Evropaïki Dynamiki - Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE v European Central Bank (ECB).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:31
CourtCourt of Justice (European Union)
Date27 January 2011
Docket NumberC-401/09
Procedure TypeRecurso de casación - infundado
Celex Number62009CC0401

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO MENGOZZI

présentées le 27 janvier 2011 (1)

Affaire C‑401/09 P

Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE

contre

Banque centrale européenne

«Pourvoi – Marché public de services – Banque centrale européenne – Groupement d’entreprises – Droit de recours individuel des membres d’un consortium – Contrôle juridictionnel sur l’application du droit national par des institutions de l’Union»





1. Par le présent pourvoi, la société Evropaïki Dynamiki (ci-après, également, la «requérante») demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal du 2 juillet 2009, Evropaïki Dynamiki/BCE (T-279/06) (2). Par cette ordonnance, le Tribunal a rejeté, comme étant en partie manifestement dépourvu de tout fondement en droit et en partie manifestement irrecevable, le recours formé par la requérante contre la lettre de la Banque centrale européenne (BCE) du 31 juillet 2006 l’informant que son offre n’avait pas été retenue dans le cadre d’une procédure de marché public pour la fourniture de services informatiques.

I – Cadre juridique

A – Le droit de l’Union

1. Le régime juridique des marchés publics de la BCE

2. Les marchés publics de la BCE étaient, à l’époque des faits, régis par la circulaire administrative n° 8/2003, du 16 septembre 2003. Ni les directives en matière de marchés publics, destinées, par leur nature même, aux États membres, ni les règles applicables aux institutions, notamment celles contenues dans le règlement portant règlement financier (3) et dans le règlement en établissant les modalités d’exécution (4), ne trouvaient directement application.

3. Les dispositions de la circulaire administrative ne sont pas directement pertinentes dans le cadre du présent pourvoi: aussi nous limiterons-nous à les mentionner, lorsque cela s’avérera nécessaire, dans la suite des présentes conclusions.

2. Le règlement de procédure du Tribunal

4. L’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal dispose:

«Si une partie demande que le Tribunal statue sur l’irrecevabilité, l’incompétence ou sur un incident, sans engager le débat au fond, elle présente sa demande par acte séparé.

La demande contient l’exposé des moyens de fait et de droit sur lesquels elle est fondée, les conclusions et, en annexe, les pièces invoquées à l’appui.»

B – Le droit allemand

5. Ainsi que nous le verrons dans la reconstitution des faits de la présente affaire, la solution du présent litige dépend, en partie, de l’application de certaines dispositions du droit national applicable au contrat que la BCE entendait conclure avec le soumissionnaire retenu dans le cadre du marché public en cause. Il s’agit, plus précisément, de la loi du 7 août 1972 relative à la mise à disposition de personnel (Arbeitnehmerüberlassungsgesetz, ci-après également l’«AÜG»).

6. L’article 1er de l’AÜG prévoit, en particulier, comme suit:

«1. Les employeurs qui entendent, à titre commercial, mettre à la disposition […] de tiers […] du personnel, en vue de l’exécution de prestations, doivent être en possession de l’autorisation.

[…]»

II – Les faits

7. Le 19 juillet 2005, la BCE a publié un avis (5) relatif à une procédure négociée pour la «fourniture de services de conseil et de développement» (6) en matière informatique.

8. Dans sa version initiale, l’avis excluait, au point III.1.3, la possibilité de participer à la procédure pour les groupements d’entreprises et les consortiums. Toutefois, le 11 août 2005, un corrigendum (7) a été publié, qui a modifié ce point, en admettant la participation tant de consortiums que de groupements momentanés d’entreprises.

9. La requérante a participé à la procédure, en tant que membre du consortium E2Bank, constitué par elle-même et par la société italienne Engineering Ingegneria Informatica SpA.

10. Les documents adressés par la BCE aux participants, en particulier l’appel d’offres et différentes annexes y relatives, indiquaient, notamment, l’obligation pour tous les soumissionnaires de posséder l’autorisation prévue à l’article 1er de l’AÜG (ci-après l’«autorisation»).

La possession de cette autorisation n’aurait toutefois été nécessaire qu’au moment, le cas échéant, de la signature du contrat: l’offre du consortium E2Bank a par conséquent été considérée complète et régulière, dès lors que, quand bien même les deux sociétés qui le composaient n’étaient pas en possession du document en question, elles s’étaient engagées à l’obtenir en temps utile.

11. Le consortium E2Bank a passé avec succès la première phase de la procédure d’adjudication et a été classé dans la «shortlist» des meilleurs soumissionnaires. Cependant, par la suite, son offre a été placée en quatrième position et, par conséquent, elle a été exclue de la phase finale de la sélection, réservée aux trois meilleurs soumissionnaires. La requérante en a été informée par une lettre du 31 juillet 2006 qu’elle a attaquée devant le Tribunal.

III – Le recours devant le Tribunal et la décision attaquée

12. Le recours formé devant le Tribunal par la requérante, agissant pour le compte du consortium E2Bank, s’articulait autour de huit moyens.

13. Avant de procéder à l’examen des moyens de la requérante, le Tribunal a rejeté l’exception d’irrecevabilité de la BCE, tirée d’un prétendu défaut d’intérêt à agir de la requérante, résultant du fait que celle-ci n’était pas en possession de l’autorisation de mise à disposition temporaire de personnel et que, ainsi qu’elle admettait elle-même, elle n’aurait jamais pu l’obtenir. Le Tribunal a relevé que l’un des moyens que faisait valoir la requérante avait précisément trait à l’obligation de posséder ladite autorisation: partant, il convenait de juger le recours recevable, en ce qu’il visait, précisément, à voir écarter la condition relative à l’autorisation.

14. Le Tribunal est donc passé à l’examen des moyens du recours, en commençant par le dernier de ceux-ci, à savoir celui tiré d’une prétendue illégalité de la clause relative à l’obligation de posséder l’autorisation. Dans le cadre de son recours formé devant le Tribunal, la requérante a non seulement soutenu que cette condition était illégale, mais également affirmé avoir réalisé, au cours de la procédure, ne pas pouvoir obtenir d’autorisation. En effet, les autorités allemandes, dans le cas d’entreprises établies à l’étranger, ne délivreraient d’autorisation qu’aux entreprises en étant déjà en possession dans leur pays d’origine, alors que, en application du droit de l’État membre d’établissement de la requérante (la Grèce), cette autorisation ne serait délivrée qu’aux entreprises opérant exclusivement sur le marché du travail intérimaire. L’activité exclusive de la requérante n’étant pas la fourniture de personnel intérimaire, elle n’aurait jamais pu obtenir d’autorisation en Grèce ni, par conséquent, en Allemagne.

15. Dans son examen de ce moyen, après avoir rappelé qu’il était clairement indiqué dans les documents de la procédure que le contrat serait régi par le droit allemand, ce que la requérante n’avait aucunement contesté, le Tribunal a jugé que la BCE avait correctement interprété le droit national en cause, considérant que le droit allemand imposait effectivement, pour la mise en œuvre des activités indiquées dans l’avis de marché, la possession de l’autorisation. Concernant les difficultés résultant du fait que la requérante était établie en Grèce et qu’elle n’aurait pas pu, par conséquent, obtenir d’autorisation de la part des autorités allemandes, le Tribunal a observé que l’on ne saurait, dans le cadre d’un recours en annulation formé sur la base de l’article 230 CE, apprécier la nature éventuellement discriminatoire ou, plus généralement, l’incompatibilité, avec le droit de l’Union, d’une disposition nationale.

16. Ayant ainsi rejeté le huitième moyen, le Tribunal a observé que, ainsi qu’elle l’avait elle-même admis, la requérante n’aurait pas pu obtenir l’autorisation de mettre à disposition du personnel intérimaire. Par conséquent, la question de la légalité de cette clause étant tranchée, il n’y avait plus lieu de procéder à l’examen des sept autres moyens du recours, dès lors que ces moyens ne pouvaient, en tout état de cause, déboucher sur l’adjudication du marché en faveur de la requérante, à défaut de l’autorisation en question. Par conséquent, le Tribunal a déclaré que les sept premiers moyens du recours étaient manifestement irrecevables. Partant, le recours a été rejeté dans son intégralité.

IV – La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

17. Le présent pourvoi a été déposé au greffe le 3 octobre 2009. Par son pourvoi, la requérante, agissant pour le compte du consortium E2Bank, conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

– annuler l’ordonnance attaquée;

– annuler les actes par lesquels la BCE a exclu la requérante de la procédure et attribué le marché à un autre soumissionnaire;

– condamner la BCE aux dépens, en ce compris les dépens en première instance.

18. La BCE conclut en revanche à ce qu’il plaise à la Cour:

– rejeter le pourvoi;

– condamner la requérante aux dépens.

V – Sur la recevabilité du pourvoi

19. La BCE a soulevé une exception d’irrecevabilité du pourvoi. Pour des raisons évidentes, nous nous attacherons, en tout premier lieu, à l’examen de cette fin de non-recevoir.

A – Arguments des parties

20. La BCE soutient que le mandat conféré à la requérante par l’autre société composant le consortium E2Bank pour agir en justice, lequel a été déposé avec la requête en première instance, est limité à la procédure devant le Tribunal et, partant, qu’il ne vaudrait pas également pour la procédure devant la Cour. Par conséquent, la requérante ne serait pas titulaire des droits lui permettant de former un pourvoi pour le compte du consortium.

21. En outre, selon la BCE, les membres d’un groupement d’entreprises ne jouiraient pas du droit autonome d’agir individuellement contre les...

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  • Opinion of Advocate General Ćapeta delivered on 11 April 2024.
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    • 11 April 2024
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