Řízení Letového Provozu ČR, s. p. v Bundesamt für Finanzen.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2007:103
Docket NumberC-335/05
Celex Number62005CC0335
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date15 February 2007

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO Mengozzi

présentées le 15 février 2007 (1)

Affaire C‑335/05

Řízení letového provozu ČR, s.p.

contre

Bundesamt für Finanzen

[demande de décision préjudicielle formée par le Finanzgericht Köln (Allemagne)]

«Dispositions fiscales – Harmonisation des législations – Taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée – Remboursement de la taxe aux assujettis non établis sur le territoire de la Communauté – Opérateur établi sur le territoire d’un État tiers partie à l’Organisation mondiale du commerce – Clause de la nation la plus favorisée prévue par l’accord général sur le commerce des services – Interprétation de l’article 2, paragraphe 2, de la directive 86/560/CEE conformément à cette clause»





1. Par la présente demande de décision préjudicielle, le Finanzgericht Köln (Allemagne) demande à la Cour d’interpréter l’article 2, paragraphe 2, de la treizième directive 86/560/CEE du Conseil, du 17 novembre 1986, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Modalités de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée aux assujettis non établis sur le territoire de la Communauté (2) (ci-après la «treizième directive»).

2. Le juge de renvoi demande, en substance, si cette disposition doit être interprétée en ce sens que la possibilité qu’elle confère aux États membres de subordonner le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA»), en faveur des assujettis non établis sur le territoire de la Communauté, à l’octroi par les États tiers d’avantages comparables dans le domaine des taxes sur le chiffre d’affaires, ne vaut pas à l’égard des États qui, en tant que parties à l’accord général sur le commerce des services (en anglais General Agreement on Trade in Services, ci-après le «GATS»), peuvent se prévaloir de la clause de la nation la plus favorisée prévue à l’article II, paragraphe 1, du GATS.

3. Cette question est soulevée dans le cadre d’une procédure intentée par une entreprise établie en République tchèque, Řízení letového provozu ČR, s.p (ci‑après la «requérante»), à l’encontre du Bundesamt für Finanzen (Office fédéral des finances) et portant sur la légalité de la confirmation, par ce dernier, du rejet d’une demande de la requérante visant à obtenir le remboursement de la TVA qu’elle avait acquittée en Allemagne en 2002 pour des prestations de services dont elle a bénéficié sur le territoire allemand.

Cadre normatif de référence

4. Par décision du 22 décembre 1994 (3), le Conseil a approuvé, au nom de la Communauté et pour ce qui concerne le domaine de compétence de celle-ci, en particulier l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (ci-après l’«OMC») ainsi que les accords visés aux annexes 1, 2 et 3 de cet accord, au nombre desquels figure, en annexe 1 B, le GATS.

5. L’article II du GATS, intitulé «Traitement de la nation la plus favorisée», prévoit, en son paragraphe 1, ce qui suit:

«En ce qui concerne toutes les mesures couvertes par le présent accord, chaque Membre accordera immédiatement et sans condition aux services et fournisseurs de services de tout autre Membre un traitement non moins favorable que celui qu’il accorde aux services similaires et fournisseurs de services similaires de tout autre pays.»

6. L’article 2 de la treizième directive dispose ce qui suit:

«1. Sans préjudice des articles 3 et 4, chaque État membre rembourse à tout assujetti qui n’est pas établi sur le territoire de la Communauté, dans les conditions fixées ci-après, la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé des services qui lui sont rendus ou des biens meubles qui lui sont livrés à l’intérieur du pays par d’autres assujettis, ou ayant grevé l’importation de biens dans le pays, dans la mesure où ces biens et ces services sont utilisés pour les besoins des opérations visées à l’article 17 paragraphe 3 points a) et b) de la directive 77/388/CEE ou des prestations de services visées à l’article 1er point 1 sous b) de la présente directive.

2. Les États membres peuvent subordonner le remboursement visé au paragraphe 1 à l’octroi par les États tiers d’avantages comparables dans le domaine des taxes sur le chiffre d’affaires.

[...]»

7. L’article 18, paragraphe 9, sixième phrase, de la loi allemande sur la taxe sur le chiffre d’affaires (Umsatzsteuergesetz, ci-après l’«UStG») de 1999 (4) est en ces termes:

«Lorsqu’un entrepreneur n’est pas établi sur le territoire de la Communauté, la taxe en amont ne lui est remboursée que si, dans le pays où il est établi, aucune taxe sur le chiffre d’affaires ou taxe comparable n’est perçue ou, dans l’hypothèse où une telle taxe est perçue, si elle est remboursée aux entreprises établies à l’intérieur du pays.»

Litige au principal et question préjudicielle

8. La requérante est une entreprise tchèque fournissant des services dans le domaine de la sécurité aérienne dans l’espace aérien situé au-dessus du territoire tchèque. Elle propose en outre des entraînements de vols dispensés exclusivement sur ce même territoire.

9. Dans le cadre de cette dernière activité, elle a eu recours en 2002 à des entraînements sur simulateur de vol et autres cours de formation dispensés en Allemagne par des entreprises allemandes, prestations assujetties à la TVA dans cet État. Ayant acquitté la TVA sur ces prestations, la requérante en a sollicité le remboursement, pour un montant de 29 013,60 euros, pour la période de janvier à décembre 2002, par demande parvenue au Bundesamt für Finanzen le 7 juillet 2003.

10. Par décision du 12 février 2004, ce dernier a rejeté la demande, au motif que la condition de réciprocité visée à l’article 18, paragraphe 9, sixième phrase, de l’UStG n’était pas remplie en l’espèce. En outre, par décision du 27 avril 2004, il a également rejeté, pour le même motif, l’opposition de la requérante à l’encontre de sa première décision.

11. Le 5 mai 2004, la requérante a donc formé un recours devant le Finanzgericht Köln.

12. Dans la décision de renvoi, il est précisé que le remboursement, à la requérante, de la taxe versée en amont en Allemagne serait exclu par le droit national en application de l’article 18, paragraphe 9, sixième phrase, de l’UStG. Le juge de renvoi observe que, pendant la période de référence pour le remboursement, la République tchèque prélevait une taxe sur le chiffre d’affaires sans octroyer toutefois aux entreprises allemandes le remboursement de la taxe en amont.

13. Le juge de renvoi doute néanmoins de la conformité de cet article 18, paragraphe 9, sixième phrase, de l’UStG aux prescriptions de l’article 2, paragraphe 2, de la treizième directive, qui servent pourtant de base à la disposition nationale qui en a repris le libellé. Le juge se demande si l’article 2, paragraphe 2, de la treizième directive ne devrait pas être interprété de manière restrictive, pour ce qui concerne les États membres de l’OMC et donc parties au GATS, conformément à la clause de la nation la plus favorisée prévue à l’article II, paragraphe 1, du GATS; en d’autres termes, s’il ne faudrait pas considérer, compte tenu de cette dernière disposition, que la possibilité ouverte par l’article 2, paragraphe 2, de la treizième directive de subordonner le remboursement de la taxe en amont à une exigence de réciprocité ne vaut pas à l’égard des États membres de l’OMC.

14. Le juge de renvoi constate que la République tchèque et la Communauté européenne sont membres de l’OMC, et sont donc également parties au GATS, depuis le 1er janvier 1995, et que les États membres de la Communauté européenne renoncent à appliquer entre eux une condition de réciprocité analogue à celle visée à l’article 2, paragraphe 2, de la treizième directive. Il ne ferait par conséquent aucun doute que, sur la base de l’article II, paragraphe 1, du GATS, la République tchèque également peut se prévaloir d’un traitement exempt de toute exigence de réciprocité (5).

15. Le juge de renvoi relève par ailleurs que le GATS est une pure convention de droit international qui ne crée de droits et d’obligations qu’entre ses membres, les violations du GATS devant en principe se régler exclusivement en application de l’accord sur le règlement des différends conclu dans le cadre de l’OMC. Toutefois, cela ne signifierait pas, selon le juge de renvoi, que la Communauté européenne et ses institutions ne devraient pas interpréter et appliquer conformément au GATS les actes de droit communautaire dérivé adoptés avant l’adhésion à l’OMC, dont la treizième directive. En effet, les accords, tels que le GATS, conclus conformément aux conditions de l’article 300, paragraphe 7, CE, auquel renvoie expressément l’article 133, paragraphe 3, CE, lieraient les institutions de la Communauté et ses États membres et feraient partie intégrante de l’ordre juridique communautaire.

16. Estimant que la résolution du litige dont il est saisi dépend de la compatibilité de l’article 18, paragraphe 9, sixième phrase, de l’UStG avec l’article 2, paragraphe 2, de la treizième directive et ayant des doutes sur l’interprétation correcte de cette dernière disposition, le juge de renvoi, décidant de surseoir à statuer, a soumis à la Cour la question suivante:

«L’article 2, paragraphe 2, de la treizième directive […] doit-il être interprété de manière restrictive en ce sens que la possibilité qu’ont les États membres, en vertu de cet article, de subordonner le remboursement de la TVA à l’octroi par les États tiers d’avantages comparables dans le domaine des taxes sur le chiffre d’affaires, ne s’applique pas aux États qui, en tant que parties [au GATS], peuvent se prévaloir de la clause de la nation la plus favorisée prévue par cet Accord (article II, paragraphe 1, du GATS)?»

Analyse juridique

17. Les parties ayant soumis des observations écrites à la Cour en application de l’article 23 de son statut – à savoir les gouvernements chypriote et polonais ainsi...

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