European Commission v Republic of Poland.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:790
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-512/10
Date13 December 2012
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62010CC0512
62010CC0512

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 13 décembre 2012 ( 1 )

Affaire C‑512/10

Commission européenne

contre

République de Pologne

«Recours en manquement — Directive 91/440/CEE — Développement de chemins de fer communautaires — Directive 2001/14/CE — Répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire — Article 6, paragraphe 3, et annexe II de la directive 91/440Articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14 — Gestionnaire de l’infrastructure — Indépendance organisationnelle et décisionnelle — Structure de holding — Article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14 — Absence persistante d’équilibre financier — Articles 6, paragraphe 1, et 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440 — Absence de mesures d’incitation du gestionnaire de l’infrastructure — Articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 — Calcul de la redevance pour l’accès minimal»

I – Introduction

1.

Par son recours en manquement, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de la directive 91/440/CEE ( 2 ), telle que modifiée par la directive 2007/58/CE ( 3 ) (ci-après la «directive 91/440»), des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14/CE ( 4 ) (ci-après la «directive 2001/14»), de l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14, de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440, ainsi que des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14. La République de Pologne conclut au rejet du recours introduit par la Commission.

2.

La présente affaire s’inscrit dans une série de recours en manquement ( 5 ), introduits par la Commission en 2010 et en 2011 et portant sur l’application par les États membres des directives 91/440 et 2001/14, dont l’objet principal est d’assurer l’accès équitable et non discriminatoire des entreprises ferroviaires à l’infrastructure, à savoir au réseau ferroviaire. Ces recours sont inédits car ils offrent à la Cour la possibilité d’examiner pour la première fois la libéralisation des chemins de fer dans l’Union européenne et, notamment, d’interpréter ce qu’il est convenu d’appeler le «premier paquet ferroviaire».

3.

J’ai déjà présenté, le 6 septembre 2012, mes conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Portugal, précité, ainsi que dans les affaires précitées Commission/Hongrie; Commission/Espagne; Commission/Autriche, et Commission/Allemagne. En sus des présentes conclusions, je présente aujourd’hui mes conclusions dans les affaires précitées Commission/République tchèque; Commission/France; Commission/Slovénie, et Commission/Luxembourg. Dans la mesure où la présente affaire porte sur des griefs analogues à ceux que j’ai déjà eu l’occasion d’analyser dans les conclusions susvisées, je me limiterai à faire référence aux points pertinents de celles-ci, sans, toutefois, reprendre dans son intégralité l’argumentation y figurant.

II – Le cadre juridique

A – La réglementation de l’Union

1. La directive 91/440

4.

L’article 6, paragraphes 1 à 3, de la directive 91/440 dispose:

«1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer la tenue et la publication de comptes de profits et pertes séparés et de bilans séparés, d’une part, pour les activités relatives à la fourniture de services de transport par des entreprises ferroviaires et, d’autre part, pour celles relatives à la gestion de l’infrastructure ferroviaire. Les aides publiques versées à l’une de ces deux activités ne peuvent pas être transférées à l’autre.

Les comptes relatifs aux deux activités sont tenus de façon à refléter cette interdiction.

2. Les États membres peuvent, en outre, prévoir que cette séparation comporte des divisions organiques distinctes au sein d’une même entreprise ou que la gestion de l’infrastructure est assurée par une entité distincte.

3. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que les fonctions essentielles en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure, qui sont énumérées à l’annexe II, sont confiées à des instances ou entreprises qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire. Quelles que soient les structures organisationnelles, cet objectif doit être atteint d’une manière probante.

Les États membres peuvent, toutefois, confier aux entreprises ferroviaires ou à toute autre entité la perception des redevances et la responsabilité de la gestion des infrastructures, par exemple, tels que, l’entretien et le financement.»

5.

L’annexe II de la directive 91/440 énumère les fonctions essentielles visées à l’article 6, paragraphe 3, de celle-ci:

préparation et adoption des décisions concernant la délivrance de licences aux entreprises ferroviaires, y compris l’octroi de licences individuelles;

adoption des décisions concernant la répartition des sillons, y compris la définition et l’évaluation de la disponibilité, ainsi que l’attribution de sillons individuels;

adoption des décisions concernant la tarification de l’infrastructure, et

contrôle du respect des obligations de service public requises pour la fourniture de certains services.

6.

L’article 7, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/440, prévoit:

«3. Les États membres peuvent, en outre, octroyer au gestionnaire de l’infrastructure, dans le respect des articles 73, 87 et 88 du traité, un financement suffisant en rapport avec les tâches, la dimension et les besoins financiers, notamment pour couvrir des investissements nouveaux.

4. Dans le cadre de la politique générale arrêtée par l’État, le gestionnaire de l’infrastructure établit un plan d’entreprise incluant des programmes d’investissement et de financement. Le but de ce plan est d’assurer une exploitation et un développement optimaux et efficaces de l’infrastructure, tout en permettant d’atteindre l’équilibre financier et en prévoyant les moyens nécessaires pour réaliser ces objectifs.»

2. La directive 2001/14

7.

Les considérants 11 et 16 de la directive 2001/14 énoncent:

«Il y a lieu que les systèmes de tarification et de répartition des capacités assurent à toutes les entreprises un accès égal et non discriminatoire et s’efforcent, dans la mesure du possible, de répondre aux besoins de tous les utilisateurs et de tous les types de trafic, et ce de manière équitable et non discriminatoire.

[…]

Il y a lieu que les systèmes de tarification et de répartition des capacités permettent une concurrence équitable dans la fourniture de services ferroviaires.»

8.

L’article 4, paragraphe 2, de ladite directive dispose:

«Si le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, les fonctions décrites dans le présent chapitre, autres que celles de recouvrement des redevances, sont assumées par un organisme de tarification qui est indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.»

9.

Selon l’article 6 de la directive 2001/14:

«1. Les États membres définissent les conditions appropriées, comprenant, le cas échéant, des paiements ex ante, pour que les comptes du gestionnaire de l’infrastructure, dans des conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable, présentent au moins un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances d’utilisation de l’infrastructure, les excédents dégagés d’autres activités commerciales et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure.

[…]

2. Le gestionnaire de l’infrastructure est, tout en respectant les exigences en matière de sécurité, et en maintenant et en améliorant la qualité de service de l’infrastructure, encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

3. Les États membres veillent à ce que la disposition prévue au paragraphe 2 soit mise en œuvre soit dans le cadre d’un contrat conclu, pour une durée minimale de trois ans, entre l’autorité compétente et le gestionnaire de l’infrastructure et prévoyant le financement par l’État, soit par l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires.

[...]»

10.

L’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14 dispose:

«Sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 ou de l’article 8, les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services sont égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire.»

11.

L’article 8, paragraphe 1, de ladite directive est ainsi rédigé:

«Un État membre peut, afin de procéder au recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure et, si le marché s’y prête, percevoir des majorations sur la base de principes efficaces, transparents et non discriminatoires, tout en garantissant une compétitivité optimale, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Le système de tarification respecte les gains de productivité réalisés par les entreprises ferroviaires.

Le niveau des redevances ne doit cependant pas exclure l’utilisation des infrastructures par des segments de marché qui peuvent au moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête.»

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