l'arrêt, mais à un moment où la date de ce dernier avait déjà été annoncée.

11. En vertu de l'article 162 de la Wiener Abgabenordnung (code des impôts de Vienne), les créances et les dettes fiscales doivent d'abord être compensées, tout excédent devant ensuite être remboursé. Avant le 2 mars 2000, l'article 185 était ainsi rédigé:

«(1) L'assujetti peut demander le remboursement de crédits d'impôt (article 162, paragraphe 2). Ce remboursement peut également être effectué d'office.

(2) Les dettes fiscales dont le montant a été déterminé, et que l'assujetti est tenu de régler au plus tard trois mois après l'introduction de la demande de remboursement, peuvent être déduites du montant à rembourser.»

12. Le 2 mars 2000, les paragraphes suivants ont été ajoutés par l'article I de la loi modificative 9/2000:

«(3) L'assujetti ne peut prétendre au remboursement lorsque la taxe a été supportée économiquement par un tiers. Dans la mesure où une taxe ainsi répercutée n'a pas encore été payée, les services fiscaux doivent l'exiger par décision séparée.

(4) Le paragraphe 3 n'est pas applicable aux assujettis pouvant se prévaloir de l'Anlaßfallwirkung en ce qui concerne les dispositions fiscales jugées illégales par le Verfassungsgerichtshof [Cour constitutionnelle].»

13. La notion d'«Anlaßfallwirkung» est liée à la circonstance qu'en Autriche une loi déclarée inconstitutionnelle par le Verfassungsgerichtshof n'est pas annulée immédiatement ou rétroactivement mais reste en vigueur (pendant une durée maximale fixée par cette juridiction) en attendant l'adoption d'une nouvelle réglementation. Pour l'essentiel, seules les personnes ayant introduit un recours pour la contester (soit le recours qui a donné lieu à la déclaration d'inconstitutionnalité - l'Anlaßfall - soit un autre recours ayant le même objet dont cette même juridiction est saisie à la date de l'arrêt) peuvent bénéficier directement et immédiatement de la déclaration d'inconstitutionnalité, à moins que le Verfassungsgerichtshof n'en décide autrement.

14. Ultérieurement, le 20 février 2001, le membre de phrase «dans ce cas, la réduction de la taxe par autoliquidation ou par décision d'imposition ne donne pas lieu à l'établissement d'un crédit d'impôt» a été inséré à la fin de la première phrase du paragraphe 3.

15. L'article II de la loi modificative disposait:

«L'article I est également applicable aux obligations fiscales nées avant la promulgation de la présente loi.»

16. L'exposé des motifs du projet de loi modificative présenté au parlement régional de Vienne en vue de son adoption faisait référence aux conclusions de l'avocat général Saggio dans l'affaire EKW et Wein & Co et soulignait que, si la Cour devait suivre son avis, des demandes de remboursement de l'ordre de 3,8 milliards de ATS pourraient être introduites à Vienne. Cette éventualité avait attiré l'attention sur le fait, de portée générale, que le code des impôts dans sa rédaction de l'époque pouvait entraîner l'enrichissement sans cause d'un contribuable ayant incorporé le montant d'une taxe indirecte dans le prix de ses fournitures, en lui permettant de récupérer ce montant alors que la taxe avait été en...

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